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Le présent numéro de Recherches sémiotiques est annoncé sous le mode d’un rapprochement extrême de la traduction et de la sémiose de sorte qu’elles apparaissent comme des soeurs siamoises. Cette métaphore conceptuelle peut être comprise comme exprimant un état handicapant, du fait que deux systèmes se rattachent à un organe qu’ils partagent. Pour notre part, nous en retenons le lien vital entre les systèmes sémiotique et traductif qui se partagent un organe, en l’occurrence celui du langage. Si pour le neurolinguiste, celui-ci correspond à une portion de circonvolution située dans l’hémisphère gauche du cerveau, pour les traductologues dont nous sommes, c’est davantage sa fonction qui est préoccupante. Qu’il serve à affirmer une présence humaine dans le monde, à transmettre des messages, à agir sur son environnement ou encore à transformer des contenus psychiques – comme l’avancent diversement Benveniste, Jakobson, Austin et Freud –, le langage sert nécessairement à vivre. Au nombre des activités vitales se trouve le récit, lequel répond au vif désir chez l’être humain de projeter son existence dans les possibilités infiniment renouvelées de la fiction. Il est un type de littérature qui dérange autant qu’il fascine et qui, pour cette double raison, mobilise notre attention : le récit érotique.

C’est dans la perspective de sa traduction que nous observerons le récit érotique contemporain et sa visée avouée : exciter le lecteur. L’écriture du texte érotique vise à faire jouir et c’est ce processus de sémiotisation qui nous occupera. L’usage qui est fait des signes au regard du “comportement qu’ils devraient faire apparaître chez le destinataire” (Iser 1985 : 101) s’observera dans la trame narrative ainsi que dans les agencements lexicaux, syntaxiques et discursifs. Les textes à l’étude nous semblent d’autant plus captivants qu’ils sont rangés dans le tiroir des ustensiles sans valeur herméneutique, bien que leur ustensilité résulte de procédés techniques tout à fait dignes d’intérêt.

La littérature érotique

Si Roland Barthes écrit que “le texte de jouissance n’est jamais celui qui raconte une jouissance” (1970 : 74), c’est parce que, selon lui, le lecteur est libre dans l’espace du texte de jouir de ses propres désirs et non des fantasmes que l’auteur aura transférés sur lui. Aussi délaisserons-nous cette définition, afin de reconnaître comme notre objet le texte qui raconte des jouissances, sa finalité et sa transitivité. Le texte érotique est écrit pour faire jouir et cette modalité factitive présuppose qu’il est écrit pour quelqu’un. L’énoncé de Barthes demeure néanmoins incontournable parce qu’il nous amène à “l’invisible ligne de démarcation qui sépare un écrit pornographique d’un texte littéraire” (Esparbec 2003 : 270). L’épineuse question du pornographe qui demande si “[l]a complaisance balourde, le ressassement descriptif maniaque qui sont propres à l’écriture pornographique sont [...] à jamais interdits de séjour en littérature” (Ibid. : 271) ouvre le débat de la littérarité. La complainte du pornographe interdit de territoire littéraire se heurte en fait aux critères énoncés dans la poétique de Jakobson qui rattache la littérarité à l’originalité du texte et à la richesse de ses formes. Mais Esparbec reste cantonné dans une définition symbolique de la littérature en tant que production qui rapporte un capital intellectuel ou culturel proportionnel à la cote que lui donnent les acteurs du champ littéraire.

Dans cette seule perspective, il est vrai que les textes érotiques demeurent en marge de la littérature. En revanche, si les productions érotiques sont considérées selon le capital économique qu’elles rapportent, alors elles occupent tout un marché qui impose ses propres critères de production. Nous verrons que ceux-ci sont régulés tant par les formats de publication que par l’exigence de stimulation du lecteur. Cet impératif organique ne fait aucun doute chez les auteurs érotiques tels que Rupert Smith qui annonce sans détour la visée du texte : “Erotic fiction has a purpose, and it’s not a very highbrow one. James Lear’s novels are designed specifically as aids to masturbation” (2008). Bien que cette visée mette le marché de l’édition mal à l’aise, les auteurs de textes érotiques en assument complètement la fonction et les meilleurs savent ce qu’il faut écrire pour faire jouir.

Grand éditeur de textes érotiques, Jean-Jacques Pauvert s’est confronté aux critères servant à définir le texte érotique lorsqu’il a constitué son Anthologie historique des lectures érotiques en cinq tomes. Au lieu de broder une réponse en fonction du contenu des textes, il s’en est doctement remis à la valeur d’usage de ceux-ci en fonction des époques tel que l’indique le titre de son anthologie. À y regarder de plus près, effectivement, nous constatons que ce sont les lectures qui sont érotiques et non les textes. Du point de vue économique que nous avons évoqué, la valeur d’usage est révélée par les ventes d’un livre qui seraient proportionnelles au plaisir qu’il a procuré. C’est donc dire que la valeur d’usage se jauge à l’expérience de la lecture alors que la qualité littéraire se juge en fonction de critères de fabrication : la différence entre “a good read” et “a good book” (Stein 1995 : 251).

Le statut culturellement marginal du texte érotique ne semble pas gêner ceux qui en vivent grassement comme le fait remarquer Smith : “Pornographic fiction, erotica, one-handed reading, call it what you will, is a publishing parallel universe. Books sell in large quantities” (2008). Si l’écrivain synthétise clairement la situation éditoriale, il balaie du revers de la main la différence entre la fiction pornographique et le roman érotique dans une équivalence synonymique. Y a-t-il une différence à faire entre ces deux adjectifs?

Il semble y avoir un consensus sur une axiologie qui place le pornographique au pôle négatif et l’érotique au pôle positif du spectre des représentations, tel que l’illustre l’inventaire critique des définitions que nous avons recensées. Alors que la production pornographique montre son objet par des moyens techniques qu’elle ne s’attarde pas à raffiner, la production érotique travaille le langage qu’elle utilise. La pornographie serait donc privée d’art et réduite à une technique, tandis que “l’inspiration érotique ajoute ce supplément d’âme que nous appelons l’art” (Biasi 2007 : 16). La différence entre les deux ne tient donc pas tant à la nature osée de la chose représentée qu’à un degré de créativité et d’esthétique. Pourtant, le pornographe travaille à ce qu’il faut écrire pour être lu et pour faire jouir; en ce sens, il maîtrise son art, si tant est que l’art soit entendu comme l’ensemble de procédés par lesquels on cherche à atteindre un certain résultat. De surcroît, la distinction en fonction du seul critère artistique devient improductive devant les écrits du Marquis de Sade dont l’élégance et le travail de la langue rivalisent avec le cru des images. Faudrait-il plutôt s’en remettre à une définition de contenu, selon laquelle “[o]n appelle littérature pornographique une littérature réduite à quelques mots d’ordre (fais ceci, cela…), suivis de descriptions obscènes” (Deleuze 1967 : 17)? Ou vaudrait-il mieux poser une définition fondée sur le degré d’indécence, de sorte que “l’érotisme exige une obscénité légèrement sublimée” (Vian 1980 : 52)?

Mais si l’obscénité s’entend de ce qui doit normalement demeurer hors scène, la notion reste aussi floue que les choses ressenties comme devant être cachées changent d’une génération à l’autre (Atkins 1975 : 10). C’est plutôt la sentimentalité de l’amour qui, par renversement historique, se trouve aujourd’hui obscène puisque démodée et tombée “hors du temps intéressant” (Barthes 1995 : 625). La sentimentalité choque plus que le sexe et, sur le plan littéraire, elle présenterait même un danger : “Sentimentality in fiction usually comes across as patently insincere, mawkish, or maudlin, and should be avoided” (Stein 1995 : 170). En dernière tentative, n’y aurait-il pas lieu d’établir le distinguo en fonction d’un coefficient romance-amour lequel serait nul dans l’écrit pornographique et variable dans l’écrit érotique (Terrega 2001 : 5)?

En réponse à cette dernière proposition nous devons rappeler pour éviter le glissement sémantique que le terme “érotique” vient d’“éros”, passion amoureuse (et principalement physique) et renvoie d’office à l’instinct sexuel. Faut-il rappeler que dans la théorie des pulsions sexuelles de Freud, l’amour est “la relation du moi à ses sources de plaisir” et “provient de la capacité qu’a le moi de satisfaire une partie de ses motions pulsionnelles de façon auto-érotique par l’obtention du plaisir d’organe” (Freud 2005 : 36, 41)? Fils d’Aphrodite et d’Hermès chez les dieux grecs, Éros est le dieu de l’amour qui finit par s’éprendre de la belle mortelle Psyché tel que le relate le “Conte d’Amour et Psyché” tiré des Métamorphoses d’Apulée, auteur berbère du IIe siècle. Leur amour est consommé, et plus qu’une fois raconte Apulée, mais toujours dans l’obscurité de la nuit afin que l’identité d’Éros ne soit jamais dévoilée à Psyché. Dans ce récit “primoérotique”, qui nous sert de source étymologique, le sexe est donc implicite à l’amour, en cela qu’il ne figure pas expressément; l’amour est certes charnel, mais à l’aveugle tant pour la protagoniste Psyché que pour le lecteur. Il ne fait aucun doute que la dignité traditionnellement acquise à l’adjectif “érotique” se joue dans cette cécité, condition très pratique pour le conteur : il ne se risque pas à faire voir ce qui doit demeurer caché et, de ce fait même, exerce un pouvoir de suggestion qui laisse tout à imaginer. En revanche Apulée, fin narrateur, exploite les cinq sens et s’attache à décrire le superbe château d’or et d’argent dans lequel Éros installe Psyché et où celle-ci se délecte des meilleurs mets, vit au rythme des musiques les plus harmonieuses et se prélasse dans des bains aux parfums les plus suaves. Aux fins de notre étude, nous retenons du récit d’Éros que l’érotique advient par l’exploitation des cinq paradigmes sensoriels.

Du point de vue empirique des auteurs, le récit de jouissances doit captiver le lecteur totalement, c’est-à-dire jusqu’à lui faire oublier qu’il n’est pas dans la scène (Terrega 2001 : 76). Notons le renversement de l’obscénité – ce fait d’être hors scène – qui s’effectue par la lunette du scripteur. Tout comme le censeur, l’écrivain cherche à faire cesser l’obscénité, mais en incorporant celui qui voit et non en refoulant la chose vue. Le succès de cette entreprise répond de critères conventionnels dont nous traiterons plus loin. Contrairement au rire ou au sourire que suscite le texte d’humour, l’effet d’excitation chez le lecteur du texte érotique demeure méthodologiquement gênant à vérifier. En revanche, certains lecteurs n’hésitent pas à témoigner de leur “appréciation corporelle” (Paasonen 2010 : 147, 148) de manière très concrète dans des sites de nouvelles érotiques évaluées par les pairs, tel Literotica.com.

Lire le récit érotique

Dès qu’on s’intéresse à l’acte de lecture, il est impossible d’escamoter le principe de suspension consentie de l’incrédulité (willing suspension of disbelief) formulé par Coleridge (1834 : 174). Selon ce principe, la fiction ne peut advenir que si le lecteur se prête au jeu de croire ce qu’il lit, notamment en s’identifiant à un personnage, et que rien ne vienne interrompre ce jeu. Étant donné que “le texte dans son intentionnalité reste subordonné à l’activité lectrice” (Plassard 2007 : 55), il devient primordial pour l’écrivain de découvrir les conditions du pacte que conclut tacitement le lecteur avec le texte.

Dans les réflexions sur l’acte de lecture telles qu’elles ont pu s’articuler dans divers essais de Barthes, et notamment sur la question du tempo, les métaphores abondent pour exprimer les différentes vitesses de lecture. Elles sont filées dans deux paradigmes : manger (brouter, ingérer, ruminer) et marcher (lecture pas à pas, piétinement, lecture en rase-mottes, lecture-chevauchée, course) (Carpentiers 1998 : 106, 112, 118). Ces réseaux lexicaux s’inscrivent dans une longue tradition conceptuelle remontant d’une part à la ruminatio médiévale (la lecture à voix basse ou le murmure) et au verbe patein de l’Antiquité grecque qui signifie “piétiné”, pour désigner un livre lu à plusieurs reprises (Cavallo et Chartier : 2010). Il importe de noter la dimension physique servant à expliquer l’activité du lecteur qui se déplace dans le texte ou en ingère la substance.

L’expérience du texte passe par le corps

En fait, l’accélération de la lecture entraînerait une “exaltation”, un “enivrement”, une “ivresse”, une “intoxication”, un “vertige” (Barthes 1995 : 725). Et la question que nous en venons à poser est la suivante : le tempo de la lecture est-il imposé au texte, donc à l’écrivain, par les attentes du lecteur ou est-ce, à l’inverse, l’écrivain qui donne la marche en produisant un texte qui puisse être lu rapidement?

Nous répondrons “les deux”. Bien que le lecteur dispose du texte à sa guise, il se peut que celui-ci se prête plus ou moins bien à une lecture lente ou rapide. Par exemple, la lecture à vive allure convient particulièrement aux textes qui comportent une intrigue. Dans ces textes, le tempo est mené par un lecteur que Barthes qualifie de pressé et avide de résoudre l’énigme. La curiosité catalysée par le suspense propulse le lecteur et le pousse à court-circuiter les passages qui ne relèvent pas directement de la suite d’actions. Mais tandis que l’avidité de savoir aiguillonne le lecteur du roman à intrigue, c’est plutôt l’avidité de voir qui motive le lecteur du texte érotique puisque l’issue sexuelle est connue d’entrée de jeu. Le combustible des scènes sexuelles provient de la montée du désir, dont le propre est d’être repoussé. Aussi, le schéma narratif du texte érotique, sous-tendu par la séquence rencontre-séduction-coït, ressemble-t-il davantage à un tracé cardiographique ponctué de phases ascendantes prononcées alors que la formule crime-enquête-solution du roman à intrigue appelle une montée graduelle de la tension jusqu’à l’élucidation du mystère. La tension sexuelle chez l’un et le suspense chez l’autre sont certes garants d’un plaisir, mais celui-ci est porté au paroxysme de la jouissance chez le lecteur érotique par la représentation des scènes sexuelles.

À l’avidité du lecteur vient s’ajouter un phénomène purement physique, lequel éclaire le processus de la lecture. Les études cognitives menées depuis les années 1990 ont démontré que le processus de la lecture dépasse le simple décodage de mots et engage le lecteur dans la construction de sens et, ajouterons-nous, d’images. Les études du mouvement oculaire, qui s’attachent à calculer le temps de fixation, les régressions et les saccades de l’oeil à la lecture, ont révélé que l’oeil ne focalise que sur environ 70 % des mots. Il faut préciser que celui-ci ne transmet aucune information au cerveau lorsqu’il est en mouvement (Paulson 2008 : 27, 44).

La proportion des mots sautés comprend très souvent les mots-outils, l’oeil fixant plutôt les mots pleins (Goodman 2008a : 23). Le fait que l’oeil ne fixe pas chaque mot permet deux déductions : d’une part, celle que le lecteur travaille sans cesse à faire des prédictions sur le texte à venir et, d’autre part, qu'il ne fixe pas ou alors ne fixe que très rapidement les mots qu’il a anticipés (Paulson 2008 : 36). Les régressions sont très souvent causées par la difficulté à inférer le référent d’un pronom ou d’un participe (Vandendorpe 1994 : 218) et agissent comme autant de ralentisseurs de lecture. Les phénomènes affectifs et physiques qui influent sur la démarche de lecture sont à considérer au nombre des contraintes qui informent le processus d’écriture.

Dans le pacte de lecture qui lie le texte et le lecteur, ce dernier peut décider de transgresser la linéarité du texte. De fait, le lecteur du texte érotique se caractérise par sa propension à contrevenir au code de lecture : avide, il lit vite et enjambe non seulement les mots-outils mais aussi des passages entiers jusqu’à la prochaine scène salace qu’il savoure plus lentement. Que cette dévoration soit dictée par les habitudes commerciales et idéologiques imposées par la société, comme le pense Barthes (1970 : 22) ou qu’elle soit inhérente aux textes érotiques, les auteurs sont conscients de la contrainte formelle qu’elle impose à l’écriture. En réalité, la vitesse de la lecture n’importe pas tant à l’écrivain que l’“asservissement temporaire du lecteur” et la tâche “de produire sur lui une impression physique, [...] car il paraît évident que lorsqu’on est engagé physiquement dans une lecture, on s’en détache plus difficilement” (Vian 1980 : 30, 31). La sensation qu’évoque Vian survient physiologiquement lorsque la glande médullosurrénale sécrète de l’adrénaline en réaction au stress ou à l’état de tension que provoque la lecture. Les romans à suspense sont consommés pour les doses d’adrénaline qu’ils entraînent le corps à sécréter et dont les effets cardiaques et vasodilatateurs procurent une sensation stimulante, sinon plaisante. Il est légitime de postuler une corrélation directe entre la prédisposition du lecteur à suspendre son incrédulité et la perspective de l’excitation.

Un impératif de stimulation régit le récit érotique et les stimuli, comme nous le verrons plus loin, proviennent en grande partie de la trame narrative qui garantit la progression du lecteur dans le texte. La sémiose, en tant que processus de mise en tension érotique, s’arrête dès que le lecteur n’arrive pas à s’imaginer l’action, c’est-à-dire à se construire des images. L’avidité de ce lecteur étant proportionnelle à son impatience, il abandonnera le texte sans remords s’il se trouve déçu par l’interaction des corps engagés dans l’acte sexuel, soit par l’ambiguïté, soit par la banalité de celle-ci.

Écrire un texte érotique

Dans sa monographie Le sexe dans la littérature, John Atkins adresse une mise en garde aux puritains de 1970, leur déconseillant la lecture de son livre. Plaçant le puritanisme sous le signe de la maladie, il les incite à se ménager en ces termes : “Ceux dont le corps est malade doivent faire attention à ce qu’ils mangent. Ceux dont l’esprit est malade à ce qu’ils lisent.” (1975 : 17). Quarante ans plus tard, à l’ère de la malbouffe et de l’obésité, c’est plutôt le premier terme de la mise en garde qui prévaut dans notre société nord-américaine préoccupée par la santé publique. Quant au deuxième énoncé, nous osons croire que l’avènement des Porn Studies vers la fin des années 1990 aura levé quelques pudeurs universitaires à l’égard de l’objet érotique.

C’est dans la perspective de traduire en connaissance de cause que nous présentons les conventions d’écriture qui prévalent sur le marché de la production littéraire érotique. En amont du protocole d’écriture, il existe des contraintes formelles qu’impose le format du texte : il peut s’agir d’une lettre de 600 mots ou d’une nouvelle de 1000 à 3000 mots destinées à une revue pornographique, d’une nouvelle de longueur variable publiée dans un collectif ou sur un site Internet d’écrivains amateurs, ou encore d’un roman. Dans la nouvelle de 3000 mots par exemple, il est convenu que celle-ci contienne deux scènes sexuelles : la première devant survenir au seuil du millième mot et se dérouler sur au moins 600 mots, la seconde devant s’amorcer à peine quelques centaines de mots plus loin et occuper au moins un tiers de la nouvelle (Terrega 2001 : 30). La deuxième scène sera plus longue et intense que la première afin de faire culminer l’action sexuelle. La fin, pour peu qu’elle soit lue, est expédiée sur un ton souvent badin.

Par ailleurs, des contraintes visant le contenu s’imposent en fonction du lectorat cible car la sémiose érotique emprunte des voies variées : les préférences sexuelles sont protéiformes. Cette pluralité libidinale se décline catégoriquement sous forme d’onglets dans la kyrielle de sites internet spécialisés en histoires érotiques gratuites, dits récits coquins ou intimes, tels que Literotica.com, Sextails.com et Sexstoriespost.com et histoireerotique.org, histoires-intimes.com et annuaire-histoire-erotique.com. En fait, la catégorisation et la sous-catégorisation en fonction de l’orientation sexuelle, des préférences et d’une esthétique corporelle occupent une place centrale dans les représentations pornographiques en ligne, qu’elles soient répertoriées sur des sites et des métasites ou des portails (Paasonen 2010 : 139). Au nombre de ces catégories se trouvent la défloration (hétérosexuelle, gaie et saphique), la domination sadomasochiste, le fétichisme de jambes et de pieds, le couple exhibitionniste, la séduction de jeunes femmes et le coït hétérosexuel, gai, saphique et transgenre. Sur le marché des productions écrites proposées à la vente, les auteurs se voient imposer des spécialités érotiques, d’une part, en fonction des revues dans lesquelles ils publient leurs textes et, d’autre part, par le marché visé lorsqu’il s’agit de la publication d’un livre. Ils tiennent compte notamment de ce qu’il serait légitime d’appeler une démographie du fantasme fondée sur l’orientation sexuelle, les prédilections et l’âge. Dans ses romans érotiques, par exemple, Smith dose la jouissance selon l’âge de son lectorat cible : deux bons orgasmes par chapitre pour les lecteurs plus jeunes et un pour les plus de quarante ans (2008).

Malgré la diversité des motifs littéraires qui distinguent les contenus hyperspécialisés des récits érotiques sur les marchés payants ou gratuits, une finalité préside à l’écriture des histoires : exciter le lecteur en générant un univers narratif captivant.

Il ne sera pas question d’échafauder dans le cadre du présent article une analyse de la narrativité telle que des sémioticiens se sont attachés à le faire pour le folklore, le mythe et le théâtre. Plutôt, il s’agira d’inventorier les principaux opérateurs narratifs qui régissent le récit érotique suivant les prescriptions des guides d’écriture et nos observations de textes tirés du recueil de nouvelles érotiques X : The Erotic Treasury, paru aux États-Unis en 2008. Ces opérateurs se posent comme autant d’impératifs d’écriture que nous avons synthétisés en fonction de trois dénominateurs : la clarté, la réalité et l’inventivité. Ensemble ils assurent la sémiose érotique car ils évacuent tout ferment d’hésitation, de doute et d’ennui chez le lecteur, garantissant ainsi son attention soutenue et sa progression fluide dans le texte en vue de l’amener à un état de tension culminante. Nous illustrerons certaines conventions d’écriture à l’aide d’exemples puisés à même le recueil de nouvelles érotiques étudiées.

Impératif de clarté

Afin d’éliminer tout ralentisseur de lecture qui viendrait nuire à la mise en tension du lecteur, l’action des protagonistes doit se prêter à un décodage aisé. Toute ambiguïté dans le déroulement des séquences sexuelles entraîne une hésitation qui érode l’attention du lecteur.

C’est donc un impératif de clarté qui incombe à l’écrivain, mais celle-ci ne doit toutefois pas être confondue avec le réalisme. En fait, il existe toute une échelle de précision, allant de la métaphore vive au cliché, telle que les extraits 1 et 2 l’illustrent :

Les deux scènes relatent la même chose, un acte de sodomie, mais très différemment à en juger les procédés utilisés pour décrire les organes génitaux, dont nous signalons les manifestations en caractères italiques. La métaphore filée dans les paradigmes portier et équestre confère au premier extrait une qualité poétique par la densité du réseau lexical brodé en dentelle, alors que le deuxième extrait recourt à des pronoms (“la” pour éviter “pénis”et “ça” pour varier “anus” qui apparaît plus loin) et à des figures assez courantes (“pastille”, “fente” et “corolle”), dont la catachrèse “gland” est une manifestation extrême. Bien qu’un seul mot concret (souligné) soit tiré du registre physiologique (“fesse” et “anus”) dans chacun des passages cités, le réalisme du deuxième extrait évite, en évacuant les circonlocutions poétiques, tout risque d’imbroglio. Si la démarche lexicale semble terne dans le deuxième extrait, comme asservie à un principe de réalité, elle n’en demeure pas moins maîtrisée. En fait, le vocabulaire érotique à l’instar de tout autre nomenclature technique s’acquiert et se développe au fil de l’expérience de la rédaction. Sa maîtrise s’impose d’autant plus que, en ce qui concerne le lexique génital, le recours trop fréquent au registre physiologique, les auteurs s’entendent-ils à dire, est non seulement lassant, mais contre-productif, puisqu’il évoque un discours clinique qui éteint le désir. Il semble que la ligne soit fine entre l’euphémisme cucul (le “tunnel de l’amour” ou le “jardin secret” pour ne pas nommer le vagin) et une trouvaille. Au demeurant, l’écrivain érotique n’échappe pas à la prescription du mot juste pour décrire le mouvement, par exemple, d’une main qui palpe, masse, glisse, effleure, ces actions étant toutes beaucoup plus précises que le simple verbe “caresser” (Terrega 2001 : 77).

La contrainte de clarté force la narration des scènes sexuelles dans une structure sujet-verbe-complément répétitive, voire intensive, mais rythmée, qui se caractérise par les tours de rôle des personnages. Quant à l’ordre, deux structures prédominent : à trois agents (il/elle + il/elle + partie du corps), comme dans l’extrait 3, et à deux agents (il/elle + il/elle), comme dans l’extrait 4. Les passages sont tirés d’une même scène, où Greta et Jimmy se rejoignent dans les toilettes d’un restaurant :

La structure syntaxique qui ordonne les tours de rôles pèche sans doute par répétition et manque d’inversion; en revanche, elle offre le bénéfice de la clarté. Un rythme s’installe au profit d’une hyperlisibilité. La fluidité syntaxique est étroitement liée à l’efficacité des adjectifs possessifs à la troisième personne (his/her). Ceux-ci présentent une difficulté en traduction car, en français, ils s’accordent avec la chose possédée et non avec le genre du possesseur (voir Boulanger 2008). L’adjectif possessif devient ambigu lorsque les parties du corps sont communes aux deux personnages, tel que dans la phrase figurant dans l’extrait 3 : “The textures of her body against his tongue send shivers down his spine, and thighs”. Il n’y a dans cet exemple, si on le traduit littéralement en français, aucun trait sémantique ni marque distributionnelle qui indiquent au lecteur qui fait quoi, car les deux personnages sont également dotés d’une langue, d’une échine et de cuisses : “Les textures de son corps contre sa langue font courir un frisson le long de son échine et de ses cuisses”. Mais le contexte lève l’ambiguïté, puisque nous savons que c’est la bouche de Jimmy qui parcourt le corps de Greta. Il ne fait donc aucun doute que ce sont les textures de son corps à elle qui font courir un frisson le long de son dos et de ses cuisses à lui. Aussi évitera-t-on les explicitations “à lui” ou “à elle” afin de ne pas encombrer et ralentir le tapis roulant de l’action. En revanche si le contexte ne fournit aucun appui, tel que dans le récit homoérotique ou saphique, le traducteur n’a d’autre choix que de réactiver les prénoms des personnages à chaque tour de rôle et de varier les épithètes qui les caractérisent. Ce qui sera perdu en fluidité sera gagné en clarté.

Qu’il s’applique au régime lexical ou qu’il commande la syntaxe, l’impératif de clarté contribue à créer un effet de réel, autre gage de réussite du récit érotique.

Impératif de réalité

En ce qui concerne les gestes posés, les situations et les lieux de l’action, le lecteur de littérature érotique se doute bien que des relations sexuelles fortuites et effrénées sont loin d’être choses courantes dans notre monde productiviste. Et c’est cette réalité qui pousse le lecteur à la fiction érotique. Les gestes, les situations et les lieux doivent être plausibles selon les normes du monde fantasmé du lecteur (Terrega 2001 : 49, 63). Mais la fiction doit sembler vraie pour que le lecteur y croie. Ne mésestimons pas non plus la valeur documentaire du récit érotique, lu pour alimenter la “machine à fantasme”, la même qui tourmente les jaloux et les cocus en proie aux visions les plus lubriques.

Le récit érotique se caractérise par une trame narrative entrecoupée de descriptions qui ont pour fonction d’ancrer l’action dans un contexte concret, c’est-à-dire de créer un effet de réel, un sentiment de véracité, nécessaire afin que le lecteur arrive à se projeter l’action et se projeter dans l’action. Ce sentiment de véracité est créé par le recours fréquent à l’hypotypose qui offre une description réaliste et frappante d’une scène laquelle donne l’impression au lecteur de la vivre au moment de la lire. L’objet est si clairement décrit que l’on croit le voir (ou le sentir, le toucher, le goûter, l’entendre). Cette figure de rhétorique microstructurale qui sert à frapper l'imagination prend la forme d'une énumération de détails concrets et développe l’aspect plastique, c’est-à-dire la manifestation extérieure de l’objet, du texte (Molinié 2009 : 168). Dans le texte érotique l’hypotypose concorde avec la description de l’interaction sexuelle qui se traite comme un passage technique tant lors de la rédaction que de la traduction. Voici un exemple d’hypotypose dans une scène où deux joueuses de tennis rivales, Mariana et Anna, s’“affrontent” dans le vestiaire :

L’évocation du rongeur s’abreuvant au biberon à bille a de quoi surprendre le lecteur dont l’imagination se trouve néanmoins complètement prise en charge par le détail de la description, lequel qualifie jusqu’à la couleur de la langue. De surcroît, les indications visant les mouvements de la langue (en caractères gras) sont d’une technicité dont le degré de complexité se révèle à la moindre tentative de traduction. C’est en fait par le souci maniaque du détail que le pornographe acquiert ses lettres de noblesse (Terrega 2001 : 78). La réalité doit passer par l’évocation des quatre sécrétions (salive, sueur, sperme, cyprine), suivant l’adage “sex is sticky” (Almond 2003). Mais la consigne unanime exige la perspective intimiste, encore une fois pour éviter la représentation mécanique : il faut décrire non pas ce que la chose fait, mais ce qu’elle “me” et “lui” fait. Si l’intimité narrative consiste également à livrer les secrets du corps nu, ceux-ci gagnent à être singuliers, voire drôles, afin de rendre les personnages attachants (Almond 2003).

La réalité du récit est également produite par la voix narrative. Le discours à la première personne, en captant d’emblée l’attention du lecteur, exploite la fonction appellative du langage, qui vise à provoquer une réaction chez le lecteur. C’est en fait le lectorat cible qui dicte le point de vue. Par exemple, certaines revues destinées à un lectorat homosexuel exigent des histoires narrées à la première personne par un homme qui relate sa défloraison, la “première expérience” étant toujours mémorable. Les nouvelles du recueil X : The Erotic Treasury, quant à elles, sont pour la plupart narrées au “je”. Quelques-unes sont racontées à la troisième personne par un narrateur omniscient, point de vue qui comble le lecteur-voyeur.

Bien que le point de vue du voyeur relatant l’action à laquelle il ne participe pas physiquement semble a priori impersonnel, il bénéficie d’une perspective omnisciente qui répond à la pulsion scopique du lecteur. La description sensorielle contribue plus efficacement à propulser l’action que les dialogues car, chaque fois, il est fait appel à la volonté de voir qui pousse à lire. Aussi, n’est-il pas rare que les personnages restent innommés, comme des identités à pourvoir par le stock personnel du lecteur. Les histoires où la deuxième personne assume la voix narrative sont moins nombreuses et semblent interpeller un public plus jeune comme les histoires-jeux dont vous êtes le héros. L’extrait suivant illustre le ton confiant de cette voix à la deuxième personne, qui s’enhardit jusqu’à la truculence :

Tant dans la trame narrative que dans les dialogues, la voix soulève la question du sociolecte, puisque le personnage doit emprunter un registre qui lui correspond afin d’être convaincant. Dans chacun des extraits anglais cités précédemment, se trouve un mot, soit vulgaire ou familier (fuck et come), soit tiré du slang (ass, broad, back door, cunt et clit). Au nombre des activités qui occupent l’être humain depuis des générations, il y a le sexe mais aussi, et peut-être plus encore, parler de sexe. Les auteurs du dictionnaire Sex Slang s’entendent à dire que “[w]e are hard-wired for a linguistic resourcefulness that always matches, and usually surpasses, our physical and sexual invention” (Dalzell et Victor 2007 : vii). De ce fait, le discours sexuel infiniment renouvelé comporte une pléthore de termes tout aussi originaux que choquants. À vouloir les analyser selon la seule grille des niveaux de langue, nous nous tromperions sur les mots du slang. Bien plus que des marques de vulgarité, ces mots permettent non seulement de contourner le registre clinique ou neutre, mais aussi d’établir une complicité avec le lecteur. Dans une perspective sociolinguistique, le slang, comme tout parler, constitue une caractéristique extrinsèque de la langue que le locuteur adapte à ses besoins sociaux, en l’occurrence installer un lien entre les membres d’un groupe. Le lecteur partage avec le narrateur une même scène érotique et, avec l’auteur, il a partie liée dans l’impertinence et l’irrévérence que le slang exprime à l’égard des valeurs de la culture dominante (Adams 2009 : 48). Activités de subversion du corps et du cortex, le sexe et la lecture “ne cherchent-ils pas à voler du temps au temps utilitariste auquel nous supplient de souscrire nos sociétés de contrôle, autrement plus perverse[s] que l’obsédé textuel” (Di Folco 2009 : 11)?

Les difficultés que soulèvent la traduction du slang relèvent du problème du sociolecte en traduction et dépassent les limites du texte érotique. Quant aux choix lexicaux en ce qui a trait au vocabulaire sexuel du registre familier, ils découlent de l’incontournable question de savoir si le texte est destiné au lecteur franco-québécois ou au lecteur franco-français.

Impératif d’inventivité

Le principal défi de l’auteur de récits érotiques consiste à déjouer la banalité car rien n’est plus banal que le sexe, cette pratique vieille comme le monde. Les meilleurs antidotes contre l’ennui sont l’inventivité et l’humour qui, dans une large mesure, sont impartis à la description des personnages et des scènes sexuelles. En introduction au recueil de nouvelles qu’elle a colligées, Susie Bright résume les critères qui ont présidé à la sélection des textes : “They made me laugh, they aroused me, they twisted my mind and my sheets before I could protest” (2008 : 9). Parce que la finalité sexuelle du récit érotique est toujours connue d’avance, l’impératif d’inventivité pèse encore plus sur l’auteur. Aussi le renouvellement de l’intérêt du lecteur s’opère-t-il par l’invention de lieux, de situations et de motivations humaines et la combinaison de ces trois dimensions est infinie. Comme l’ordre des verbes dans le propos de Bright l’indique, l’humour occupe une place prépondérante.

Vital, “l’humour est au récit érotique ce que le levain est au pain : sans lui, rien ne lève” (notre trad. de Smith 2008). Il humanise les situations sexuelles, lesquelles courent toujours le risque de sombrer dans le “décalque cru de la chose” (Di Folco 2009 : 11). Il peut s’agir d’humour subversif, comme l’illustre le passage suivant :

Le rapprochement entre le rite sacré et le coït anal procède d’une démarche subversive qui n’est pas sans rappeler l’attitude libertine des récits sadiens, à la différence du registre familier dont relèvent les termes back door et lube. L’onction des “saintes huiles” pour l’administration du sacrement à l’héroïne, qui a les deux mains sur le comptoir de la cuisine et le jeans aux chevilles, ne manque pas d’audace à l’égard de l’institution religieuse, que le ton soit sincère ou moqueur.

L’humour peut passer par le jeu de mots, démonstration insigne d’inventivité, tel que le donne à lire l’amorce d’une nouvelle comptant à peine 2000 mots :

Recours moins fréquents, les inventions lexicales (mangopuss, mangopussy, mindbody, Labia Majora Fest) ne visent pas tant à exciter le lecteur qu’à le préserver de l’ennui. Mais l’inventivité ne se manifeste pas exclusivement dans la dimension spectaculaire du texte, tels que les néologismes de l’extrait 8 en témoignent; la chasse à l’ennui se poursuit également dans la syntaxe et le lexique. Si les scènes sexuelles permettent la répétition des structures syntaxiques, cette dispense ne s’applique pas par ailleurs et il est recommandé de varier l’amorce des phrases ainsi que leur longueur (Terrega 2001 : 51). Par conséquent, l’écrivain évite la répétition de mots et s’efforce de ne pas systématiquement nommer les parties génitales (Almond 2003) : à trop montrer la chose, on ne la voit plus.

Conclusion

Si nous n’avons pas tenu à trancher sur la différence entre l’érotique et le pornographique, c’était pour ne pas enfermer le texte de jouissances dans une axiologie stérile. Pour le traducteur, tout texte mérite le regard fin de l’analyse puisqu’il s’agit chaque fois de trouver son système de valeurs afin de le transposer dans la langue-culture cible.

Comme la valeur du texte érotique tient à sa finalité jouissive, c’est le fonctionnement des moyens déployés à cette fin que nous avons travaillé à relever. Car il n’est pas simplement question de traduire les mots, mais plutôt la manière d’être des mots dans le langage, que nous envisagions “[...] une recette de bouillon en poudre, un article de physique nucléaire, un poème, un roman” (Meschonnic 1999 : 82) ou un texte érotique. Le traducteur se rend compte dans chacune de ces situations d’écriture qu’on ne fait pas n’importe quoi.

Sans douter du fait que faire jouir, comme faire rire, sollicite des codes culturels différant d’une langue à l’autre, nous avançons que des lignes de force sous-tendent le processus de sémiose du récit érotique. Nous en avons isolé trois et estimons qu’elles échoient au traducteur comme autant d’impératifs d’écriture : la clarté, la réalité et l’inventivité.

Suivant ces lignes de force, le traducteur s’astreindra à reproduire la netteté des images, la répétition syntaxique rythmée dans les scènes à haute intensité sexuelle, la technicité des actions, le ton irrévérencieux et complice du slang ainsi que l’humour. En clair, la tâche ultime du traducteur digne de l’épithète érotique consiste à produire chez son lecteur un état de tension culminante.