Présentation du numéro[Notice]

  • Irina Kirchberg

À la « jonction du culturel et du social » (Fourcade 2014, p. 6), la médiation culturelle « chapeaute un vaste ensemble de pratiques allant des actions de développement des publics à l’art participatif et communautaire. Ultimement, elle vise à faire de chaque personne, visiteur ou spectateur, un véritable acteur culturel » (Culture pour tous). Au Québec comme en France, on ne compte plus les recherches et les ouvrages qui se consacrent à l’étude de ce domaine d’activité et permettent d’affiner les définitions de cette pratique (Lafortune 2012, Quintas 2014, Camart et al. 2016, Bordeaux 2017), d’en mesurer les effets (Fleury 2008, Jacob et Bélanger 2014, Montoya, Sonnette et Fugier 2016) et de saisir la diversité de ses expressions (Perez-Roux et Montandon 2014, Dufrêne et Gellereau 2010, Bordeaux 2016). Alors que cette riche bibliographie permet d’observer la façon dont le terme et la pratique se sont implantés dans le champ muséal, théâtral ou cinématographique, par exemple (Peyrin 2010, Lussier 2015, Bordeaux 2016, Boutin 2016, Casemajor et al. 2017), les travaux de recherche ne permettent pas encore d’appréhender réellement ce qui se passe lorsque la médiation culturelle, son programme et ses outils empruntent au domaine musical. Ce numéro ouvre donc une première « fenêtre sur la médiation de la musique ». Il rassemble les publications de quelques membres du réseau constitué depuis 2016 autour de l’organisation des écoles d’hiver internationales en médiation de la musique auxquels s’ajoutent les articles et des témoignages de chercheur·e·s, de praticien·ne·s et d’étudiant·e·s affilié·e·s à l’Étude partenariale en médiation de la musique (epmm). Si la formulation générique de « médiation de la musique » est utilisée dans le titre de ce numéro, c’est parce qu’elle domine désormais dans le milieu musical professionnel et dans les institutions d’enseignement supérieur de la musique. Les variations syntaxiques repérées au fil de ce numéro (« médiation de la musique », « médiation musicale » ou « médiation culturelle de la musique ») amènent pourtant à réfléchir aux nuances dans la façon dont le projet de la médiation culturelle est négocié, reformulé ou transposé dans le milieu musical. Ces variations invitent à considérer la façon dont les médiateur·rice·s, les formateur·rice·s et les chercheur·e·s dont les textes sont rassemblés ici teintent leurs commentaires d’enjeux culturels, sociaux, politiques, psychologiques et pédagogiques. S’agit-t-il d’opérer une médiation « de » la musique faisant ainsi du contact avec certains répertoires musicaux la cible de ces activités ? Le processus de médiation prend-il le caractère la musique dans une démarche de médiation alors qualifiée de « musicale » ? Insiste-t-on finalement sur le fait que la musique, « fait social total », syncrétise des repères historiques, politiques, géographiques, etc., qui en font un levier puissant pour mettre en oeuvre les objectifs de la médiation culturelle et « invente[r] un espace nouveau où les oeuvres sont aussi là pour permettre de parler de soi et de sa condition » (Saada 2016, p. 217) ? Dans l’article qui ouvre ce numéro, Sylvie Pébrier s’inscrit dans cette dernière veine. L’auteure choisi de parler de l’évaluation de la « médiation culturelle de la musique » et précise que cette formulation « situe la musique non pas tant comme la finalité de la médiation que comme le moyen d’une rencontre pour faire culture ensemble ». On observe dans ce texte la façon dont le milieu éducatif s’accommode des tensions (Bordeaux 2018 et Mörsch 2017) et des paradoxes de la médiation culturelle (Saez 2018, Dufrêne et Gellereau 2010, Saada 2016, p. 218-219) …

Parties annexes