TTR
Traduction, terminologie, rédaction
Volume 35, Number 2, 2e semestre 2022 Traduction et subversion Translation and Subversion Guest-edited by Denise Merkle, Isabelle Collombat and Fayza El Qasem
Table of contents (12 articles)
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Présentation
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« English is an Anishinaabe language too. » Évaluer le rôle de la traduction dans la résurgence des ordres juridiques autochtones au Canada
René Lemieux
pp. 21–42
AbstractFR:
Alors que l’État canadien reconnaît pleinement deux traditions juridiques distinctes (le droit civil d’origine française et la common law d’origine anglaise), une troisième tradition juridique gagne actuellement en importance et en reconnaissance dans la jurisprudence : les différents ordres juridiques des peuples autochtones du Canada. Une question peut être posée : dans quelles langues ces ordres juridiques peuvent-ils être exprimés? Le titre de cet article, qui propose une réponse à cette question, provient d’une phrase de Brenda Child citée par le juriste John Borrows : « After 400 years, English is now an Anishnaabe language too » (2016, p. 810). Cette manière de qualifier l’anglais tend à indiquer qu’un ordre juridique autochtone ne doit pas absolument être lié à une langue spécifique. L’article a ainsi pour objectif de questionner cette affirmation et de donner un aperçu des enjeux du multilinguisme dans la résurgence des ordres juridiques autochtones au Canada, et ce, par une analyse du rôle potentiel de la traduction, tant interlinguale qu’intralinguale. Les enjeux de ce multilinguisme, intrinsèque au droit autochtone, nous permettent d’envisager une autre manière de comprendre la traduction interculturelle, non plus entre deux différentes cultures, mais à l’intérieur d’une même culture, dans ce cas-ci un système juridique particulier.
EN:
While the Canadian state fully recognizes two distinct legal traditions (the civil law of French origin and the common law of English origin), a third legal tradition is currently gaining importance and recognition in jurisprudence: the different legal orders of the Indigenous peoples of Canada. One might ask: in what languages can these legal orders be expressed? The title of this article—a phrase by Brenda Child quoted by the jurist John Borrows: “After 400 years, English is now an Anishnaabe language too” (2016, p. 810)—proposes an answer to this question, suggestings that an Indigenous legal order need not be tied to a specific language. The article aims to critically examine this assertion by providing an overview of the issues at stake in the resurgence of Indigenous legal orders in Canada, through an analysis of the role that translation, both inter- and intra-lingual, can play. The issues raised by this particular sort of multilingualism, intrinsic to Indigenous law, bring to the fore another way of understanding intercultural translation as no longer uniquely between two different cultures, but within the same culture, in this case a particular legal system.
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Figures de la subversion et de la transgression dans la fiction à substrat traductif
Freddie Plassard
pp. 43–69
AbstractFR:
Les romans Vengeance du traducteur et Les Nègres du traducteur, de Brice Matthieussent et de Claude Bleton respectivement, se jouent des hiérarchies traditionnelles entre auteur et traducteur, original et traduction, illustrant chacun par leur intrigue et leur trame un visage parfois méconnu de la traduction, celui de la traduction déviante, subversive et transgressive, néanmoins propice à un questionnement sur son statut générique et son rapport à l’écriture princeps.
EN:
The novels Vengeance du traducteur and Les Nègres du traducteur, by Brice Matthieussent and Claude Bleton respectively, play with the traditional hierarchies between author and translator, original and translation, thereby illustrating at the levels of both plot and narration a facet of translation that has often gone unrecognized, namely its deviant, subversive, and transgressive nature, which, in turn, is conducive to a questioning of translation’s generic status as well as its relationship to the original.
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Subversion in Visual and Verbal Paratexts. A Case Study of the Translation of a Contemporary Chinese Artist’s Biography
Yandi Wang
pp. 71–99
AbstractEN:
Translation has long been integral to the circulation of art between the East and West (Whyte and Heide, 2011, p. 47). Classical Chinese art was first introduced to the West when a history of classical Chinese painting was translated into English (ibid., pp. 46-47). As indicated by the plethora of books and articles published on the subject, there is now widespread interest in contemporary Chinese art, which has achieved international acclaim since the 1990s. This paper draws on existing scholarship in translation studies and political science to analyze four types of paratext (title, cover design, epigraphs, and translator’s preface) in a biography of contemporary Chinese artist Zhang Xiaogang. Based on a comparative visual and verbal paratextual analysis, the paper examines the re-construction of the original title and cover design for the English translation of Zhang’s biography. In this “paratranslation” (Pellatt, 2013a), the translator subverts what Valerie Pellatt calls an “Occidentalist approach” in two ways: first, by privileging the source culture—China’s soft power—over the Western target readership and, second, by explicitly but subtly using rhetorical and narrative devices to convey his own social-political stance. The translated paratexts thus perform multiple functions. They promote the state’s soft power by constructing an image of an underground artist whose work, by resisting autocracy, was once suppressed by the state but is now acclaimed both nationally and internationally. Simultaneously, the translation provides a space for the translator’s voice. This study reveals the importance of translation to scholarship on contemporary Chinese art, which here goes beyond translation itself by giving the translator a voice to advocate for social awareness.
FR:
La traduction constitue depuis longtemps un vecteur de circulation de l’art entre l’Orient et l’Occident (Whyte et Heide, 2011, p. 47). L’art chinois classique a été introduit pour la première fois en Occident lorsque l’histoire de la peinture chinoise classique a été traduite en anglais (ibid., pp. 46-47). Comme l’indique la pléthore de publications sur le sujet, l’intérêt pour l’art contemporain chinois, qui bénéficie d’une reconnaissance internationale depuis les années 1990, est désormais très répandu. Cet article, qui s’appuie sur des études existantes en traductologie et en politique, analyse quatre types de paratexte (titre, couverture, épigraphes et préface du traducteur) d’une biographie de l’artiste chinois contemporain Zhang Xiaogang. Dans cette « paratraduction » (Pellatt, 2013a), le traducteur subvertit de deux façons « l’approche occidentaliste » de la traduction : premièrement, en déplaçant l’attention des lecteurs cibles occidentaux vers le contexte social de la culture d’origine et, deuxièmement, en utilisant des procédés rhétoriques et des récits historiques explicites, mais subtils, pour transmettre sa position socio-politique. Le paratexte remplit donc de multiples fonctions. Il promeut le pouvoir de convaincre (soft power) de l’État, en construisant l’image d’un artiste autrefois clandestin qui a résisté à l’autocratie, dont le travail a été censuré par l’État, et qui est maintenant acclamé aux niveaux national et international. Simultanément, la traduction offre un espace d’expression pour le traducteur, dans un scénario complexe. Cette étude révèle l’importance de la traduction dans l’étude de l’art chinois contemporain, dont la valeur potentielle va au-delà de la traduction elle-même, et dans laquelle la voix du traducteur peut plaider pour une prise de conscience sociale.
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Les enjeux du traduire : penser « l’entre » dans la distance à l’autre. Le cas de la traduction française du roman d’El Aswany
Fayza El Qasem
pp. 101–128
AbstractFR:
Si la subversion est la remise en question d’un modèle ou une posture qui en questionne la pertinence, dans quelle mesure la traduction d’un roman subversif, cloué au pilori par les gardiens de l’ordre traditionnel, remplit-elle son rôle, en ouvrant les virtualités de l’oeuvre originale et en donnant à lire l’Autre dans sa singularité et son universalité? Un des chemins consiste à sortir du dualisme qui postule un principe de séparation/exclusion, d’homogénéisation d’une culture et de sa sur-identification. C’est donc au traducteur de choisir les moyens de négocier le décentrement qui s’opère entre la langue-culture source et la langue-culture cible, en fonction de sa représentation de son lecteur, qu’il peut voir comme ouvert à l’universel ou, au contraire, comme désireux de s’ouvrir vers des horizons lointains, mais d’une façon qui lui reste familière.
Dans quelle mesure la traduction française du roman de l’auteur égyptien El Aswany, J’ai couru vers le Nil (Actes Sud, 2018), réalisée par Gilles Gauthier, transmet-elle le style et le contenu subversifs de l’original? Plutôt que de montrer les insuffisances de l’oeuvre traduite, nous proposons de nous confronter aux enjeux représentationnels de la traduction et à leurs effets sur l’image de la culture cible. Nous présenterons les stratégies utilisées par Gauthier dans certains passages, à même d’éclairer sa posture et d’interroger son rapport à l’altérité.
EN:
If subversion is the questioning of the relevance of a model or a posture, to what extent does the translation of a subversive novel—pilloried by the guardians of the traditional order of things—, fulfill its role by opening up the possibilities of the original, by freeing itself from the translational norms of its time, and by giving reader a chance to apprehend the singularity and universality of the Other? One way is to move away from dualisms informed by the principle of separation/exclusion that lead to cultural homogenisation and over-identification. Translators must choose how to negotiate the decentering that takes place between the source language-culture and the target language-culture, according to their representation of the reader, construed either as open to the universal or, conversely, eager to open up to distant horizons, in a way that nonetheless remains familiar.
To what extent does the French version of Egyptian author El Aswany’s novel, J’ai couru vers le Nil (Actes Sud, 2018), translated by Gilles Gauthier, convey the original’s subversive style and content? Rather than pointing to the inadequacies of his translation, our objective is to analyse the representational issues it raises and their effects on the target culture’s image of the Other. We will present the strategies used by Gauthier in certain passages, in order to shed light on his posture with regard to otherness.
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Subversive Sixties in Ink: Underground Comix, Censorship, and Translation between the United States and Italy
Chiara Polli
pp. 129–160
AbstractEN:
This study focuses on underground comix in the US and their reception in Italy, where different translations have been circulating since the late 1960s. Underground comix were the controversial product of the 1960s-1970s’ counterculture, that is, of a period of struggle and cultural renewal in US history. As taboo contents such as sex, drugs, and political dissent became the core of this needle-sharp graphic satire, underground cartoonists had to deal with media lynching, exclusion from distribution circuits, fines, and seizures of materials. The present contribution reconstructs the twisted relationships between underground comix and the different forms of censorship they faced in their homeland as well as in Italy, where they were translated by both militant and mainstream publishers in different time periods. This study focuses on Robert Crumb, the most famous underground cartoonist, and discusses a corpus of comics dealing with the theme of sexuality used to shock and subvert US morality. The compared analysis of multiple translations of the same stories, published between the 1970s and 2018, shows how the Italian reception of Crumb’s most provocative comics was impacted by a pre-selection of contents, practices of deliberate censorship of the original materials and, in particular, by the trivialisation of potentially subversive contents under the influence of the commedia sexy all’italiana film genre. It is maintained that, in the Italian context, Crumb’s sexually explicit works are not deemed controversial provided they are deprived of social criticism and re-interpreted within a comedic frame through translation. The latter argument paves the way for a reflection on how subversive materials can be “narcotized” (Eco, 2003, p. 139) by means of banalization, whose outcomes are similar to those that result from overt censorship.
FR:
Cette étude porte sur le phénomène de la bande dessinée underground [underground comix] aux États-Unis et sur sa réception en Italie, pays où les traductions de ces oeuvres controversées circulent à partir de la fin des années 1960. Nés de la contre-culture des années 1960-1970, les underground comix sont l’un des produits d’une époque de lutte acharnée et de renouveau culturel dans l’histoire des États-Unis. Les sujets de prédilection de cette satire mordante étant des thématiques taboues comme le sexe, la drogue et la contestation politique, de nombreux dessinateurs underground font face au lynchage médiatique, aux amendes et à la saisie de matériel, avant d’être exclus des circuits de distribution. La présente contribution retrace donc le rapport intriqué entre les underground comix et les différentes formes de censure dont ils ont été la cible aux États-Unis et en Italie, où les traductions ont été publiées autant par des éditeurs militants que par des éditeurs plus commerciaux à différentes époques. Elle se penche précisément sur Robert Crumb, le dessinateur underground le plus célèbre, et un corpus de bandes dessinées visant à choquer et à subvertir la moralité américaine. L’analyse comparée de plusieurs traductions des mêmes histoires, publiées entre les années 1970 et 2018, montre l’incidence de la présélection des contenus, des pratiques de censure délibérée des matériaux originaux et d’une banalisation de contenus potentiellement subversifs, sous l’influence du genre cinématographique commedia sexy all’italiana, sur la réception en Italie des bandes dessinées de Crumb les plus provocatrices. L’étude confirme que, dans le contexte italien, les oeuvres sexuellement explicites de Crumb ne sont pas jugées controversées tant que leur militantisme social est évacué et réinterprété dans un cadre comique par la traduction. Ce dernier argument ouvre la voie à une réflexion sur la façon dont les matériaux subversifs peuvent être « narcotisés » (Eco, 2003, p. 139) par le biais de la banalisation, avec des résultats comparables à ceux de la censure explicite.
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La religion, véritable credo du discours franquiste : traduction, censure et adaptation idéologique de La Terre, d’Émile Zola
Purificación Meseguer Cutillas
pp. 161–188
AbstractFR:
La littérature étrangère n’a cessé de représenter une menace pour l’Espagne franquiste. Les traductions produites à l’époque étaient systématiquement soumises à un examen destiné à détecter tout contenu subversif. Les censeurs avaient alors tout le loisir de caviarder ou même de réécrire des passages entiers d’oeuvres considérées comme potentiellement dangereuses. Par le biais de l’étude des traductions littéraires réalisées durant cette époque, il est possible d’observer dans quelle mesure les idées dissidentes ou contraires à l’ordre établi pouvaient ainsi être neutralisées, ou tout bonnement transformées en discours bienveillants envers le pouvoir en place. La plupart de ces oeuvres étrangères ont été retraduites depuis la fin de la dictature : certaines, cependant, circulent encore sous la forme censurée qui leur fut alors donnée. C’est le cas de La Terre, d’Émile Zola : ce roman, qui s’est attiré les foudres de la critique et des autorités à Paris, à Londres ou à Rome, pour son supposé caractère immoral voire tout à fait obscène, a donné lieu, en plein franquisme, à deux versions en espagnol. Pourtant, dans celles-ci, c’est manifestement le traitement de la question religieuse qui a posé le plus problème. Le sentiment antireligieux qui plane sur la communauté paysanne dépeinte dans cet épisode des Rougon-Macquart est complètement détourné, et le phénomène de déchristianisation qui s’y produit laisse même place, dans les deux traductions, à un renforcement de la foi. À travers l’analyse de ces versions en phase avec l’orthodoxie franquiste, cette étude a pour objet de reconstruire la micro-histoire du grand roman paysan de Zola dans le contexte de son importation au sein du système littéraire encadré par la dictature espagnole, en envisageant les processus de réception, de conditionnement et d’appropriation auxquels il a été soumis afin d’en assurer la conformité idéologique.
EN:
Foreign literature was a threat to Franco’s Spain. Translations produced at that time were subjected to a thorough vetting aimed at identifying subversive content. Censors were free to redact or even rewrite entire passages of works considered potentially dangerous. Through the study of literary translations published during this period, it is possible to observe the extent to which dissident or anti-establishment ideas could be neutralized or transformed into discourses that were benevolent to the ruling power. Most of these foreign works have been re-translated since the end of the dictatorship; others, however, still circulate in the censored form in which they were published. This is the case of Émile Zola’s La Terre: the novel, which attracted the wrath of critics and authorities in Paris, London, and Rome for its supposed immorality, even obscenity, was translated twice into Spanish during Franco’s dictatorship. However, in these versions, the most problematic passages are those with religious content. The anti-religious feelings characteristic of the peasant community depicted in this novel from the Rougon-Macquart series is significantly distorted, and the accompanying phenomenon of de-christianization at times gives way, in the two translations, to a strengthening of Christian values. Through the analysis of these versions in line with Francoist orthodoxy, this study aims to reconstruct the micro-history of Zola’s great peasant novel in the context of its importation into the literary system framed by the Spanish dictatorship, by examining the processes of reception, censorship, and appropriation to which it was subjected in order to ensure its ideological conformity.
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Une tentative subversive par le « coeur d’enfant » – Traduire l’humanité de Quatrevingt-treize en Chine par Zeng Pu (1872-1935)
Florence Xiangyun Zhang
pp. 189–211
AbstractFR:
Le roman Quatrevingt-treize de Victor Hugo est traduit en chinois en 1912 par Zeng Pu (1872-1935), au lendemain de la révolution républicaine chinoise. Le traducteur, romancier de renom, est un lettré chinois qui a appris le français en autodidacte. Dans sa préface pour la réédition du roman hugolien en 1913, Zeng Pu, qualifiant le roman de poésie, met en avant l’humanité de Hugo et souligne le « coeur d’enfant » comme idée principale du roman. Sa traduction, en chinois semi-classique, réduit la part de la narration philosophique de Hugo, mais se concentre sur des scènes allégoriques et amplifie les descriptions des sentiments des personnages. Or, cette démarche romanesque et morale du traducteur n’est pas dépourvue de choix paradoxaux qui méritent une étude approfondie. Le présent article examine les singularités de cette traduction afin de mettre en lumière une certaine tentative subversive de la traduction à une période spécifique de la Chine moderne.
EN:
Victor Hugo’s novel Ninety-Three (Quatrevingt-treize) was translated into Chinese in 1912 by Zeng Pu (1872-1935), in the immediate aftermath of the Chinese republican revolution. The translator, a renowned novelist, was a Chinese literati who had learned French on his own. In his preface to the 1913 re-edition of the Hugolian novel, Zeng Pu, calling it poetry, highlights Hugo’s humanity and emphasizes the “child’s heart” as the novel’s main theme. His translation into semi-classical Chinese reduces the length of Hugo’s philosophical narration, focusing instead on allegorical scenes and amplifying the descriptions of the characters’ feelings. However, this approach to fiction and morality by the translator is not without paradoxical choices, which deserve an in-depth study. The article examines the singularities of Zeng’s Chinese version in order to shed light on what can be seen as an attempt at subversive translation in a specific period of modern China.
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When Deciding to Translate Means Risking Your Reputation: How an American Translator Became a “Spy,” and a Chinese Author, an “Enemy from America”
Ye Tian
pp. 213–238
AbstractEN:
While research on the role of translation in society largely focuses on the reception of translated texts, this article calls for a closer look at the decision to translate. It proposes that, on a micro-level, the decision to translate, in the context of an ideological and political conflict, has the potential to subvert the image of authors and translators as perceived by certain groups of people. It reveals how opinions regarding translators and authors are often a product of ideological stances rather than widespread reading of either the authored text or its translation. In this case, it is not a collective reading of the translation itself that sways the perception but, rather, a political “reading” of the translator’s and author’s respective images, which consequently influences their reputation within these groups. This article investigates the translation of a “diary” that recorded events during the Wuhan lockdown (January-April 2020) and garnered much attention on Weibo, China’s largest social media platform. Comments shared on Weibo about the author, Wang Fang, also known as Fang Fang, and the American translator, Michael Berry, were significantly different before and after the publication of Berry’s translation, intitled Wuhan Diary. By examining a sample of Weibo users’ reactions, the article seeks to understand the rationale behind the changing perceptions of the author’s and the translator’s image. It argues that Berry, through his decision to translate, comes to be perceived by Weibo users as a “spy,” while Fang Fang, having given her consent for her “diary” to be translated, is then perceived as an “enemy from America.” Translation is thus seen to play a significant role in subverting both an author’s and a translator’s reputation at the micro-level.
FR:
Alors que les recherches sur le rôle de la traduction se concentrent essentiellement sur la réception de textes traduits, cet article se concentre sur la décision de traduire, avançant l’hypothèse que, dans le contexte d’un conflit idéologique et politique, cette décision a le potentiel de subvertir l’image des auteurs et des traducteurs, telle qu’elle est perçue à un niveau micro par certains groupes. En effet, l’opinion qu’on se forge sur les traducteurs et auteurs peut découler de positions idéologiques plutôt que d’une lecture approfondie du texte original ou de sa traduction. Ce n’est donc pas la lecture collective d’un texte traduit qui infléchit cette perception, mais plutôt une « lecture » politique de l’image du traducteur et de l’auteur, laquelle peut nuire à leur réputation au sein de ces groupes. Cet article porte sur la traduction d’un « journal » dans lequel ont été consignés les événements survenus pendant le confinement de Wuhan (janvier-avril 2020) et qui a suscité de nombreux commentaires sur Weibo, la plus grande plateforme de réseaux sociaux de Chine. Les commentaires concernant l’autrice Wang Fang, également connue sous le nom de Fang Fang, et le traducteur anglais, Michael Berry, étaient sensiblement différents avant et après la publication de la traduction du « journal » sous le titre Wuhan Diary. À partir d’un échantillon de réactions des utilisateurs de Weibo, l’article analyse les raisons pour lesquelles l’image de l’autrice et du traducteur a été modifiée. Par sa décision de traduire, Berry est désormais perçu par les utilisateurs de Weibo comme un « espion », tandis que Fang Fang, qui a donné son accord pour que son « journal » soit traduit, est perçue comme une « ennemie venue d’Amérique ». La traduction joue donc un rôle dans la subversion de leur réputation à un niveau micro.
Comptes rendus / Book Reviews
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Markoosie Patsauq. Edited and translated by Valerie Henitiuk and Marc-Antoine Mahieu. Uumajursiutik unaatuinnamut / Hunter with Harpoon / Chasseur au harpon. Montréal and Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2021, 334 p.
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Elizabeth Yeoman. Exactly What I Said: Translating Words and Worlds. Winnipeg, University of Manitoba Press, 2022, 276 p.
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Judith Weisz Woodsworth, ed. Translation and the Global City: Bridges and Gateways. New York and London, Routledge, 2022, 260 p.