Abstracts
Résumé
Hyperboliques rêveurs, les auteurs symbolistes sont aussi d’impénitents railleurs. Il est rare que l’esprit de sérieux qu’ils affichent ne soit pas concurrencé et relativisé en sous-main par des allusions ironiques, blagueuses ou plus généralement équivoques. Nous réfléchissons à cette double tendance au rêve et à la raillerie par référence aux Demoiselles Goubert (1886) : dans ce roman expérimental, et plus précisément dans sa partie centrale, qui en forme le noyau « poétique », Jean Moréas et Paul Adam auront essayé d’illustrer les thèses du célèbre « Manifeste » publié par leurs soins à la même période. Notre intention première est de réinscrire cette oeuvre princeps dans l’histoire littéraire, sous l’angle double où elle apparaît, d’une part, comme le complément fictionnel de l’une des références théoriques les plus importantes du symbolisme et, d’autre part, comme sa contrepartie railleuse ou sa mise en jeu critique. Mais il s’agit aussi de considérer Les demoiselles Goubert « de l’intérieur » : en prêtant attention à son écriture, nous serons en mesure de caractériser les principaux ressorts stylistiques sur lesquels reposent tout à la fois son pouvoir d’enchantement poétique et sa puissance de contestation et d’autodérision.
Abstract
In addition to being hyperbolic dreamers, symbolist authors are incorrigible mockers. It is rare that the spirit of seriousness that they exhibit is not secretly challenged and relativized by ironic, comical or, more generally, equivocal allusions. We reflect upon this dual tendency toward dream and mockery in reference to Les demoiselles Goubert (1886): in this experimental novel, and more specifically in its central part, which forms its ‘poetic’ core, Jean Moréas and Paul Adam attempted to illustrate the theses of the famous ‘Manifesto’ they published during the same period. Our primary intention is to reinscribe this pioneer and experimental work in literary history, from the dual perspective under which it appears: on one hand, as the fictional complement to one of the most significant theoretical references of symbolism, and, on the other hand, as its mocking counterpart or as its critical challenge. But it is also a matter of considering Les demoiselles Goubert ‘from the inside’: by paying attention to its writing, we will be able to characterize the main stylistic elements on which rest both its power of poetic enchantment and its strength of contestation and self-derision.