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Dussart, Françoise et Sylvie Poirier (dir.), 2021, Contemporary Indigenous Cosmologies and Pragmatics. Edmonton, University of Alberta Press, 336 p., cartes, illustr., bibliogr., index.[Notice]

  • Émile Duchesne

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  • Émile Duchesne
    Département d’anthropologie, Université de Montréal, Montréal (Québec), Canada

Cet ouvrage collectif dirigé par Françoise Dussart (Anthropologie, University of Connecticut) et Sylvie Poirier (Anthropologie, Université Laval) propose une série de contributions anthropologiques sur les cosmologies autochtones d’Amérique du Nord (Laugrand, Nepton Hotte et Jérôme), d’Amérique latine (Tassinari, Crépeau, Colpron, Hall, Mackenzie), de Sibérie (Pimenova), de Malte (Rountree) et d’Australie (Vaarzon-Morel). Ces différents cas ethnographiques sont l’occasion pour les auteurs qui forment ce collectif d’aborder des thématiques aussi variées que l’adoption du christianisme, l’actualisation du chamanisme, la place des nouveaux médias, la négociation de la globalisation, la parenté, etc. La question principale qui se pose aux études de cas proposées dans l’ouvrage est de comprendre comment les sociétés autochtones actualisent de façon pragmatique leurs cosmologies, de façon à aborder la rencontre avec d’autres univers de sens, tels que le christianisme et la société coloniale. Il s’agit ainsi d’un ouvrage qui propose d’aborder la complexité et la contemporanéité des cosmologies autochtones à partir de multiples exemples fournis par les ethnographies des différents collaborateurs de Dussart et Poirier. Les deux directrices n’en sont pas à leur première collaboration et l’on pourra dégager une certaine continuité dans leur travail. Dans l’introduction à un ouvrage collectif antérieur, Dussart et Poirier (2017) s’étaient intéressées aux enchevêtrements (entanglements) qu’elles avaient alors définis comme l’ensemble des tensions, des conflits, des compromis et des négociations entre les peuples autochtones et non-autochtones, conçu comme un processus imprévisible, inattendu, invisible et émergent (Ibid., 5-7). Dans la même veine, l’introduction de Contemporary Indigenous Cosmologies and Pragmatics propose une intervention théorique bien fouillée sur les cosmologies autochtones. Pour les deux autrices, l’enchevêtrement religieux qui caractérise la contemporanéité des sociétés autochtones « has become the new normal […] the goal of this volume is to consider the complex connections among religiosity, politics, activism, and resistance » (p. 4) [est devenue la nouvelle norme [...] l’objectif de ce volume est d’examiner les liens complexes entre la religiosité, le politique, l’activisme et la résistance]. Dans cette introduction, les autrices proposent leurs propres définitions des concepts qui leurs permettent de mieux saisir ces dynamiques. Dussart et Poirier proposent ainsi de comprendre la notion de cosmologie en tant que: Les deux anthropologues font également valoir l’avantage d’appréhender la contemporanéité des cosmologies autochtones en termes de religiosité plutôt qu’en termes de religion. Selon elles, bien que les deux termes aient la même racine étymologique latine (religare) qui signifie « relier », la notion de religiosité, contrairement à celle de religion, dénote l’idée de processus. Elles ajoutent que le terme « religiosité » Dussart et Poirier situent également l’ouvrage collectif qu’elles dirigent dans la lignée des travaux de Stengers (2003) et Latour (1999) sur les cosmopolitiques. Ce faisant, elles mettent de l’avant le caractère politique des cosmologies autochtones ainsi que leurs propensions à ne pas se limiter au domaine humain : La collection des contributions proposées dans Contemporary Indigenous Cosmologies and Pragmatics amène Dussart et Poirier à émettre un certain nombre de constats théoriques à portée générale. Pour n’en citer que deux, le premier est que « l’ouverture cosmologique » des sociétés autochtones, leurs religiosités enchevêtrées et leur capacité à recadrer et reconfigurer leurs cosmologies et leurs rituels « allow Indigenous peoples to reproduce their worlds and specific identities within the constraints, appetites, and turmoil of a globalized world » (p. 24) [« permet aux peuples autochtones de reproduire leurs mondes et leurs identités spécifiques dans le cadre des contraintes, des appétits et de l’agitation d’un monde globalisé »] Le second constat est que l’incorporation de l’altérité au sein de leur univers de sens permet d’affirmer des identités particulières et des projets de …

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