Résumés
Résumé
L’objectif de cet article est de faire un état des lieux de la littérature théorique sur l’approche microéconomique du taux de change réel d’équilibre. Celle-ci se focalise sur l’étude du comportement à long terme du taux de change réel interne, défini comme le prix relatif des biens échangeables en termes de biens non échangeables. Plutôt que de faire un inventaire classique, nous présentons un modèle synthétique d’équilibre général intertemporel à trois agents et à trois secteurs intégrant, dans un cadre unifié, la plupart des caractéristiques proposées par les principaux travaux dans le domaine. Cette méthodologie permet alors d’identifier clairement un vaste ensemble de déterminants fondamentaux du taux de change réel d’équilibre, à la fois du côté offre et du côté demande, d’une part, et de décomposer de manière précise leurs différents mécanismes de transmission, d’autre part. Néanmoins, la richesse théorique évidente de l’approche microéconomique ne doit pas occulter les nombreuses difficultés rencontrées sur le plan empirique, des difficultés découlant pour la plupart des fondements théoriques même de l’approche.
Abstract
This article aims at presenting a theoretical survey relative to the microeconomic approach of the equilibrium real exchange rate. The exchange rate concept considered within this framework is the internal real exchange rate that is the relative price of nontradables. To this regard, we develop an intertemporal general equilibrium model with three agents and three sectors. Then, a large set of fundamental determinants of the equilibrium exchange rate, belonging both to the supply and demand sides, can be put forward. Moreover, this canonical model allows us to isolate transparently the different transmission channels of the fundamentals’ effects.
Corps de l’article
Introduction
Plus personne ne conteste aujourd’hui les disfonctionnements du Système monétaire internationale (SMI) et donc le besoin urgent d’une réforme de son architecture (Davanne, 1998; Bergsten et al., 1999; Cartapanis, 2004). À cet égard un consensus se dégage sur la nécessité de construire un système offrant le meilleur compromis entre flexibilité et stabilité. Dans cet esprit, deux recommandations ont été avancées. Premièrement, il s’agirait pour les pays industrialisés, et principalement le G3, de mettre en place un mécanisme de « surveillance renforcée » par lequel ils assureraient un suivi approfondi de l’évolution des taux de change[1]. Deuxièmement, un système de « parités de références ajustables » constituerait une alternative intéressante à la fois à une caisse d’émission et au flottement totalement libre pour les pays émergents[2]. En définitive, toute réforme crédible du SMI ne peut faire l’économie d’une réflexion préalable sur le problème de la détermination des taux de change réels d’équilibre.
La théorie la plus couramment utilisée dans l’évaluation des taux de change réels d’équilibre est la parité des pouvoirs d’achat (PPA). La théorie de la PPA, énoncée pour la première fois par Cassell (1925), se décline en fait en deux versions, à savoir la PPA absolue et la PPA relative, lesquelles définissent respectivement le taux de change réel d’équilibre comme unitaire et constant. Toutefois, bien qu’elle soit commode à utiliser, cette théorie, dans ses deux versions, présente des défauts majeurs, tant au niveau conceptuel qu’au niveau empirique (Isard, 1997; Sarno et Taylor, 2002; Taylor, 2006).
Ceci a amené les chercheurs à diriger leurs efforts vers la définition d’un taux de change réel d’équilibre axée sur deux principes fondamentaux interreliés. Tout d’abord, les nombreux tests économétriques ont montré qu’en règle générale, les taux de change réels ne sont pas stationnaires, c.-à-d. le taux de change réel d’équilibre n’est pas constant et possède une dynamique propre[3]. Ensuite, il semble qu’un grand nombre de facteurs guident sa trajectoire, insinuant que sa détermination ne peut être considérée indépendamment du contexte macroéconomique. Le taux de change réel d’équilibre doit donc se définir par rapport à une trajectoire d’équilibre compatible avec les équilibres internes et externes d’une économie. Ainsi, dans cette voie de recherche, la littérature théorique (Joly et al., 1996; Hinkle et Montiel, 1999; Hoarau, 2004) fait ressortir deux approches différentes : l’approche macroéconomique et l’approche microéconomique. C’est sur cette dernière approche que nous nous focalisons dans cet article dont l’objectif avoué est d’en proposer une synthèse rigoureuse dans la dimension théorique.
La modélisation microéconomique part de la constatation générale que l’hypothèse de parfaite substituabilité des productions nationales, retenue par les approches basées sur la PPA, n’est pas satisfaisante. En effet, il est fort probable que tous les biens ne se heurtent pas, avec la même intensité, à la concurrence internationale, ce qui implique de désagréger la production nationale en plusieurs secteurs. Cette approche propose donc de retenir une structure de production duale, caractéristique des petites économies ouvertes (Salter, 1959). D’un côté, il existe un secteur traditionnel, peu productif car utilisateur de technologies anciennes, dont la production est destinée au marché national. Ce secteur, abrité de la concurrence internationale, est celui des « biens non échangeables », c.-à-d. des biens qui ne font pas l’objet du commerce avec l’extérieur. De l’autre côté, il existe un secteur plus moderne qui utilise des technologies contemporaines et dont la production est destinée pour l’essentiel à l’exportation. Ce secteur, productif et soumis à la concurrence internationale, est celui « des biens échangeables ».
À cette nouvelle configuration doit forcément correspondre une nouvelle expression du taux de change réel. En effet, les prix des produits des deux secteurs relèvent d’une logique différente. Pour le secteur traditionnel, les prix (Pne) reflètent l’état du marché interne. Pour le secteur moderne, les prix (Pe) reflètent l’état de la concurrence internationale. Si celle-ci est suffisamment forte, ce qui est supposé ici, la loi du prix unique s’applique à l’échelle mondiale pour ces produits, c.-à-d. . Le taux de change réel se définit ensuite comme le prix relatif des biens fabriqués dans l’économie nationale, c.-à-d. le prix relatif desbiens échangés en termes de biens non échangés, (ee/ne) soit . Parconséquent, étant donné ce statut, ses variations sont associées à une modification de l’allocation des ressources entre le secteur des biens échangeables et le secteur des biens non échangeables.
Ainsi, de par sa nature de prix relatif « interne[4] », le taux de change réel peut faire l’objet d’une analyse microéconomique rigoureuse dans le cadre d’un modèle d’équilibre général intertemporel. Le taux de change réel d’équilibre se définit alors comme le prix relatif des biens échangeables en termes de biens non échangeables conduisant à la réalisation simultanée de l’équilibre interne et de l’équilibre externe. L’équilibre interne suppose que l’équilibre sur le marché des biens non échangés, pour un taux de chômage fixé à son niveau naturel, tient pour toutes les périodes. L’équilibre externe est atteint lorsque la contrainte budgétaire intertemporelle, laquelle suppose que la somme actualisée des déficits courants d’un pays est nulle, est satisfaite (Montiel, 1999).
Les modèles appartenant à ce corps d’analyse sont anciens et nombreux. La première modélisation microéconomique du taux de change réel d’équilibre a été proposée par le duo Balassa (1964) et Samuelson (1964). Les auteurs constatent, qu’une fois mesurés dans la même devise, les prix tendent à être plus élevés dans les pays riches que dans les pays pauvres, une différence qu’ils justifient en termes de différentiel de productivité en faveur du secteur des biens échangeables. Le taux de change réel est alors déterminé uniquement par des facteurs du côté offre de l’économie dont l’élément essentiel est le taux de croissance de la productivité globale des facteurs. En d’autres mots, un pays possédant une croissance de la productivité supérieure à ses partenaires commerciaux tend à voir son taux de change réel s’apprécier.
Néanmoins, des travaux plus récents ont montré que certains facteurs du côté demande ne doivent pas être écartés de l’analyse[5]. Notamment, si les hypothèses de parfaite mobilité des capitaux (Edwards, 1989; De Gregorio et Wolf, 1994) et de concurrence pure et parfaite (Allard-Prigent et al., 2000) sont remises en cause, des facteurs comme les dépenses publiques ou les termes de l’échange participent également à la détermination du taux de change réel d’équilibre à long terme. De plus, l’ensemble des déterminants potentiels du change réel s’élargit encore lorsque l’aspect intertemporel est introduit dans l’analyse (Joly et al., 1996; Balvers et Bergstrand, 1997; Burda et Wyplosz, 1998; Agenor, 2000). À l’instar de Montiel (1999), nous montrons alors qu’il est possible de regrouper l’ensemble de ces travaux à l’intérieur d’un cadre de modélisation unifié permettant d’étudier, de manière relativement simple, le comportement du taux de change réel à long terme[6].
Aussi, nous organisons la suite de notre article de la manière suivante. Dans la première section, un modèle microéconomique synthétique de taux de change réel d’équilibre est exposé. La deuxième section analyse l’impact des déterminants fondamentaux domestiques et étrangers, dégagés par la modélisation, sur le taux de change réel d’équilibre à long terme. Enfin, la dernière section conclut sur les principaux enseignements qui ressortent de l’article, ainsi que sur les points faibles de l’approche ayant encouragé le développement de l’approche macroéconomique du taux de change réel d’équilibre.
1. Une modélisation microéconomique du taux de change réel d’équilibre
Le point de départ de notre analyse repose sur la présentation d’un modèle monétaire d’équilibre général intertemporel (Dornbusch, 1983; Montiel, 1999) qui intègre l’ensemble des caractéristiques des travaux précédemment cités. L’objectif ultime de ce modèle est d’isoler les principaux déterminants fondamentaux du prix relatif des biens non échangeables.
1.1 Un modèle général d’optimisation intertemporelle
Nous nous plaçons donc dans le cadre d’une petite économie ouverte parfaitement concurrentielle[7] constituée de trois agents représentatifs (les firmes, les ménages et l’État) et de trois secteurs (exportable, importable et non échangeable). La loi du prix unique, et par déduction la PPA, tient sur le secteur exposé à la concurrence internationale. Ensuite, l’imparfaite substituabilité entre titres domestiques et étrangers, et donc l’imparfaite mobilité des capitaux, est introduite à travers une prime de risque liée au niveau d’endettement du pays, invalidant du même coup la parité d’intérêt réel. Par ailleurs, les prévisions des agents sont supposées parfaites. Enfin, étant donnée la structure de production adoptée, le taux de change réel se définit dans ce modèle comme le prix relatif des biens importables en termes de biens non échangeables, soit plus précisément[8].
1.1.1 Le programme des ménages
Le modèle considère un ménage représentatif qui reçoit l’intégralité des revenus de la production et qui dispose d’une fonction d’utilité intertemporelle séparable dans le temps. Il consomme deux biens : le bien non échangeable et le bien importable. De plus, il reçoit des transferts de l’étranger et supporte le financement des subventions à l’exportation pratiquées par l’État.
Le programme du consommateur peut alors se décomposer en deux parties. D’un côté, il doit déterminer la répartition optimale entre consommation et épargne, c.-à-d. le programme intertemporel. De l’autre, il doit allouer le montant total de la consommation entre biens importables et non échangeables à chaque période, c.-à-d. le programme intratemporel.
a) Le programme intratemporel
Les préférences instantanées dépendent de la consommation de biens importables (cimp) et non échangeable (cne), d’où le programme intratemporel du ménage représentatif[9] :
La solution à ce programme conduit au résultat traditionnel selon lequel le taux marginal de substitution entre le bien importé et le bien non échangé est égal à leur prix relatif, c’est-à-dire au taux de change réel, soit :
De plus, la spécification Cobb-Douglas de la fonction de sous-utilité implique que la dépense de consommation totale est allouée en part égale entre les deux biens :
Enfin, en substituant cette dernière relation dans la partie haute du système (1), la fonction de sous-utilité peut se réécrire sous sa forme indirecte, telle que :
b) Le programme intertemporel
Le ménage représentatif doit ensuite décider du montant optimal de sa consommation. Pour cela, il maximise simplement la fonction de sous-utilité indirecte en tenant compte de sa contrainte budgétaire intertemporelle sur un horizon infini. Ce programme s’écrit comme (annexe (A.1.)) :
où a, y, tx, r, m, ρ, τ, T · tsub · yexp et TR représentent respectivement, en termes de biens importés, la richesse financière composée de titres (étrangers et domestiques) et de monnaies nationales, le revenu national, les taxes forfaitaires, le taux d’intérêt réel, les encaisses monétaires, le taux de préférence pour le présent, les coûts de transaction liés à la consommation, la subvention aux exportations financée par les ménages et les transferts internationaux. Notons que la monnaie est détenue par les ménages selon le motif de transaction. Son introduction se justifie donc par le fait qu’elle permet d’éviter le coût de transaction associé à la consommation.
La résolution de ce programme s’appuie sur la théorie du contrôle optimal (ou maximum de Pontriagin). Ainsi, le programme (5) doit être transformé sous sa forme hamiltonienne :
où et la covariable d’état λ donne l’utilité marginale de la richesse. La solution de l’équation (6) est obtenue par les conditions de premier ordre (7), (8) et (9) :
L’équation (7) est la condition nécessaire pour que la consommation soit à son niveau optimal à chaque période. Elle stipule simplement que le gain d’utilité d’une unité supplémentaire de consommation égalise le coût d’opportunité lié à l’épargne abandonnée.
L’équation (8) donne l’allocation optimale du portefeuille entre titres et monnaie nationale. Cette dernière pose que le gain découlant de la détention d’une unité supplémentaire de monnaie (réduisant les coûts de transactions) égalise les coûts d’opportunité résultant des intérêts non perçus sur les titres (i). À partir de cette dernière équation, il est possible de déterminer l’équation de demande de monnaie, de forme standard, qui est fonction négativement du taux d’intérêt et positivement du niveau des transactions, soit m = h(i) c avec .
L’équation (9) décrit l’allocation optimale de la richesse financière du ménage au cours du temps comme une fonction de l’écart entre le taux de préférence pour le présent et le taux d’intérêt réel exprimé en termes de biens importés.
Finalement, à partir des équations (7), (8) et (9), la trajectoire optimale de la consommation totale est obtenue :
où représente le taux d’intérêt réel « du point de vue du consommateur ». L’équation (10) indique que ce dernier, et par conséquent le taux de croissance de la consommation, dépend positivement du taux de dépréciation réelle anticipée et de la variation du taux d’intérêt nominal.
1.1.2 Le programme des firmes
Le côté offre du modèle est composé d’un grand nombre de firmes agissant en situation de concurrence pure et parfaite, sur deux secteurs de production : les secteurs échangeables et non échangeables. Les entreprises nationales produisent donc les biens exportables, importables et non échangeables à partir du facteur travail uniquement, homogène et parfaitement mobile. Les fonctions de production pour les biens exportables (yexp), importables (yimp) et non échangeables (yne) sont données ci-dessous :
Par conséquent, en l’absence de facteur capital et d’investissement, le problème de la firme représentative se résume à un programme de maximisation du profit (exprimé en termes de biens importables) classique en concurrence pure et parfaite, soit :
Les conditions de premier ordre donnent les fonctions de demande de travail des entreprises sur chaque secteur telles que[11] :
Le salaire réel d’équilibre w̅ se déduit ensuite simplement de l’équilibre du marché du travail . D’où :
Enfin, en substituant les équations (13) et (14) dans (11), les expressions des productions de chaque secteur à l’équilibre s’obtiennent comme suit :
Le côté offre du modèle montre que les productions sectorielles dépendent du taux de change réel, des termes de l’échange, de la subvention à l’exportation et du paramètre de productivité (annexes (A.2) et (A.3)). Une dépréciation réelle, engendrée par une baisse du prix des biens non échangeables, provoque une baisse du salaire réel d’équilibre. Les ressources se déplacent du secteur non échangeable vers le secteur échangeable (exportable et importable) puisque ce dernier est désormais plus attractif. Par conséquent, sa production augmente au détriment de celle de l’autre secteur.
Une amélioration des termes de l’échange et une hausse des subventions à l’exportation stimulent la production de biens exportables. Le salaire réel augmente, permettant de transférer le facteur travail des secteurs importable et non échangeable vers le secteur des exportations.
Un choc de productivité en faveur du secteur échangeable (exportable et importable) entraîne une augmentation de la production et par conséquent de la demande de travail dans ce secteur. Le secteur non échangeable doit donc libérer une partie du facteur travail, ce qui est permis par l’augmentation du salaire réel d’équilibre.
1.1.3 Le programme du secteur public
Le secteur public du modèle comprend l’État et la banque centrale. L’État effectue des achats en biens importables (gimp) et en biens non échangeables (gne). Pour financer ses dépenses[12], il a recours à des taxes forfaitaires prélevées auprès du secteur privé (Tx), aux crédits accordés par la banque centrale (L) et aux émissions de titres (B), c.-à-d. à la dette publique. La contrainte budgétaire de l’État a donc la forme suivante :
Pour sa part, la banque centrale doit remplir un double objectif. Tout d’abord, elle accorde des crédits au gouvernement. Ensuite, elle intervient sur le marché des changes afin de défendre la parité fixe compatible avec le système de change glissant (au taux prédéterminé ∈) adopté par le pays. Par conséquent, le bilan de cette banque centrale implique simplement que la variation de la base monétaire (M) est égale à la variation du crédit à l’État plus la variation des réserves officielles (R*) moins la variation de la richesse nette de la banque centrale (Wc)[13] , soit :
À partir des équations (16) et (17), il est possible de consolider les comptes de l’État et de la banque centrale de manière à obtenir :
Maintenant, en exprimant la relation (18) en termes de biens importables et en introduisant l’effet du seigneuriage, la contrainte budgétaire du secteur public consolidé peut être dégagée (annexe (A.4.)) :
où donne le stock de titres détenus par le secteur public, tx les taxes forfaitaires réelles, m le stock réel de monnaie domestique et π* le taux de croissance du prix des biens échangeables (exprimé en monnaie nationale). Cette équation stipule simplement que la variation de la dette publique réelle doit être égale au déficit public réel moins les revenus du seigneuriage, c.-à-d. la somme de l’augmentation du stock réel de monnaie et de la taxe d’inflation associée. En définitive, en introduisant l’aspect dynamique, la contrainte budgétaire intertemporelle du secteur public s’écrit :
1.2 La détermination de l’équilibre de long terme
L’équilibre de long terme du modèle est déterminé par la réalisation simultanée de trois conditions, à savoir (i) l’équilibre de portefeuille en situation d’imparfaite mobilité des capitaux, (ii) l’équilibre interne, c.-à-d. l’équilibre du marché des biens et services protégés de la concurrence internationale et (iii) l’équilibre externe, c.-à-d. l’équilibre de la balance des paiements caractérisé par la soutenabilité de la position extérieure nette du pays domestique. De plus, à long terme, toutes les autres variables dynamiques, à savoir la consommation, le taux de change réel et le taux d’intérêt nominal, ont convergé vers leur point d’équilibre stationnaire.
1.2.1 Équilibre de portefeuille et imparfaite mobilité des capitaux
Il a été supposé plus tôt que la richesse financière des ménages est constituée d’une part des encaisses monétaires nationales et d’autre part d’un stock de titres nets comprenant à la fois des titres domestiques rémunérés au taux d’intérêt (i) et des titres étrangers rémunérés au taux d’intérêt (i*). La répartition entre titres domestiques et étrangers se fait alors par la condition de parité d’intérêt non couverte, soit :
Néanmoins, bien que l’économie considérée n’influence pas les prix fixés sur les marchés mondiaux, le coût d’emprunt qu’elle subit ne se résume plus au taux d’intérêt mondial (iw) puisqu’il est supposé que les titres étrangers et domestiques ne sont plus des substituts parfaits. En effet, elle doit aussi faire face à un coût supplémentaire représenté par une prime de risque (p(f)) définie comme une fonction croissante de la part de la dette du pays détenue par le reste du monde[14]. La condition d’équilibre de portefeuille s’écrit donc comme :
Cette dernière équation va permettre de déterminer le niveau d’équilibre de long terme du taux d’intérêt nominal domestique. En effet, les conditions de stationnarité ċ = ė = i = 0 combinées à la relation (10) donnent les niveaux de long terme de la prime de risque et de la position créditrice nette () :
et
où rw est le taux d’intérêt réel mondial[15] . Ensuite, en remplaçant (23) dans (22), il vient :
Cette dernière aboutit finalement à la détermination du niveau d’équilibre de long terme des coûts de transactions, c’est-à-dire :
1.2.2 Équilibre interne et biens non échangeables
L’équilibre interne d’une petite économie ouverte est décrit par l’équilibre du marché des biens non échangeables. En effet, puisque ces biens ne font pas l’objet du commerce international, toute la production doit être absorbée par la demande locale :
En substituant (3) et (15) dans (27), il découle :
À partir de l’équation (28), il est possible d’extraire un niveau de taux de change réel garantissant l’égalité entre l’offre et la demande sur le marché des biens non échangeables, tel que :
1.2.3 Équilibre externe et soutenabilité des paiements extérieurs
En règle générale, la condition d’équilibre externe stipule que toutes les dettes contractées par un pays aujourd’hui doivent être entièrement remboursées demain. Or, ce modèle étant écrit en temps continu, il est simplement supposé que la dette doit se stabiliser à long terme à un niveau soutenable, c.-à-d. elle n’explose pas. Cette condition découle directement de la contrainte budgétaire intertemporelle de la nation (Burda et Wyplosz, 1998). Celle-ci se déduit de l’agrégation des contraintes budgétaires du secteur public et du secteur privé.
La contrainte externe du secteur privé () découle de la composition et de l’accumulation de la richesse des ménages. Elle est retranscrite par :
La contrainte budgétaire intertemporelle de la nation se détermine par conséquent en faisant la somme des contraintes individuelles privée (30) et publique (19), soit :
Cette dernière relation explicite l’évolution de la position créditrice nette réelle de l’économie domestique au cours du temps comme la somme entre la balance commerciale réelle , les revenus des transferts internationaux et le flux des intérêts réels perçus sur cette position.
À long terme, cette position de créditeur net doit atteindre une valeur d’équilibre stationnaire. Pour cela, il suffit de poser , d’où :
Finalement, pour que l’équilibre externe du pays soit respecté, c.-à-d. pour que la position de créditeur net soit soutenable à long terme, son compte courant réel doit être nul. En d’autres termes, sa balance commerciale réelle s’ajuste de manière à compenser les intérêts réels reçus provenant des actifs détenus sur l’étranger.
À partir de la relation (32), il est possible de déterminer le niveau de taux de change réel permettant le maintien de l’équilibre externe :
1.2.4 Équilibre simultané et taux de change réel de long terme
Au total, le taux de change réel d’équilibre de long terme s’obtient comme la parité réelle conduisant à la réalisation simultanée des équilibres interne (29) et externe (33), soit :
L’approche microéconomique établit donc qu’à long terme, le taux de change réel d’équilibre est déterminé par deux ensembles de facteurs à savoir les déterminants fondamentaux domestiques (la politique commerciale, la productivité sur le secteur des biens échangeables, les dépenses publiques en biens non échangeables et importables et la préférence pour le présent) et internationaux (les termes de l’échange, les transferts internationaux, le taux d’inflation mondial et le taux d’intérêt réel mondial). Ce résultat n’est pas surprenant. En effet, étant donné que la petite économie ouverte n’influence pas le reste du monde, tout choc qui l’affecte se répercute automatiquement sur son taux de change réel.
2. L’impact des déterminants fondamentaux de l’économie
Le modèle précédent permet de faire ressortir un vaste ensemble de facteurs explicatifs du niveau de long terme du taux de change réel d’équilibre. Il s’agit désormais d’analyser comment ce dernier réagit à la suite d’un choc permanent non anticipé[16] sur chacun d’entre eux.
2.1 Le rôle de la structure de l’économie domestique
2.1.1 L’effet Balassa-Samuelson
Dans sa version la plus simple, c’est-à-dire dans le cadre d’un modèle à un seul facteur de production, l’effet Balassa-Samuelson stipule qu’un différentiel de productivité positif en faveur des biens échangeables provoque une augmentation du prix des biens non échangeables et une appréciation réelle de la monnaie domestique[17] .
Néanmoins, cette analyse est de statique comparative dans le sens où elle suppose implicitement que le compte courant du pays domestique est toujours nul, évacuant toute possibilité d’endettement. Même si des fonctions de production complexes sont considérées, l’effet Balassa-Samuelson originel ne prend pas en compte les dynamiques de l’épargne et de la dette externe.
Le modèle général que nous utilisons permet de contourner ce problème. La relation entre la productivité des facteurs et le taux de change réel d’équilibre doit maintenant incorporer les effets transitant par l’équilibre du marché des biens non échangeables et les effets découlant de la condition de soutenabilité de la dette extérieure.
Dans un premier temps, un choc positif sur u décourage l’offre de biens non échangeables. Il se produit alors un excès de demande sur ce marché et le taux de change réel doit s’apprécier pour rétablir l’équilibre interne, d’où . Dans un deuxième temps, la hausse induite de la production des biens échangés (biens exportables et importables) améliore la balance commerciale, ce qui engendre une appréciation réelle afin de restaurer l’équilibre externe, soit . En d’autres termes, les deux effets agissent dans le sens d’une appréciation réelle d’équilibre comme proposée par l’analyse de Balassa-Samuelson.
2.1.2 Les dépenses publiques
De nombreuses études ont placé les dépenses publiques au centre de la détermination du taux de change réel d’équilibre (Froot et Rogoff, 1991; Rogoff, 1992; De Gregorio et Wolf, 1994). Quelle que soit la spécification adoptée par chacune d’entre elles, la dépense publique agit de la même façon, à savoir à travers le canal de l’allocation des ressources (« ressources withdrawal ») déterminé par la dimension intratemporelle. Une augmentation de la dépense publique est assimilée à un choc d’offre négatif, l’effet total sur la consommation privée et le taux de change réel dépendant de la répartition de la dépense publique entre biens échangeables et non échangeables.
Le modèle retenu ici s’inscrit dans la même logique. Par conséquent, pour présenter clairement le lien unissant les dépenses de l’État et le taux de change réel de long terme, il convient d’étudier séparément les effets de la dépense publique en biens échangeables (importables) et en biens non échangeables. Un choc sur la demande de biens importables émanant de l’État n’intervient que sur la condition d’équilibre externe. En effet, une hausse de gimp détériore la balance commerciale et exige une dépréciation réelle afin de garantir la soutenabilité de la position extérieure du pays, soit . Un choc sur la demande publique en biens non échangeables n’a d’effet que sur la condition d’équilibre interne. Ainsi, une augmentation de gne, en stimulant l’absorption domestique, débouche sur un excès de demande sur le marché des biens non échangeables. Le taux de change réel doit donc s’apprécier pour encourager l’offre sur ce secteur et rétablir l’équilibre interne, d’où . Finalement, le taux de change réel d’équilibre est fonction de la composition de la dépense publique, c’est-à-dire de son allocation entre les biens importables et non échangeables.
Toutefois, plusieurs travaux récents (Obsfeld et Rogoff, 1996; Balvers et Bergstrand, 2002) ont montré que ces conclusions restent largement incomplètes. Elles oublient en effet l’influence qu’exercent les dépenses publiques sur les décisions de consommation privée à travers le canal intertemporel de l’orientation de la consommation (« consumption tilting »). Balvers et Bergstrand (2002) corrigent cette lacune en introduisant dans la fonction d’utilité intertemporelle des ménages le niveau des dépenses publiques[18]. Dès lors, une augmentation des dépenses de l’État peut tout aussi bien apprécier ou déprécier le taux de change réel selon que les consommations privée et publique soient considérées comme complémentaires ou substituables[19].
2.1.3 La politique commerciale
Le lien significatif entre la politique commerciale et le taux de change réel d’équilibre a été reconnu depuis longtemps dans la littérature (Edwards, 1989, 1994; Elbadawi, 1994). Son analyse a pris place dans le contexte de l’influence d’une libéralisation commerciale, matérialisée par un abaissement des droits de douane sur les importations, sur l’équilibre externe d’une petite économie. En l’occurrence, une diminution des taxes commerciales sur les biens importés conduit à une dépréciation du taux de change réel d’équilibre[20].
En règle générale, trois effets expliquent cette relation. Tout d’abord, la prise en compte des droits de douane dans l’indice des prix à l’importation provoque un effet comptable poussant le taux de change réel à se déprécier mécaniquement. Ensuite, la baisse des prix à l’importation conduit les ménages à substituer les biens importables aux biens non échangeables devenus relativement trop chers. Ainsi, la demande de ces derniers diminue, exigeant une baisse de leur prix relatif et une dépréciation réelle. Enfin, la libéralisation commerciale et les gains à l’échange associés, aboutissent à un effet revenu stimulant la demande de biens non échangeables et nécessitant une appréciation réelle. Par conséquent, l’impact total est ambigu. Néanmoins, il est généralement admis que l’effet revenu est trop faible pour compenser la combinaison entre les effets comptable et substitution.
Malheureusement, peu de place est accordée à l’impact d’une libéralisation commerciale lorsque celle-ci résulte d’une minoration des subventions sur les exportations. C’est précisément ce qui est réalisé dans ce modèle.
En premier lieu[21], la baisse des subventions à l’exportation (1 + tsub) modifie l’équilibre interne. En effet, la baisse du prix des biens exportables détourne le facteur travail du secteur des exportations vers le secteur des biens non échangés. L’excès d’offre naissant sur ce dernier nécessite une dépréciation réelle afin de stimuler la demande et rétablir l’équilibre sur le marché des biens domestiques, d’où . En second lieu, l’équilibre externe est aussi concerné à travers la détérioration de la balance commerciale induite par la chute de l’offre des biens exportables. Le maintien de la soutenabilité des paiements extérieurs n’est donc possible que par une dépréciation du taux de change réel d’équilibre, soit .
Finalement, l’effet d’une libéralisation commerciale, qu’elle soit réalisée par le biais d’une réduction des taxes à l’importation ou des subventions à l’exportation, déprécie le taux de change réel d’équilibre à long terme. Néanmoins, il doit être précisé que dans le cas des subventions à l’exportation seul l’effet substitution est présent. Ceci résulte du fait que le financement de ces aides est directement supporté par les ménages, ce qui annule l’effet revenu.
2.1.4 La préférence pour le présent
Bien que la préférence pour le présent n’intervienne directement que dans la formulation de l’équilibre externe, son impact sur le taux de change réel d’équilibre reste ambigu à long terme. Celui-ci est donné par . Il est donc possible d’identifier trois canaux de transmission différents liés à un choc positif sur la préférence pour le présent. Premièrement, le taux d’intérêt nominal de l’économie augmente, provoquant une baisse de la demande de monnaie et une hausse des coûts de transaction associés à la consommation de biens échangeables. La détérioration induite de la balance commerciale nécessite une consommation nationale moindre et une dépréciation réelle afin de déplacer le facteur travail du secteur abrité vers le secteur exposé. Deuxièmement, l’accroissement de la prime de risque de long terme réduit le stock d’actifs étrangers détenus par le pays domestique, ce qui renforce la tendance à la dépréciation réelle. Enfin, puisqu’à long terme la préférence pour le présent est égale au taux d’intérêt réel national, les recettes d’intérêt sur la position externe s’améliorent et une tendance à l’appréciation réelle apparaît pour obtenir la dégradation requise de la balance courante compatible avec la soutenabilité des paiements extérieurs. Toutefois, il ne faut pas oublier que les petites économies ouvertes sont généralement dans une position de débiteurs nets sur les marchés de capitaux internationaux, c.-à-d. est négatif. Ainsi, les recettes d’intérêt deviennent des paiements d’intérêt sur la dette extérieure et une nouvelle dépréciation réelle est exigée afin de maintenir l’équilibre externe.
En définitive, dans le cas habituellement observé, pour lequel le pays domestique a accumulé une dette vis-à-vis du reste du monde, une hausse de la préférence pour le présent aboutit à une dépréciation du taux de change réel d’équilibre de long terme.
2.2 L’influence du contexte international
2.2.1 Les termes de l’échange
Les termes de l’échange sont sans nul doute le déterminant du taux de change réel ayant reçu le plus d’attention dans la littérature consacrée aux petites économies ouvertes (Neary, 1988; Edwards, 1988; De Gregorio et Wolf, 1994; Obsfeld et Rogoff, 1996). L’ensemble de ces travaux débouche sur le même constat. L’impact théorique des termes de l’échange, exogènes pour les petits pays, est difficile à cerner puisqu’il dépend de nombreux paramètres de l’économie, à savoir le degré de perfection de la mobilité internationale des capitaux, le degré de substituabilité ou de complémentarité entre biens échangeables et non échangeables dans la consommation des ménages, la source de la variation des termes de l’échange (prix des exportations ou des importations) et la méthode de mesure du prix des biens échangeables (suivant un critère de consommation ou de production). Les conclusions sont par conséquent largement tributaires de la modélisation adoptée et notamment de la définition du taux de change réel retenue.
Toutefois, le modèle que nous avons présenté précédemment donne un aperçu satisfaisant de ces mécanismes de transmission. En effet, il permet d’analyser l’impact d’une modification à la fois des prix des biens exportables et des biens importables sur le niveau de long terme du taux de change réel sous l’hypothèse d’imparfaite mobilité internationale des capitaux[22].
Lorsque l’on considère une amélioration des termes de l’échange induite par une hausse du prix des exportations, le taux de change réel s’apprécie sans ambiguïté. La hausse du prix des exportables et l’amélioration de la balance commerciale[23] provoquent un effet revenu positif pour les ménages, d’où une augmentation de la demande de biens importés et non échangés. Sur le marché des biens échangeables, l’accroissement des importations compense l’excès commercial naissant. Sur le marché domestique, la hausse de la consommation nécessite une appréciation réelle afin de déplacer le facteur travail du secteur échangeable vers le secteur non échangeable pour accroître l’offre. Cet effet substitution du côté offre en faveur du secteur protégé renforce donc l’effet revenu[24]. Aussi, l’impact analytique d’une hausse de prix des exportables sur les équilibres interne et externe s’écrit respectivement comme et . Lorsque l’on considère au contraire une amélioration des termes de l’échange issue d’une baisse des prix des biens importables, les résultats en termes de taux de change réel deviennent indéterminés. Cette indétermination se retrouve à la fois au niveau de l’équilibre interne, avec et au niveau de l’équilibre externe, avec .
L’effet revenu positif résultant de la production de biens exportables accrue et l’effet de substitution dans l’offre conduisent toujours à une appréciation réelle afin de garantir l’équilibre sur le marché des biens domestiques. Par ailleurs, un effet substitution du côté demande, engendré par la variation exogène du taux de change réel, apparaît. L’appréciation réelle induite par la baisse du prix des importations incite les agents à remplacer dans leur panier de consommation les biens non échangés par les biens importables devenus moins chers, provoquant un excès d’offre sur le marché domestique et une nécessaire dépréciation réelle pour rétablir l’équilibre, c.-à-d. une hausse de . Néanmoins, il est généralement admis que l’effet revenu domine l’effet substitution du côté demande, ce qui implique qu’une amélioration des termes de l’échange est plus susceptible d’aboutir à une appréciation du taux de change réel d’équilibre (De Gregorio et al., 1994; Richaud et al., 2003).
2.2.2 Les flux de capitaux exogènes et les transferts internationaux
Beaucoup de pays pauvres reçoivent des aides financières directes de la part des pays développés dans le cadre de leur programme de développement. Ces transferts positifs, interprétés comme des flux d’entrée de capitaux exogènes, de par le surcroît de revenu réel qu’ils entraînent, exercent une influence significative sur le taux de change réel d’équilibre de ces économies (Lane et Milesi-Ferretti, 2004).
Dans notre modèle, un choc positif sur les transferts internationaux exerce un impact direct sur l’équilibre externe uniquement, d’où . Le mécanisme de transmission de ces flux d’entrée financiers est simple. En fait, ils sont considérés comme un véritable gain de revenu réel par les agents résidents, lesquels vont augmenter leur consommation. La hausse de l’absorption nationale qui en découle stimule la dépense en biens importables et en biens non échangeables. Le taux de change réel doit alors s’apprécier afin de dégager des ressources productives supplémentaires en faveur du secteur domestique permettant l’ajustement de l’offre de biens non échangeables.
2.2.3 Les flux de capitaux endogènes et le taux d’intérêt réel mondial
À côté de ces flux de transferts exogènes, d’autres flux entrants de nature endogène viennent perturber les mécanismes d’ajustement de la petite économie ouverte. Ces derniers nécessitent une analyse différente des premiers pour au moins deux raisons. D’une part, étant donné leur caractère endogène, la réaction du taux de change réel d’équilibre est fonction de l’origine du mouvement de capitaux. D’autre part, ils créent des obligations de repaiement à long terme, modifiant la contrainte budgétaire intertemporelle de l’économie et par conséquent le niveau du taux de change réel d’équilibre.
Parmi l’ensemble des facteurs déterminant les flux de capitaux, le taux d’intérêt réel étranger occupe une place importante (Fernandez-Arias et Montiel, 1996; Frankel et Okongwu, 1996). Un choc sur le taux d’intérêt réel mondial peut être présenté de manière simple dans notre modèle puisqu’il n’exerce qu’un impact direct sur la condition d’équilibre externe, à savoir . En d’autres termes, une baisse du taux d’intérêt réel mondial provoque à long terme une diminution du stock d’actifs étrangers détenus par les ménages résidents et des intérêts perçus sur ce stock. Pour garantir l’équilibre externe, la balance commerciale de l’économie doit s’améliorer via la dépréciation du taux de change réel. Cette dernière permet de déplacer les ressources du secteur abrité vers le secteur exposé, entraînant une augmentation de l’offre de biens exportables et importables, et ainsi une nouvelle pression positive sur la balance commerciale[25].
2.2.4 Le taux de croissance du prix des biens échangeables
L’équation qui caractérise l’équilibre externe de l’économie fait ressortir le fait que le niveau de long terme du taux de change réel est fonction de l’évolution du prix des biens échangeables[26] (π*). Par conséquent, puisqu’un choc sur celui-ci est équivalent à une modification du taux de croissance de la masse monétaire (Montiel, 1999), le modèle rejette la propriété de neutralité monétaire généralement retenue dans la littérature en débouchant sur le résultat . Une hausse du taux de croissance des biens échangeables provoque une augmentation du taux d’intérêt domestique. La demande de monnaie moins importante qui en résulte alourdit les coûts de transaction associés à la consommation. Étant donné que par hypothèse ces coûts de transaction sont liés à la consommation de biens échangeables[27], la balance commerciale tend à se détériorer. La consommation doit donc être découragée pour rétablir l’équilibre externe et le taux de change réel déprécié pour rediriger les ressources productives du secteur abrité vers le secteur exposé.
Conclusion
En définitive, selon l’approche microéconomique, le taux de change réel global d’une économie, c.-à-d. tous secteurs confondus, est déterminé par le prix relatif des biens échangés en termes de biens non échangés. Dans un tel cadre d’analyse, les facteurs conditionnant ce prix relatif suffisent donc à expliquer le niveau du taux de change réel d’équilibre. De plus, la méthodologie adoptée est particulièrement attrayante puisqu’elle permet, d’une part d’identifier clairement les déterminants fondamentaux du taux de change réel d’équilibre, et d’autre part de décomposer de manière précise leurs différents mécanismes de transmission.
En revanche, lorsque l’on s’intéresse aux travaux appliqués relatifs à l’approche microéconomique[28], sa portée empirique apparaît beaucoup plus limitée. Tout d’abord, les spécifications économétriques utilisées sont en décalage par rapport au modèle théorique sous-jacent. En effet, ces travaux adoptent une démarche reposant sur l’estimation d’équations réduites, par le biais notamment des techniques de stationnarité et de coïntégration[29]. Or, seule une approche économétrique en termes d’équilibre général intertemporel, certes particulèrement coûteuse (construction et calibrage), serait totalement satisfaisante. Ensuite, simuler un niveau d’équilibre pour le taux de change réel interne exige la construction d’indices de prix des biens échangeables non fournis par la comptabilité nationale[30]. Enfin, dans bien des cas, les résultats obtenus ne sont pas conformes aux attentes. L’approche est rarement validée, excepté, peut-être, pour la version faible de l’effet Balassa-Samuelson ou encore pour certains facteurs du côté demande.
Certains économistes justifient ce constat déroutant à partir des fondements théoriques de l’approche. En effet, elle repose sur l’hypothèse fondamentale de PPA sur le secteur des biens exposé à la concurrence internationale, une condition qui est loin d’être établie aussi bien sur le plan empirique que théorique.
Plusieurs travaux ont testé la robustesse de la relation unissant le taux de change réel global et le prix relatif des biens non échangeables, c’est-à-dire la validité de la PPA relative sur le secteur exposé (Asea et Mendoza, 1994; Canzoneri et al., 1999). Globalement, ils permettent de dégager trois faits stylisés. Tout d’abord, il n’existe pas de relation claire entre le taux de change réel, tous secteurs confondus, et le prix relatif des biens non échangés à long terme. Ensuite, à quelques exceptions près, la PPA relative sur le secteur exposé est mal vérifiée. Enfin, une forte corrélation est observée entre le prix relatif des biens échangeables domestiques et étrangers et le prix relatif des biens non échangeables. En définitive, les mouvements du taux de change réel agrégé s’expliquent davantage par ceux du taux de change réel du secteur exposé que par ceux du taux de change réel du secteur abrité.
Au niveau conceptuel, deux éléments majeurs sont avancés pour expliquer la non-vérification de la PPA sur le secteur des biens exposés[31] (Obstfeld et Rogoff, 2000; Benigno et Toenissen, 2003; Unayama, 2003; Egert et al., 2006b). Le premier, appelé « canal de segmentation de marché », traduit la capacité des firmes à discriminer par les prix à l’échelle mondiale, c’est-à-dire à offrir un même bien à des prix différents selon le marché considéré. Ce comportement dit de « pricing to market » introduit des rigidités nominales dans l’économie, en limitant notamment la réponse des prix domestiques à un choc sur le taux de change nominal. Dans ces conditions, les variations du taux de change nominal se répercutent mécaniquement sur le taux de change réel et des écarts durables par rapport à la PPA apparaissent[32]. Le deuxième, appelé « canal du biais domestique », retrace le degré de préférence des consommateurs nationaux pour le bien produit domestiquement, c’est-à-dire l’importance de la différenciation des produits. En effet, le commerce international porte de plus en plus sur l’échange de biens hétérogènes et donc imparfaitement substituables. Par conséquent, les élasticités prix du commerce extérieur sont généralement faibles (Wren-Lewis et Driver, 1998; Ghei et Pritchett, 1999) et la balance commerciale tend à être relativement insensible aux variations du taux de change réel.
Dès lors, le rejet de cette hypothèse fondamentale affaiblit substantiellement l’approche microéconomique. Par ailleurs, une autre critique plus générale, relative à la définition de l’équilibre externe, a été relevée. La soutenabilité du compte courant est imposée dans la modélisation, ce qui ne permet pas de comprendre la persistance des déséquilibres extérieurs constatés au cours des 20 dernières années. Par conséquent, cette approche évacue d’emblée les questions portant sur le financement du déséquilibre externe et l’évaluation des flux de capitaux compatibles avec la soutenabilité de la position extérieure du pays. Aussi, ces deux critiques révèlent que la détermination du taux de change réel d’équilibre de long terme d’une petite économie ouverte doit reposer sur la double analyse des marchés de biens et services et des capitaux.
Ce constat explique, en partie, le développement récent de ce qui a été baptisé dans la littérature « l’approche macroéconomique du taux de change réel d’équilibre[33] » (Hoarau, 2004). Cette dernière approche a en effet inspiré la majeure partie des études empiriques contemporaines portant sur la détermination des taux de change réels de long terme (Teiletche, 2003; Egert et al., 2006a; Hoarau, 2006). Le taux de change réel d’équilibre est toujours le niveau du taux de change réel qui réalise conjointement les équilibres internes et externes. Toutefois, dans cette approche, les définitions de ces équilibres internes et externes et du taux de change réel différent. En particulier, le taux de change réel n’est plus considéré comme le prix relatif des biens échangeables en termes de biens non échangeables. Il est défini, au contraire, comme un indicateur de la compétitivité globale d’une nation, c’est-à-dire comme le prix relatif, exprimé en monnaie étrangère, des biens nationaux.
Parties annexes
Annexes
A.1
La contrainte budgétaire du secteur privé
La contrainte budgétaire intertemporelle des ménages (en temps continu) se déduit de l’accumulation de la richesse nette des ménages d’où :
Cette dernière est donc donnée par la différence entre les revenus des ménages issus du travail, c.-à-d. le revenu national après impôt (y – tx), les intérêts perçus sur la détention de titres (i · fd) et les transferts internationaux (TR), et les dépenses des ménages, à savoir la consommation (c), les coûts de transaction associés à celle-ci (T(.)), l’érosion inflationniste (en termes de biens échangeables) sur la richesse nette (π* · a) et le financement des subventions à l’exportation (T · tsub · yexp).
La richesse nette des agents privés se compose de titres (fd) et de monnaie nationale (m) telle que :
Les titres peuvent être libellés soit en devise étrangère et rémunérés au taux d’intérêt nominal i*, soit en devise domestique et rémunérés au taux d’intérêt nominal i. De plus, la composition du portefeuille des ménages obéit à la condition de parité de taux d’intérêt non couverte, soit :
La détention de monnaie se fait selon le motif de transaction. En effet, elle permet d’éviter le coût de transaction associé à la consommation :
La loi du prix unique prévaut sur le secteur échangeable. Le taux d’inflation sur les biens échangeables (π*) s’écrit donc comme :
En substituant les équations (36), (37), (38) et (39) dans la relation (35), il vient :
Finalement, si nous introduisons le taux d’intérêt réel (r) tel que r = i* – πw, l’équation (40) se réécrit comme suit :
A.2
Le salaire réel d’équilibre et ses déterminants
Le salaire réel d’équilibre est donné par l’expression ci-dessous :
Il dépend par conséquent du taux de change réel, des termes de l’échange, de la subvention à l’exportation et du différentiel de productivité. L’impact de ces derniers se déduit de la différentielle totale de la relation traduisant l’équilibre sur le marché du travail, soit :
A.3
L’impact des facteurs déterminant les productions sectorielles d’équilibre
Les niveaux d’équilibre des productions de biens exportables, importables et non échangeables sont donnés respectivement par :
et
Celles-ci sont donc déterminées par un ensemble de facteurs incorporant le taux de change réel, les termes de l’échange, la subvention à l’exportation et le niveau de la productivité sur le secteur échangeable. Les effets de ces derniers sont obtenus à partir de la différentielle totale des expressions des offres sectorielles ci-dessus.
1. L’offre de biens exportables
2. L’offre de biens importables
-
Le taux de change réel :
-
les termes de l’échange :
-
la subvention à l’exportation :
-
la productivité sur le secteur échangeable :
3. L’offre de biens non échangeables
A.4
La contrainte budgétaire du secteur public consolidé
Le secteur public de l’économie étudiée est composé d’un état et d’une banque centrale. Par hypothèse, l’État consomme des biens importables (gimp) et non échangeables (gne). Ces dépenses sont financées par la collecte d’une taxe forfaitaire (Tx), les crédits accordés par la banque centrale (L) et l’émission de titres publics (B). La contrainte budgétaire de l’État en termes nominaux s’écrit donc comme :
De son côté, la banque centrale doit remplir deux missions. D’une part, elle assure la conversion sans coût des avoirs libellés en monnaie nationale et en monnaie étrangère au taux de change fixe en vigueur. D’autre part, elle fournit des crédits à l’État. Le bilan de cette dernière donne la variation de la base monétaire telle que :
où M, R* et Wc représentent respectivement la masse monétaire, les réserves officielles et la richesse nette de la banque centrale. De plus, en faisant abstraction des autres sources de dépenses et de recettes, les profits nets de la banque centrale correspondent aux intérêts perçus sur les réserves officielles qui ont pour contrepartie une hausse de sa richesse nette, soit :
Après avoir soustrait les intérêts sur les réserves officielles du membre gauche et la variation de la richesse nette de la banque centrale du membre droit de l’équation (43), il vient :
avec Bp = B – R* représentant la dette nette du secteur public consolidé. De plus, en substituant la relation (44) dans (46), la contrainte budgétaire du secteur public consolidé en termes nominaux devient :
Ensuite, cette contrainte peut s’écrire en termes réels en divisant (35) par Pimp, soit :
D’après Agenor (2000), et se décomposent comme :
avec étant le taux d’inflation sur le secteur importable.
Finalement, en réinjectant (49) dans (48), la contrainte budgétaire du secteur public consolidé est donnée par :
Notes
-
[1]
Ce suivi repose sur deux éléments : (i) l’existence d’estimations des taux de change réels d’équilibre à long terme, élaborés par le Fonds monétaire international (FMI) et ajustées dans le cadre d’une interaction régulière avec les marchés et (ii) une réflexion profonde sur les raisons des divergences potentielles entre les taux observés et les taux d’équilibre ainsi définis.
-
[2]
Celui-ci requiert trois conditions : (i) la définition d’une parité de référence par rapport à un panier de monnaies qui soit le reflet de la structure du commerce extérieur, à un niveau considéré comme durable sur un horizon de moyen à long terme, et qui évoluerait régulièrement pour maintenir cette cohérence à long terme, (ii) l’adoption d’un processus d’ajustement asymétrique selon lequel la politique monétaire préfère l’appréciation de la monnaie (par rapport à la parité de référence) à l’inflation et le resserrement monétaire à la dépréciation et (iii) l’intervention du FMI et de la communauté internationale par une réaction ferme lorsqu’un désajustement du taux de change se produit malgré le respect du « code de bonne conduite » par le pays .
-
[3]
Il convient tout de même de nuancer quelque peu ce propos suite au développement récent des tests de racine unitaire en panel et non linéaires (Chortareas et Kapetanios, 2004; Alba et Papell, 2007).
-
[4]
On retrouve souvent ce concept de taux de change réel dans la littérature sous l’appellation de « taux de change réel interne » pour l’opposer au « taux de change réel externe », c’est-à-dire le prix relatif des biens échangeables étrangers en termes de biens échangeables domestiques.
-
[5]
Ces derniers s’appuient sur la constatation faite par Baumol et Bowen (1966), connue sous le nom d’« effet Baumol-Bowen ». Cet effet stipule que si la productivité du secteur produisant les biens (le secteur échangeable) croît plus rapidement que celle du secteur des services (le secteur non échangeable) mais que l’élasticité de la demande du secteur des services par rapport au revenu est plus forte que celle du secteur des biens, alors le prix relatif des services tend à augmenter au cours du temps, ce qui apprécie le taux de change réel.
-
[6]
Toutefois, nous ne tenons pas compte de l’hypothèse de concurrence imparfaite. En effet, étant donné que notre but est implicitement de modéliser le bon niveau du taux de change réel, le défaut de concurrence constituerait plutôt un facteur explicatif du mésalignement réel. Par ailleurs, très récemment, une série de travaux a identifié les facteurs démographiques comme des déterminants potentiels du taux de change réel à long terme (Andersson et Osterholm, 2006; Aloy et Gente, 2009). Le cadre théorique retenu s’appuie sur un modèle à générations imbriquées à deux périodes de vie d’une petite économie ouverte plutôt que celui de l’agent représentatif à durée de vie infinie traditionnellement adopté. Toutefois, cette littérature n’étant encore qu’à ses balbutiements, nous choisissons de ne pas l’inclure dans ce travail.
-
[7]
Notons que cette économie possède plusieurs caractéristiques d’un pays en développement en l’occurrence les termes de l’échange exogènes, le régime de change glissant, l’imparfaite mobilité des capitaux, les transferts internationaux, … Il convient de préciser également que l’hypothèse de concurrence parfaite concerne les marchés de biens et services et du travail.
-
[8]
Le taux de change réel est donné par . Les indices de prix étrangers (P*) et domestiques (P) doivent maintenant prendre en compte la présence de biens exportables et importables, d’où et . Le taux de change réel s’écrit donc comme où , , et . La loi du prix unique tient sur le secteur échangeable, ce qui implique et , et en définitive . Par conséquent, les fluctuations endogènes du taux de change réel sont fonctions de celles du prix relatif interne des biens importables en termes de biens non échangés. Les deux autres composantes ( et T*) sont exogènes pour la petite économie ouverte.
-
[9]
La fonction de sous-utilité est de type « Constant Relative Risk Aversion » (CRRA), ce qui implique que l’élasticité de substitution intratemporelle entre les deux biens est unitaire.
-
[10]
L’introduction de la productivité doit permettre d’analyser l’impact de l’« effet Balassa-Samuelson », donc l’impact du différentiel de productivité entre les secteurs des biens échangeables et non échangeables. Par conséquent, l’inclusion de la variable dans les seules fonctions de production de biens échangeables est suffisante pour satisfaire cet objectif.
-
[11]
Les signes sur les fonctions donnent les signes des dérivées partielles premières.
-
[12]
Les subventions à l’exportation n’apparaissent pas dans la contrainte budgétaire de l’État car, par hypothèse, elles sont entièrement financées par les ménages.
-
[13]
Pour une formalisation plus rigoureuse du bilan de la banque centrale, il est souhaitable de se référer à Agenor (2000).
-
[14]
Agenor (1997) modélise explicitement cette prime de risque.
-
[15]
En posant ċ = ė = i = 0 dans (10), on obtient ρ = r. Puisque r = i – π* = (i* + ∈) – (πw + ∈) = i* – πw et i* = iw + p(f), alors r = iw – πw + p(f) avec iw – πw = rw.
-
[16]
Notre objectif étant l’analyse du taux de change réel de long terme, il ne nous paraît pas utile de présenter l’impact d’un choc transitoire. En effet, celui-ci n’influence que le taux de change réel de court terme et la trajectoire conduisant ce dernier vers l’équilibre stationnaire stable de long terme (Edwards, 1989).
-
[17]
Lorsqu’une fonction de production comprenant à la fois les facteurs travail et capital est utilisée, cet effet demeure mais il est corrigé par les parts du facteur travail dans la production de chaque secteur. Ainsi, plus la part du facteur travail est importante dans le secteur du bien non échangeable relativement au secteur du bien échangeable, plus le différentiel de productivité entre les deux secteurs influence le niveau du taux de change réel.
-
[18]
Le taux marginal de substitution intertemporelle est maintenant fonction des dépenses publiques.
-
[19]
L’application empirique de ces auteurs montre de plus que le canal du « consumption tilting » ne doit pas être négligé puisque son effet sur le taux de change réel est approximativement égal à celui exercé par le canal traditionnel du « resource withdrawal ».
-
[20]
Edwards (1989) souligne le fait que si les biens importables et non échangeables sont complémentaires, une appréciation réelle reste possible.
-
[21]
Il existe également un effet comptable créé par la présence des subventions à l’exportation dans l’indice des prix à l’exportation. Celui-ci tend à apprécier mécaniquement le taux de change réel.
-
[22]
Par ailleurs, la structure du modèle utilisé ici permet également d’étudier le problème du « syndrome hollandais » (Corden et Neary, 1982). En supposant, par exemple, une augmentation du prix des biens exportables, la combinaison des différents effets revenu et substitution aboutit à une appréciation du taux de change réel, laquelle va détériorer la compétitivité-prix des producteurs des biens importables. Par conséquent, l’expansion des secteurs de biens exportables et non échangeables, engendrée par l’amélioration des termes de l’échange et le surcroît des richesses, finit par évincer le secteur des biens importables.
-
[23]
L’amélioration de la balance commerciale résulte de l’augmentation de l’offre de biens échangés permise grâce au déplacement des ressources du secteur domestique vers le secteur des exportations et donc de la diminution de l’offre des biens non échangés.
-
[24]
Les termes de l’échange exercent aussi un effet comptable qui apprécie mécaniquement le taux de change réel (voir la note de bas de page 8).
-
[25]
De plus, il convient de préciser que le résultat en matière de taux de change réel est indépendant du niveau initial de la position extérieure du pays. Par contre, la nature de cette position (créditrice ou débitrice) influe directement sur les dynamiques d’ajustement conduisant vers l’équilibre stationnaire de long terme (Agenor, 1997).
-
[26]
Par hypothèse, la PPA tient sur le secteur des biens échangeables, impliquant que le taux de croissance du prix des biens échangés est fonction à la fois du taux de dépréciation du change nominal et du taux d’inflation mondial. Étant donné que ces variables exercent les mêmes effets sur l’équilibre de long terme du modèle, il n’est pas nécessaire de les présenter séparément.
-
[27]
Si les coûts de transaction portent sur les biens non échangeables, alors π* perturbe l’équilibre interne de l’économie. La consommation totale diminue encore mais cette fois-ci le taux de change réel doit s’apprécier.
-
[28]
Les travaux empiriques dans ce domaine sont légions (Elbadawi et Soto, 1995; Chinn et Johnston, 1996; Chinn, 1997; Baffes et al., 1999; Canzoneri et al., 1999; Kakkar, 2003; Richaud et al., 2003; Lane et Milesi-Ferretti, 2004; Drine et Rault, 2005, parmi d’autres).
-
[29]
L’objectif est de mettre en évidence une relation de long terme entre le taux de change réel interne et ses déterminants fondamentaux donnés a priori par l’analyse théorique.
-
[30]
De tels calculs sont réalisables pour une dizaine de pays de l’OCDE grâce à la base sectorielle « International Sectoral Data Base » (ISDB). Pour les autres, en règle générale, le prix des biens échangeables est approché par le prix de production et celui des biens non échangeables par le prix de consommation.
-
[31]
Les coûts de transports, les écarts de fiscalité et les barrières commerciales tarifaires et non tarifaires engendrent une bande de non-arbitrage dans laquelle le taux de change réel peut fluctuer sans que l’arbitrage n’exerce de force de rappel vers la PPA. Néanmoins, ce défaut d’arbitrage n’explique pas les écarts permanents par rapport à la PPA (Parsley et Wei, 1996).
-
[32]
La persistance de ces déviations par rapport à la PPA est d’autant plus forte que les prix s’ajustent lentement et que les limites à l’arbitrage sont nombreuses.
-
[33]
L’approche macroéconomique regroupe les modèles « Fundamental Equilibrium Exchange Rate » (FEER) (Williamson, 1994), « NATural Real EXchange Rate » (NATREX) (Stein et al., 1995), « Desired Equilibrium Exchange Rate » (DEER) (Isard et Faruqee, 1998) et « Behavioral Equilibrium Exchange Rate » (BEER) (Clark et MacDonald, 1999).
Bibliographie
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