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Trois brins d’ADN dans le centre catalytique des ADN polymérasesThree DNA strands in the catalytic center of DNA polymerases[Record]

  • Patrick Lestienne

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  • Patrick Lestienne
    Laboratoire de pharmacologie des agents anticancéreux,
    FRE 2618 Cnrs, Institut Bergonié,
    229, cours de l’Argonne,
    33076 Bordeaux, France.
    lestienne@bergonie.org

Depuis plus de 40 ans, on admet que les ADN polymérases ne contiennent que deux brins d’ADN dans leur centre actif : le brin modèle et le brin en cours de synthèse. Nous montrons dans ce travail qu’à partir d’une amorce formant une triple hélice, il est possible de répliquer de l’ADN en double brin si une certaine instabilité est localisée à proximité du site d’initiation de la réplication. Par conséquent, les ADN polymérases peuvent accomoder transitoirement trois brins d’ADN au lieu de deux comme cela est communément admis. Les conséquences portent à la fois sur les systèmes de réparation, voire des mécanismes de réarrangements de l’ADN. Des hypothèses évolutives sur la structure des amorces permettant l’initiation de la réplication sont aussi proposées. La longue course pour la détermination de la structure de l’ADN, débutée il y a un peu plus de 50 ans, a été marquée par des erreurs d’interprétation de modèles tels celui de Linus Pauling qui proposa une triple hélice hélicoïdale avec les groupements phosphates au centre de la molécule. En revanche, le dénouement, qui mit du temps à se faire admettre par la communauté scientifique, eut lieu avec l’aide des clichés de diffraction des rayons X effectués par Rosalind Franklin dans le laboratoire de Maurice Wilkins à Cambridge, et interprétés avec intuition et justesse par Jim Watson et Francis Crick [1]. Néanmoins, des triples hélices ont été mises en évidence en 1957 par Alex Rich et ses collaborateurs [2] à l’aide d’un simple spectrophotomètre. En effet, la titration d’oligonucléotides de taille définie a montré que, pour un brin riche en poly(A), deux brins en poly(U) pouvaient former un complexe ternaire, probablement par l’interaction du 3e brin dans le grand sillon de l’ADN formé du duplexe (A-U). Pendant ce temps, Arthur Kornberg tentait d’élucider les mécanismes de réplication qui posaient de sérieux problèmes topologiques. Depuis l’ensemble de ses travaux, il est communément admis que des activités hélicases séparent la double hélice, et qu’une amorce, en général oligonucléotidique, s’apparie avec le simple brin. Les ADN polymérases incorporent alors à l’extrémité de l’amorce des désoxyribonucléotides monophosphates reliés par des liaisons phosphodiester complémentaires du brin à répliquer, formant ainsi une copie de la molécule en double brin initiale, permettant la transcription et la synthèse de protéines au niveau des ribosomes grâce à des adaptateurs, les ARN de transfert. Un problème difficile à concilier avec ce modèle concernait sa réplication, et ce n’est que grâce aux travaux pionniers d’Arthur Kornberg qu’une image progressive se dégagea [3]. La détermination de la structure cristallographique de différentes ADN polymérases montra leur ressemblance au niveau de leur mécanisme assuré par trois acides aminés et des cations métalliques ; il en est de même pour les ARN polymérases (Figure 1) [4]. Les ADN polymérases allongent une amorce oligonucléotidique et répliquent le simple brin modèle par l’incorporation de désoxynucléotides monophosphates complémentaires des bases exposées de l’ADN en simple brin [5] et, par conséquent, on admet qu’elles ne contiennent dans leur centre catalytique que le simple brin à répliquer et l’amorce en cours de synthèse. Nous avons démontré que, contrairement aux données connues, une séquence riche en poly d(G) formant une triple hélice peut servir d’amorce à la réplication dans une configuration non canonique par rapport aux données des différentes publications. En effet, cette amorce est parallèle au brin homologue, tandis qu’en règle générale elle est antiparallèle [6]. La réplication initiée à partir de l’amorce en triple brin avait été effectuée sur de l’ADN simple brin, conformément aux données de la littérature. Cependant, dans une seconde étape, nous avons utilisé un ADN en double brin comme modèle …

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