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Dans cet ouvrage, Françoise Serrero nous propose une rencontre avec un homme engagé, oeuvrant dans une école primaire du 20e arrondissement à Paris où le projet est au centre de la pédagogie.
Caractérisé par une approche ethnologique, l’ouvrage se présente sous forme d’entretiens avec Jean-Marc Houzet, instituteur à l’école Vitruve. Des intertitres sont insérés dans les entretiens afin de mettre l’accent sur les moments forts de la conversation, sur les concepts particuliers qui caractérisent l’approche du projet développée à Vitruve.
À travers ces discussions, Houzet expose sa conception de la pédagogie, développe ses réflexions sur l’élève et sur l’importance du social dans l’apprentissage.
Il est question des projets mis en place à l’école : les assembles générales (AG), où l’élève s’engage sur le plan social et agit en cogestion ; les tables d’hôtes ainsi que les classes vertes.
Au fil des entretiens, Jean-Marc Houzet développe une approche audacieuse et différente de la pédagogie du projet. Cette approche, basée sur le grand groupe, met l’accent sur le social. Houzet nous explique à ce sujet la trichotomie, un concept particulier qui marie le projet, le social et l’acquisition. À ces dimensions s’ajoute le temps, essentiel au cheminement de l’élève. Ainsi, pour Houzet, l’apprentissage de la lecture se fait par l’appartenance au groupe social et il est vécu à travers des situations concrètes par et avec le grand groupe. Dans cette perspective, le climat d’apprentissage demeure important. Ainsi, la moquerie et la concurrence sont bannies des relations maître-élèves ou des relations entre pairs. Selon Houzet, pour instaurer un climat propice au développement, l’enseignant doit d’ailleurs être attentif au chantage émotionnel de la part de l’élève et désamorcer les situations où cette conduite se manifeste. L’apprentissage est donc conçu comme un rapport social au savoir (les acquisitions) et à l’école (la communauté de vie et d’apprentissage). La cohérence des adultes (enseignants et parents) est très importante à cet égard et permet de formaliser l’appartenance au groupe.
À propos de la liberté de l’enseignant, Houzet insiste sur le fait qu’elle est illusoire, et que l’enseignant, confronté à la société dans sa classe par le biais des problèmes sociaux que les élèves portent avec eux, agit à partir des contraintes imposées par cette situation.
Bien que l’ouvrage présente une vision différente aux lecteurs intéressés par la pédagogie du projet, on doit déplorer quelques lacunes, surtout pour le lecteur québécois. Ainsi, il aurait été utile d’avoir une introduction plus détaillée sur l’histoire et le développement de l’école Vitruve, car, au cours des conversations, les acteurs font référence à certains évènements passés qui ont marqué l’évolution de cette institution, mais qui ne seront pas, d’emblée, familiers au lecteur.
Enfin, bien que l’approche ethnologique présente des qualités en soi, en offrant au lecteur une parole ouverte et sans censure, il y a parfois des répétitions et des sauts dans la logique des explications d’une section à l’autre de l’ouvrage. La conversation à bâtons rompus ne facilite pas toujours la compréhension, ce qui donne parfois une sensation de confusion dans l’explication de la vision de cet homme digne d’intérêt.