Corps de l’article

Au Québec, une étude récente réalisée auprès des élèves de première secondaire indiquait que 65 % des élèves présentaient des symptômes associés à de l’anxiété de performance (Plante et al., 2019). Même si l’anxiété de performance semble être un phénomène courant, il est possible de constater une hétérogénéité au niveau des définitions pour décrire ce construit (Bögels, 2010). L’absence de taux de prévalence chez les enfants et les adolescents témoigne également de lacunes dans ce champ de recherche (Papageorgi, 2020). Néanmoins, dans la population des enfants et des adolescents, l’anxiété de performance est généralement définie comme un sous-type d’anxiété sociale qui se caractérise par des composantes physiologique, cognitive (inquiétude liée à la possibilité de vivre un échec, crainte d’être jugé négativement) et comportementale (évitement, recherche de réassurance). Depuis la cinquième édition du manuel du DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013), l’anxiété de performance est répertoriée dans le trouble d’anxiété sociale de type performance seulement. Ce sous-type d’anxiété sociale se distingue par une peur limitée aux situations de performance et la peur de parler en public. À la différence de l’anxiété sociale, la personne ayant ce trouble évite et/ou vit une détresse excessive uniquement lors des situations où une performance est attendue (American Psychiatric Association, 2013). De plus, il a été soulevé que la crainte d’être jugée négativement par autrui serait secondaire chez les personnes éprouvant de l’anxiété de performance, alors que leur niveau d’autocritique serait plus prégnant (Powell, 2004).

Au-delà des enjeux nosologiques, l’anxiété de performance tend à affecter les individus dans un large spectre de situations allant de prendre la parole en public aux sphères académique, professionnelle, personnelle (p. ex., anxiété de performance dans le rôle parental), sportive, et artistique. Elle peut se manifester en contexte de compétition, dans les situations sociales et/ou lors de situations d’évaluations (American Psychiatric Association, 2013; Ergene, 2003; Kenny, 2005; Khiouich, 2014; Knappe et al., 2011). Chez les enfants et les adolescents, les domaines pour lesquels de l’anxiété de performance est rapportée sont les suivants : académique (p. ex., tests, présentations orales, mathématiques, etc.), sportif (p. ex., danse, sport de compétition) et musical. À cet égard, il est possible de retrouver dans la littérature différentes déclinaisons conceptuelles de l’anxiété de performance soient l’anxiété de test, l’anxiété de performance musicale, l’anxiété de compétition, etc. D’ailleurs, ces types d’anxiété de performance semblent constituer des sujets d’étude distincts. Des différences conceptuelles et contextuelles semblent être à l’origine de ces différentes classes d’anxiété de performance. À titre d’exemple, l’anxiété liée aux tests et l’anxiété de performance musicale impliquent toutes les deux des situations d’évaluation de la performance, mais l’anxiété de test ne se déroule pas systématiquement dans un contexte social (Ergene, 2003). Ainsi, il est difficile d’obtenir une définition claire et concise de cette problématique prise dans son ensemble.

Bien que la quête de performance puisse apporter des bénéfices (p. ex., reconnaissance, récompenses, sentiment de compétence), l’envers de la médaille de cette quête met en évidence des effets délétères lorsqu’elle est associée à une détresse psychologique significative (Baumeister et Showers, 1986). Sur le plan sociologique, une montée de la méritocratie et du perfectionnisme a été objectivée en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne durant les dernières années, ce qui n’est pas sans incidence sur l’ajustement psychologique des individus (Curran et Hill, 2019). Sachant que l’anxiété de performance a été observée chez des enfants musiciens dès l’âge de 3-4 ans et que l’anxiété sociale de type performance seulement est associée à d’autres troubles anxieux, comme le trouble d’anxiété généralisée et la phobie spécifique, il apparait essentiel de mieux comprendre ses mécanismes sous-jacents et d’identifier des interventions permettant de soutenir l’enfant et l’adolescent dans l’établissement d’un rapport sain avec la performance (Fuentes-Rodriguez et al., 2018).

OBJECTIFS

Cette revue de la littérature a pour objectif d’examiner les écrits empiriques et théoriques disponibles sur le phénomène de l’anxiété de performance chez les enfants ainsi que les adolescents et de relever les principaux sous-domaines de recherche, les modèles et les variables centrales, pour expliquer l’apparition et le maintien de cette anxiété, de même que les modalités d’interventions suggérées pour guider cette population vers un rapport sain avec la performance. Dans un premier temps, le présent article fera état des typologies associées à l’anxiété de performance, des caractéristiques communes de l’anxiété de performance chez les enfants et les adolescents, les facteurs personnels contributifs ainsi que les facteurs environnementaux qui ressortent de la littérature. Une connaissance approfondie de chacune des typologies de l’anxiété de performance chez cette clientèle apparaît nécessaire pour développer et dispenser des interventions spécialisées. De ce fait, les résultats émanant des écrits empiriques abordant les modalités d’interventions et de traitements destinées aux enfants et aux adolescents suivront.

MÉTHODOLOGIE

Dans le but de réaliser cette revue de la littérature, les auteurs du présent article ont interrogé les bases de données PSYCHINFO (EBSCO), Eric et PubPsych. Les articles ont été sélectionnés selon leur titre, leur résumé et leur langue, soit français et anglais. Les mots clés utilisés furent les suivants : « performance anxiety », « test anxiety », « exam anxiety », « exam stress », « evaluation anxiety », « competition anxiety », «performance anxiety AND interventions» ainsi que leur traduction française « anxiété de performance », « anxiété de test », « anxiété d’examen », « stress d’examen », « anxiété d’évaluation », « anxiété de compétition » ainsi que « anxiété de performance ET interventions ». De plus, les articles devaient être publiés dans une période entre 1950 et 2021. Certains articles issus de la littérature grise ont également été relevés via les plateformes Google Scholar et ProQuest. Il convient de mentionner que ces mots-clés avaient préalablement été validés par une professionnelle en recherche documentaire. Un total de 3285 articles incluant les doublons a été initialement obtenu. Suite à l’exclusion des doublons, une première analyse de la pertinence des articles a été effectuée en fonction des critères suivants : 1) inclure un des mots-clés liés au thème de l’anxiété de performance 2) être constitués d’un échantillon de participants âgés entre 0 et 18 ans 3) inclure une mesure d’anxiété de performance 4) articles cliniques ou théoriques incluant des interventions thérapeutiques ciblant l’anxiété de performance. Ce rationnel découle du fait que le présent article constitue parmi les rares recensions sur le sujet. Ultimement, un nombre de 508 articles a été retenu. Plus spécifiquement, 317 articles traitaient de l’anxiété de test, 65 de l’anxiété des mathématiques, 3 des sciences et de la prise de parole en public, 5 des cours d’éducation physique, 65 étaient liés au domaine sportif et 35 au domaine musical. Un nombre de 16 articles théoriques sur les concepts de l’anxiété de performance a été répertorié. Parmi ceux-ci, 95 articles étaient associés à des interventions toutes catégories confondues. Il convient de mentionner que la liste exhaustive des articles recensés pourra être fournie sur demande.

ANALYSE DES ARTICLES

Les typologies associées à l’anxiété de performance

L’anxiété de performance en contexte d’évaluation : l’anxiété de test

L’anxiété de test est une forme d’anxiété de performance de type académique qui se distingue par le fait qu’elle soit associée à un contexte spécifique tel que des situations de tests ou d’évaluations qui surviennent dans un processus d’apprentissage (Cassady, 2010; Donolato et al., 2020; Raymo et al., 2019). Initialement, les travaux de Liebert et Morris (1967) ont identifié l’émotivité et l’inquiétude comme étant les principales composantes de l’anxiété de test. Par la suite, d’autres composantes dites cognitives, comportementales et motivationnelles ont été ajoutées (Cassidy et Finch, 2015). Ainsi, conformément au modèle tripartite de l’anxiété (Lang, 1968), l’anxiété de test se manifeste sur le plan cognitif par des inquiétudes liées à la performance, le fait de percevoir les situations d’examen comme menaçantes, un discours interne invalidant, des fragilités au niveau des fonctions cognitives, telles que le traitement de l’information, ainsi qu’une sensibilité à l’interférence dans la sphère attentionnelle. Des manifestations physiologiques typiquement associées à l’anxiété (un rythme cardiaque et respiratoire accéléré, des maux de ventre, des nausées, etc.) lui sont également associées. Afin de composer avec ces situations, l’enfant tend à s’engager dans des comportements tels que l’évitement, la recherche de réassurance auprès d’autrui (p. ex., ses parents, ses enseignants), engagement dans des comportements de vérifications, etc. (Fergus et al., 2020; Zeidner, 1998). Il est suggéré que l’anxiété de test comprend aussi une composante motivationnelle qui serait sous-jacente à l’adoption des stratégies d’adaptation mises en oeuvre pour composer avec les situations d’évaluation (p. ex., évitement, acceptation de l’échec, désengagement, etc.) (von der Embse et al., 2013; Zeidner, 1998). Qui plus est, il convient de mentionner que ce domaine d’anxiété de performance était le plus représenté dans les articles recensés sur ce phénomène chez les enfants et les adolescents. Dans la littérature, les termes « stress lié aux examens » et « stress lié aux tests » sont également utilisés pour décrire cette forme spécifique d’anxiété qui se caractérise par la peur ou la présence d’inquiétudes, quant à la possibilité d’obtenir une évaluation négative voire un mauvais résultat (Zeidner, 1998).

Quant à l’impact de l’anxiété de test, les résultats de plusieurs études ont démontré de fortes associations négatives entre de faibles performances académiques, une faible estime de soi, une mauvaise image de soi (Hasty et al., 2021; Ng et Lee, 2015; Raymo et al., 2019; von der Embse et al., 2013). Les élèves qui souffrent d’anxiété liée aux tests présenteraient de moins bons résultats dans les matières scolaires telles que l’anglais, les sciences et les mathématiques (Donolato et al., 2020).

L’anxiété de test peut être conceptualisée comme évoluant sur un continuum et dont l’intensité varie selon différents facteurs prédicteurs. Parmi ceux-ci, on retrouve des variables intrapersonnelles comme l’intelligence, le fonctionnement socioémotionnel, l’anxiété de trait, le sentiment d’efficacité personnel, l’estime de soi, les capacités académiques, la motivation, et les capacités d’autorégulation (Raymo et al., 2019; Schnell et al., 2015; von der Embse et al., 2013). De surcroit, le fait qu’un élève présente un trouble neurodéveloppemental (p. ex., trouble d’apprentissage, trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) le rendrait plus à risque d’éprouver de l’anxiété de test (Raymo et al., 2019). Le modèle biopsychosocial de l’anxiété de test élaboré par Lowe et collaborateurs (2008) suggère que les bases biologiques et psychologiques associées à cette forme d’anxiété interagiraient également avec le contexte social. Par exemple, un environnement scolaire compétitif peut interagir avec des variables interpersonnelles, tout comme les attentes parentales concernant les résultats scolaires, le fait d’être félicité pour la réussite plutôt que pour l’effort et la crainte de ne pas atteindre les attentes parentales (Raymo et al., 2019). Raymo et ses collaborateurs (2019) ont réalisé une étude auprès de 257 adolescents qui visait à examiner les variables personnelles et contextuelles liées à l’anxiété de test chez ces derniers. Au terme de leur étude, ils ont recensé les variables interpersonnelles suivantes comme facteurs prédictifs de l’anxiété de performance : les attentes parentales concernant les résultats scolaires, la crainte de ne pas atteindre les attentes parentales, le fait d’être félicité pour la réussite plutôt que pour l’effort, et un environnement de classe compétitif. De plus, le niveau de perfectionnisme des parents ainsi que le fait que ceux-ci entretiennent des attentes irréalistes quant aux accomplissements de leurs enfants étaient associés à l’anxiété de test chez ces derniers (Raufelder et al., 2015; Raymo et al., 2019). Globalement, les variables qui prédiraient le mieux l’anxiété de test sont le concept de soi ou l’autonomie, les spécificités de l’environnement de classe (négativité des enseignements, environnement compétitif) et une prédisposition à l’anxiété généralisée (Raymo et al., 2019). L’anxiété de test est donc la résultante d’une interaction entre des variables interpersonnelles et les exigences de la situation, qui sont affectées par des variables environnementales telles que les pressions externes et les attentes, qui poussent les étudiants à développer des croyances quant à l’importance des tests (Raymo et al., 2019).

Le contrôle de l’effort ou l’autorégulation, une dimension du tempérament, serait également impliquée dans l’anxiété de performance. Cette variable intrapersonnelle réfère aux capacités de la personne à réguler ses émotions, ses cognitions et ses comportements dans un contexte d’évaluation (Santens et al., 2020). De bonnes capacités d’autorégulation permettraient un contrôle accru de l’action et favoriseraient l’ajustement aux exigences situationnelles de manière flexible et volontaire. Les étudiants présentant de l’anxiété de test auraient une faible autorégulation devant les stimuli menaçants (p. ex., réponse physiologique, pensées intrusives, discours intérieur négatif). Ainsi, ils présentent de la difficulté à porter leur attention sur les stimuli qui facilitent la réussite de la tâche (Raymo et al., 2019). Le développement du contrôle de l’effort est un facteur de protection contre l’anxiété de test. Les étudiants très anxieux, dans les situations de performance, sont plus susceptibles d’obtenir un échec. Un soutien modéré de la part des parents permettrait de faciliter la performance notamment en validant les forces de l’enfant et en le soutenant dans le développement de ses habiletés. Inversement, des attentes parentales irréalistes peuvent créer une pression et une anxiété de performance chez leurs enfants. Les parents très critiques qui fixent un objectif de performance élevé à leurs enfants rendraient ceux-ci plus à risque de développer de l’anxiété de test (Raymo et al., 2019). Sur le plan développemental, l’émergence des croyances métacognitives au moment de l’adolescence, c’est-à-dire les croyances d’une personne quant à ses propres pensées (p. ex., utilité de s’inquiéter, responsabilité personnelle pour la survenue de pensées d’inquiétudes), contribuerait à l’anxiété de test chez cette population. Elles mèneraient à l’utilisation de stratégies non adaptatives, notamment lorsqu’il y a pression académique excessive (Fergus et al., 2020). La théorie du contrôle et de la valeur de Pekrun (2006) présuppose que les émotions associées aux réussites constituent les émotions (dont l’anxiété) qui émergent en relation avec des activités à visée d’accomplissements (p. ex., apprendre un comportement, fournir des efforts, persévérer à une tâche) et des retombées qui peuvent en découler (p. ex., évaluation de la qualité de la performance selon certains standards). Deux dimensions liées à l’appréhension seraient ainsi associées à l’anxiété de test soit (1) perception de contrôle et (2) la valeur accordée aux activités évaluées et leurs retombées (Pekrun, 2006).

En résumé, parmi les variables importantes à considérer dans l’anxiété de test, il y a les variables intrapersonnelles, dont l’autorégulation (contrôle de l’effort), le concept de soi académique, la performance académique et la menace perçue des tests. Parmi les variables contextuelles, il importe de considérer les attentes irréalistes des parents concernant la réussite et l’environnement scolaire.

L’anxiété de test spécifique à certaines matières. L’anxiété de test présente des caractéristiques générales, toutes matières scolaires confondues. Toutefois, certaines disciplines académiques ont été identifiées comme étant plus sujettes au développement de l’anxiété de test et présentent des particularités qui les rendent singulières. Par exemple, certains considèrent l’anxiété spécifique aux mathématiques comme une forme d’anxiété de test (Catapano, 2014; Devine et al., 2012). Elle se définit comme un sentiment de tension, d’appréhension ou de peur qui interfère avec les habiletés typiquement associées aux mathématiques soit la manipulation des nombres et la résolution de problème (Ganley et McGraw, 2016). Les performances académiques plus faibles dans cette matière seraient expliquées avant tout par la présence des manifestations cognitives d’anxiété, plutôt que par des déficits au niveau des compétences réelles de l’élève (Ashcraft, 2002). L’anxiété affecterait la mémoire de travail des individus et interfèrerait avec la complétion des tâches requérant cette fonction exécutive (Baddeley, 1986). L’élève se retrouverait donc en situation de doubles tâches, alors qu’il doit composer avec ses ruminations anxieuses, et réaliser le problème mathématique auquel il est soumis. Sur le plan comportemental, cela amènerait l’individu à s’engager dans des comportements d’évitement en lien avec cette matière (Ganley et McGraw, 2016; Lyons et Beilock, 2012). Il a été soulevé que cette forme d’anxiété a pour effet de diminuer le sentiment d’efficacité personnel de l’individu quant à sa capacité à comprendre les mathématiques, en plus d’amenuiser son l’intérêt envers cette matière (Jamieson et al., 2020). Des études suggèrent que les adolescentes présenteraient un niveau plus élevé d’anxiété mathématique que leurs homologues masculins (Ganley et Vasilyeva, 2014; Ganley et McGraw, 2016). Quant aux facteurs intra et interpersonnels contribuant au développement et au maintien de l’anxiété spécifique aux mathématiques, l’étude de Devine et ses collègues (2012) révélait que des expériences négatives en classe, les caractéristiques de l’enseignant, des facteurs intellectuels tels que le degré de pensée abstraite ou logique, ainsi que des facteurs de la personnalité comme l’estime de soi, le style d’apprentissage et la confiance, pouvaient influencer la survenue de manifestations anxieuses dans l’anxiété face aux mathématiques.

Une autre forme d’anxiété de test est l’anxiété scientifique. Cette dernière est définie par Mallow (1981) comme étant l’expérience des étudiants ayant des difficultés de compréhension avec les concepts scientifiques et qui tend à favoriser l’adoption de comportement d’évitement envers les sciences (Güzeller et Doğru, 2012; Jegede et al., 1996). La différence entre les sexes serait perceptible au début du secondaire et augmenterait au fil du temps. Les étudiantes seraient plus anxieuses face aux sciences (Güzeller et Doğru, 2012).

Finalement, l’anxiété de test associée aux cours d’éducation physique comporte aussi ses particularités propres. Les cours d’éducation physique sont identifiés comme étant propices à la comparaison sociale et aux jugements comme l’étudiant se retrouve fréquemment dans un contexte où ses actions, ses compétences et son apparence peuvent être observées et jugées directement par autrui (Kerner et al., 2017). Le fait de performer devant ses camarades de classe engendrerait des expériences affectives éprouvantes et générerait des manifestations anxieuses. Une autre des particularités de cette anxiété serait aussi liée au fait que le corps constitue l’objet central d’évaluation et que les capacités physiques du corps et la proprioception (représentation et ajustement du corps dans l’espace) sont évaluées (Kerner et al., 2018). Ainsi, l’incidence sur l’image corporelle des élèves, notamment des adolescents, est importante. Le concept d’anxiété sociale physique découle aussi de ce constat et se définit comme un sous-type d’anxiété sociale inhérent au fait que la personne perçoit ou constate que son apparence physique est évaluée par autrui (Hart et al., 1989). Ultimement, il est considéré que la peur des évaluations, de l’échec, le contexte de compétition et les problèmes d’image corporelle, peuvent avoir une incidence importante sur l’estime de soi des étudiants (Danthony et al., 2019). Les filles rapporteraient vivre plus d’inquiétudes, de symptômes physiologiques et de tension somatique que les garçons, en lien avec les évaluations dans les cours d’éducation physique (Danthony et al., 2019). Enfin, il convient de mentionner que la dimension sociale spécifique à cette forme d’anxiété de test chevauche conceptuellement l’anxiété de performance en contexte social qui regroupe les domaines sportif et artistique décrits dans la prochaine section.

Anxiété de performance en contexte sportif

L’anxiété de compétition liée à la participation sportive est décrite comme une propension à percevoir les situations de compétition comme étant menaçantes, et à réagir à ces situations, par des sentiments d’appréhension et de tension (Martens et al., 1996). L’anxiété compétitive est abordée dans le détail dans un article spécifique dans ce numéro. La présente section présente rapidement la littérature qui ressort chez les 0-18 ans. Comme dans les autres modèles présentés précédemment, cette tendance à appréhender négativement ce type de situation est susceptible de générer des manifestations cognitives, somatiques et comportementales d’anxiété (Freire et al., 2020). L’anxiété compétitive dans le sport est influencée par des différences individuelles et des variables situationnelles. Plus spécifiquement, les différences individuelles incluent l’orientation des objectifs (p. ex., buts de maîtrise; améliorer son temps personnel ou de performance; gagner la première place), le trait d’anxiété, les attentes liées à la performance, les préoccupations concernant les attentes, le niveau de compétition ainsi que le genre (Beauchamp et al., 2003). Il a été observé que les filles démontreraient davantage d’anxiété de performance (somatique et cognitive) et se préoccuperaient plus de la compétition que les garçons (Freire et al., 2020). Aussi, les adolescents athlètes présentant un perfectionnisme mésadapté, seraient plus disposés à vivre de l’anxiété durant une compétition (Freire et al., 2020). Ils seraient plus à risque d’être préoccupés par la possibilité de faire des erreurs, de subir de la pression parentale et d’être envahis par des doutes concernant leurs actions (Freire et al., 2020). Sur le plan situationnel, la complexité des tâches, la capacité de l’adversaire, l’emplacement du jeu et le type de sport sont des variables pouvant influencer l’anxiété de performance (Beauchamp et al., 2003). Ultimement, des niveaux élevés d’anxiété de compétition sont associés à de mauvaises performances et à une diminution du plaisir (Grossbard et al., 2009). Cette forme d’anxiété constituerait un facteur prédicteur important associé à l’arrêt de la participation sportive (Grossbard et al., 2009).

Anxiété de performance en contexte artistique : l’anxiété de performance musicale

Certaines situations de performance peuvent se produire en contexte social, notamment dans les domaines des arts. C’est le cas de l’anxiété de performance musicale (APM). L’anxiété de performance musicale se définit comme une expérience d’appréhension persistante pouvant provoquer une altération des compétences d’interprétation devant un public (Zarza-Alzugaray et al., 2018). Cette expérience peut survenir avec certains symptômes somatiques, dont la transpiration, la nausée, les étourdissements, les tremblements, la tension musculaire, la bouche sèche, les bouffées de chaleur, l’évanouissement et les mains moites (Guven, 2017). Les aspects cognitifs de l’anxiété de performance musicale se manifestent par des préoccupations concernant d’éventuelles catastrophes, des craintes sur la qualité de la performance ainsi que l’exagération de l’importance accordée à la performance. Ultimement, il peut survenir une baisse de la qualité de la performance et des échecs, qui sont considérés comme des aspects comportementaux (Guven, 2017). L’anxiété de performance musicale résulte de l’interaction entre divers facteurs, tels que les caractéristiques personnelles, comme l’anxiété liée aux traits de personnalité, le perfectionnisme (ou besoin excessif de contrôle), le névrosisme, l’introversion et la propension à la phobie sociale (Guven, 2017). Ces tendances peuvent être déterminées en partie biologiquement. L’APM est aussi associée à la peur de l’humiliation, les inquiétudes concernant l’évaluation négative des autres, une tendance à surestimer les conséquences (croire que des erreurs mineures peuvent avoir des conséquences catastrophiques) ou des croyances irrationnelles, telle la conviction, qu’il faut être parfaitement compétent lors d’une interprétation musicale (Perdomo-Guevara, 2014). Finalement, l’anxiété de performance musicale est plus fréquemment rapportée chez les filles que chez les garçons (Thomas et Nettelbeck, 2014).

Points communs

Ultimement, bien que chacun des sous-types d’anxiété de performance présente ses propres particularités qui relèvent notamment du contexte dans lequel la situation de performance survient, certaines caractéristiques sont communes aux trois grands types, soit la présence de manifestations cognitives (p. ex., crainte d’échouer), physiologiques (p. ex., accélération cardiaque, tension musculaire, etc.) et comportementales (p. ex., figer, éviter, s’inquiéter, rechercher de la réassurance auprès d’autrui) en lien avec la qualité et la finalité d’une performance qui doit être exécutée. On remarque aussi que dans les trois types, les filles sont plus affectées que les garçons. De surcroit, le rapport des parents avec la performance et le climat environnemental d’apprentissage (professeur, entraineur, etc.) ont aussi un rôle important à jouer. Les prochaines sections abordent plus en détail ces facteurs communs prédisposant à l’anxiété de performance ressortis dans la littérature, ce peu importe le sous-type.

FACTEURS INDIVIDUELS ET ENVIRONNEMENTAUX ASSOCIÉS À L’ANXIÉTÉ DE PERFORMANCE

Les facteurs individuels

Différences entre les sexes

Il est bien établi dans la littérature que la prévalence de l’anxiété est plus élevée chez les filles (Auerbach et al., 2012; Carter et al., 2011). Un constat similaire est aussi observé chez les individus présentant de l’anxiété de performance, alors que les filles/femmes rapportaient un niveau plus élevé d’anxiété que leurs homologues masculins, et ce, indépendamment du type d’anxiété de performance (Aydin, 2017; Hill et al., 2016). Cependant, ces différences au niveau du sexe ne seraient pas observées chez les enfants âgés de moins de 9-10 ans (Ryan, 2005). Cette divergence apparaitrait davantage au début de l’adolescence, période concordant avec l’entrée au secondaire, et tendrait à augmenter au fil du temps (Freire et al., 2020). Thomas et Nettelbeck (2014) ont démontré que chez les enfants âgés de 5 à 13 ans, les différences entre les sexes apparaissent autour de 9-10 ans, suggérant aussi que ces différences sont moins susceptibles d’apparaître en bas âge.

L’anxiété de trait

Le trait d’anxiété est décrit comme une caractéristique individuelle qui prédispose une personne à expérimenter et à rapporter des émotions dites dérangeantes comme la peur, des inquiétudes et de l’anxiété dans différentes situations (Gidron, 2013). L’individu qui présente ce trait aurait tendance à percevoir les événements de son environnement comme potentiellement menaçants (Spielberger, 2013). Ce trait a été identifié comme un facteur prédisposant à l’anxiété de performance (Khiouich, 2014). Plusieurs études suggèrent que l’anxiété de trait a un rôle à jouer dans l’anxiété de performance musicale (Kenny et al., 2004; Thomas et Nettelbeck, 2014). À cet égard, les résultats d’une étude menée par Ryan (2005) suggèrent que les enfants ayant un niveau de trait d’anxiété élevé ont tendance à ressentir davantage d’anxiété le jour d’une performance musicale. Un étudiant présentant de l’anxiété de test serait plus à risque d’être habité par des inquiétudes excessives et d’éprouver une réaction physiologique dans plusieurs situations d’évaluations. Similairement, l’anxiété de trait influence l’anxiété de performance en contexte de compétition (Beauchamp et al., 2003).

L’estime de soi et les représentations de soi

Parmi les facteurs identifiés comme ayant une incidence dans le développement de l’anxiété de performance, la perception qu’a l’enfant ou l’adolescent de ses propres ressources personnelles pour composer avec le danger perçu, de même que son estime de soi, constituent des variables centrales (Passer, 1982). La capacité d’un enfant et d’un adolescent à s’autoévaluer fait partie du développement cognitif normal (Harter, 2015). Bien que les évidences empiriques ne permettent pas d’associer des périodes d’âges spécifiques quant à l’émergence d’aptitudes cognitives d’autoévaluation, on pourrait croire que cette habileté est liée au développement des capacités métacognitives qu’on voit plus présentes à l’adolescence (Kuhn, 2009). Il a été observé chez les adolescents musiciens que l’anxiété de performance avait tendance à se manifester davantage durant ce stade (Dempsey et Comeau, 2019). À titre comparatif, l’évaluation subjective que les enfants d’âge préscolaire feraient de leurs habiletés serait dichotomique, bonne ou mauvaise. Leur analyse tient davantage compte du niveau d’efforts mis pour déployer leurs habiletés que de l’évaluation de leur degré de maitrise de celles-ci (Stipek et Tannatt, 1984). Conséquemment, il a été documenté que les enfants ont une perception d’eux-mêmes optimiste, idéalisée et positive. Un changement sociocognitif surviendrait lorsque les enfants font leur intégration à l’école, alors qu’ils apprennent à se comparer à leurs pairs pour évaluer leurs propres caractéristiques (p. ex., opinion, habiletés, etc.) (Harter, 2015). La capacité à adopter la perspective d’autrui les amène à considérer davantage ce que leurs amis, parents et enseignants pensent d’eux, à inférer ce qu’ils pourraient penser, et ultimement, à craindre l’opinion de ceux-ci à leur endroit (Mizokawa, 2018). À l’adolescence, des études ont mis en perspective une influence bidirectionnelle entre une représentation de soi positive dans un domaine spécifique, ainsi que le degré d’accomplissement dans ce même domaine (Chen et al., 2013). L’estime de soi est également corrélée avec le sentiment d’efficacité personnel d’un individu (Bandura, 1977; Lane et al., 2004). Indépendamment du type d’anxiété, le sentiment d’efficacité personnel constitue une variable médiatrice importante dans l’émergence et le maintien de l’anxiété (Bandura, 1977, 1988). En ce qui a trait à l’anxiété de performance en contexte sportif, il a été démontré que l’anxiété influencerait négativement le sentiment d’efficacité personnelle et qu’un faible niveau d’efficacité personnelle aurait une incidence négative sur le niveau d’accomplissement sportif (Durovic et al., 2021). Le sentiment d’efficacité personnel fait également écho à plusieurs modèles théoriques élaborés pour expliciter l’anxiété de performance (p. ex., Beilock, Schaeffet et Rozek, 2017; Ringeisen et Raufelder, 2015).

Les facteurs environnementaux

Relation parents-enfants

Les parents ont un rôle prépondérant dans le développement de l’enfant comme ils constituent les principaux agents de socialisation (Pomerantz et Thompson, 2008). Il est considéré que leurs comportements peuvent avoir une incidence sur l’adaptation scolaire et sociale de leurs enfants, leurs sentiments de compétence, leurs performances ainsi que les émotions, notamment l’anxiété (Ringeisen et Raufelder, 2015; Simpkins et al., 2012). Cette influence serait d’autant plus importante chez les adolescents et les jeunes adultes. Dans les domaines de l’anxiété et de la performance, les facteurs parentaux ont été étudiés à l’aide de différentes perspectives, dont les styles parentaux, les pratiques parentales, la pression parentale, les croyances des parents à l’égard de leurs enfants, les perceptions des enfants et des adolescents quant aux attentes des parents à l’égard de leur performance (Bouffard et al., 2011; O’Rourke et al.,2014; Wiedermann et al., 2020).

Quant aux styles parentaux issus de la théorie de Baumrind (1971) et de Maccoby et Martin (1983), le style démocratique, caractérisé par un niveau élevé de contrôle, de support et de chaleur affective, serait associé à de nombreux bienfaits chez l’enfant, dont une meilleure estime de soi, un sentiment d’efficacité personnel adéquat et un meilleur fonctionnement scolaire (Lavric et Naterer, 2020). Inversement, un style parental autoritaire se manifestant par un niveau de contrôle et des exigences élevés, l’absence de support et de chaleur favoriserait une perception négative de soi chez l’enfant (Masud et al., 2015). Les perceptions que les parents ont des compétences de leurs enfants, les attentes qu’ils ont envers eux et l’importance qu’ils accordent à certains domaines, vont influencer leurs comportements et globalement la relation parent-enfant (Eccles et al., 2002). L’accompagnement offert à l’enfant pour lui permettre d’atteindre ses objectifs, les encouragements et la confiance voués à celui-ci, quant à ses compétences pour réussir, sont considérés comme cruciaux pour une saine gestion de l’anxiété reliée aux accomplissements (Martinez et al., 2011). Chez les adolescents, un niveau élevé de support parental serait corrélé à un niveau moindre d’anxiété générale et de test (Ringeisen et Raufelder, 2015; Wolfradt et al.,2003). Inversement, la pression parentale, qui correspond à une tendance à communiquer de manière excessive des critiques, a été associée à un niveau de performance moindre et plus d’affects négatifs dans les domaines sportifs et académiques (Sebire et al., 2009). En contexte scolaire, la pression socioacadémique amènerait les parents à pousser leur enfant à travailler plus fort à l’école, à établir des attentes académiques élevées ainsi qu’à critiquer les performances scolaires, sans tenir compte des capacités réelles de l’enfant (Ringeisen et Raufelder, 2015). Quant aux caractéristiques spécifiques des parents, il a été démontré que les parents anxieux tendent à être plus critiques envers leurs enfants (Hirshfeld et al., 1997). Ceux qui présentent un sentiment d’efficacité personnel élevé dans leur rôle parental seraient davantage en mesure de donner de la rétroaction constructive à leur enfant autant quand ils vivent des réussites que des échecs (Jones et Prinz, 2005).

L’environnement social

La qualité du climat et de la relation qu’entretient l’enfant avec son enseignant/entraîneur a été identifiée comme étant des facteurs modérateurs de l’anxiété dans le contexte sportif, académique et musical (Poulin et al., 2015; Wang et al., 2020). Le concept de climat motivationnel réfère aux caractéristiques de l’environnement d’apprentissage dans lequel évolue l’individu. Cela peut comprendre les valeurs transmises, les standards identifiés, la qualité des relations interpersonnelles, la tendance à recourir aux récompenses et aux punitions, etc. Ces facteurs jouant sur le climat motivationnel auraient une incidence sur l’anxiété de performance et le sentiment de compétence (O’Rourke et al., 2014). Ainsi, par leurs attitudes et leurs actions, les parents, les enseignants et les entraîneurs influencent le fonctionnement de l’enfant et l’adolescent (Schwebel et al., 2016). Deux types de climats motivationnels ont été décrits, soient le climat de maîtrise et le climat de performance (Ames, 1992). Les adultes qui favorisent un climat axé sur la maîtrise, tendent à décrire le succès par l’amélioration de ses propres aptitudes plutôt que la réussite, encouragent la maîtrise des habiletés et valorisent les efforts déployés, plutôt que les résultats. Ce type d’environnement est associé à une baisse de l’anxiété de performance et une meilleure estime de soi (O’Rourke et al., 2011). Parallèlement, les environnements qui se caractérisent par un climat axé sur la performance accordent davantage d’importance aux réussites et aux victoires qu’aux efforts déployés, à l’amélioration individuelle ou à la qualité de l’expérience vécue (plaisir ressenti). La comparaison sociale est davantage présente dans ces environnements ainsi que le recours aux renforcements négatifs (p. ex., punitions) lorsque des erreurs sont commises (Smith et al., 2009). Il n’est pas étonnant de savoir que ce type de climat est associé à un niveau plus élevé d’anxiété de performance et une estime de soi plus faible (O’Rourke et al., 2011). Il a également été démontré que le climat motivationnel induit par les parents avait plus d’influence sur l’enfant/l’adolescent, que celui de l’entraîneur (O’Rourke et al., 2014). Notamment étudié dans le contexte scolaire, l’effet «gros poisson petit bassin» (Marsh, 1987) est également proposé dans l’explication de l’anxiété de performance. Ce paradigme réfère au fait qu’à compétence égale, les enfants qui évoluent dans un environnement scolaire où le niveau de performance est plus élevé, vont présenter un concept de soi moins favorable et un rendement plus faible, en se comparant à leurs pairs, comparativement aux enfants qui présentent des aptitudes similaires et qui fréquentent des environnements scolaires où le niveau d’habiletés varie entre faible et modéré (Seaton et al., 2010). Ultimement, il a été observé que l’anxiété vécue par un enfant était associée à sa perception de l’importance que son parent attribue à un domaine, ainsi que la pression de réussir qu’il vit (White, 1998). Ainsi, une influence bidirectionnelle relevant de l’interaction entre l’enfant et son environnement doit être considérée dans la compréhension de l’anxiété de performance. À cet effet, la prochaine section mettra de l’avant les interventions à privilégier auprès de l’enfant et de son environnement qui ressortent du relevé de littérature sur l’anxiété de performance chez les enfants et les adolescents.

PROPOSITIONS CLINIQUES ISSUES DE LA LITTÉRATURE ET CIBLANT L’ANXIÉTÉ DE PERFORMANCE

Le dernier objectif de cette recension des écrits était de relever dans la littérature, les interventions identifiées comme étant prometteuses et efficaces dans le traitement de l’anxiété de performance. Différents constats en sont découlés. Tout d’abord, un nombre de 95 articles satisfaisant les critères de recherche a été repéré à travers les différentes bases de données. Plus spécifiquement, 65 % des articles recensés traitaient de l’anxiété de tests, 14 % de l’anxiété de performance dans le domaine des mathématiques, 8 % dans le contexte sportif, 7 % dans le domaine musical ainsi que 5 % étaient associés à d’autres thèmes (p. ex., pharmacologie, crainte de parler en public, etc.). Uniquement 25 % des articles recensés constituent des essais contrôlés randomisés. Ce nombre plutôt restreint d’études cliniques, apparait cohérent avec le fait que l’anxiété de performance ne constitue pas un diagnostic en soi, mais une déclinaison du trouble d’anxiété sociale. Comme soulevé par plusieurs équipes de chercheurs ayant conduit des revues systématiques sur l’anxiété de test et l’anxiété de performance musicale, les lacunes méthodologiques souvent citées concernent l’hétérogénéité des échantillons ainsi que des disparités dans la façon de conceptualiser l’anxiété de performance (Fernholz et al., 2018; von der Embse et al., 2013). Ultimement, ces limites ont une incidence notoire sur les conclusions qui peuvent être tirées quant à l’efficacité des interventions. Cependant, il demeure pertinent de s’intéresser d’un point de vue clinique, à l’état des connaissances actuelles, afin d’adapter les interventions à privilégier auprès des enfants et des adolescents qui sont affligés par cette problématique. Similairement aux observations de Cizek et Burg (2006), Fernhloz et al., (2018), Kenny (2009) et Von der Embase et ses collègues (2012), les interventions spécifiques pour l’anxiété de performance chez les enfants et les adolescents recensés peuvent être regroupées selon différentes approches de traitement, dont cognitive-comportementale, psychodynamique, et alternatifs (p. ex., yoga, méditation, biofeedback, pharmacothérapie). Celles-ci seront détaillées dans les prochaines sections.

Les interventions cognitives et comportementales

Sur le plan clinique, la thérapie cognitive comportementale (TCC) est la forme de psychothérapie ayant le plus d’appuis empiriques dans le traitement de l’anxiété et des troubles anxieux auprès des enfants et des adolescents, ainsi que des adultes (Higa-McMillan et al., 2016; Wang et al., 2017). Issue des postulats des théories de l’apprentissage, des théories cognitives et comportementales, la TCC met l’accent sur le rôle des pensées et des expériences comportementales dans le développement, le maintien et la résolution des problèmes émotionnels (Beck, 1979). Conséquemment, la TCC propose différentes interventions qui vont amener l’individu à ne plus percevoir son environnement et les demandes de celui-ci comme menaçants, ainsi qu’à reconnaitre sa capacité à s’adapter à ceux-ci (Kendall et al., 2003). Le modèle conceptuel de l’anxiété de performance élaboré par Beilock, Schaeffer et Rozek (2017) identifie notamment l’inquiétude et l’activation physiologique comme étant les deux principales composantes de l’anxiété de performance qui mènent à différentes réponses comportementales, dont des comportements d’évitement, des attitudes négatives et des défis au niveau de l’expression du plein potentiel des enfants. Au Québec, les résultats préliminaires de l’implantation d’un programme d’intervention développé dans le cadre d’un projet de maitrise en psychoéducation «Performer… sans anxiété» offert à des étudiants du secondaire avaient démontré une diminution significative du niveau d’anxiété de performance chez les adolescents (Cocullo, 2014). Parmi les objectifs de ce programme, on relevait notamment de réduire les manifestations cognitives et physiologiques associées à l’anxiété de performance, d’accroitre les connaissances des participants sur ce sujet ainsi que leur utilisation de techniques de relaxation.

Les stratégies d’interventions ciblant les manifestations physiologiques

Globalement, la TCC de l’anxiété de performance a souvent pour but le développement des compétences de l’enfant et de l’adolescent, pour lui permettre de réguler de manière autonome et adéquate les manifestations émotionnelles, cognitives et physiologiques associées à l’anxiété. Un peu comme dans toutes les TCC pour l’anxiété, elle propose d’utiliser la psychopédagogie sur l’anxiété et ses composantes, l’enseignement de stratégies de gestion des sensations physiologiques (p. ex., respiration diaphragmatique, technique de relaxation de Jacobson), des pensées (p. ex., restructuration cognitive) ainsi que des expériences comportementales et de l’exposition comportementale graduelle au stimulus générant l’anxiété de performance (Gosch et al., 2006). À titre d’exemple, un élève qui doit réaliser une présentation orale devant sa classe (situation de performance) pourrait ressentir les manifestations anxieuses suivantes à différents moments, comme la veille de sa présentation, quelques heures, minutes, avant ou pendant, etc. : malaises physiques (ressentir un mal de coeur, une accélération de son rythme cardiaque, une élévation de sa température corporelle, mains moites); pensées anxiogènes (je vais avoir un blanc, les gens vont rire de moi, je vais échouer, etc.) et comportementales (refus de faire sa présentation, paralyser devant la classe, crise de pleurs, difficultés à parler, etc.). Des études ont démontré que le fait de normaliser et d’expliquer les réactions physiologiques associées à l’anxiété avait un impact sur les effets négatifs associés à l’anxiété de performance (Jamieson et al., 2016). Ainsi, lorsque les individus perçoivent les réactions physiologiques comme moins dangereuses et même utiles à un certain degré pour bien performer, cela permettrait de modifier leur expérience de la situation (Jamieson et al., 2016). De plus, une étude réalisée par Su et ses collaborateurs (2010) auprès d’enfants de la troisième à la sixième année a démontré des effets significatifs de l’entrainement à la relaxation via des respirations diaphragmatiques, pour réduire l’anxiété de performance musicale chez ce groupe d’âge. Enfin, l’utilisation des technologies permettant d’obtenir une appréciation en temps réel des variables anthropométriques (p. ex., variable mesurée dans le biofeedback; température corporelle, rythme cardiaque) et un contrôle conscient des paramètres physiologiques, a démontré certains bienfaits pour les différents domaines d’anxiété de performance discutés dans le présent article (Aritzeta et al., 2017; Bradley et al., 2010; Thurber et al., 2010).

Les stratégies d’interventions cognitives

Sur le plan cognitif, l’identification des sources d’inquiétudes et des croyances est une avenue à considérer pour atténuer le niveau d’anxiété qu’un domaine ou une tâche peut susciter (Johns et al., 2005). Il a été démontré à plusieurs reprises que les enfants anxieux présentent un certain biais attentionnel qui les amène à interpréter les situations ambiguës comme étant davantage menaçant (Bögels et al., 2003). Ainsi, l’identification des sources d’inquiétudes est une avenue à considérer pour atténuer le niveau d’anxiété qu’un domaine ou une tâche peut susciter (Johns et al., 2005). On amène ainsi les jeunes à objectiver leurs inquiétudes ainsi qu’à réévaluer l’utilité de s’inquiéter. Des résultats significatifs ont d’ailleurs soulevé l’efficacité d’une stratégie, visant à écrire librement ses pensées et ses émotions vécues, en lien avec une situation stressante comme un récital ou une compétition de danse (Park et al., 2014). Les personnes éprouvant de l’anxiété de performance ont tendance à associer leurs échecs à des causes stables et qu’elles perçoivent immuables comme un manque de compétence, leur genre, leur appartenance à un groupe ethnique, etc. Inversement, le fait d’attribuer ses réussites et ses échecs aux efforts déployés ou à des facteurs qui sont changeants (p. ex., degré de difficulté d’une tâche, préparation, un examen isolé versus une note finale, etc.) nuance la perception de l’individu et lui permet d’entrevoir la possibilité d’avoir un pouvoir d’action sur les situations de performance (Yeager et al., 2016). Il a été démontré que les élèves qui sont en mesure de considérer le contexte dans lequel ils ont réalisé leur performance parviennent à réagir adéquatement à différentes situations en ajustant leurs comportements et leurs stratégies pour atteindre leur but (Hartman, 2001). De plus, la perception que les personnes ont d’elles-mêmes, notamment en situation de performance, constituerait une variable modératrice de leur adaptation à une telle situation (Beilock et al., 2017). Il a été démontré que le fait de croire qu’on puisse avoir du contrôle sur la situation permettrait le développement du sentiment d’efficacité personnel, notamment dans le contexte de l’anxiété de test (Hseish et al., 2012). La notion de contrôle réfère à la croyance qu’un individu a de sa capacité à obtenir un résultat qui correspond à un succès (Putwain et Pescod, 2018). D’ailleurs, le modèle théorique de l’anxiété de test (Self-referent executive processing; S-REF) élaboré par Zeidner et Matthews (2005) suggère que le processus de régulation émotionnelle, comportementale et cognitive inclurait les facteurs suivants (1) l’importance associée à la situation d’évaluation (2) les conséquences liées à l’échec (3) plan pour s’adapter (4) les métacognitions à propos des inquiétudes. Ainsi, chacun des facteurs précédents peut faire l’objet d’interventions correspondant à la restructuration cognitive.

De plus, les enfants présentant de l’anxiété de sociale ont été identifiées comme étant plus critiques envers eux lorsque leurs performances sont faibles. À cet égard, Halldorson et ses collègues (2018) suggéraient d’aider les enfants à être davantage bienveillants envers eux-mêmes plutôt que de recadrer leurs appréhensions anxieuses et leurs discours négatifs pré et post-événement. Cela peut se faire en les amenant à accorder plus d’importance aux efforts et aux processus qu’au résultat final. De plus, il a été soulevé que le fait d’aider les individus à entretenir une vision d’eux-mêmes plus exhaustive (p. ex.,de valeurs personnelles, forces, etc.) permettrait de réduire les conséquences négatives liées à l’anxiété de performance (Sherman et Cohen, 2006). Enfin, il ne faut pas oublier que la voie de l’exposition comportementale permet également d’optimiser le sentiment d’efficacité personnel des individus en contribuant au développement d’un sentiment de maitrise, d’une saine gestion des fausses attributions, des scénarios catastrophiques ainsi que des manifestations psychophysiologiques. Par ses expériences, l’individu confronte ses perceptions et peut tirer des conclusions quant à ses capacités, en se basant sur des éléments de la réalité plutôt que sur des conséquences/catastrophes imaginées (Kendall et al., 2016).

Les stratégies d’interventions comportementales

L’exposition comportementale est une modalité d’intervention centrale de l’approche TCC, notamment dans le traitement des troubles anxieux. Cette technique implique que l’enfant et l’adolescent s’exposent de manière in vivo ou via l’imagerie mentale, à la situation de performance qui lui génère une réponse physiologique, émotionnelle et cognitive d’anxiété, afin qu’il puisse apprendre à identifier, gérer et tolérer ses manifestations. L’opportunité de pratiquer in vivo ses habiletés dans un milieu contrôlé et de vivre des expériences positives dans des domaines qu’ils appréhendent négativement a été démontrée pertinente dans le traitement de l’anxiété de performance (Berkowitz et al., 2015). De plus, des techniques de visualisation sont aussi utilisées chez les athlètes de haut niveau et sont associées à des retombées positives au niveau de la confiance en soi, du sentiment de compétence et une diminution de l’anxiété notamment chez les adultes (Garza et Feltz, 1998). À titre d’exemple, le fait de pratiquer une séquence motrice en prévision d’une compétition de danse, plutôt que de surinvestir sur le plan cognitif, la possibilité de commettre une erreur. Il faut cependant distinguer la visualisation de l’exposition cognitive utilisée dans le cas d’inquiétudes excessives. Dans ce dernier cas, le but est de s’habituer à des images menaçantes, alors que dans la visualisation, la personne pratique mentalement une activité et cette pratique favorise le sentiment de contrôle, mais ne vise pas une habituation à la peur.

Plus récemment, l’utilisation de la réalité virtuelle comme paradigme d’exposition dans le traitement du trac, l’anxiété sociale et de l’anxiété de performance musicale a été étudiée et aurait démontré des résultats efficaces (Anderson et al., 2013; Bouchard et al., 2017; Hébert, 2019). Des exercices d’exposition, via la réalité virtuelle, ont démontré des effets significatifs au niveau de la réduction du niveau d’anxiété de performance éprouvé par 6 étudiants en musique, ainsi qu’une amélioration de leur performance (Bissonnette et al., 2016). Enfin, il convient également de mentionner que des approches modulaires uniquement cognitive ou comportementale, comme des interventions se limitant à l’enseignement de respirations diaphragmatique, de la relaxation musculaire ou des interventions ciblées sur la désensibilisation systématique (exposition comportementale), ont obtenu des résultats cliniquement significatifs dans le traitement de l’anxiété de test (Egbochku et Obodo, 2005; Larson et al., 2010). Bien que les résultats de plusieurs méta-analyses portant sur le traitement de l’anxiété de performance chez les musiciens, et les interventions pour les enfants vivant de l’anxiété de test, indiquaient que les modalités de traitements incluant des stratégies issues de l’approche cognitive comportementale, étaient les plus efficaces, d’autres modalités de traitement ont aussi été élaborées (Goren, 2014; McGinnis et Milling, 2005; Osborne et al., 2007).

Approches de traitements alternatives

Interventions dispensées aux adultes significatifs

Dans le domaine sportif, il est bien établi empiriquement que les entraineurs et les parents influencent l’expérience sportive et le bien-être des athlètes (O’Rourke et al., 2014). Des auteurs (Smith et al.,1995) ont évalué l’efficacité d’un programme d’intervention visant la réduction du stress et basé sur le support social, Coach Effectiveness Training (CET), d’abord auprès de 18 entraineurs impliqués auprès de 152 joueurs de baseball. Ce programme dispensé en une séance de 2,5 heures est constitué d’une série de lignes directrices quant aux comportements à favoriser (p. ex., renforcements autant pour les efforts que les bonnes performances, soutenir en dépit des erreurs commises, etc.) et inversement ceux à proscrire (le faible renforcement positif, l’usage de punitions verbales ou non verbales, un style de communication punitif, des comportements autoritaires et contrôlants). Les entraineurs étaient encouragés à mettre l’accent sur les efforts déployés par l’athlète, sa progression ainsi que le plaisir qu’il vit dans son sport, plutôt que les succès et le besoin de gagner. Il a été démontré que les enfants qui étaient sous la responsabilité des entraineurs ayant suivi le programme démontraient un niveau d’anxiété significativement réduit, et cela, durant la saison entière. Deux de ces mêmes auteurs (Smith et al., 2007) ont par la suite conceptualisé deux programmes dérivés de cette approche soient le Mastery Approach to Coaching pour les entraineurs et le Mastery Approach to Parenting in Sports. Ils décrivent ces programmes comme une forme évoluée du CET, alors qu’ils reposent davantage sur la théorie des buts d’accomplissement qui présuppose que le type de but visé (maitrise ou performance), va influencer de façon distinctive les motivations et les actions dans lesquelles l’individu va s’engager (Ames, 1992). Ces programmes considérés comme étant une intervention cognitive comportementale visaient à diminuer l’anxiété de performance de type sportive et la peur de l’échec, par le biais de la mise en place d’un climat motivationnel axé sur la maitrise et le développement des compétences.

Programmes d’interventions issues d’approches intégrées

Dans le domaine musical et académique, l’efficacité de programmes ralliant différentes approches théoriques, notamment la psychologie positive, sportive, et cognitive-comportementale, a été évaluée. Ces programmes semblent avoir comme objectifs proximaux de soutenir les participants dans la gestion de l’anxiété de performance, tout en ayant comme objectif distal d’optimiser la qualité de leurs performances. En comparaison aux traitements basés sur l’approche cognitive comportementale, il est possible de noter l’ajout de thématiques liées à l’identification de buts, les sources de motivation, la préparation et les routines en vue de performance, ainsi que la gestion des échecs. Osborne et collaborateurs (2007, 2013) ont testé des programmes similaires de huit séances consécutives lors desquelles les objectifs suivants étaient poursuivis : identification des forces personnelles et des meilleures performances, identification de buts et les aspects motivationnels, le discours interne, la préparation et les routines des performances, répétition via la visualisation, gestion du stress et du bien-être, la focalisation, et composer avec les défaites. Des résultats statistiquement significatifs ont été obtenus uniquement chez les élèves musiciens s’étant activement impliqués au niveau d’anxiété de performance musicale rapportée, et aucun effet n’avait été observé au niveau de la qualité des performances des participants (Osborne et al., 2007). Dans le domaine de l’anxiété de test, des interventions visant essentiellement à accroitre les compétences académiques des élèves dans le but de réduire leur anxiété de test spécifique, à la matière pour laquelle ils étaient en difficulté, ont obtenu des résultats mitigés concernant la variable anxiété. Par ailleurs, elles ont démontré une amélioration des performances académiques (Carter al., 2005; Faber, 2010).

DISCUSSION

Le présent article visait à établir un portrait des connaissances théoriques et cliniques actuelles au sujet de l’anxiété de performance chez les enfants et les adolescents. D’un point de vue diagnostique, l’anxiété de performance réfère au trouble d’anxiété sociale de type performance seulement. Comme soulevé dans la présente démarche, différents types d’anxiété de performance sont relevés dans la littérature soit l’anxiété de performance en contexte académique, sportif et artistique. Des sous-types à même ces groupes ont également été identifiés comme l’anxiété de performance musicale. La présence d’enjeux conceptuels dans la définition même de l’anxiété de performance ainsi que différents termes pour référer, contribuent à certaines disparités et hétérogénéités des échantillons qui composent les études sur le sujet. La diversité du construit de l’anxiété de performance à travers le temps, rend complexe l’évaluation des manifestations de l’anxiété de performance et des modalités d’interventions à privilégier. Bien qu’un niveau d’anxiété optimal favorise la performance, lorsque celle-ci est excessive, elle peut altérer de manière significative le fonctionnement de l’enfant et de l’adolescent. À cet effet, il est possible de noter un paradoxe dans les cibles d’interventions des programmes d’interventions spécifiques recensés, notamment dans les domaines sportif, artistique et musical alors que plusieurs ont comme objectifs d’optimiser la qualité des performances des enfants et des adolescents. Ainsi, un message contradictoire peut être perçu par les enfants et les adolescents quant à la juste importance qu’il faut accorder à la performance, étant donné que les croyances attribuées à la performance constituent un des facteurs contributifs à la détresse.

Enfin, plusieurs facteurs individuels et environnementaux semblent contribuer au trouble d’anxiété de performance, dont les représentations de soi (p. ex., estime de soi, sentiment d’efficacité personnel, etc.), les capacités d’autorégulation, les expériences d’apprentissage, les principes éducatifs et les valeurs véhiculées dans l’environnement dans lequel les enfants évoluent (p. ex., attentes de performance, buts de maitrise vs de réussite, etc.). À ce jour, l’approche cognitive comportementale présente le plus d’appuis empiriques concernant l’amélioration des symptômes anxieux chez les enfants et les adolescents, et l’anxiété de performance ne ferait pas exception (Wang et al., 2017). Les interventions basées sur la gestion du stress, la modification des pensées, la connaissance de soi et l’amélioration des habiletés cognitives permettent de réduire les symptômes associés à l’anxiété. Globalement, il est possible de conclure que les stratégies individuelles d’autorégulation permettant aux enfants et aux adolescents d’optimiser leur capacité à s’auto-observer, à s’autoévaluer sans jugement, et à ajuster leurs comportements en fonction des demandes de l’environnement, vont ultimement les aider à mieux composer avec l’anxiété de performance. Similairement, les résultats de cette revue des écrits s’inscrivent dans la même lignée, alors que la plupart des articles portant sur les interventions qui ciblent l’anxiété de performance mettent de l’avant des interventions calquées sur les principes théoriques de la thérapie cognitive comportementale classique. Or, le présent article a permis d’identifier certaines caractéristiques propres à ce type d’anxiété et à mettre en lumière la prépondérance d’écrits propre à la sphère académique, alors que l’anxiété de performance ne se limite pas à ce domaine. D’un point de vue empirique, des données manquantes chez les enfants et adolescents (p. ex., taux de prévalence), témoignent du fait qu’il s’agit d’un sujet qui demeure d’intérêt et qui mériterait qu’on s’y attarde davantage pour mieux arrimer la recherche à la réalité rencontrée par les cliniciens dans leur pratique (Papageorgi, 2020). Ainsi, il apparait pertinent de poursuivre l’exploration des spécificités propres à chacun des domaines d’anxiété de performance relevés dans le présent article. De surcroit, le développement d’une approche de traitement intégrant davantage les données théoriques et empiriques qui émergent des récentes études, de manière à guider d’une part et à uniformiser d’autre part les interventions dispensées par les psychologues, s’avèrerait pertinent.

Limites de la présente recension des écrits

Certaines limites sont inhérentes à cette démarche, notamment le fait que cette revue de la littérature ne constitue pas une revue de portée ni une recension systématique. De plus, certains critères d’inclusion étaient vastes, notamment quant à la date de publication. Comme mentionné, les études recensées en lien avec les modalités de traitements ne présentaient pas toutes des qualités méthodologiques (p. ex.,nombre de participants, genre, étude contrôlée randomisée) qui auraient permis des comparaisons statistiques. Le présent article recense à tout le moins des articles théoriques et empiriques qui ont été sélectionnés en fonction de leur pertinence, pour les cliniciens oeuvrant auprès de populations infantiles et adolescentes.

CONCLUSION ET PISTES DE RECHERCHES FUTURES

L’anxiété de performance demeure un phénomène insidieux qui semble affecter bon nombre d’enfants et d’adolescents en plus d’être associé à un niveau de détresse psychologique important. Bien qu’aucun taux de prévalence ne soit disponible, Papageorgi (2020) observait dans un échantillon de 410 adolescents que 11 % d’entre eux présentaient un niveau élevé d’anxiété de performance. Cela dit, il demeure difficile de statuer clairement sur la prévalence des enfants et adolescents qui sont cliniquement affectés par cette forme d’anxiété, étant donné l’absence de consensus nosologique et qu’il s’agit d’un état susceptible de se manifester dans différents diagnostics (p. ex., phobie sociale, anxiété généralisée, personnalité obsessionnelle, etc.). Ultimement, ceci a aussi un impact direct sur les recherches empiriques, car la définition de ce phénomène varie d’une étude à l’autre. Ainsi, il apparait nécessaire que les prochaines études dans chaque domaine tentent d’une part d’uniformiser les termes employés, et d’autre part, d’utiliser des mesures similaires de manière à pouvoir faire des comparaisons. Ensuite, les chercheurs cliniciens devront aussi évaluer l’efficacité des interventions pour traiter cette forme d’anxiété. Seulement quelques études ont testé des programmes d’intervention individuels visant à outiller les jeunes ou les entraineurs (Cocullo, 2014; O’Rourke et al., 2011; Osborne, 2009). Il serait également intéressant de vérifier si des programmes de traitements transdiagnostiques pour les troubles anxieux pourraient être appliqués à l’anxiété de performance (Carlucci, et al., 2021; Kennedy et al., 2019). La venue de traitements intégrant différentes approches théoriques qui ciblent implicitement (p. ex., yoga, biofeedback) ou explicitement l’amélioration des performances des patients, amène à questionner si ceux-ci ne viennent pas renforcer l’importance parfois excessive que les individus accordent à leurs performances. Des études sur la question pourraient être intéressantes (Artizea et al., 2017; Khalsa et al., 2013). Quant à la population d’intérêt, il demeure impératif de poursuivre des recherches auprès des enfants et des adolescents issus d’environnements socioculturels variés, dans le but d’approfondir notre compréhension des manifestations de l’anxiété de performance ainsi que des facteurs contributifs. Ultimement, la poursuite de travaux dans ce champ favorisera la concertation des différents acteurs impliqués auprès de cette population et permettra d’aider les enfants et des adolescents, à développer un rapport sain avec la performance.