Notes critiques

Éric Bédard, L’histoire du Québec pour les nuls (préface de Jacques Lacoursière), Paris, First Éditions, 2012, 394 p.[Record]

  • Jocelyn Létourneau

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  • Jocelyn Létourneau
    Chaire de recherche du Canada en histoire du Québec contemporain, Célat/Département d’histoire, Université Laval
    Jocelyn.letourneau@celat.ulaval.ca

Historien de métier et professeur d’université, Éric Bédard, depuis quelques années, a décidé d’investir intensément le champ de la vulgarisation de l’histoire. Outre une chronique historique qu’il tient chaque dimanche dans les pages du Journal de Montréal (« Le Québec, une histoire de famille »), il codirige une émission à caractère historique (« Au tour de l’histoire ») sur la chaîne MATV de Vidéotron. Soucieux de rendre l’histoire accessible au plus grand nombre, il a, dans la première décennie des années 2000, collaboré à plusieurs séries diffusées sur Historia. Durant l’été 2009, à l’occasion du 250e anniversaire de la bataille des Plaines d’Abraham, il a tenu une « Chronique de la conquête » dans les pages du Journal de Québec. Un an plus tard, il est revenu en publiant, dans le même quotidien, une série de textes soulignant le cinquantième anniversaire de la Révolution tranquille. Plus récemment, Éric Bédard s’est fait connaître par ses interventions publiques en faveur du rétablissement de l’histoire politique et nationale dans l’enseignement scolaire. Instigateur du Collectif pour une éducation de qualité et membre fondateur de la Coalition pour l’histoire, il a fortement dénoncé la mise sur pied du cours Histoire et éducation à la citoyenneté parce que, apparemment, ce cours ne valorisait pas assez l’héritage de la nation québécoise auprès des jeunes. Avec Myriam D’Arcy, il a publié un rapport sur l’enseignement et la recherche en histoire politique et nationale du Québec dans les universités de la province (Bédard et D’Arcy, 2011), affirmant, à propos de cet enseignement et de cette recherche, qu’ils étaient à toutes fins utiles inexistants. Bien que vivement contestée par les spécialistes (Fecteau, 2011), l’étude – commandée par la Fondation Lionel-Groulx –, s’ajoutant à d’autres actions publiques de l’historien, a néanmoins convaincu le Parti québécois, par l’entremise de Marie Malavoy qui a porté le dossier, d’inclure dans son programme une mention forte concernant l’enseignement de l’histoire nationale du Québec, et ce, de l’école primaire à l’université. Que, dans ce contexte, Éric Bédard ait accepté l’invitation de rédiger une histoire du Québec pour les nuls ne surprend pas. Cette production va dans le sens de l’objectif qu’il s’est fixé de diffuser, parmi la population, une vision de l’histoire du Québec qui sied à la représentation qu’il privilégie du destin du peuple québécois, peuple à qui il croit nécessaire de rappeler d’où il vient, ce qu’il a fait et qui il est à défaut de lui dire où aller. Pour plusieurs, au premier titre les nationalistes conservateurs (Piotte et Couture, 2012), la publication de L’histoire du Québec pour les nuls arrive à point. Depuis un bon moment déjà, dans la province, fait rage un débat entre ceux qui plaident pour une histoire actualisée de l’expérience québécoise dans le temps et ceux qui, s’inquiétant des effets possiblement délétères d’une telle histoire sur l’identitaire collectif et la représentation accréditée de la nation, militent pour le maintien du récit traditionnel. Ce débat a pris une nouvel élan en 2006 au moment où, sous l’égide du ministère de l’Enseignement, du Loisir et du Sport (MELS), le cours Histoire du Québec et du Canada, en vigueur depuis 1982, a été remplacé par le cours Histoire et éducation à la citoyenneté. Rapidement, la mobilisation s’est faite contre le nouveau cours dont on a dit qu’il visait à dénationaliser, à déquébéciser et à défrancophoniser l’expérience historique québécoise au profit d’une vision réputée postnationaliste, fédéraliste et multiculturaliste du parcours collectif (Bédard, 2006 ; Bock-Côté, 2007 ; Courtois, 2009). Bien que la réprobation du cours Histoire et éducation à la citoyenneté …

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