![Cover forthe thematic issueDe la French Theory à la déconstruction du monde](/en/journals/cs/2022-n4-cs07915/coverpage.jpg 135w)
Number 5, 2023 Le néo-sujet et son contrôle Guest-edited by David Auclair and Olivier Bélanger-Duchesneau
Table of contents (18 articles)
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In Memoriam. Nathalie Freitag (1964-2023)
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Introduction
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L’état-limite, maladie d’époque
Jean-Pierre Lebrun
pp. 19–45
AbstractFR:
Si la névrose résulte, comme l’avance Freud, de l’excès de renoncement qu’exigeait la société d’hier au nom de son idéal culturel, on est en droit de se demander si les néo-sujets d’aujourd’hui ne seraient pas le symptôme de la liberté à laquelle nous pouvons désormais prétendre dans le cadre d’une société fondée sur la prévalence de l’individu. C’est à lire les effets du bouleversement anthropologique atteint depuis un demi-siècle que nous nous sommes attelés. Ce dernier a en effet atteint autant les individualités que le fonctionnement du collectif entraînant avec lui des confusions qui s’avèrent délétères pour la construction de la subjectivité. Confusion entre fonction patriarcale et fonction paternelle comme entre sujet citoyen et consommateur hypernarcissique. Nous nous confrontons dès lors, maintenant que nous en sommes à la troisième génération, à un véritable « cancer sociétal » qui en aurait terminé avec l’autorité, l’altérité et l’antériorité, trois règles non écrites qui pourtant caractérisent toujours la condition humaine. Ce n’est alors qu’en retournant à ce qu’exige notre statut d’être parlant – de parlêtre aimait à dire Lacan – que nous pourrons réinventer, au-delà de l’idéologie, un équilibre entre les exigences individuelles et les contraintes civilisationnelles.
EN:
If neurosis, as Freud posited, stemmed from the excessive renunciation demanded by yesterday’s society in the pursuit of its cultural ideal, it becomes pertinent to inquire whether today’s “neo-subjects” represent symptoms of the freedoms we now assert within a society founded on the primacy of the individual. Our endeavor lies in discerning the ramifications of the anthropological upheaval witnessed over the past half-century, which has impacted both individual identities and collective dynamics, fostering confusions detrimental to the cultivation of subjectivity. These confusions blur distinctions between patriarchal and paternal functions, as well as between citizen subjects and hypernarcissistic consumers. Consequently, as we now confront what could be described as a “societal malignancy” - one that seemingly disregards authority, alterity, and anteriority, three enduring principles that define the human condition - we are compelled to revisit the imperatives inherent to our status as speaking beings, or as Lacan aptly termed, “parlêtre.” It is through this reexamination that we may envisage, transcending ideological constraints, a reconciliation between individual exigencies and the demands of civilization.
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« La casse du sujet » dans l’oeuvre de Pierre Legendre : une exploration de la désubjectivation à l’époque du nihilisme technique et managérial
Baptiste Rappin
pp. 47–65
AbstractFR:
Pierre Legendre (1930-2023) est un érudit français dont la spécificité est d’être à la fois un historien du droit, un psychanalyste et un anthropologue. Ce cocktail détonant implique aussitôt que la question du sujet soit au coeur de son oeuvre : c’est ce fil directeur que nous suivons afin de saisir sur le vif le processus inédit de désubjectivation qui caractérise la société industrielle.
EN:
Pierre Legendre (1930-2023) is a French scholar who was at the same time a historian of law, a psychoanalyst, and an anthropologist. This explosive mixture involves that the question of subject is at the heart of his work: we follow this guiding principle in order to take the process of desubjectivation caused by the industrial society on the spot.
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Du sujet politique au néo-sujet narcissique : la crise postmoderne de la citoyenneté
Olivier Bélanger-Duchesneau
pp. 67–101
AbstractFR:
Cet article veut rendre compte de la mutation contemporaine de l’individu, poussé dans ses retranchements narcissiques, à l’aune d’une théorie de la crise du sujet politique frappant les sociétés postmodernes. Suivant une perspective qui, à l’appui d’un certain nombre d’auteurs, tente d’éclairer les transformations sociales qui marquent l’avènement d’un nouveau type de subjectivité, la thèse défendue pourrait se résumer en cette formule simple : nous passons d’une société moderne, centrée autour de l’idéal démocratique du citoyen autonome, à celle, postpolitique, d’individus repliés dans leurs particularismes narcissiques, au profit d’une régulation essentiellement capitalistique du social. L’article est construit en trois parties. La première entend, avec l’aide de la psychanalyse et de la sociologie de Michel Freitag, dégager les soubassements du sujet social, fournissant une anthropologie dont la base loge dans la reconnaissance du tiers symbolique. La seconde partie s’attache à tracer les contours d’une typologie du sujet politique moderne, dont la spécificité résiderait, suivant la pensée durkheimienne, dans l’enracinement du citoyen dans une nation démocratique, à rebours de l’universalisme abstrait auquel on tente de réduire la modernité politique. C’est cette lecture particulière de la subjectivité moderne, qu’on pourrait qualifier de « républicaniste », qui nous amène à la poser en contraste, dans la partie finale, avec la figure du néo-sujet (J.-P. Lebrun), soit l’individu narcissique incapable de se sentir l’acteur d’une communauté politique, en tant que produit de la logique atomisante de la postmodernité technocapitaliste, tâchant de mettre à mal les fondements institutionnels de la subjectivation.
EN:
This article aims to examine the contemporary transformation of the individual, pushed to the limits of narcissism, in light of a theory of the crisis of the political subject affecting postmodern societies. Following a perspective supported by various authors, it seeks to shed light on the social changes that mark the emergence of a new type of subjectivity. The thesis can be summarized in this simple statement: we are transitioning from a modern society centered around the democratic ideal of the autonomous citizen to a post-political one, where individuals retreat into their narcissistic particularities, giving way to a predominantly capitalist regulation of the social sphere. The article is divided in three parts. The first part aims, with the assistance of psychoanalysis and Michel Freitag’s sociology, to uncover the foundations of the social subject, providing an anthropology rooted in the recognition of the symbolic third party. The second part focuses on outlining a typology of the modern political subject. According to Durkheimian thought, the specificity of this subject lies in the citizen’s connection to a democratic nation, in contrast to the abstract universalism that attempts to reduce political modernity. This particular interpretation of modern subjectivity, which could be described as “republican,” leads us to contrast it, in the final part, with the figure described by the psychoanalyst Jean-Pierre Lebrun as the “neo-subject.” This neo-subject is the narcissistic individual incapable of identifying as an actor in a political community, a product of the atomizing logic of technocapitalist postmodernity that undermines the institutional foundations of subjectification.
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Les dynamiques de l’infantilisation contre l’autorité scolaire
Dominique Ottavi
pp. 103–119
AbstractFR:
La crise de l’autorité scolaire a été décrite de nombreuses fois, mais pour en comprendre l’origine et la nature, il faut s’interroger plus profondément sur le rôle de l’école dans notre culture et son histoire. L’idée de progrès comme l’a montré Umberto Eco contient déjà la mise en cause de l’autorité. La modernité éducative a, ensuite, contribué à remettre en cause la légitimité de l’école. Dans la mesure où, à la scolarisation de la société, s’est ajouté l’apprentissage tout au long de la vie, l’individu étant considéré comme responsable de lui-même, l’école a perdu son rôle de formation. Aujourd’hui, les technologies de la communication amplifient un processus d’infantilisation des sujets qui trouve sa source bien en amont. L’autonomie n’est qu’apparente dans cet environnement qui ignore les besoins des enfants, en donnant l’illusion de la liberté aux adultes.
EN:
The crisis of school authority has been widely described, but to understand its origin and nature, one must delve deeper into the role of school in our culture and its history. The idea of progress, as Umberto Eco demonstrated, inherently questions authority. Educational modernity has further challenged the legitimacy of schools. With society becoming more educated and lifelong learning becoming preva- lent, individuals are considered responsible for themselves, diminishing the school’s role in shaping them. Today, communication technologies amplify a process of infantilization that has deep roots. Autonomy is only apparent in this environment, which ignores children’s needs, giving adults an illusion of freedom.
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Discours progressiste et crises des institutions éducatives : l’Horizon 2030 de l’UNESCO contre le sujet
David Auclair
pp. 121–144
AbstractFR:
Les progrès technoscientifiques et industriels du siècle passé continuent de peser lourdement sur le développement des subjectivités ainsi que sur les mécanismes de socialisation. En psychanalyse, certains auteurs et certaines autrices parlent d’un grand dérangement. Nous assisterions à la naissance d’un néo-sujet narcissique infantile incapable de transmettre quoi que ce soit, car il n’a pas appris de ses parents de quelle façon il doit s’approprier les outils du langage et de la culture. Vivant dans le fantasme d’un monde « sans limite », ce néo-sujet récuse même une quelconque dette symbolique envers le genre humain. À l’école, ces formes perverses marquent les rapports intersubjectifs au même titre que les conditions d’intervention. Impossible de contraindre, de limiter et d’encadrer, lorsque le parent ne fait plus confiance et ne reconnaît plus la légitimité de l’autorité en milieu scolaire. Jean-Pierre Lebrun parle de perversion ordinaire. En référence à la société thérapeutique qui se présente comme neutre et bienveillante, nous avons choisi d’employer le concept de « mèreversion ». Parce qu’un paradoxe ne vient jamais seul, nous avons aussi choisi d’analyser les trois rapports de l’UNESCO regroupés sous un Horizon 2030, car ils témoignent d’un changement radical dans les manières de concevoir et de prescrire une éducation dite progressiste autour des TIC et de l’Intelligence artificielle. Nous pensons que les transformations socioculturelles et structurelles récentes, politiquement de gauche comme de droite, ouvrent la porte à diverses formes de contrôle et de violences dans les manières de « faire école ».
EN:
The technoscientific and industrial progress of the past century continues to weigh heavily on the development of subjectivities as well as on the mechanisms of socialization. In psychoanalysis, some authors speak of a great disturbance. We would witness the birth of an infantile narcissistic neo-subject incapable of transmitting anything, because he too has not learned from his parents how to appropriate the tools of language and culture. Living in the fantasy of a “limitless” world, this neo-subject even rejects any symbolic debt to mankind. At school, these perverse forms mark intersubjective relationships in the same way as the conditions of intervention. It is impossible to constrain, limit and supervise when the parent no longer trusts and no longer recognizes the legitimacy of authority in the school environment. Jean-Pierre Lebrun speaks of ordinary perversion. In reference to the therapeutic society which presents itself as neutral and benevolent, we have chosen to use the concept of “mèreversion” (“motherversion”). Because a paradox never comes alone, we have also chosen to analyze three UNESCO reports grouped under Horizon 2030, because they bear witness to a radical change in the ways of conceiving and prescribing a so-called progressive education around ICT and Artificial Intelligence. We believe that recent socio-cultural and structural transformations, politically on the left and on the right, open the door to various forms of control and violence in the ways of “schooling”.
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Auto-autorité et gestion psychosociologique des métiers relationnels
Michel Parazelli and Isabelle Ruelland
pp. 145–176
AbstractFR:
Loin d’avoir disparu des sociétés modernes, l’autorité s’exprimerait par des voies et des figures différentes, particulièrement celles générées par le mode néolibéral de production économique tendant à marchandiser les rapports sociaux et humains. En examinant certains enjeux organisationnels associés à la gestion psychosociologique des métiers relationnels au Québec, nous analysons les conditions d’émergence d’une figure d’autorité constituant l’un des moteurs de la subjectivation néolibérale des individus et que les tenants de la sociopsychanalyse appellent l’auto-autorité. Induite par un courant dominant de la nouvelle gestion publique, cette forme d’autorité perverse trouve sa légitimité de façon paradoxale dans l’exacerbation de l’hyperindividualisme via une injonction incitative s’adressant aux professionnels et professionnelles des métiers du social. Il s’agit de reconnaître comme devant provenir de soi le com- mandement de l’autre. Cette injonction ne va pas sans favoriser une précarité subjective des travailleurs qui se sentent personnellement responsables de ne pas être en mesure de répondre aux attentes impossibles des gestionnaires institutionnels. Constatée dans plusieurs secteurs des métiers relationnels (travail social, éducation, soins de santé, etc.), l’ampleur de cette précarité subjective témoignerait de l’élargissement des sphères d’instrumentalisation de l’acte de travail des salariés qui s’apparenterait à une forme de néo-taylorisme. Rétablir les principes et les pratiques démocratiques au coeur des métiers relationnels demeure nécessaire et possible par l’entremise de collectifs de travail et de leur soutien en contexte organisationnel.
EN:
Far from having disappeared from modern societies, authority is expressed through different ways and forms, particularly those generated by the neoliberal mode of economic production tending to commodify social and human relations. By examining certain organizational issues associated with the psychosociological management of relational professions in Quebec, we analyze the conditions for the emergence of an authority figure constituting one of the lever of the neoliberal subjectivation of individuals and which the proponents of sociopsychoanalysis call the self-authority. Induced by a dominant current of new public management, this form of perverse authority finds its legitimacy in a paradoxical way by the exacerbation of hyperindividualism via an incentive injunction addressed to professionals in the social professions. It is a question of recognizing as having to come from oneself the command of the other. This injunction is not without favoring a subjective precariousness of workers who feel personally responsible for not being able to meet the impossible expectations of institutional managers. Observed in several sectors of relational professions (social work, education, health care, etc.), the extent of this subjective precariousness would testify to the widening of the spheres of instrumentalization of the act of work of employees which would be similar to a form of neo-taylorism. Restoring democratic principles and practices at the heart of relational professions remains necessary and possible through work groups and their support in an organizational context.
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Les sémantiques historiques du suicide dans la tradition occidentale
Daniel Dagenais
pp. 177–205
AbstractFR:
Cet article revient sur les significations du suicide qui se sont succédé dans l’histoire à partir de l’hypothèse que l’émergence du suicide des jeunes en Occident inaugurerait en même temps une nouvelle signification du suicide. Celle-ci se situerait en rupture avec la gravité que la sociologie lui avait reconnue en l’appréhendant comme problème social. Dans le but d’étayer cette hypothèse, l’article revient sur les sémantiques historiques propres à la tradition occidentale depuis la plus haute antiquité. La notion de sémantique historique vise à intégrer sous un même concept les significations pratiques vécues comme suicide, le sens qu’y attribuent les sociétés historiques et les discours savants qui les saisissent.
EN:
This article reviews the successive meanings of suicide in history, based on the hypothesis that the emergence of youth suicide in the Western world would at the same time usher in a new meaning of suicide. The latter would break with the gravity that sociology had ascribed to suicide by understanding it as a social problem. In order to support this hypothesis, the article returns to the historical semantics specific to the Western tradition since ancient times. The notion of historical semantics seeks to integrate under the same concept the practical meanings experienced through suicide, the meaning attributed to it by historical societies and the types of scholarly discourses which grasp them.
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La construction nazie d’un safe space racial : le prototype d’une communauté de déni postmoderne
Jean-François Filion
pp. 207–228
AbstractFR:
Le présent article part du rapprochement qu’établit le psychanalyste Jean-Pierre Lebrun à plusieurs reprises dans ses écrits entre des pratiques inusitées, qui sont survenues sous le nazisme, et la transformation profonde de la subjectivité occidentale que constitue la « mutation anthropologique » exposée par le concept de néo-sujet. Il s’agira ici d’approfondir divers traits spécifiques aux néo-sujets à l’aide de travaux d’historiens du nazisme, dans la mesure où ces traits font écho à la réalité contemporaine. Bien que notre époque n’en soit pas dépourvue, il s’agira moins de s’attarder à la violence meurtrière, mais plutôt aux phénomènes banals, typiques de l’économie psychique du néo-sujet : la démission à l’endroit de ses devoirs, l’absence d’empathie, le déni de réalité, etc. La première section de l’article esquissera l’imaginaire de la communauté raciale unie par le sang auquel se réfère la récusation nazie des médiations instituées de l’État et du droit ; la deuxième section visera à montrer comment la violence est euphémisée par le discours de la science ; enfin, la troisième section montrera comment la guerre permet l’amalgame d’une nostalgie primitiviste avec une technophilie typique du capitalisme avancé.
EN:
The present article builds upon the correlation established by the psychoanalyst Jean-Pierre Lebrun, in several of his writings, between unusual practices that emerged during Nazism and the profound transformation of Western subjectivity encapsulated by the concept of the “neo-subject” as discussed by Lebrun. This study aims to delve into various specific traits of the neo-subject, drawing upon the works of historians specializing in Nazism, as these traits resonate with contemporary reality. While our era is not devoid of such traits, the focus here is less on murderous violence and more on mundane phenomena inherent in the psychic economy of the neo-subject: resignation towards duties, lack of empathy, denial of reality, etc. The first section of the article will outline the imagery of the racially unified community bound by blood, based on the Nazi rejection of established state and legal mediations references. The second section aims to demonstrate how violence is euphemized by the discourse of science. Finally, the third section will illustrate how war facilitates the amalgamation of a primitivist nostalgia with a technophilia typical of advanced capitalism.
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Passion du signifiant ou empire des signes ?
Anne Élaine Cliche
pp. 229–248
AbstractFR:
Cet article vise à soulever la question de ce qu’est devenu l’enseignement de la littérature (avec la psychanalyse) dans un monde dominé par la toute-puissance narcissique allant jusqu’au déni du réel (sexué). Cet « empire des signes » — comme le nomme Jean-Pierre Winter — qui tend à s’imposer aujourd’hui, et dans lequel les êtres parlants s’identifient à leur parole plutôt que de reconnaître qu’ils sont l’effet d’une parole dont ils ne sont pas les maîtres, constitue une régression qui se remarque par une réfutation du symbolique et une relation duelle, sans Autre. L’identité est en effet devenue aujourd’hui une affaire de signes. C’est dans ce contexte, dont je propose de décrire brièvement les enjeux psychiques « nouveaux » où se loge, selon Jean-Pierre Lebrun, un individu (légitimé par le droit) qui se prétend d’emblée autonome et libre de récuser les lois fondamentales de la condition humaine ; c’est aussi dans ce climat social que l’enseignement universitaire se poursuit et que nous devons continuer de transmettre les grands textes de la littérature qui ont charrié, depuis l’avènement de la modernité jusqu’à l’ère dite postmoderne, un sujet en acte. Ce sujet, non pas repérable par son identité et sa consistance imaginaire, mais disséminé dans le matériau littéral qui en dispose, je propose de montrer comment il se révèle par le jeu des signifiants, dans le petit livre de J. M. G. Le Clézio, L’Africain. L’analyse conduit à éclairer la notion de dette symbolique.
EN:
This article aims to raise the question of what has become of the teaching of literature (in conjunction with psychoanalysis) in a world dominated by narcissistic omnipotence, extending to the denial of reality (including its sexual dimension). This “empire of signs” - as named by Jean-Pierre Winter - which tends to prevail today, wherein speaking beings identify with their speech rather than recognizing themselves as the product of a discourse they do not master, constitutes a regression evident in the repudiation of the symbolic and a dual relationship without the Other. Identity has indeed become today a matter of signs. It is within this context, wherein Jean-Pierre Lebrun identifies new psychological stakes, characterized by individuals (legitimized by law) who claim immediate autonomy and freedom to reject the fundamental laws of the human condition, that university education continues. Here, we must persist in transmitting the great literary texts that have carried an active subject since the advent of modernity through the so-called postmodern era. This subject, not identifiable by its identity and imaginary consistency but dispersed within the literary material at hand, is proposed to be demonstrated through the play of signifiers, as exemplified in J. M. G. Le Clézio’s “L’Africain”. The analysis serves to elucidate the notion of symbolic debt.
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Le Maître et l’Esclave : le moment de conclure
Biais de langage
Hors-Thème
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La controverse Freitag-Gauchet ou de la catégorie du temps dans l’hétéronomie : une mise en perspective par la sociologie dialectique
Clément Morier
pp. 289–312
AbstractFR:
Ce travail discute deux systèmes conceptuels de la théorie sociale contemporaine, autour d’un point clé de leur modèle respectif : le paramètre « temps » dans les sociétés d’avant l’État. Nous interrogeons le rôle de la temporalité dans le concept d’hétéronomie, formalisé par Marcel Gauchet, à partir de la sociologie dialectique proposée par Michel Freitag, et ce, à l’aide des résultats scientifiques produits par l’étude de Michel Lalonde. Cette étude porte sur les formes d’objectivation symbolique du temps et nous donne l’occasion de poser un nouveau regard sur un point de dispute entre Freitag et Gauchet. Nous confrontons ainsi deux systèmes distincts de représentation du temps, qui alimentent une controverse : d’un côté chez Freitag, une compréhension de la temporalité primitive qui remet en question le critère de mise à distance du fondement normatif, alors que de l’autre côté, chez Gauchet, cette mise à distance reste une condition sine qua non pour conceptualiser l’hétéronomie. Nous montrons que le dispositif théorique ainsi formulé contient une notion de temporalité qui fait problème, et nous exposons la nécessité d’un travail dialectique intrinsèque à l’hétéronomie, autour de la condition mythique.
EN:
This work invites discussion between two conceptual systems of contemporary social theory, around a key point of their respective model, that is the “time” parameter in pre-state societies. We question the role of temporality in the concept of heteronomy, formalized by Marcel Gauchet, from the concepts of dialectical sociology proposed by Michel Freitag, and this, with the help of the scientific results produced by the study of Michel Lalonde. This study about forms of symbolic objectification of time offers us the opportunity to take a fresh look at a point of controversy between Freitag and Gauchet. We thus confront two distinct systems of representation of time, which fuel a controversy: according to Freitag, properties of time-reckoning in primitive societies bring into question a sine qua non condition for understanding the essence of Heteronomy, according to Gauchet, focused on the movement of setting aside the normative basis. Then we show that this theoretical device contains a problematic view on time-reckoning, and expose the need of a dialectical work on heteronomy, about the mythical condition.