Résumés
Résumé
Cet article se penche sur l’apport de nouvelles archives au travail des historiens de la Chine, et plus spécifiquement, sur le cas des Archives nationales de la Mongolie Khalkha, qui fit partie de l’empire des Qing de 1690 à 1911. Nous examinerons le lien entre la matérialité documentaire et les prémices épistémologiques du domaine de l’histoire de la Chine et de ses frontières.
Abstract
This article explores the contribution of new archives to the work of China historians, focusing on the case of the National Archives of Khalkha Mongolia, which was part of the Qing Empire from 1690 to 1911. I explore the intersection between the materiality of documents and the epistemological premises of the field of the history of Chinese frontiers.
Corps de l’article
En 1968, Charles Bawden écrivait, dans son ouvrage fondateur sur l’histoire de la Mongolie, qu’« il ne peut y avoir moins de pages blanches dans l’histoire du monde civilisé que dans l’histoire de la Mongolie du XIXe siècle »[1]. Il ajouta que c’est faute d’enthousiasme et de documentation que ce coin de l’empire des Qing (1636–1911) est demeuré négligé des chercheurs. Un demi-siècle s’est écoulé : de nouvelles générations d’historiens de la Chine et de ses frontières, forts de nouvelles perspectives et de nouvelles sources documentaires ont entrepris de noircir ces pages blanches de l’histoire. Écrivant dans un contexte de Guerre froide caractérisé par une fermeture des frontières et des accès aux archives, Bawden ne se doutait pas que, loin de faire défaut, la documentation sur la Mongolie du XIXe siècle était telle que la génération suivante la décrirait comme l’une des sociétés pastorales les mieux documentées de l’histoire de l’Humanité.
Les changements géopolitiques suivant la chute de l’URSS ont grandement influencé l’écriture de l’histoire, non seulement en rendant obsolètes les conceptions binaires du monde, mais aussi en redéfinissant le domaine des sources empiriques qui alimentent leurs travaux. Cet article se penche sur l’apport de nouvelles archives au travail des historiens de la Chine, et plus spécifiquement, sur le cas des Archives nationales de la Mongolie Khalkha, qui fit partie de l’empire des Qing de 1690 à 1911[2]. Nous examinerons le lien entre la matérialité documentaire et les prémices épistémologiques du domaine de l’histoire de la Chine et de ses frontières, en portant une attention particulière à la manière dont ces éléments se sont transformés au cours des dernières décennies après 1990. Premièrement, nous montrerons que les apports de l’histoire sociale et environnementale au domaine de l’histoire politique ont orienté le travail des chercheurs vers de nouvelles sources documentaires, à un moment où une fenêtre d’accès s’était ouverte—avant qu’elle ne se referme progressivement sous Xi Jinping. Nous soulignerons ensuite les limites du seul usage d’archives conservées à Beijing pour comprendre les sociétés frontalières. Nous montrerons que la riche documentation des archives de Mongolie permet de capter les voix d’acteurs marginalisés et de corriger des « silences archivistiques »[3]. Nous illustrerons enfin par quelques exemples les manières dont l’usage de nouvelles archives situées au sein des territoires frontaliers permet de repenser les structures de pouvoir de l’administration étatique des Qing.
Archives, pouvoir et histoire
Comme le rappelle Jacques Derrida, « nul pouvoir politique sans contrôle de l’archive, sinon de la mémoire »[4]. L’histoire de l’institution des Archives de la Mongolie étant étroitement liée à la constitution du pouvoir étatique et à la transformation des structures politiques, un retour dans le temps et un survol de la constitution de ces archives s’imposent[5]. Au lendemain de la prise d’Ourga (Oulan-Bator) par les forces conjointes mongoles et russes, qui établirent un nouveau gouvernement révolutionnaire en juillet 1921, un groupe d’intellectuels mené par le bouriate Jamsrano fonda en novembre de la même année l’Institut des écritures et des manuscrits. L’entreprise avait pour principal objectif de rassembler des documents sur l’histoire, la philologie, l’ethnographie et l’archéologie des Mongols. Pour y parvenir, l’Institut des écritures et manuscrits émit des documents de voyage à destination de délégués, dont Jamsrano lui-même, qui eurent pour mission de sillonner la Mongolie, la Bouriatie et la Mongolie intérieure en quête de documentation historique[6]. En 1927, les Archives nationales furent officiellement fondées[7]. Trente ans plus tard, en 1957, elles furent déplacées dans un édifice situé dans le centre-ville d’Oulan-Bator, en face de l’Université nationale de Mongolie. Maintenues hors d’accès pour les chercheurs étrangers lors de la période communiste, la révolution démocratique de 1990 instaura une nouvelle ère de liberté de la presse, ce qui se traduisit par une ouverture presque totale aux documents. Jusqu’en 2015, les chercheurs pouvaient prendre place dans la salle de lecture d’un bâtiment de style soviétique, à quelques pas du Parlement, surplombant l’iconique Place Sukhbaatar. Une vitre séparait la salle du bureau des employés chargés de surveiller les chercheurs, et une pancarte « Caméra en marche » trônait dans la pièce. Traces d’une autre époque marquée par la surveillance, le mobilier rappelait l’origine de ces documents d’archives, issus d’appareils étatiques où s’entremêlaient contrôle, censure et hiérarchie.
Avec la montée des prix de l’immobilier dans le centre-ville, l’État entreprit de déplacer plusieurs édifices gouvernementaux à quelque vingt kilomètres de là, tout près de l’aéroport Gengis Khan, qui allait être lui aussi reconstruit plus loin[8]. Un bâtiment flambant neuf fut donc érigé au beau milieu de plaines à l’extérieur de la ville, loin de toute concentration résidentielle et de toute activité commerciale. Le Bureau de l’immigration subit le même sort, et fut reconstruit non loin des nouvelles Archives. Ce nouveau bâtiment concentre plusieurs unités administratives consacrées à la conservation de documents officiels. L’immeuble vitré de cinq étages ne peut offrir de plus grand contraste avec l’édifice précédent, tant sur le plan architectural qu’urbanistique. La nouvelle salle de lecture, spacieuse et lumineuse, tranche avec la précédente salle, apparemment placée sous étroite surveillance. À une heure de bus des quartiers animés de la capitale, l’endroit n’offre désormais ni café ni restaurant, mais permet, depuis la cafétéria du cinquième étage, la contemplation des sommets enneigés surplombant les plaines. Chevaux et moutons s’aventurent parfois dans le parc de stationnement pour en brouter les alentours gazonnés. Faisant abstraction de l’autoroute déserte et de la piste d’atterrissage aboutissant presque à l’édifice des Archives, on ne peut s’empêcher de penser que c’est probablement dans un décor similaire que se sont couvertes d’encre les pages que l’on consulte en ces lieux.
Si les sources orientent l’écriture de l’histoire, le contexte socio-économique entourant la constitution des institutions d’Archives joue également un grand rôle dans la manière dont elles sont rendues consultables, ce qui ne manque pas d’influencer en retour le travail des historiens. La fondation de l’État mongol, la répression politique de l’ère soviétique puis l’ère de l’expansion capitaliste expliquent les refontes successives des Archives nationales. La question de l’accès n’est qu’un exemple parmi tant d’autres des paramètres qui déterminent le travail de recherche. Avec la révolution numérique, les bases de données ont remplacé les catalogues au format papier, facilitant le repérage de certains sujets, mais détachant aussi les documents du contexte dans lequel ils ont été produits. En effet, l’accès aux documents par le biais de base de données isole les documents les uns des autres, contrairement à l’accès aux collections physiques qui préservent généralement l’ordre original des documents. Les Archives de Mongolie n’ont pas encore embrassé ce virage numérique, ce qui force le chercheur à feuilleter des dizaines de documents avant de parvenir à ce qu’il cherche, plutôt que d’y accéder instantanément à l’aide d’un mot-clé. Ce temps de recherche permet cependant d’appréhender les documents suivant l’ordre dans lequel ils ont été produits sous l’ère Qing, ce qui permet de contextualiser la problématique à laquelle le chercheur désire répondre.
Au-delà du cas de la Mongolie, les archives situées à mille lieues des centres du pouvoir politique ont fait l’objet d’un engouement croissant chez les historiens depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’émergence de l’histoire sociale a entraîné l’expansion des recherches hors du domaine des élites politiques caucasiennes et masculines. Bien que des auteurs se soient penchés sur l’histoire de la vie quotidienne avant les années 1960, cette époque marquée par les révoltes et les mouvements postcoloniaux à travers le monde a fait office de cadre pour l’essor de l’histoire sociale. Les travaux d’E. P. Thompson sur les classes ouvrières anglaises constituèrent un modèle quant à l’utilisation combinée de documents étatiques et de documents manuscrits émanant d’individus issus des classes populaires[9]. Au sein de ce courant, les peuples colonisés, marginalisés, les femmes et les autochtones sont devenus les nouveaux acteurs des récits historiques. Hors de la sphère de l’Humanité, le reste du vivant s’est taillé une place dans les écrits historiques lors de l’émergence du domaine de l’histoire de l’environnement dans les années 1970[10]. Les auteurs d’ouvrages en histoire environnementale entreprirent de redéfinir l’histoire comme un produit d’interactions entre des acteurs humains et non-humains, brisant la dichotomie entre la nature et la culture et mettant l’accent sur les dynamiques relationnelles entre ces deux pôles. En d’autres termes, ils créèrent de nouveaux cadres théoriques permettant de reconnaître l’empreinte de la nature sur le politique, ainsi que la politisation des connaissances sur le monde naturel[11]. Ces développements théoriques s’opèrent en parallèle avec l’émergence de nouvelles sources documentaires permettant de nourrir ces courants intellectuels et de les développer sur la base de matériel empirique jusqu’alors non exploité. Les Archives de la Mongolie constituent un exemple de sources documentaires mettant en lumière des éléments de la vie quotidienne dans la steppe ainsi que les transformations environnementales au cours de la période Qing.
Percées méthodologiques et nouvelles archives
Cet élargissement successif des perspectives s’est également opéré dans le domaine de l’histoire de la Chine des Qing. En effet, la génération de John Fairbank tentait de caractériser l’influence exercée par les élites occidentales sur le peuple chinois, dépeignant la Chine comme une entité passive dont les fonctionnaires ne purent s’adapter au nouvel ordre mondial des États-nations[12]. Cette tendance à représenter les peuples non-occidentaux comme statiques et inertes ne se limitait pas à la sinologie, mais constituait également un paradigme dominant en anthropologie[13]. Avec le tournant des années 1980 émergea un nouveau courant qui entreprit de déconstruire le mythe d’une Chine immuable. Il porta la focale sur les acteurs chinois ainsi que sur les dynamiques internes à la Chine telle que les factions d’officiels chinois. Ces nouvelles perspectives ne sont pas sans lien avec celles l’histoire sociale dont la genèse est contemporaine des mouvements de décolonisation, et qui remirent en question l’eurocentrisme caractéristique des empires coloniaux. Les chercheurs tentèrent donc de dépasser les récits produits par les élites coloniales et mirent en lumière le rôle de divers groupes dont l’agentivité avait été négligée. Les travaux de Paul Cohen incarnent ce courant qui invite les chercheurs à développer des approches centrées sur la Chine plutôt que portées sur les relations Chine-Europe[14]. Ce furent donc les élites chinoises[15], les femmes[16], et les groupes ethniques de la Chine qui reçurent l’attention croissante des chercheurs. En particulier, l’école de la « Nouvelle histoire des Qing » (New Qing History) contribua à redéfinir la Chine des Qing comme multiethnique, soulignant l’apport continu de la culture mandchoue à l’administration impériale et questionnant le paradigme de la sinisation selon lequel les conquérants sont assimilés à la civilisation Han[17]. Bien sûr, ce courant n’était pas purement pionnier et s’appuyait sur des recherches existantes ; la nouveauté que l’on évoque ici est finalement toute relative. Ce regain d’intérêt pour des entités politiques situées hors des cercles conventionnels se traduisit ainsi par le déplacement du travail des chercheurs vers d’autres types de sources documentaires. Par exemple, aux correspondances diplomatiques consultées par John Fairbank, se sont ajoutés les écrits des femmes, les documents privés (民间文献, minjian wenxian)[18] et les sources en langues étrangères telles que le mandchou, le ouïgour, le tchaghataï, le mongol, le tibétain, et le thaï.
Toutefois, bien que les percées empiriques et méthodologiques en histoire de la Chine soient liées aux courants théoriques des sciences humaines, l’ouverture progressive des archives de Chine et de Taiwan au cours du XXe siècle a également joué un grand rôle. Dans les décennies 1950 et 1960, les archives chinoises étaient complètement fermées. De 1960 à 1965, certaines collections préservées à Taiwan, comme celles sur les Guerres de l’Opium, sur la guerre civile des Taiping, sur la guerre sino-française et sur la révolution de 1911 devinrent accessibles. De 1965 à 1979 s’ajouta aux archives ouvertes la collection des « mémoires du Palais » (zouzhe, 奏折) du Musée national du Palais de Taiwan, ainsi que d’autres documents locaux. Enfin, dans les années 1980, ce sont 3 500 institutions d’archives de Chine continentale qui ouvrirent leurs portes, avec un accès restreint et changeant[19]. Bien sûr, il est essentiel de considérer également les nombreuses publications de recueils de documents, qui servent de matériel de choix à beaucoup d’historiens et qui se sont multipliées au cours des dernières décennies[20]. À cela s’ajoutent depuis quelques années les bases de données facilitant grandement l’accès aux textes et permettant des recherches rapides à l’aide de mots-clés.
Toutefois, la tendance à l’ouverture des archives chinoises s’est inversée sous le mandat de Xi Jinping, élu en 2012, et un nombre significatif de sources liées aux zones frontalières, à la cartographie, et à d’autres enjeux jugés sensibles devinrent inaccessibles[21]. Ainsi, ces nouvelles restrictions contraignirent les chercheurs à se tourner vers des sources documentaires hors de Chine. Bien que les politiques de Xi limitent considérablement le travail des historiens, le recours aux sources hors de la Chine ne peut qu’accentuer la tendance à inclure de nouveaux acteurs situés hors des cercles élitaires, tendance par ailleurs amorcée avec le tournant de l’histoire sociale. Les Archives nationales de Mongolie constituent donc une institution de choix pour les chercheurs souhaitant prendre le contre-pied des effets de la censure sur les documents conservés en Chine, et désirant repenser les structures de pouvoir en incorporant de nouveaux acteurs aux récits historiques conventionnels.
Un examen rapide de l’historiographie de la Mongolie des Qing permet de constater le poids des compilations institutionnelles réalisées par l’État central ainsi que des écrits des missionnaires jésuites parmi les ouvrages fondateurs[22]. En effet, les chercheurs occidentaux se sont initialement appuyés sur les codes de loi impériaux[23], les constitutions administratives[24] et les organes situés à Beijing comme le Lifanyuan[25] pour écrire l’histoire de la Mongolie des Qing[26]. Or, les omissions et les distorsions ne deviennent visibles que lorsque ces publications de l’État central sont confrontées aux documents locaux, exercice que les chercheurs ont entrepris récemment[27]. Pour illustrer cela, il convient de donner un aperçu du contenu des Archives nationales de Mongolie afin de souligner, et d’appeler à éventuellement emplir, quelques « silences archivistiques ».
Des archives négligées
Les Archives nationales de Mongolie contiennent environ 1 260 000 lettres au total, en sus de sources audiovisuelles et de journaux. Les documents les plus anciens remontent à l’année 1647, et l’on y retrouve des manuscrits en sept langues—le mongol classique et cyrillique, le mandchou, le chinois, le tibétain, le russe, l’anglais et le français[28]. L’organisation des documents de l’ère Qing en 224 fonds (ou collections) reflète, à peu de choses près, la structure administrative de l’époque, dans la mesure où chaque collection correspond à une institution administrative ou religieuse[29]. En tête du catalogue figurent les collections M-1 et M-2, correspondant respectivement aux bureaux des deux surintendants représentant l’État central (en mongol Saiid ; en mandchou Amban ; en chinois Banshi dachen 辦事大臣). Le premier était en poste à Khüriy-e (aujourd’hui appelé Oulan-Bator), et le second à Uliyasutai, dans la partie occidentale de la Mongolie. La plupart des documents de ces deux collections sont rédigés en langue mandchoue, plusieurs sont en mongol ou bilingues mandchou-mongol, voire trilingues et incluant une version chinoise. On y trouve également des documents rédigés seulement en chinois et en russe. Le surintendant de Khüriy-e régnait sur les deux provinces (appelées ligues) de l’Est, soit Secen Qan et Tüsiyetü Qan, tandis que les deux provinces de l’Ouest étaient sous la juridiction du surintendant de Uliyasutai, soit Sain Noyan et Jasagtu Qan, ainsi que Khovd[30]. Lorsque les Mongols se séparèrent des Qing en 1911, les archives qui se trouvaient à Uliyasutai furent brûlées, ce qui explique que cette collection ne compte que 206 items, par contraste avec les 8 932 objets de la collection du surintendant de Khüriy-e, demeurée pratiquement intacte.
Les surintendants jouaient le rôle de courroies de transmission entre le gouvernement central de Beijing et l’administration locale mongole. Les précédentes études historiques axées sur l’État central avaient tendance à voir le Lifanyuan comme l’organe par excellence liant le pouvoir central aux localités des frontières[31]. Or, un examen des Archives de Mongolie révèle le rôle charnière des surintendants dans l’administration politique des territoires non-Han, alors que le Lifanyuan dispose de fonctions apparaissant davantage comme symboliques et rituelles. Notons également que les assistants mongols des surintendants (canzan dachen, 參贊大臣) se chargeaient de la majeure partie du travail administratif de leurs supérieurs hiérarchiques[32].
Les autres collections correspondent aux bannières mongoles[33], aux bureaux-chefs des provinces, à la supervision des stations postales, aux postes frontaliers, aux cartes géographiques, à la traduction et transmission de documents, aux pâturages impériaux, et aux différents domaines ecclésiastiques. La richesse de la documentation des bannières varie d’une collection à l’autre : alors que certaines bannières sont bien connues, pour d’autres, seuls quelques documents demeurent accessibles. Les collections des sièges des deux provinces de l’Est offrent une richesse documentaire considérable et encore peu exploitée. Ainsi, une tendance générale de la littérature affirme que les chefs des provinces n’occupent qu’une fonction symbolique, sans pouvoir réel au sein de l’administration[34] ; or, un examen des sources documentaires de ces collections donne un tout autre point de vue sur ces acteurs. En effet, ils étaient chargés de relayer les directives des surintendants aux chefs des bannières, et de veiller à leur bonne mise en oeuvre au sein des sociétés locales. Leur travail de coordination impliquait également l’adaptation de certaines politiques au contexte local, la supervision et la gestion des relations entre les bannières, notamment pour ce qui avait trait à l’allocation des pâturages en temps de catastrophe naturelle. Ainsi, ces derniers jouaient un rôle clé au sein de l’administration Qing, et une compréhension de l’histoire politique et locale serait bien incomplète sans un examen approfondi des traces laissées par le travail de ces acteurs[35].
Remédier aux silences
En somme, les silences des archives d’hier constituent les pistes de recherche de demain. Avec les changements dans l’accès et dans la constitution des archives de différents États, les acteurs qui apparaissaient comme périphériques ou absents des sources pourraient se retrouver au premier plan de nouvelles recherches incorporant de nouvelles sources et combinant divers langages encore peu enseignés. En d’autres termes, la politique actuelle de censure de l’État chinois ne devrait pas être vue comme un frein à l’entreprise de recherche sur des sujets jugés « sensibles », mais plutôt comme une invitation pour les chercheurs à faire preuve d’imagination dans l’utilisation des sources disponibles. Les récents développements de l’histoire sociale ont établi qu’il n’est plus acceptable d’exclure des travaux historiques les acteurs absents des sources officielles. Il en va de même pour l’histoire des peuples frontaliers des Qing : leur exclusion sous prétexte de censure ou de rareté des sources n’est plus valide, compte tenu de l’existence de collections nouvellement accessibles aux chercheurs, en Mongolie, mais également au sein d’autres pays frontaliers tels que le Kazakhstan, où l’on retrouve un nombre significatif de documents en langue ouïgoure. Cela ne signifie pas que ces sources suffisent à rendre compte de l’histoire de tous les acteurs. Malgré le fait que la recherche s’appuie de plus en plus sur des sources alternatives, beaucoup d’acteurs—sinon une majorité—demeurent absents des documents écrits. À cet égard, des auteurs ont remis en doute le potentiel des archives produites par les régimes coloniaux pour reconstruire l’histoire des communautés locales, compte tenu des omissions et des exclusions[36]. Certes, bien des documents des archives de Mongolie sont le produit d’élites locales tentant de concilier leurs intérêts avec ceux de l’administration impériale. Ainsi, nombre d’acteurs furent exclus des recensements et bien des pratiques ne furent jamais écrites, ce qui doit servir d’incitation à réfléchir aux limites des sources documentaires et à redoubler d’efforts pour reconstituer l’histoire de ces absents. Tel que l’évoque Jeannette Bastian, il est possible de reconstruire une partie des événements passés en se fondant sur ces documents qui sont des « témoins du passé » malgré eux, écrits sans l’intention de faire partie d’un corpus d’écrits historiques[37]. Ces documents incluent les rapports administratifs, les inscriptions, la culture matérielle, et ils doivent être interrogés par l’intermédiaire de sources complémentaires comme les témoignages oraux, les travaux archéologiques et ethnographiques. Finalement, si pour les chercheurs de la génération de Bawden, les pages blanches de l’histoire de la Mongolie s’expliquaient par le silence des archives, l’on peut plus sûrement parler de silence de l’historiographie depuis l’ouverture des Archives de Mongolie.
Parties annexes
Note biographique
Candidate au doctorat en études de l’Asie intérieure à Université Harvard, sa recherche actuelle porte sur la cartographie locale en Mongolie sous les Qing. Dans le cadre d’une maîtrise en études est-asiatiques à l’Université McGill, elle a réalisé des recherches ethnographiques sur la Mongolie intérieure contemporaine. Sa thèse de doctorat, intitulée « Mapping Colonial Mongolia: Qing Cartography and the Transformation of the Steppe », s’appuie sur un séjour de recherche d’un an aux Archives nationales de Mongolie ainsi qu’aux Premières Archives historiques de la République Populaire de Chine.
Notes
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[1]
Charles Bawden, The Modern History of Mongolia, New York, Routledge, 2013 (1968), p. 108 (traduction libre).
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[2]
Ces dates s’appliquent à la Mongolie des Khalkha—les territoires de Mongolie Intérieure furent annexés en 1635 et ceux de Jungars entre 1756 et 59. Le territoire de la Mongolie des Khalkha correspond à peu de choses près à la République populaire mongole actuelle et les Khalkha en constituent le groupe ethnique majoritaire.
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[3]
On pense aujourd’hui les archives comme des lieux de pouvoir permettant de reconstituer les voix de certains acteurs seulement. Michel-Rolph Trouillot a démontré que les archives contiennent autant de voix que de silences, et donc que l’écriture de l’histoire donne préséance à ceux dont les traces sont conservées au sein d’archives institutionnelles. Décrivant les archives comme hantées par les silences, Carter défend l’idée que pour certains groupes marginalisés, le silence constituait également un moyen de contestation. Voir Rodney G. S. Carter, « Of Things Said and Unsaid: Power, Archival Silences, and Power in Silence », Archivaria, nº 61 (mars 2006), p. 215–233 ; Michel-Rolph Trouillot, Silencing the Past: Power and the Production of History, Boston, Beacon Press, 1995, 191 p.
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[4]
Jacques Derrida, Mal d’archive, Paris, Galilée, 1995, p. 15.
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[5]
Pour les chercheurs en archivistique, l’institution et le lieu physique abritant les documents ou objets font partie de l’archive elle-même. Michelle Caswell, « “The Archive” is Not An Archive: Acknowledging the Intellectual Contributions of Archival Studies », Reconstruction, vol. 16, no 1 (2016), p. 2.
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[6]
Quelques-uns de ces documents de voyage se retrouvent dans la collection personnelle du professeur Christopher Atwood. L’un d’eux fut émis à Jamsrano le 24 août 1922, lui permettant de se rendre dans trois villes de Russie pour rassembler des documents et constituer les archives de Mongolie (« Soumis par le Comité des écritures et des manuscrits pour l’émission d’un document de voyage certifié » [Mongġol ulus-un sudur bicig-ün küriieleng-ün ġajar-aca ünemlen qamaġalaqu bicig sidken olġuġsan-u ucir]). Voir aussi dans la même collection le document de voyage issu le 5 juin 1922 à Jamsrano.
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[7]
Alan J. K. Sanders, Historical Dictionary of Mongolia, Troisième édition, Lanham, The Rowman & Littlefield Publishing Group, 2010, p. 5.
-
[8]
L’afflux de capitaux étrangers voués à l’exploitation minière alimenta la croissance économique de 2001 à 2011, ce qui façonna le paysage urbain et fit gonfler les prix de l’immobilier. Bien que l’exploitation minière en Mongolie encadrée par l’État date de l’ère Qing, l’extraction des minéraux devint une stratégie nationale de développement économique au cours des années 1990 et perdure jusqu’à ce jour. De 1990 à 2017, 73 % des capitaux étrangers alimentent le secteur minier. Voir Sara L. Jackson, « Imagining the Mineral Nation: Contested Nation-Building in Mongolia », Nationalities Papers, vol. 43, nº 3 (mai 2015), p. 437–456 ; Tsolmon Baatarzorig, Ragchaasuren Galindev, et Hélène Maisonnave, « Effects of Ups and Downs of the Mongolian Mining Sector », Environment and Development Economics, vol. 23, nº 5 (octobre 2018), p. 527–542.
-
[9]
Edward Palmer Thompson, The Making of the English Working Class, Londres, Victor Gollancz, 1963, 848 p.
-
[10]
Alfred W. Crosby, « The Past and Present of Environmental History », American Historical Review, vol. 100, nº 4 (1995), pp. 1177–1189 ; Linda Nash, « The Agency of Nature or the Nature of Agency? », Environmental History vol. 10, nº 1 (2005), pp. 67–69.
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[11]
Dipesh Chakrabarty, « The Climate of History: Four Theses », Critical Inquiry, vol. 35, nº 2 (2009), pp. 197–222 ; Bruno Latour, Nous n’avons jamais été modernes : essai d’anthropologie symétrique, Paris, La Découverte, 1993, 157 p. ; Robert Marks, China: An Environmental History, Lanham, Rowman & Littlefield, 2017, 468 p. ; Donald Worster, Rivers of Empire: Water, Aridity, and the Growth of the American West, New York, Pantheon Books, 1985, 402 p.
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[12]
Cette perspective ne se limitait pas à la sinologie américaine, mais était aussi partagée par des auteurs français comme Alain Peyrefitte. Voir John Fairbank et al., The Chinese World Order; Traditional China’s Foreign Relations, Cambridge, Harvard University Press, 1969, 430 p. ; Alain Peyrefitte, L’empire immobile ou le choc des mondes : récit historique, Paris, Fayard, 1989, 555 p.
-
[13]
Andy Alaszewski, « Anthropology and Risk », Health, Risk, and Society, vol. 17, nº 3–4 (2015), pp. 205–225.
-
[14]
Les travaux de William Skinner et son modèle régional servant à expliquer l’intégration commerciale des métropoles et des régions rurales environnantes de la Chine constituent un exemple de ce tournant, précédant Cohen. Voir Paul A. Cohen, Discovering History in China: American Historical Writing on the Recent Chinese Past, New York, Columbia University Press, 1984, 296 p. ; William Skinner, The City in Late Imperial China, Stanford, Stanford University Press, 1977, 820 p.
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[15]
Quelques exemples d’ouvrages sur les élites chinoises écrits après le recentrage sur la Chine amorcé par Cohen : James M. Polachek, The Inner Opium War, Cambridge, Harvard University Press, 1992, 400 p. ; Beatrice S. Bartlett, Monarchs and Ministers: The Grand Council in Mid-Ch‘ing China, 1723–1820, Berkeley, University of California Press, 1991, 417 p. ; William T. Rowe, Saving the World: Chen Hongmou and Elite Consciousness in Eighteenth-Century China, Stanford, Stanford University Press, 2001, 601 p. ; R. Kent Guy, Qing Governors and Their Provinces: The Evolution of Territorial Administration in China, 1644–1796, Seattle, University of Washington Press, 2010, 512 p.
-
[16]
Susan Mann, Precious Records: Women in China’s Long Eighteenth Century, Stanford, Stanford University Press, 1997, 340 p. ; Dorothy Ko, Teachers of the Inner Chambers: Women and Culture in Seventeenth-Century China, Stanford. Stanford University Press, 1994, 395 p.
-
[17]
Le discours d’Evelyn Rawski à l’Association pour les études asiatiques en 1996, suivi d’une réponse par Ho Ping-ti, a lancé un débat, dont la polarisation ne fit que s’accroître, sur la validité du cadre conceptuel de la sinisation tel qu’appliqué aux Mandchous. S’en suivirent de nombreuses recherches examinant la Chine sous l’angle des dynamiques ethniques, des frontières, et de la structure politique des Qing que les nouveaux historiens des Qing comparèrent avec les empires occidentaux. Voici une liste non exhaustive d’ouvrages ayant contribué à la Nouvelle histoire des Qing : Evelyn S. Rawski, « Presidential Address: Reenvisioning the Qing: The Significance of the Qing Period in Chinese History », The Journal of Asian Studies, vol. 55, no 4 (1996), pp. 829–850 ; Ping-Ti Ho, « In Defense of Sinicization: A Rebuttal of Evelyn Rawski’s “Reenvisioning the Qing” », The Journal of Asian Studies vol. 57, nº 1 (1998), pp. 123–155 ; Mark C. Elliott, The Manchu Way; the Eight Banners and Ethnic Identity in Late Imperial China, Stanford, Stanford University Press, 2001, 580 p. ; James A. Millward, Beyond the Pass: Economy, Ethnicity, and Empire in Qing Central Asia, 1759–1864, Stanford, Stanford University Press, 1998, 353 p. ; James A. Millward, New Qing Imperial History: The Making of Inner Asian Empire at Qing Chengde, London, New York, Routledge-Curzon, 2004, 246 p. ; Joanna Waley-Cohen, « The New Qing History », Radical History Review, nº 88 (janvier 2004), pp. 193–206 ; Johan Elverskog, Our great Qing: the Mongols, Buddhism and the state in late imperial China, Honolulu, University of Hawai’i Press, 2006, 243 p.
-
[18]
Michael Szonyi conclut son dernier recueil en soulignant que les documents privés ont ouvert de nouvelles pistes de recherche, notamment sur la structure des familles, la propriété, et l’économie. Michael Szonyi, A Companion to Chinese History, Hoboken, John Wiley & Sons, 2017, p. 326.
-
[19]
Pour une introduction à l’histoire des archives de la Chine, voir Wa Ye, Chinese Archives: An Introductory Guide, Berkeley, Institute of East Asian Studies, University of California, Center for Chinese Studies, 1996, 355 p. ; Frederic E. Wakeman, Telling Chinese History: A Selection of Essays, Berkeley, University of California Press, 2009, p. 315.
-
[20]
Pour le recensement le plus exhaustif des sources publiées et des ouvrages de référence sur l’histoire de la Chine, voir Endymion Porter Wilkinson, Chinese History: A New Manual, cinquième édition, Cambridge, Harvard University Asia Center, 2018, 1302 p.
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[21]
Ghosh et Urbansky observent que l’ouverture des archives chinoises atteint son apogée en 2007 avec l’ouverture des Archives du ministère des Affaires étrangères, pour commencer à se refermer sous le mandat de Xi. Lors de mon passage aux Premières archives de Chine en janvier 2018, j’ai pu constater qu’une grande partie des documents ayant trait aux régions mongoles étaient hors d’accès. Également, les documents touchant à la cartographie et à la production d’atlas n’étaient pas disponibles. Arunabh Ghosh et Sören Urbansky, « China from Without: Doing PRC History in Foreign Archives—Editorial Introduction », The PRC History Review, vol. 3, nº 2 (2017), p. 1.
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[22]
Par exemple, l’historien Jacques Legrand fonde son étude de l’administration mongole sur la version mongole du Code des lois du ministère des Affaires de Mongolie extérieure (Lifanyuan zeli, 理藩院则例) conservé à Beijing. Les travaux de N. Di Cosmo couvrent surtout la documentation de l’État central, Elverskog examine surtout des documents produits par les missionnaires jésuites basés à Ordos et, comme mentionné supra, J. Bawden déplorait le manque d’accès aux sources primaires mongoles au moment d’écrire son ouvrage fondateur sur l’histoire de la Mongolie. Voir Jacques Legrand, L’administration dans la domination sino-mandchoue en Mongolie Qalq-a : version mongole du Lifanyuan zeli, Paris, Presses universitaires de France, 1976, 221 p. ; Nicola Di Cosmo, « Qing Colonial Administration in Inner Asia », The International History Review, vol. 20, nº 2 (1998), pp. 287–309 ; Johan Elverskog, Our great Qing: The Mongols, Buddhism and the state in late imperial China, Honolulu, University of Hawai’i Press, 2006, 243 p.
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[23]
Par exemple le Menggu lüli 蒙古律例 [Mongol Statutes and Precedents], Haikou, Hainan chubanshe, 2000 [c1774].
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Par exemple, le Daqing huidian 大清會典 [Constitution administrative des Qing], qui fut modifié et republié par différents empereurs.
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[25]
Le Lifanyuan est un organe administratif créé au début du XVIIe siècle dans le but initial d’administrer les régions mongoles nouvellement annexées à l’Empire Qing. Jusqu’en 1636, cet organe administratif portait le nom de Mongol Jurgan (Bureau des affaires mongoles), avant d’être changé pour Lifanyuan. D’ailleurs, dans les documents mongols, le nom Mongol Jurgan, continue d’être employé ponctuellement jusqu’à la fin des Qing. La mission de cet organe s’élargit en 1636 pour inclure l’administration des peuples frontaliers du Nord et du Nord-Ouest, incluant la Russie. Suivant les conventions, je conserverai le néologisme Lifanyuan plutôt qu’une version traduite. Voir également le Lifanyuan zeli, 理藩院则例, une collection des instituts et règles du Lifanyuan.
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[26]
Le chercheur Chuluu E. Khohchahar observe les limites de l’étude des codes de lois de l’état central et souligne l’importance d’incorporer des documents locaux pour comprendre le système légal de la Mongolie des Qing. De la même façon, plusieurs études réalisées par des chercheurs japonais et mongols se penchent sur les documents d’archives de la Mongolie des Qing, un exemple étant l’ouvrage du mongoliste Oka Hiroki. Voir Hiroki Oka, « Haruha, Mongoru ni okero shinchō no meiki seito shihai no seiritsu katei », The Historical Society of Japan, vol. 97, no 1 (1988), pp. 1–32 ; Chuluu E. Khohchahar et Mamoru, Hagihara, « Mongoru hōsei shi kenkyū dōkō [Research Trends Regarding Mongolian Legal History] », Hōsei shi kenkyū, vol. 64, (2014), pp. 171–211.
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[27]
Quelques exemples de travaux ayant contribué à déconstruire la perspective étatique en examinant les sociétés locales : Jonathan Schlesinger, A World Trimmed with Fur. Wild Things, Pristine Places, and the Natural Fringes of Qing Rule, Stanford, Stanford University Press, 2017, 288 p. ; Dear Devon Margaret, « Marginal Revolutions: Economies and Economic Knowledge between Qing China, Russia, and Mongolia, 1860–1911 », thèse de doctorat (Études de l’Asie Intérieure), Université Harvard, 2014 ; Wei-Chieh Tsai, « Mongolization of Han Chinese and Manchu Settlers in Qing Mongolia, 1700–1911 », thèse de doctorat (Études de l’Eurasie Centrale), Université de l’Indiana, 2017.
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[28]
Tsai, Wei-chieh, « Mongolian National Central Archives » [En ligne], Dissertation Reviews, http://dissertationreviews.org/archives/10369, (page consultée le 10 octobre 2019).
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[29]
Pour un aperçu du catalogue, voir celui compilé par Hiroshi Futaki, « Mongoru kokuritsu chūō bunshokan shozō no shindai bunsho shiryō—Fondo mokuroku (Historical Documents of the Qing Era Preserved in the National Central Archives of Mongolia: Catalogue of the Archival Fonds) », Fumi shiryō habu chiiki bunka kenkyū kyoten (Journal of the Centre for Documentation & Area-transcultural studies), vol. 1, (2003), pp. 136–47.
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[30]
Pour une liste des fonctionnaires ayant occupé ce poste, voir Zhang Bofeng, Qingdai gedi jiangjun dutong dachen deng nianbiao 清代各地將軍都統大臣等年表, 1796–1911, Taipei, Wenhai chubanshe, 1965.
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[31]
Aux travaux cités plus haut s’ajoute ce plus récent ouvrage collectif portant sur le Lifanyuan: Dittmar Schorkowitz et Chia Ning (ed.), Managing Frontiers in Qing China: The Lifanyuan and Libu Revisited, Leiden ; Boston, Brill, 2017, 462 p. À noter que l’article de Fabienne Jagou dans ce même ouvrage souligne le rôle important du surintendant.
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[32]
Pour un historique de la création de ces postes, voir Di Cosmo, « Qing Colonial ».
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[33]
Les bannières constituaient l’unité administrative de base de la Mongolie Khalkha des Qing, qui en comptait 86 au total. Les bannières couvraient une superficie moyenne de 15 500 kilomètres carrés. Les bannières avaient pour chef un Jasag issu de la noblesse mongole, dont les pouvoirs suivaient une transmission héréditaire. Voir Christopher Atwood, « Banner, Otog, Thousand: Appanage Communities as the Basic Unit of Traditional Mongolian Society », Mongolian studies, vol. 34, (2012), p. 9.
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[34]
Jacques Legrand, L’administration.
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[35]
Et traces il y a : les collections combinées des chefs de provinces et de leurs assistants comptent 28 666 documents pour la province de Tüsiyetü Qan, et 18 281 documents pour la province de Secen Qan, surtout écrits en langue mongole. Hiroshi Futaki, Researching Archival Documents on Mongolian History: Observations on the Present and Plans for the Future. Proceedings of the International Symposium on the Current Situation and Objectives of Research on Archival Materials Related to the History of Mongolia, Oulan-Bator, 2003, pp. 140–141. Notre thèse de doctorat entreprend de documenter le travail des chefs de province dans la cartographie et la réorganisation territoriale des bannières au cours du XIXe siècle.
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[36]
Caroline Elkins est un exemple de chercheuse « sceptique face aux archives ». Caroline Elkins, « Looking beyond Mau Mau », The American Historical Review, vol. 120, nº 3 (2015), pp. 852–868.
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[37]
Jeannette Allis Bastian, « Whispers in the Archives: Finding the Voices of the Colonized in the Records of the Colonizer », dans Political Pressure and the Archival Record, Chicago, Society of American Archivists, 2005, pp. 29–30.