Mémoires du livre
Studies in Book Culture
Volume 14, Number 1, Spring 2023 La bande dessinée vagabonde : échanges, transferts, circulations The Roving Comic Book: Exchanges, Transfers, Circulation Guest-edited by Maël Rannou and Philippe Rioux
Table of contents (12 articles)
Articles
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Pep, ou les cousins néerlandais
Clément Lemoine and Michaël Baril
pp. 1–24
AbstractFR:
Entre 1962 et 1975, le journal néerlandais Pep présente une tentative de diffusion et d’imitation du modèle franco-belge. À sa création, Pep mise sur les deux héros Tintin et Mickey. Mais au bout d’une année d’existence, pour atteindre un nouveau lectorat adolescent, le journal adopte une identité inspirée de la tradition franco-belge d’après-guerre, en s’appuyant surtout sur Spirou et Pilote associés dans un même modèle. À partir de 1965, les rédacteurs en chef Peter Middeldorp et Hetty Hagebeuk favorisent même l’émergence d’une scène esthétique nouvelle largement tributaire du modèle francophone, avec notamment Daan Jippes, Henk Albers ou Dick Matena, qui réinvestissent à leur manière les traditions de Morris, Goscinny, Uderzo et Franquin. Le marché qui se constitue autour du journal apparaît comme prometteur pour un certain nombre d’acteurs belges, comme Morris et Delporte qui produisent directement pour Pep. Pour autant, cette dynamique ne permettra pas aux auteurs néerlandais de parvenir à des publications durables à l’international.
EN:
From 1962 to 1975, the Dutch magazine Pep represented an attempt to spread and emulate the Franco-Belgian model. In the beginning, Pep relied on the two heros, Tintin and Mickey Mouse. By the end of its first year, however, in order to reach a teenage audience, the magazine adopted an identity inspired by the post-war Franco-Belgian tradition, with a combination of Spirou and Pilote as its main reference. After 1965, editors-in-chief Peter Middeldorp and Hetty Hagebeuk actually encouraged the emergence of a new artistic scene derived from the Franco-Belgian model. Local artists such as Daan Jippes, Henk Albers or Dick Matena, each in his own way, perpetuated the legacy of Morris, Goscinny, Uderzo and Franquin. The market developing around the journal was deemed promising by a number of Belgian players such as Morris and Delporte, who began creating works directly for Pep. Even so, the dynamics were not substantial enough to enable the Dutch authors to create publications of lasting international prominence.
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Les mangas amateurs français dans les fanzines de 1995 à 1997
Delphine Ya-Chee-Chan
pp. 1–22
AbstractFR:
En France, l’engouement pour les mangas et la japanimation a véritablement commencé à la fin des années 1980 avec la diffusion à la télévision de dessins animés japonais. Les premiers fans vont, à partir de 1994, publier des fanzines dans lesquels on trouve des bandes dessinées inspirées des mangas dont l’accès était compliqué (contrairement aux dessins animés japonais diffusés à la télévision). De jeunes autrices et auteurs d’à peine 20 ans vont chercher à imiter leur modèle asiatique, mais avec un bagage culturel européen qui intervient forcément dans leurs productions, que ce soit sur le plan de la langue ou de la gestion des codes de la bande dessinée.
EN:
In France, towards the end of the 1980s, the appetite for mangas and Japanese animation began in earnest with the broadcasting of Japanese cartoons on French television. By 1994, early fans published fanzines containing comics inspired by mangas that were difficult to access (contrary to the Japanese cartoons on television). Young authors, most of them barely twenty years of age at the time, tried to emulate their Asian role models, but inevitably their own European cultural background intervened, may it be in the language or in the way they dealt with comic-book genre codes.
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À l’Ouest, rien de nouveau ? Les éditions françaises de la collection « Marvel Graphic Novel » et la circulation contrastée de l’étiquette graphic novel
Jean-Matthieu Méon
pp. 1–42
AbstractFR:
Les dynamiques des transferts culturels peuvent être saisies à travers les déplacements des oeuvres, des auteurs, des références; elles peuvent aussi l’être à partir de la circulation des catégories servant à caractériser ces oeuvres. L’étiquette du graphic novel est une bonne illustration de ces processus. Née aux États-Unis dans les années 1960, cette expression y a évolué entre différents espaces de commentaire et de production avant de se déplacer entre espaces nationaux. L’analyse de la collection « Marvel Graphic Novel » (1982-1993) et de ses importations françaises par différents éditeurs (Lug/Semic, Comics USA, Arédit/Artima, Panini) illustre la réception contrastée de cette étiquette en France, entre resémantisation et abandon. Les conditions de cette réception relèvent à la fois d’effets de contexte et de jeux d’acteurs : le sens d’un même format varie d’un pays à un autre, l’intérêt des acteurs à se saisir de l’étiquette dépend des stratégies éditoriales qu’ils déploient.
EN:
The dynamics of cultural transfer can be perceived in the movement of works, authors or references, but also in the circulation of categories used to qualify works. The graphic novel label offers a good illustration of these processes. Emerging in the United States in the 1960s, the label evolved among various critique and production spaces before moving from one country to another. An analysis of the “Marvel Graphic Novel” collection (1982-1993) and its various translations by French publishers (Lug/Semic, Comics USA, Arédit/Artima, Panini) reveals that the reception of this label in France was diverse, ranging from re-semantization to abandonment. This diversity results from both contextual effects and from strategies of the people involved: the meaning of an identical format varies from country to country, and the motivation of those wanting to use the label depends on the editorial strategies they adopt.
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Vegeta l’Algérien : réinterprétations et appropriation du manga Dragon Ball d’Akira Toriyama par les communautés musulmanes en France et en Afrique du Nord
Samuel Lévêque
pp. 1–21
AbstractFR:
Dragon Ball est une des séries de bande dessinée les plus vendues de tous les temps et a été l’objet de nombreuses oeuvres hommages de la part de ses fans. Le manga d’Akira Toriyama a notamment donné lieu à des fanfictions transposant ses personnages à l’époque moderne et les dépeignant comme des caricatures de personnages musulmans ou issus de l’immigration nord-africaine. Parties d’une simple plaisanterie puérile, ces fanfictions ont suscité depuis dix ans des débats sur les parallèles entre les stéréotypes présents dans les mangas d’action à destination des jeunes garçons et ceux associés aux hommes issus de communautés à majorité musulmane. Cet article revient sur l’origine de la popularité réputée universelle de Dragon Ball et sur le cas spécifique de son appropriation par les communautés musulmanes en France et en Afrique francophone.
EN:
Dragon Ball, one of the best-selling comics of all time, has recieved alot of fan content all along the years. Some readers of Akira Toriyama’s manga series have created fanfictions depicting the main characters in our modern world, transposed as sterotypical muslim chraracters. It began as a simple prank, then initiated a wide debate among the fans discussing the possible parallels between the stereotypes in popular manga series for young boys and the stereotypes associated with men with a cultural muslim background in France and French North Africa. This article is a retrospective about the reasons why Dragon Ball has the reputation to be a manga with almost universal popularity, and focusing on the particular case of its appropriation by the muslim community in France and French speaking Africa.
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Des centres et des marges. La trajectoire de Julie Doucet
Izabeau Legendre and Julien Lefort-Favreau
pp. 1–59
AbstractFR:
Cet article propose d’analyser la trajectoire de Julie Doucet en tant que révélatrice des dynamiques et enjeux relatifs aux sphères de production culturelle dans lesquelles elle s’inscrit. Depuis ses débuts dans la bande dessinée « underground » montréalaise dans la deuxième moitié des années 1980 jusqu’à son prétendu « adieu » au média à la fin de la décennie suivante, Julie Doucet a parcouru quelques-uns des lieux les plus importants de la bande dessinée nord-américaine et européenne. De Montréal à Berlin, en passant par New York, Portland (Oregon) et Paris, suivre cette trajectoire équivaut à cartographier le renouveau de la bande dessinée au cours de la décennie 1990, des deux côtés de l’Atlantique. L’oeuvre de Doucet a été largement étudiée et est considérée comme emblématique de la bande dessinée des années 1990, car elle épouse quelques-unes des caractéristiques principales de l’époque : dimension autobiographique; travail sur le corps, la sexualité et l’abject; et un penchant féministe. À ces thématiques, nous proposons d’ajouter celle de l’éclatement du média qu’elle opère par des formes et techniques nouvelles. À cet effet, une attention particulière sera d’ailleurs accordée à la place qu’occupe la bande dessinée de Doucet dans un ensemble plus grand de pratiques, notamment la relation qu’elle entretient avec les marges de la production culturelle. La production de zines de Doucet - tant avant sa professionnalisation au tournant des années 1980 et 1990 qu’après son retrait au tournant 1990-2000 - en est le signe le plus évident. Il s’agit d’ailleurs d’une question qui travaillera notre article de manière souterraine : comment se négocie le rapport de la marge au centre pour une artiste comme Doucet, particulièrement au regard de l’intégration tardive de la bande dessinée au champ culturel? De ce point de vue, un opérateur central de travail de Doucet se révèle : le jeu avec le positionnement d’outsider. Cet opérateur est perceptible à la fois à la lecture interne des oeuvres (le choix des thèmes, de la langue, et l’exploration formelle au coeur de sa démarche), et dans les choix éditoriaux et stratégiques de l’autrice (le rapport à la bande dessinée sur la longue durée et le retour au zine, la mobilité, les commentaires de Doucet sur son parcours et son oeuvre). Cet article présente finalement, et pour la première fois, une bibliographie exhaustive des publications de Doucet, incluant toute sa production autoéditée, de la deuxième moitié des années 1980 à aujourd’hui.
EN:
This article studies Julie Doucet’s trajectory as a revelation of the dynamics and issues related to the spheres of cultural production in which the artist is embedded. From her beginnings in the Montreal “underground” comic scene in the second half of the 1980s to her so-called “farewell” to the medium at the end of the following decade, Julie Doucet has journeyed through some of the most important venues in the world of North American and European comics, from Montreal to Berlin, via New York, Portland (Oregon) and Paris. Doucet’s work has been widely studied and is considered to embrace some of the characteristics of 1990s comics: body representation, sexuality and the abject; and a feminist inclination. To these themes, we propose adding the fragmentation of the medium in which she operates brought about by new forms and techniques. Particular attention will be given to the place that Doucet’s comics occupy in a larger set of practices, notably the close relationship that she maintains with the margins of cultural production. The relationship is most obvious in the production of Doucet’s zines - both before her professionalization at the turn of the 1980s and 1990s and since her withdrawal at the turn of 1990-2000. Our article addresses, in a somewhat subversive manner, the following question: how is the relationship between the margin and the center negotiated for an artist like Doucet, particularly in light of the late integration of comics into the cultural field? Examining Doucet’s work from such an angle reveals a central operator: her play with the outsider position. This operator is perceptible both in the internal reading of the works (the choice of themes and of language, and the formal exploration at the heart of her approach), and in Doucet’s editorial and strategic choices (the relationship to comics over the long term and the return to the zine, her mobility, her personal comments on her career and her work). Finally, our article presents an exhaustive ground-breaking bibliography of Doucet’s publications, including all of her self-published works, from the second half of the 1980s to the present.
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Lorsque les mangas sont perçus comme des produits dérivés : les adaptations de séries animées (France, Italie et Espagne)
Bounthavy Suvilay
pp. 1–22
AbstractFR:
Les pratiques professionnelles liées à la sphère d’influence de la télévision et les adaptations transmédiatiques jouent historiquement un rôle majeur dans les transferts culturels du manga en France, en Italie et en Espagne à la fin des années 1970. Déviées de leur circuit de communication initial pour être reterritorialisées dans un contexte non prévu, les oeuvres japonaises subissent de multiples transformations afin de correspondre aux conventions locales. Les entreprises locales créent des adaptations de dessins animés dérivés de mangas avant d’importer des oeuvres japonaises en les modifiant selon les besoins de leurs réseaux de diffusion. Si la fiction peut circuler de manière globale en s’incarnant dans différents médias, le format reste un élément fortement contextualisé plus difficile à déterritorialiser : il matérialise en effet une histoire des pratiques de création et de réception distincte selon les pays.
EN:
Professional practices related to the sphere of influence of television and transmedia adaptations played a significant historical role in the cultural transfer of manga in France, Italy and Spain in the late 1970s. Diverted from their initial communication circuit in order to be reterritorialized in an unintended context, Japanese comic books underwent multiple transformations in order to correspond to local conventions. Local companies created cartoon adaptations of manga before importing Japanese works by modifying them according to the needs of their distribution networks. If fiction can circulate globally by being embodied in different media, the format remains a strongly contextualized element that is more difficult to deterritorialize: it materializes a history of creation and reception practices, distinct for each country.
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De Jessie à Muriel, super-héroïnes tchèques face à la normalisation. Sur l’oeuvre transmédiatique du dessinateur tchèque Kája Saudek
Garance Fromont
pp. 1–34
AbstractFR:
La période de la guerre froide est souvent pensée comme celle d’une non-porosité entre l’Ouest et l’Est. Cependant, des objets culturels découverts avant l’instauration de gouvernements socialistes continuent de circuler. À partir de l’oeuvre de l’auteur tchèque Kája Saudek, nous nous proposons d’étudier comment les comic strips américains ont été adaptés, retravaillés et transformés en Tchécoslovaquie communiste dans les années 1960. Saudek a collaboré à un classique du cinéma populaire tchèque, Kdo chce zabít Jessii? (Qui veut tuer Jessie?), réalisé par Václav Vorlíček. À la même époque, il se lance dans un projet plus personnel, Muriel a andělé (Muriel et les Anges), scénarisé par l’écrivain Miloš Macourek et inspiré de la bande dessinée française Barbarella. Cet article revient sur l’oeuvre atypique d’un monument de la bande dessinée tchèque, au carrefour de diverses influences dans un monde coupé en deux.
EN:
The Cold War period is often thought of as a period of non-porosity between West and East. However, cultural objects discovered before the establishment of socialist governments continue to circulate. Based on the work of Czech author Kája Saudek, we propose to study how American comic strips were adapted, reworked and transformed in communist Czechoslovakia in the 1960s. Saudek collaborated on a classic of Czech popular cinema, Kdo chce zabít Jessii? (Who Wants to Kill Jessie?), directed by Václav Vorlíček. At the same time, he worked on a more personal project, the graphic novel Muriel a andělé (Muriel and the Angels) written by Miloš Macourek and inspired by the French comic strip Barbarella. This article looks back at the atypical work of a monument of Czech comics, at the crossroads of various influences in a world split in two blocs.
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Les éditeurs alternatifs et la traduction : une république mondiale de la bande dessinée alternative ?
Kévin Le Bruchec
pp. 1–23
AbstractFR:
Cet article entend examiner l’importance de la traduction pour l’édition de bande dessinée. Plus précisément il s’agit de montrer comment une partie des acteurs de cet espace – les éditeurs regroupés dans le récent Syndicat des éditeurs alternatifs (SEA) – se positionnent par rapport à cette question, dans un secteur où la traduction d’oeuvres étrangères représente plus de la moitié des nouveautés éditées dans l’année. Pour rendre compte de ces éléments, on s’appuiera sur l’analyse des catalogues du SEA afin de rendre compte des modes d’action de ces structures éditoriales. Dans un second temps, nous porterons notre attention sur les langues traduites par ces éditeurs, afin de définir la potentielle spécificité de ces derniers au regard du reste du secteur, où deux langues, l’anglais et le japonais, dominent.
EN:
This article examines the importance of translation in the field of comic book publishing. More precisely, it shows how certain players in this field—the publishers grouped together in the recently formed Alternative Publishers’ Union (APU)—position themselves in relation to this question, in a sector where translations of foreign works represent more than half of new titles published each year. To understand such elements, we focus first on an analysis of the APU catalogs in order to describe the methods of these publishing structures. We then focus on the languages translated by these publishers in order to define their potential specificity in relation to the rest of the sector where two languages, English and Japanese, dominate.
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Bringing Up Mischievous Strips: The Katzenjammer Kids’ Domestication in Spanish and Italian Children’s Comics Magazines
Eva Van de Wiele and Ivan Pintor Iranzo
pp. 1–32
AbstractEN:
This article examines how the comic series The Katzenjammer Kids, created by Rudolph Dirks in 1897 and whose main characters are two wicked children, has been usually altered, modified, and reframed due to its publication in Spain and Italy. By using the concept of domestication and utilizing tools of the history and formal analysis of comics and the contextual studies used in iconography, we try to study the influence and the afterlife impact of the forms, narratives, and gags of The Katzenjammer Kids and, at the same time, to provide a theoretical-methodological framework for understanding the cultural scope of these phenomena that characterize a field of study such as comics reception, which has been relatively underdeveloped.
FR:
Cet article examine comment la série de bande dessinée The Katzenjammer Kids, créée par Rudolph Dirks en 1897 et dont les protagonistes sont deux enfants espiègles, a été très souvent altérée, modifiée et adaptée en raison de sa publication en Espagne et en Italie. À partir du concept de domestication et en utilisant les outils de l’histoire et de l’analyse formelle de la bande dessinée ainsi que les études contextuelles utilisées en iconographie, nous tentons d’étudier l’influence et de la survivance des formes, des récits et des gags de The Katzenjammer Kids. Nous cherchons aussi à fournir un cadre théorique et méthodologique pour comprendre la portée culturelle de ces phénomènes qui caractérisent un champ d’étude tel que la réception de bandes dessinées, qui a été relativement sous-développé.
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Vers Les Nombrils universels : transformations et marqueurs d’une série québécoise en Europe francophone
Maël Rannou and Noémie Sirat
pp. 1–24
AbstractFR:
Cet article se penche sur l’origine et la réception des Nombrils, série créée par les Québécois Marc Delaf et Maryse Dubuc dans le magazine pour adolescents Safarir en 2004, avant de s’exporter l’année suivante dans Spirou, magazine belge largement diffusé en France. En vue de cette exportation, des choix conscients sont effectués pour rejoindre un public à la fois nouveau et plus jeune : la série perd ses éléments québécois (notamment le vocabulaire) et adoucit sa virulence. Au moyen d’une analyse détaillée des huit albums parus, mais aussi des entretiens avec les dessinateurs adjoints, et d’un examen des échanges des auteurs avec leurs fans, notamment via la page Facebook qu’ils administrent, cet article vise à mettre en lumière la stratégie d’effacement de la québécité pour l’adaptation de la série à un public européen francophone. Au fil de la parution, alors que Les Nombrils obtiennent un grand succès public, les signes québécois réapparaissent sporadiquement dans les décors ou les références culturelles, mais demeurent discrets sur la question de la langue. Désormais plus visiblement américaine, la série n’en est pas pour autant perçue comme québécoise.
EN:
This article examines the origin and reception of Les Nombrils, a series created by Québécois authors Marc Delaf and Maryse Dubuc in the teen magazine Safarir in 2004, before being exported the following year to Spirou, a Belgian magazine widely distributed in France. During the exportation process, conscious choices were made to attract a new and younger audience: the series’ Québécois elements (notably vocabulary) disappeared and its nastiness was softened. Through a detailed analysis of the eight albums released, interviews with drawing assistants and a review of the authors’ exchanges with their fans, notably via the Facebook page they administer, this article aims to highlight strategies used to erase the series’ Québécois elements in order to adapt it for a French‑speaking European audience. Over the course of the publication, while Les Nombrils achieved remarkable public success, Québécois characteristics reappeared sporadically in sets or in cultural references, but remained discreet around the question of language. Now more visibly American, the series’ nature is no longer perceived to be Québécois as such.
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Dante global : adaptations, transpositions, transnationalisations d’un imaginaire « pop »
Alessandro Benucci
pp. 1–66
AbstractFR:
Cet article s’intéresse aux nombreuses adaptations en bandes dessinées de La divine comédie de Dante Alighieri parues en Italie et dans plusieurs pays (France, Pays-Bas, Allemagne, États-Unis, Japon) aux xxe et xxie siècles. Ce phénomène majeur d’un univers médiatique en pleine expansion – le « Dante pop » – est interprété selon deux approches théoriques complémentaires. D’une part, les critères régissant le détournement parodique selon la pensée structuraliste (Genette, Kristeva, Hutcheon) permettent de saisir les enjeux culturels soulevés par les reprises bédéiques italiennes ; d’autre part, les réflexions menées autour des notions de transculturalité (De Toro) et de transmédialité (Rajewsky) mettent en valeur quelques tendances communes aux bandes dessinées inspirées de L’enfer de Dante et diffusées sur le marché éditorial français, telles que les processus d’actualisation des personnages, les trames narratives promues par l’industrie culturelle, l’évolution transnationale de la signification attribuée à l’adjectif « dantesque ».
EN:
This paper focuses on the numerous comic book adaptations of Dante Alighieri’s Divine Comedy, released in Italy and in several countries (France, the Netherlands, Germany, the United States, Japan) in the 20th and 21st centuries. This major phenomenon of a rapidly expanding media universe - the Dante pop - is interpreted according to two complementary theoretical approaches. On the one hand, the criteria governing parodic diversion according to structuralist theory (Genette, Kristeva, Hutcheon) make it possible to grasp the cultural issues involved in the Italian comic book adaptations; on the other hand, the reflections carried out around the notions of transculturality (De Toro) and transmediality (Rajewsky) highlight some common tendencies in the comics inspired by Dante’s Inferno and published in the French editorial market, such as the processes of character actualisation, the narrative frameworks driven by the cultural industry, and the transnational evolution the adjective Dantesque and its meaning.