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L’auteur, Senior Lecturer à la Luton Business School, University of Luton, au Royaume-Uni, s’était donné pour objectif d’apporter une vue d’ensemble des différents modes de protection du travail reliés au commerce international, dans un contexte de « mondialisation ». Il s’agit, en définitive, de l’examen des différents modes d’expression d’une « dimension sociale du commerce international », ou encore, plus couramment, des différents jours de la « clause sociale » associée à ce commerce international. L’objet est largement entendu, car il y est question aussi bien des codes de conduite privés des entreprises transnationales que de l’apport d’instruments publics ; une synthèse, donc, de tout ceci, dans la perspective des « relations industrielles transnationales », nous dit l’auteur, et non une étude détaillée de chacun des éléments en cause, ce qui sera bien le cas, disons-le immédiatement.
Dix chapitres traitent des sujets successifs suivants : l’argumentaire favorable ou défavorable à la « clause sociale » ; la nature et le rôle de l’Organisation internationale du travail en la matière ; les codes de conduite privés ; les initiatives unilatérales étatiques, soit surtout des lois américaines subordonnant des avantages commerciaux au respect de certaines conditions de travail essentielles, par exemple un âge minimum d’accès au travail ; les initiatives étatiques bilatérales de même nature : celles auxquelles les États-Unis sont partie, puis des initiatives de l’Union européenne ; les tentatives de rattacher cette dimension sociale à des entreprises multinationales de régulation du commerce (GATT et OMC), puis à des accords régionaux : au sein de l’Union européenne et en Amérique du Nord (Accord nord-américain de coopération dans le domaine du travail (ANACT) ; enfin, en guise de conclusion, sous le titre « Policy Implications of International Labor Regulation », des considérations finales relatives à l’impact de cette régulation internationale du travail sur la régie interne des entreprises transnationales et les vues de l’auteur sur ce que serait une clause sociale idéale.
Chacun de ces relativement brefs développements consacrés à autant de sujets s’ouvre sur de vastes horizons. Il ne peut être question ici que de quelques observations particulières se greffant à ces thèmes relativement diversifiés. Ainsi l’argumentaire relatif à la clause sociale est équilibré : il tient compte des positions de différents milieux et apporte ainsi notamment le fruit de l’analyse économique. Il débouche sur des interrogations très pertinentes : par exemple, dans quelle mesure ces standards de travail que l’on prétend imposer sur un plan plus ou moins international sont-ils le reflet d’une culture particulière ? Aussi, l’incontournable et essentiel débat sur l’opportunité de la sanction économique pour assurer leur respect. La présentation de l’OIT s’en tient vraiment — un peu trop — à l’essentiel : l’appréciation de la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi de 1998 (p. 59) pourrait ainsi être plus étoffée. La présentation des codes de conduite privés est bien informée et apporte aussi une bonne vue d’ensemble des difficultés qui se soulèvent, en particulier en ce qui a trait au monitoring de leur application. Les normes unilatérales américaines sont fort bien ramassées, avec un accent sur le travail des enfants ; elles donneraient lieu à des débats sur la compétence territoriale, que l’auteur évoque (p. 91), sans y répondre lui-même. (Pour une étude juridique systématique des différentes facettes de la dimension sociale du commerce international, ce qui n’est pas le propos de l’auteur, on pourrait aussi consulter l’ouvrage de S. Dufour, Accords commerciaux et droits des travailleurs, Sherbrooke : Les Éditions Revue de Droit, 1998, en particulier, pour ce qui est du passage correspondant, les pages 82 à 87.) Qu’il s’agisse de mesures unilatérales, ou même, bilatérales, qu’elles soient américaines ou européennes, l’auteur conclut que des considérations politiques générales gouvernent en définitive leur application (p. 109, 112, 125, 127). Le court historique des débats au sein du GATT et de l’OMC doit, pour sa part, conduire au constat à l’effet que le contexte de la clause sociale a radicalement évolué. Il ne s’agit plus tellement maintenant, pour définir ce qui constitue des conditions de travail non conformes aux normes (substandard), de comparer la rémunération dans les secteurs d’exportation de pays en voie de développement à celle ayant généralement cours dans des pays développés qui importe, mais plutôt de constater l’absence de libertés fondamentales, notamment la liberté syndicale, dans les secteurs manufacturiers de ces pays en voie de développement, secteurs souvent maintenant caractérisés par une technologie de pointe et une haute productivité (p. 134). Au sein de l’Union européenne, un ensemble de principes fondamentaux, qui orientent une politique sociale évolutive, prévalent ; il y aurait maintenant lieu d’ajouter l’apport de la Charte des droits fondamentaux de l’Union adoptée en 2000 (p. 147). Pour ce qui est de l’ANACT, sa présentation, si essentielle veut-elle être, devrait aussi s’interroger sur la portée de l’obligation des Parties de s’efforcer d’améliorer leurs normes de travail (art. 2). On ne fait état que de l’examen de cinq communications du public alors qu’il y en avait eu près d’une vingtaine au moment de la publication de l’ouvrage, dont une importante affaire relative à la discrimination fondée sur la grossesse. Surtout, le jugement plutôt sévère de l’auteur sur l’ensemble de cet Accord et son application, qu’il soit par ailleurs justifié ou non, repose en partie sur ce qui nous semblerait une certaine méprise : l’ANACT et ses institutions n’ont pas pour mission, du moins immédiate et directe, de réparer le préjudice causé à des salariés par le comportement illégal d’employeurs, multinationaux en l’occurrence, et de redresser le comportement de ces derniers, mais plutôt de faire en sorte que les institutions étatiques du travail fonctionnent adéquatement dans chaque pays (p. 162–164). Enfin, l’auteur favorise la sanction économique, de préférence dans un accord multilatéral régional pour ce qui est de « sa » clause sociale (p. 175 et 177) : la protection des droits des salariés ne se distinguerait-elle pas à cet égard de celle du commerce international ?
Considérant maintenant l’ouvrage dans son ensemble, on pourrait souhaiter, d’un point de vue théorique ou méthodologique, que l’auteur s’efforce d’exposer analytiquement les liens pouvant unir des mesures ou des comportements s’attachant à des entreprises privées, d’une part, et des instruments officiels ou publics, à différents niveaux, de l’autre. Mais, plus pragmatiquement, il n’empêche que nous sommes en présence d’une synthèse fort intéressante et utile des différentes prises en compte de la dimension sociale du commerce international. Elle est vivante, animée d’un souci humaniste et claire. Elle s’ouvre ainsi, tant par sa substance propre que par ses sources bibliographiques, sur des incursions plus spécialisées, quant à leur objet ou à leur approche disciplinaire. L’auteur a ainsi fort bien réalisé le but qu’il proposait au lecteur.