La Chaire CRSNG/Alcan pour les femmes en sciences et génie au Québec, une des cinq chaires canadiennes à mi-temps auxquelles le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG) a donné comme mandat de favoriser la participation des femmes à ces professions, partage son travail entre les services à la collectivité et à la recherche. C’est dans le contexte de ce dernier volet qu’au début de ma prise en charge de la Chaire comme titulaire, en 1997, Renée Cloutier, alors directrice de la revue Recherches féministes, m’approchait pour diriger un numéro sur les femmes et la science. J’étais loin de me douter, à l’époque, de la diversité et de la richesse des thèmes et des approches de recherche que cette problématique soulève. Le mouvement des femmes scientifiques et ingénieures reçoit actuellement un accueil favorable, car il s’inscrit très bien dans les besoins de la nouvelle économie du savoir. La demande de plus en plus importante en matière de personnel spécialisé rend apparente la faible proportion de relève féminine dans plusieurs domaines scientifiques et technologiques. Publiée en 2000, une étude de la Chaire CRSNG/Alcan fait ressortir pour le Québec une composition sexuelle très inégale des effectifs en sciences et en génie. Les femmes n’ayant pas les mêmes modèles d’orientation professionnelle que les hommes, on constate qu’elles se dirigent vers des disciplines scientifiques différentes. Elles tendent ainsi à délaisser les sciences physiques pour s’orienter plutôt vers les sciences de la vie et de la santé. On a amplement montré que les filles réussissent aussi bien que les garçons en mathématiques et en sciences au secondaire. Au collégial, elles choisissent en aussi grand nombre qu’eux le programme de sciences de la nature (formation préuniversitaire) donnant accès aux différentes disciplines des sciences et de l’ingénierie à l’université. Toutefois, les effectifs scolaires des techniques biologiques, de 1984 à 1998, sont constitués aux trois quarts de femmes. La situation s’inverse pour les techniques physiques où la proportion de femmes était de 12 % en 1984 et de 17 % en 1998. Cette tendance, constatée dans les techniques au collégial, perdure à l’université. Si nous regardons les données concernant la répartition des effectifs féminins inscrits à un programme menant à l’obtention d’un baccalauréat dans les universités du Québec en 1996, nous constatons ceci : le nombre de femmes est supérieur ou égal au nombre d’hommes dans tous les secteurs, sauf dans celui des sciences appliquées et du génie. On a pu observer, toujours durant la même année, que les femmes obtenaient 60 % des baccalauréats dans l’ensemble des secteurs de premier cycle, sauf en sciences et en génie où elles constituaient à peine le tiers des titulaires d’un diplôme, soit un ratio d’une femme pour deux hommes. Lorsqu’on parle de la faible représentation des femmes en sciences et en ingénierie, la situation concerne surtout la physique, la géomatique, l’informatique et l’ingénierie. Ces constats sont très semblables à ceux du reste du Canada et de la plupart des pays occidentaux. Cette préoccupation a d’ailleurs subi une poussée mondiale depuis 1995, soit depuis la Quatrième Conférence des Nations Unies sur les femmes qui s’est tenue à Beijing. À la suite de cet important événement, la Conférence mondiale sur la science, organisée conjointement par l’UNESCO et le Conseil international pour la science (CIUS), à l’été 1999 à Budapest, adoptait deux textes par consensus : la Déclaration sur la science et l’utilisation du savoir scientifique ainsi que l’Agenda pour la science – cadre d’action. Parmi les sujets traités dans ces textes, on s’entend explicitement sur le besoin de promouvoir un accès plus équitable des femmes à la science …