En parcourant l'histoire

Analyse de quelques mécanismes d’acquisition des premiers éléments d’un métier chez l’adolescent. Une recherche pionnière en psychopédagogie expérimentale d’Antoine Léon[Record]

  • Serge Blanchard

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  • Serge Blanchard
    Groupe de recherche et d’étude sur l’histoire du travail et de l’orientation (GRESHTO). Centre de recherche sur le travail et le développement (CRTD) – CNAM.

Cet article a été originalement publié en portugais dans « Laboreal volume XII, 1, 2012, 110-114. »

En 1957, Antoine Léon, chercheur au Service de recherche de l’Institut national d’étude du travail et d’orientation professionnelle (INETOP), présente dans le bulletin du Centre de recherche psychotechnique (CERP), alors dirigé par Jean-Marie Faverge, une recherche de terrain qui porte sur Cet article (1957a) rend compte d’un travail de recherche mené au Centre d’application de l’Ecole normale nationale d’apprentissage (ENNA) de Paris où sont formés les professeurs techniques des centres d’apprentissages (CA), établissements préparant en trois ans, sous statut scolaire, les élèves au certificat d’aptitude professionnel (CAP). Ce texte s’inscrit dans le contexte de l’époque. Dans les années cinquante, la France est encore en pleine période de reconstruction. La demande d’ouvriers et d’employés qualifiés est forte et la formation et l’orientation professionnelles sont devenues un enjeu national. Dans ce contexte, deux conceptions de l’orientation s’opposent : d’un côté l’approche pronostique-diagnostique portée historiquement par Piéron (1949), le directeur de l’INETOP, de l’autre une conception éducative et continue représentée par Antoine Léon (1957b). Cette opposition peut surprendre des lecteurs non français, plutôt spécialistes des questions du travail. En France, l’orientation est historiquement liée à la connaissance du travail. Au début du XXe siècle, les premiers travaux sur l’orientation se donnent pour objectif de régler l’entrée dans le métier des plus jeunes et l’accès à la formation de tous les travailleurs. Cette proximité revendiquée, mais pas toujours assumée, permet de comprendre qu’aujourd’hui l’INETOP regroupe dans son centre de recherche des équipes de psychologie de l’orientation, de psychologie du travail, d’ergonomie, de psychodynamique du travail et de formation des adultes. À l’aube du XXe, la dégradation des formes d’accès au métier et des conditions du travail ouvrier fait de la formation professionnelle des jeunes une question centrale. Dans ce contexte, l’idée d’orientation qui commence à se développer répond au souci de donner aux jeunes les postes qui correspondent le mieux à leurs aptitudes en fonction des caractéristiques propres à chaque métier. L’idée de mesurer les caractéristiques psychologiques en vue d’organiser la répartition des individus dans le marché du travail n’est pas nouvelle mais l’orientation lui confère, dans les premières années du XXe siècle une nouvelle forme de légitimité scientifique en la considérant comme une application de la psychologie et de ses outils : les tests. Dans cette volonté de classification, le concept d’aptitude comme disposition naturelle et sa mesure sont donnés comme centraux (Ouvrier-Bonnaz, 2007). En France, au cours des années cinquante, les conseillers d’orientation ont pour tâche principale l’orientation professionnelle des élèves qui sortent de l’école primaire à 14 ans et qui souhaitent entrer en apprentissage. Le travail des conseillers consiste pour l’essentiel à vérifier que les jeunes possèdent bien le profil d’aptitudes requis pour l’exercice du métier choisi. L’examen d’orientation professionnelle a pour objectif de fournir, aux jeunes qui consultent un conseiller et à leur famille, des informations qui peuvent les aider dans leur choix d’une profession ou plus souvent d’une formation professionnelle. Cet examen d’orientation professionnelle comporte des épreuves écrites passées en classe (séance comprenant des tests de raisonnement, d’abstraction, de compréhension technique, de coup d’œil, d’attention, de mémoire, etc.), et une consultation individuelle au Centre d’orientation professionnelle (d’une durée d’environ 2 à 3 heures) qui comprend la passation d’épreuves d’habileté manuelle, de compréhension technique, de vitesse de réaction…, un entretien au cours duquel le conseiller cherche à déceler les intérêts, les goûts, les désirs professionnels du jeune et leur intensité, et aussi une visite médicale d’orientation faite par un médecin d’orientation professionnelle. Le travail du conseiller s’inscrit donc dans une démarche de diagnostic des aptitudes d’un jeune ayant pour objectif d’établir un pronostic de sa …

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