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Cher(ère)s lecteur(trice)s,
À titre de nouvelle rédactrice en chef (section Mosaïque) de la revue Santé mentale au Québec, c’est avec plaisir que je vous présente ce numéro de huit articles inédits. Indépendants les uns des autres, ces articles sont pourtant reliés par cette même préoccupation qu’ont les auteurs d’améliorer notre dispositif de soins et services de santé mentale au Québec, ainsi que notre compréhension des enjeux et défis de nos sociétés évolutives et modernes.
Les quatre premiers articles abordent spécifiquement les enjeux de notre dispositif de soins et services.
D’abord, le texte de Marie-Josée Fleury, Guy Grenier, Jean-Marie Bamvita, Catherine Vallée, Lambert Farand et François Chiocchio, fait le point sur l’implantation de la réforme en santé mentale et les processus influençant la qualité des services, ainsi que leurs effets sur les usagers. Différentes recommandations émergent, dont l’importance de la collaboration, du soutien et de la formation des professionnels, ainsi que de la reconnaissance de leur autonomie et implication dans les décisions. L’amélioration des services axés vers le rétablissement et la qualité de vie des personnes ne peut se faire sans les intervenants, sans leur implication et engagement auprès des personnes, et sans donner du sens à leur travail. Ils ont choisi ce métier, car signifiant pour eux ; ils ont le souci de bien le faire. Permettons-leur de l’exercer dans un environnement et un contexte favorables.
L’article de Karl Turcotte et Bernadette Dallaire porte justement sur l’expérience des intervenants dans l’accompagnement au rétablissement dans les unités d’hébergement et de soins de longue durée en psychiatrie. Trois composantes centrales de l’expérience d’accompagnement s’en dégagent : l’espoir, l’implication et l’attachement envers les personnes aidées. Les auteurs rappellent comment les facteurs contextuels et la culture du milieu d’intervention sont intimement en lien avec la capacité des intervenants à accompagner efficacement et humainement les personnes.
Le troisième texte, que l’on doit à Luc Farinas, porte, quant à lui, sur l’importance des relations interpraticiens publics et communautaires ainsi que celle des partenariats flexibles et « pas trop » formalisés qui rendent possibles les discussions et l’élaboration de plans d’action auprès des sans-abri. L’article discute de la complexité et des conditions parfois difficiles de travail, en particulier l’impact désolant que peuvent avoir les réformes et la formalisation des structures et procédures sur l’accessibilité des services et des partenaires, et sur l’émergence de solutions créatives et de qualité.
Finalement, l’article d’Audrey Francoeur, Catherine Hache-Labelle, Crystal Samson, Martin Vézina et Tania Lecomte documente les stratégies utilisées pour faciliter l’accès et l’engagement des participants atteints de psychose à une thérapie cognitive comportementale. Le texte propose l’intégration de la thérapie au sein d’une équipe de suivi intensif dans le milieu (SIM) ayant justement comme mandat l’amélioration de l’accès aux soins et services des personnes atteintes de troubles mentaux graves, lesquelles entrant difficilement en lien avec les services traditionnels de santé.
Les quatre derniers textes amènent les lecteurs(trices) à poursuivre leur réflexion sur les nouveaux défis de nos sociétés : radicalisation menant à la violence, utilisation problématique des technologies, utilisation importante de stimulants du système nerveux central chez les élèves du primaire et comportement suicidaire en contexte de rupture amoureuse.
Le texte d’Imen Ben-Cheikh, Cécile Rousseau, Ghayda Hassan, Mathieu Brami, Stéphane Hernandez et Marie-Hélène Rivest propose une première description du travail clinique d’une équipe multidisciplinaire en santé mentale spécialisée en radicalisation menant à la violence. Les auteurs offrent différentes pistes d’intervention et une compréhension du phénomène de radicalisation violente au Canada.
Quant à lui, le texte d’Hélène Givron, Joëlle Berrewaerts, Martin Desseilles et Guy Houbeau discute de cyberdépendance et des problématiques associées à l’utilisation excessive d’Internet et des jeux vidéo par des étudiants en médecine. Il rend compte du phénomène d’utilisation problématique des technologies dans nos sociétés actuelles.
Le texte de Mélanie Lapalme, Caroline Temcheff, Stéphanie Boutin et Michèle Déry nous informe que 39,9 % des élèves du primaire prennent des stimulants du système nerveux central, et ce, sans nécessairement avoir un diagnostic de TDAH (trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité). Les auteurs incitent à la vigilance et rappellent l’importance d’une meilleure évaluation de la présence du TDAH et d’un suivi à long terme des enfants, dont l’impact (favorable ou non) des stimulants sur leur parcours scolaire.
Finalement, le dernier texte, rédigé par Audrey Brassard, Marianne St-Laurent-Dubé, Kristin Gehl et Tania Lecomte, porte sur la compréhension du phénomène de détresse et de comportement suicidaire en contexte de rupture amoureuse. Les auteurs abordent le rôle des insécurités d’attachement amoureux, dont l’anxiété d’abandon, dans la survenue des symptômes dépressifs et des comportements suicidaires. L’article amène à se questionner sur les premières expériences d’attachement de l’enfant (expériences qui ne sont pas toujours protégées dans nos sociétés modernes), et l’impact qu’elles peuvent avoir sur les insécurités d’attachement des adultes d’aujourd’hui.
Ce numéro Mosaïque est le fruit du travail rigoureux d’intervenants et chercheurs du milieu de la santé mentale qui ont le souci d’une pratique réflexive en vue de la constante amélioration des soins et services. Je vous souhaite d’en faire une lecture attentive et d’y trouver l’inspiration.
Bonne lecture !