Recherches amérindiennes au Québec
Volume 50, Number 1, 2020 Rêves, religions et relations intersubjectives dans les Amériques Guest-edited by Robert R. Crépeau, Frédéric B. Laugrand and Lionel Simon
Table of contents (23 articles)
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Éditorial : cinquante ans de RAQ : briser l’isolement
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Introduction : anthropologie et intersubjectivité : « Entendre et s’entendre »
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Un itinéraire anthropologique
Jean-Guy A. Goulet
pp. 11–39
AbstractFR:
Dans cette rétrospective, l’auteur trace les grandes lignes de son itinéraire comme anthropologue depuis l’obtention de son doctorat à l’Université Yale. Il raconte d’abord comment il a découvert dans l’anthropologie le métier qui lui permettrait de répondre à une question qui lui est venue tôt dans la vie : « Que serais-je devenu si ma naissance et mon éducation étaient survenues parmi les “Autres” ? » Il souligne ensuite à quel point sa carrière comme anthropologue a été, du début à la fin, nourrie par l’apprentissage de deux langues autochtones lors de deux terrains intensifs, d’abord chez les Wayuu de la Colombie (septembre 1975 à décembre 1976), puis chez les Dènès Tha’ du Nord-Ouest albertain, six mois par année, de janvier 1980 à la fin de juin 1984. Cet apprentissage l’a rapproché des anciens et a rendu possible sa participation à leurs rituels d’offrande – ce qui l’a conduit à contribuer au développement de l’anthropologie expérientielle. Ses nombreuses présentations et publications abordent différents thèmes importants dans le champ des études autochtones : questions épistémologiques et éthiques, ainsi que méthodologie, ethnogenèse, cérémonies, chamanisme, revendications territoriales, autonomie gouvernementale, identités de genre, conceptions de la vie et de la mort et réincarnation. Il décrit aussi comment ses apprentissages chez les Dènès Tha’ lui ont inspiré des initiatives significatives en tant que directeur du Centre autochtone à l’Université de Calgary, de 1988 à 1991, et doyen fondateur de la Faculté des sciences humaines à l’Université Saint-Paul de 1997 à 2005.
EN:
In this retrospective I highlight the main stages in my career as an anthropologist since completing my doctoral studies at Yale University. I first tell how I found in anthropology the profession that would enable me to explore a question that I had as a child: what I might have become had I been born and raised in another environment, among “Others”? I then underscore how from beginning to end my career was enriched from my learning two indigenous languages, first in my fieldwork among the Wayuu of Columbia (September 1975 to December 1976), and then among the Dene Tha’ of northwestern Alberta amongst whom I spent six months a year from 1980 to 1984. Learning the language brought me closer to Dene Tha’ Elders and made possible my participation in their ceremonies which led me to write ethnographically in a way that contributed to the development of experiential anthropology. My numerous presentations and publications explore major themes in the field of indigenous studies: epistemology, ethics, methodology, ethnogenesis, rituals, shamanism, territorial claims, self-government, gender identities, conceptions of life and death, and reincarnation. In this career, I also describe what I learned from the Dene Tha’ that guided me in significant initiatives in my role as Director of the Native Centre at the University of Calgary from 1988 à 1991, and as founding Dean of the Faculty of Human Sciences at Saint Paul University from 1997 to 2005.
ES:
En esta retrospectiva, el autor traza los grandes ejes de su trayectoria como antropólogo desde que se doctoró en la Universidad de Yale. Comienza relatando cómo descubrió la profesión de antropólogo, lo que le permitiría responder a una pregunta que se planteó en los primeros años de su vida: “¿Qué habría sido de mí si mi nacimiento y mi educación hubieran tenido lugar entre los «Otros?” A continuación, señala cómo su carrera de antropólogo se nutrió, de principio a fin, del aprendizaje de dos lenguas indígenas durante dos periodos intensivos de trabajo de campo, primero con los Wayuu de Colombia (de septiembre de 1975 a diciembre de 1976) y luego con los Dènès Tha’ del noroeste de Alberta, seis meses al año, de enero de 1980 a finales de junio de 1984. Este aprendizaje lo acercó a los ancianos y le permitió participar en sus rituales de ofrenda, lo que le llevó a contribuir al desarrollo de la antropología experiencial. Sus numerosas presentaciones y publicaciones abordan una variedad de temas importantes en el campo de los estudios indígenas: cuestiones epistemológicas y éticas, así como metodología, etnogénesis, ceremonias, chamanismo, reivindicaciones territoriales, autonomía, identidades de género, concepciones de la vida y la muerte, y reencarnación. También describe cómo su aprendizaje con los Dènès Tha’ inspiró importantes iniciativas como director del Centro Indígena de la Universidad de Calgary de 1988 a 1991 y decano fundador de la Facultad de Ciencias Humanas de la Universidad de Saint-Paul de 1997 a 2005.
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La reproduction socio-ethnique wayuu : les transitions de l’autonomie relative à la dépendance
Claudia Puerta Silva
pp. 41–56
AbstractFR:
La segmentation sociospatiale et la crise des processus de reproduction socio-ethnique à Media Luna (La Guajira) permettent de comprendre la transition des Wayuu vers une dépendance à l’assistanat néolibéral. D’après les ethnographies réalisées entre 1998 et 2018, le processus de segmentation sociospatiale trouve son origine dans la réduction et la fixation sur le territoire et dans les politiques néolibérales de reconnaissance multiculturelle. Ses conséquences sont 1) que les nouvelles unités sociospatiales n’ont plus les moyens matériels de subsistance et dépendent du travail salarié et de l’offre institutionnelle, et 2) que des ruptures se produisent dans les liens de solidarité, de collaboration et de complémentarité pour le soutien mutuel et les conflits internes dus à la concurrence des ressources et des équipements institutionnels.
EN:
The socio-spatial segmentation and the crisis in the processes of socio-ethnic reproduction in Media Luna (La Guajira) allow us to understand the transition of the Wayuu towards a dependence on neoliberal assistance. From the ethnographies carried out between 1998 and 2018, it is argued that the process of socio-spatial segmentation originates from the reduction and fixation in the territory and the neoliberal policies of multicultural recognition. Its consequences are 1) that the new socio-spatial units no longer have the material means for subsistence and depend on salaried work and institutional supply; and 2) that ruptures are generated in the bonds of solidarity, collaboration and complementarity for mutual support and internal conflicts due to competition for institutional resources and equipment.
ES:
La segmentación socioespacial y la crisis en los procesos de reproducción socioétnica en Media Luna (La Guajira) permiten comprender la transición de los Wayuu hacia una dependencia frente al asistencialismo neoliberal. A partir de etnografías realizadas entre 1998 y 2018, se argumenta que el proceso de segmentación socioespacial se origina de la reducción y la fijación en el territorio y las políticas neoliberales de reconocimiento multicultural. Sus consecuencias son 1) que las nuevas unidades socioespaciales dejan de contar con los medios materiales para la subsistencia y dependen del trabajo asalariado y la oferta institucional; y 2) que se generen rupturas en los lazos de solidaridad, colaboración y complementariedad para el apoyo mutuo y conflictos internos debido a la competencia por los recursos y equipamientos institucionales.
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Ruptures et continuités de la personne : traitements des morts chez les Wayùu de Colombie
Lionel Simon
pp. 57–68
AbstractFR:
Deux thèses en apparence antinomiques ont été développées pour rendre compte des traitements funéraires pratiqués dans les basses terres d’Amérique du Sud. L’une soutient l’idée que la coupure entre morts et vivants constitue le motif des pratiques mortuaires. L’autre pointe au contraire le souci de prolonger la continuité entre la personne disparue et ce qu’elle était de son vivant. À travers un examen des cérémonies funèbres, mais aussi des usages que les défunts suscitent, le cas des Wayùu de Colombie met en évidence une posture intermédiaire, qui oscille entre l’abolition et la conservation des morts, entre la préservation du souvenir et l’oubli. Cette ambivalence traduit un souci notable pour l’allégresse des yoluja, forme que prennent les individus après leur trépas. Dans cet article, ceux-ci sont notamment appréhendés à travers les « territorialisations » dont ils sont l’objet et les propriétés ontologiques qui leur sont prêtées. Il s’agit de montrer que le socle paradigmatique qui suppose l’existence de deux stades de mortalité – et l’anonymisation de la personne selon une temporalité calquée sur le processus biologique de décomposition des corps – autorise une variété d’articulations entre rupture et continuité. Les développements proposés entendent aussi de mettre en évidence le fait que, pour comprendre ces articulations, il est salutaire d’inscrire les pratiques funéraires dans un complexe relationnel plus large, qui relie les vivants et « leurs morts ».
EN:
With regard to funerary treatments in the lowlands of South America, two apparently opposite theses have been developed. One supports the idea that the mortuary practices aim to achieve the rupture between the living and the dead. On the contrary, the other points to the concern to prolong the continuity between the deceased persons and what they were during their lifetime. Through an examination of the funeral ceremonies, but also of the practices regarding the dead, the case of the Wayùu of Colombia highlights an intermediate posture, which oscillates between the abolition and the preservation of the deceased and of his memory. This ambivalence reflects a notable concern for the joy of the yoluja, the form that individuals take after their death. In this article, these latter are particularly understood through their «territorialization» and their attributed ontological properties. The aim is to show that the paradigmatic base that presupposes the existence of two stages of mortality – and the anonymization of the person according to a temporality modelled on the biological process of decomposition of the bodies – allows a variety of possibilities regarding the articulations between rupture and continuity. The proposed developments also aim to highlight the fact that, in order to understand these articulations, it is beneficial to inscribe funeral practices in a broader relational complex, which connects the living and “their dead”.
ES:
Para dar cuenta de los tratamientos funerarios practicados en las tierras bajas de América del Sur, se han desarrollado dos tesis aparentemente opuestas. Una sostiene la idea de que la ruptura entre los muertos y los vivos constituye el motivo de las prácticas mortuorias. La otra tesis apunta, en cambio, a la preocupación de mantener la continuidad entre la persona desaparecida y lo que era en vida. A través de un examen de las ceremonias fúnebres, pero también de los usos que suscitan los difuntos, el caso de los Wayùu de Colombia pone en evidencia una postura intermedia, que oscila entre la abolición y la conservación de los difuntos, entre la preservación del recuerdo y el olvido. Esta ambivalencia traduce una preocupación notable por la alegría de los yoluja, la forma que toman los individuos después de su muerte. En este artículo, éstos últimos son comprendidos en particular a través de sus “territorializaciones” y de las propiedades ontológicas que los Wayùu les prestan. Se trata de mostrar que la base paradigmática que supone la existencia de dos etapas de mortalidad - y la anonimización de la persona según una temporalidad calcada del proceso biológico de descomposición de los cuerpos - permite una variedad de articulaciones entre ruptura y continuidad. Los desarrollos propuestos pretenden también poner de relieve el hecho de que, para comprender estas articulaciones, es beneficioso inscribir las prácticas funerarias en un complejo relacional más amplio, que conecta a los vivos y “sus muertos”.
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Parenté et organisation sociale chez les Wayùu : retour sur la question
Alessandro Mancuso
pp. 69–89
AbstractFR:
Dans cet article, l’auteur revient sur certaines questions concernant le domaine de la parenté et de l’organisation sociale des Wayùu de la péninsule de La Guajira, dans la zone frontalière du nord de la Colombie et du Venezuela. Prenant pour point de départ le désaccord entre Goulet et Saler sur l’existence de catégories et de groupes de lignages et sur la place de ceux-ci dans le monde social des Wayùu, il opte pour le point de vue de Saler, à savoir que ces catégories peuvent être considérées non seulement dans les mythes au sujet de l’origine de la société wayùu, mais aussi dans les différents concepts qui réfèrent à l’ancestralité utérine commune d’un groupe de gens apparentés, ainsi que dans les processus de développement, de reproduction et de subdivision des groupes matrilinéaires. La seconde partie de l’article aborde un certain nombre de questions suscitées par l’information ethnographique au sujet de la terminologie de la parenté chez les Wayùu : les différences entre les rapports des chercheurs ; la possibilité de choisir entre plusieurs options terminologiques lorsqu’il s’agit, soit de s’adresser à un même parent, soit de l’évoquer ; et l’interprétation des corrélats sociaux aux caractéristiques de type Crow. L’auteur avance que, dans l’étude de l’organisation sociale des Wayùu, la plupart de ces questions exigent d’être approchées de façon diachronique autant qu’historique, de pair avec une approche ethnographique.
EN:
In this paper, the author revisits some debated or scarcely explored issues regarding the field of kinship and of social organization among the Wayuu of the Guajira peninsula (Northern Colombia and Venezuela). He takes as a starting point the disagreement between Goulet and Saler on the existence and the place that descent categories and groups hold in the Wayuu social world, supporting the latter’s view that they can be grasped not only in myths about the origin of Wayuu society but also in the several ways and concepts that refer to the common uterine ancestry of a group of relatives as well as to the processes of development, reproduction and subdivision of matrilineal descent groups. In the second part of the paper, he deals with a number of questions posited by the ethnographic information about Wayuu kinship terminology: the differences existing among scholars’ reports, the availability of different terminological options both to address or to refer to a same kin-type, the interpretation of the social correlates of its Crow-type features. He argues that most of these issues require to undertake, along with an ethnographical approach, a diachronic as well as historic approach in the study of Wayuu social organization.
ES:
En este artículo, el autor revisa algunos temas debatidos o escasamente explorados que conciernen el parentesco y la organización social entre los Wayuu de la península de la Guajira, en la zona fronteriza del norte de Colombia y Venezuela. En primer lugar, se hace referencia al desacuerdo entre Goulet y Saler sobre la existencia y el lugar que ocupan las categorías y grupos de descendencia en el mundo social Wayuu. A partir de la información recogida en el curso del trabajo de campo, el autor comparte la visión de Saler según la cual el relieve que tienen categorías y grupos de descendencia puede ser captado no solo en los mitos sobre el origen de la sociedad Wayuu sino también en las diversas formas y conceptos que se refieren a la ascendencia uterina común de un grupo de parientes, así como a los procesos de desarrollo, reproducción y subdivisión de los grupos matrilineales. La segunda parte del artículo aborda una serie de interrogantes planteadas por la información etnográfica sobre la terminología del parentesco Wayuu: las diferencias existentes entre los informes de los académicos, la disponibilidad de diferentes opciones terminológicas tanto para dirigirse como para referirse a un mismo tipo de pariente, la interpretación de los correlatos sociales de sus características de tipo Crow. El autor sostiene que la mayoría de estos temas requieren emprender, junto con un enfoque etnográfico, un enfoque tanto diacrónico como histórico en el estudio de la organización social Wayuu.
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Le « musée » de McLeod Lake (Colombie-Britannique) : les Sekanis, les animaux et l’oubli sélectif
Guy Lanoue
pp. 91–101
AbstractFR:
Les Sekanis de la Colombie-Britannique septentrionale ont une longue histoire de contacts avec les groupes européens et eurocanadiens. Leur passé est marqué de plusieurs évènements importants, donc deux sont ciblés ici : le fait que les divers groupes sekanis ont émergé, dû aux dynamiques de la traite de fourrure dans la région, et comment ils l’ont expérimentée avec un système phratrique-totémique dans la deuxième moitié du xixe siècle. Cependant, ces deux volets importants du passé sont aujourd’hui totalement oubliés (tandis que d’autres évènements, même antérieurs, sont toujours d’actualité). L’auteur explore ici les raisons de cet « oubli » sélectif.
EN:
The Sekani of northern British Columbia have a long contact history with Europeans and Euro-Canadians. Their past is marked with several important events, of which two are addressed here: the fact that diverse Sekani groups emerged from the dynamics of the fur trade, and why the Sekani experimented with a phratric-totemic system in the second half of the 19th century. Surprisingly, these two important historical events are today totally forgotten (while others, some even earlier, are still remembered). The author explores here the reasons for this selective forgetfulness.
ES:
Los Sekanis del norte de la Columbia Británica tienen una larga historia de contactos con grupos europeos y euro-canadienses. Su pasado está marcado por varios acontecimientos importantes, por lo que aquí nos centraremos en dos de ellos: el surgimiento de los distintos grupos Sekanis, debido a la dinámica del comercio de pieles en la región, y cómo lo experimentaron con un sistema frátrico-totémico en la segunda mitad del siglo XIX. Sin embargo, estos dos importantes aspectos del pasado están ahora completamente olvidados (mientras que otros acontecimientos, incluso anteriores, siguen siendo relevantes). El autor explora aquí las razones de este “olvido” selectivo.
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L’intersubjectivité au-delà de l’espèce : rencontre avec les chiens de Old Crow (Yukon)
Aïko Cappe
pp. 103–114
AbstractFR:
Si Jean-Guy Goulet semble avoir, en partie, centré sa réflexion anthropologique autour des façons de s’entendre et vivre ensemble, c’est dans la perspective de ses travaux que l’auteure propose de réunir les questions de l’intersubjectivité, du terrain et de la rencontre avec les animaux au sein de son article. Elle raconte comment une approche intersubjective à Old Crow lui a permis d’aller à la rencontre, non seulement des humains vuntut gwich’in, mais surtout de leurs chiens qui peuplent presque tout autant le village. À partir de données ethnographiques, le plus souvent corporellement et sensiblement recueillies à travers l’empirisme de la rencontre, elle décrit comment ces chiens ont su s’inviter sur la scène ethnographique, non pas en tant que simples figurants, mais bien en tant qu’acteurs. Après avoir posé les enjeux méthodologiques et théoriques d’une telle ethnographie, elle explique comment des concepts initialement érigés par et pour des humains pour appréhender et comprendre l’altérité, trouvent également sens et pertinence dans des mondes animaux.
EN:
Among all his anthropological reflections, Jean-Guy Goulet always seemed to wonder how to get along and live together. Inspired by his work and using his concepts of intersubjectivity and experiential ethnography, this article will bring together fieldwork and animals subjects. It explains how using those concepts actually helped us meet in Old Crow, not only Vuntut Gwich’in people, but also their dogs that occupy nearly most of the village, and invited us to propose a dog ethnography. Through a sensory ethnography, we will propose a way to consider animals as real ethnographic actors and subjects. After having raised the methodological and theoretical issues of such an ethnography, we will discuss how those concepts inspired from Jean-Guy Goulet’s work are relevant to study other than human, and can help us take anthropology beyond its dualistic world.
ES:
Si Jean-Guy Goulet parece haber centrado su reflexión antropológica en parte en torno a las formas de entenderse y convivir, es en la perspectiva de su obra que la autora propone reunir en su artículo las cuestiones de la intersubjetividad, el trabajo de campo y el encuentro con los animales. La autora cuenta cómo un enfoque intersubjetivo en Old Crow le permitió conocer no sólo a los humanos Vuntut Gwich’in, sino especialmente a sus perros, que pueblan el lugar casi en la misma medida. Basándose en datos etnográficos, la mayoría de las veces recogidos corporal y sensiblemente a través del empirismo del encuentro, la autora describe cómo estos perros pudieron invitarse a sí mismos a la escena etnográfica, no como meros extras, sino como actores. Tras plantear los retos metodológicos y teóricos de una etnografía de este tipo, se explica cómo los conceptos inicialmente erigidos por y para los humanos para aprehender y comprender la alteridad también encuentran sentido y relevancia en los mundos animales.
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Y avait-il des deux-esprits chez les Anicinabek ? Perceptions sur la sexualité et les genres
Marie-Pierre Bousquet, Laurence Hamel-Charest and Anna Mapachee
pp. 115–127
AbstractFR:
Y avait-il des genres alternatifs chez les Anicinabek ? La question a émergé après qu’un centre de santé, désireux de lutter contre l’homophobie, eut voulu créer des outils culturellement adéquats, fondés sur la tradition anicinabe. En collaboration avec ce centre, les auteures ont effectué une recherche sur les sexes et les genres auprès de personnes reconnues comme porteuses de savoirs sur les temps anciens. S’aidant d’une revue de littérature sur les deux-esprits chez les Premières Nations en général, elles ont noté que rien en anicinabemowin ne traduit l’existence d’autres genres que homme/femme et d’autres pratiques qu’hétérosexuelles. La sexualité était un domaine caché et les gens étaient pudiques. L’importance de la discrétion, dans un contexte où la reproduction était capitale, a fait ressortir les valeurs qui sont fondamentales pour les Anicinabek, comme le respect et la non-ingérence. Ainsi, être un « bon homme » et une « bonne femme » semble plus important que les préférences amoureuses et sexuelles de chacun.
EN:
Were there alternative genders among the Anicinabek? The question emerged after a health centre, wanting to fight homophobia, sought to develop culturally appropriate tools based on the Anicinabe tradition. In collaboration with this centre, we conducted a study on gender and sex with people who are recognized as bearers of traditional knowledge. With the help of a literature review on two-spiritedness among First Nations in general, we noted that nothing in Anicinabemowin shows the existence of genders other than male/female and practices other than heterosexual. Sexuality was a hidden domain and people were modest. The importance of discretion, in a context where reproduction was paramount, highlighted values that are fundamental to Anicinabek, such as respect and non-interference. Thus, being a “good man” and a “good woman” appears to be more important than one’s sexual or romantic preferences.
ES:
¿Existían géneros alternativos entre los Anicinabek? La cuestión surgió después de que un centro de salud, que deseaba luchar contra la homofobia, quisiera crear herramientas culturalmente apropiadas basadas en la tradición anicinabe. En colaboración con este centro, las autoras llevaron a cabo una investigación sobre género y sexo con personas reconocidas como portadoras de conocimientos ancestrales. A partir de una revisión de la bibliografía sobre la dualidad de espíritus entre las Primeras Naciones en general, observaron que nada en anicinabemowin refleja la existencia de géneros distintos al masculino/femenino y de prácticas distintas a la heterosexual. La sexualidad era un área oculta y la gente era púdica. La importancia de la discreción, en un contexto en el que la reproducción era primordial, puso de manifiesto valores fundamentales para los Anicinabek, como el respeto y la no injerencia. Así, ser un “buen hombre” y una “buena mujer” parece ser más importante que las propias preferencias amorosas y sexuales.
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La cérémonie du calumet ou l’ethnographie d’une expérience extraordinaire au sein de Notcimik (l’univers forestier des Atikamekw Nehirowisiwok, Québec)
Benoit Éthier
pp. 129–137
AbstractFR:
Cet article discute de l’apport des travaux de Jean-Guy Goulet dans les réflexions de l’auteur et dans ses façons d’aborder le terrain ethnographique. Il souligne notamment la pertinence des expériences oniriques du chercheur et des enseignements transmis par Notcimik, l’univers forestier des Atikamekw Nehirowisiwok, dans les matériaux ethnographiques. La réflexion est articulée ici autour d’une ethnographie d’une expérience personnelle vécue dans des relations sociales profitables ayant permis de mieux vivre et saisir certains principes, pratiques et savoirs des Atikamekw Nehirowisiwok. L’expérience ethnographique décrite dans cet article rejoint ce que Goulet (2007) décrit comme une « anthropologie extraordinaire », c’est-à-dire un engagement du chercheur dans des façons radicalement différentes de comprendre et d’habiter la réalité.
EN:
This article discusses the contribution of Jean-Guy Goulet’s work to the author’s reflections and his approaches to the ethnographic field. In particular, it highlights the relevance of the researcher’s dreamlike experiences and the teachings transmitted by Notcimik, the forest universe of the Atikamekw Nehirowisiwok, in ethnographic materials. Here, the reflection is articulated around an ethnography of a personal experience lived in profitable social relationships that enabled living better and understanding certain principles, practices and knowledge of the Atikamekw Nehirowisiwok. The ethnographic experience described in this article is in line with what Goulet (2007) describes as “extraordinary anthropology”, that is, the researcher’s involvement in radically different ways of understanding and inhabiting reality.
ES:
Este artículo analiza la contribución de la obra de Jean-Guy Goulet a las reflexiones del autor y a sus modos de abordar el terreno etnográfico. En particular, destaca la relevancia en los materiales etnográficos de las experiencias oníricas del investigador y las enseñanzas transmitidas por Notcimik, el universo forestal de los Atikamekw Nehirowisiwok. La reflexión se articula aquí en torno a una etnografía de una experiencia personal vivida en relaciones sociales provechosas que permitieron vivir y comprender mejor ciertos principios, prácticas y conocimientos de los Atikamekw Nehirowisiwok. La experiencia etnográfica descrita en este artículo está en consonancia con lo que Goulet (2007) describe como “antropología extraordinaria”, es decir, la implicación del investigador en formas radicalmente diferentes de entender y habitar la realidad.
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Être(s) d’eaux et de forêts : images du territoire et relations aux non-humains dans les cosmologies autochtones du Québec et du Brésil
Laurent Jérôme and Rubens Elias da Silva
pp. 139–150
AbstractFR:
Dans cet article, les auteurs proposent de documenter la construction des images mythiques dans les sociétés et les cosmologies autochtones du Québec et du Brésil. La lecture comparative développée vise plus spécifiquement à analyser la place de la forêt et de l’eau dans les relations entre humains et non-humains dans les cosmologies locales. Tant la territorialité atikamekw nehirowisiw que celle des peuples de la forêt en Amazonie brésilienne doivent être appréhendées dans le cadre de relations conçues, nommées, racontées, vécues, négociées et partagées avec le monde sensible, sensoriel et non humain. Des recherches de terrain menées au Québec et en Amazonie brésilienne auprès de Premières Nations, de groupes autochtones et de communautés traditionnelles nous permettent de proposer une lecture comparative de la place de l’eau et de la forêt au sein de la tradition orale, de savoirs et de relations qui s’étendent à l’infini : connaître la forêt, nommer ses règles et concevoir les sentiments vécus comme présage de la présence d’êtres invisibles sont des dispositifs d’une éthique vécue et partagée entre ceux qui ont vécu cette relation et ceux qui peuvent potentiellement en faire l’expérience.
EN:
In this article, the authors propose to document the construction of mythical images in Indigenous societies and cosmologies in Quebec and Brazil. The comparative reading developed aims more specifically at analyzing the place of the forest and water in the relations between humans and non-humans in local cosmologies. Both the territoriality of Atikamekw Nehirowisiw and the territoriality of the forest peoples in the Brazilian Amazon must be understood within the framework of relationships conceived, named, told, lived, negotiated and shared with the sensitive, sensory and non-human world. Field research carried out in Quebec and in the Brazilian Amazon, with First Nations, Indigenous groups and traditional communities, allows us to propose a comparative reading of the place of water and the forest within oral tradition, knowledge and relationships that extend to infinity: knowing the forest, naming its rules and conceiving lived feelings as a harbinger of the presence of invisible beings are devices of an ethic lived and shared between those who have lived and those who can potentially experience this relationship.
ES:
En este artículo, los autores se proponen documentar la construcción de imágenes míticas en las sociedades y cosmologías indígenas de Quebec y Brasil. La lectura comparativa desarrollada busca específicamente a analizar el rol del bosque y del agua en las relaciones entre humanos y no humanos en las cosmologías locales. Tanto la territorialidad atikamekw nehirowisiw como la de los pueblos de la selva en la Amazonia brasileña deben entenderse en el marco de las relaciones concebidas, nombradas, contadas, vividas, negociadas y compartidas con el mundo sensible, sensorial y no humano. Investigaciones de campo realizadas en Quebec y en la Amazonia brasileña con las Primeras Naciones, los grupos indígenas y las comunidades tradicionales nos permiten proponer una lectura comparada del rol del agua y del bosque dentro de la tradición oral, de los conocimientos y de las relaciones que se extienden hasta el infinito: conocer el bosque, nombrar sus reglas y concebir los sentimientos vividos como un presagio de la presencia de seres invisibles son dispositivos de una ética vivida y compartida entre quienes han vivido esta relación y quienes pueden potencialmente experimentarla.
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Filmer la divination chez les Inuit du Nunavut : les ateliers de transmission intergénérationnelle des savoirs (ATIS)
Frédéric B. Laugrand
pp. 151–165
AbstractFR:
En écho à une approche dont Jean-Guy Goulet s’est fait le défenseur, tant auprès des Wayùu de Colombie qu’avec les Déné Tha’ du Canada, et en réaction à l’un de ses articles sur la prière et les médias publié dans Recherches amérindiennes au Québec, l’auteur revient sur l’approche des Ateliers de transmission intergénérationnelle des savoirs (ATIS) mise au point avec Jarich Oosten et le Nunavut Arctic College au début des années 2000, et sur l’usage de la caméra. À travers l’exemple du qilaniq, un rituel divinatoire que les Inuit pratiquent depuis le xvie siècle, il avance que le format des ATIS permet de répondre à deux grandes critiques classiques adressées aux anthropologues. La première observation, formulée par J. Fabian, porte sur un problème de temporalité, le temps partagé lors de la rencontre entre l’ethnologue et son participant n’étant pas celui du récit anthropologique; la seconde concerne la fabrique du savoir anthropologique largement attaqué par les postmodernes. Or, en rendant le contexte d’énonciation plus transparent et en privilégiant une anthropologie expérientielle proche de celle que prône Jean-Guy Goulet, les ATIS permettent de faire de l’anthropologue un participant – pas seulement un facilitateur. Dans le contexte de performances filmées, « faire comme si » ouvre des possibilités en termes d’expérimentation, en même temps que cela permet aux aînés inuit de mettre en valeur leurs traditions à une époque marquée par d’urgents besoins dans le domaine de l’éducation et de la transmission des savoirs.
EN:
Echoing an approach that Jean-Guy Goulet has implemented over the years, both with the Wayùu of Colombia and with the Dene Tha of Canada, and in reaction to one of his papers on prayer and the media published in Recherches amérindiennes au Québec, I present the approach of the intergenerational knowledge transmission workshops (ATIS), developed with Jarich Oosten and the Nunavut Arctic College in the early 2000s, and on the use of the camera. Through the example of qilaniq, a divination ritual that the Inuit have practiced since the 16th century, I suggest that the format of the ATIS allows to respond to two great classic criticisms addressed to anthropologists. The first, formulated by J. Fabian, deals with a problem of temporality, the time shared during the meeting between the ethnologist and his participant being different than that of the anthropological narrative. The second concerns the manufacture of anthropological knowledge widely attacked by postmodernists. I argue that by making the context of enunciation more transparent and by favoring an experiential anthropology close to that advocated by Jean-Guy Goulet, the ATIS makes it possible to consider the anthropologist as a participant, and not just a facilitator. In the context of performances recorded on video, “acting as if” opens up new possibilities in terms of experimentation. At the same time it allows Inuit elders to highlight their traditions at a time marked by urgent needs in the field of education and in the transfer of knowledge.
ES:
Haciéndose eco de un enfoque que ha defendido Jean-Guy Goulet, tanto con los Wayùu de Colombia como con los Déné Tha’ de Canadá, y como reacción a uno de sus artículos sobre la oración y los medios publicados en la revista Recherches amériendiennes au Quebec, vuelvo al enfoque de los talleres de transmisión intergeneracional de conocimiento (ATIS), desarrollados con Jarich Oosten y el Nunavut Arctic College a principios de la década de 2000, y sobre el uso de la cámara. A través del ejemplo del qilaniq, un ritual de adivinación que los Inuit han practicado desde el siglo XVI, sugiero que el formato del ATIS nos permite responder a dos grandes críticas clásicas dirigidas a los antropólogos. La primera, formulada por J. Fabian, trata un problema de temporalidad, el tiempo compartido durante la reunión entre el etnólogo y su participante no siendo el de la narrativa antropológica. La segunda se refiere a la fabricación de conocimiento antropológico ampliamente atacado por los posmodernos. Sin embargo, al hacer que el contexto de expresión sea más transparente y al favorecer una antropología experiencial cercana a la defendida por Jean-Guy Goulet, los ATIS hacen posible que el antropólogo sea un participante y no solo un facilitador. En el contexto de las actuaciones filmadas, «actuar como si» abre posibilidades en términos de experimentación, al mismo tiempo que permite a los ancianos Inuit destacar sus tradiciones en un momento marcado por necesidades urgentes en el campo de educación y transmisión del conocimiento.
Réflexion
Témoignages
Hors thème
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Mode de scrutin, représentation des autochtones dans les institutions parlementaires et décolonisation : l’exemple néo-zélandais
Natacha Gagné
pp. 187–199
AbstractFR:
Cet article débute sur un questionnement dans le contexte du projet de réforme du mode de scrutin au Québec : des changements allant dans le sens d’une meilleure représentation des Autochtones dans les institutions démocratiques pourraient-ils participer au processus de décolonisation ? Par une description détaillée de la situation néo-zélandaise, en particulier des avancées réalisées par les Māori au cours des dernières années par la voie des partis politiques et des urnes, cet article vise à nourrir la réflexion sur la représentation politique autochtone et sur la décolonisation. Le repositionnement récent des Māori de Nouvelle-Zélande sur la scène politique, à la faveur d’un changement de mode de scrutin (1996) et du succès du Parti māori, ainsi que les résultats des élections de 2017 et de 2020 sont révélateurs d’un déplacement graduel des luttes pour l’autodétermination : une confiance accrue est accordée à la démocratie électorale et au parlement.
EN:
This article begins by raising a question in the context of the electoral reform project in Quebec: could changes in the direction of better representation of Indigenous people in democratic institutions share in the decolonization process? By a detailed description of the New Zealand situation, in particular the advances made by Māori in recent years through political parties and the ballot box, this article aims to nourish reflection on indigenous political representation and decolonization. The recent repositioning of Māori on the New Zealand political scene – thanks to a change in the voting system (1996) and the success of the Māori Party – as well as the results of the 2017 and 2020 elections are revealing of a gradual shift in the struggles for self-determination: increased confidence is placed in electoral democracy and in parliament.
ES:
Este artículo comienza con un cuestionamiento en el contexto del proyecto de reforma del sistema electoral en Quebec: ¿podrían los cambios hacia una mejor representación de los indígenas en las instituciones democráticas formar parte del proceso de descolonización? A través de una descripción detallada de la situación neozelandesa, en particular de los progresos realizados por los Maoríes en los últimos años a través de los partidos políticos y las urnas, este artículo busca alimentar la reflexión sobre la representación política indígena y la descolonización. El reciente reposicionamiento de los Maoríes de Nueva Zelanda en la arena política, mediante un cambio en el sistema electoral (1996) y el éxito del Partido Maorí, así como los resultados de las elecciones de 2017 y 2020, son reveladores de un cambio gradual en las luchas por la autodeterminación: se está depositando una mayor confianza en la democracia electoral y en el parlamento.
Comptes rendus
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La Plume et le calumet : Joseph-François Lafitau et les « sauvages ameriquains », Mélanie Lozat et Sara Petrella (dir.). Paris : Classiques Garnier, 2019, 296 p.
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Aniasiurti — Récit d’une presque médecin, Louisette Giroux. Saint-François-du-Lac, Éditions Tsemantou, 2020, 104 p.
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Entangled Territorialities: Negotiating Indigenous Lands in Australia and Canada, Françoise Dussart et Sylvie Poirier (dir.). Toronto : University of Toronto Press, 2017, 272 p.
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Colonialism’s Currency. Money, State, and First Nations in Canada, 1820-1950, Brian Gettler. Coll. « Études d’histoire du Québec » 39, Montréal/Kingston : McGill-Queen’s University Press, 2020, 301 p.
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L’Amérique fantôme : les aventuriers francophones du Nouveau Monde, Gilles Havard. Montréal : Flammarion Québec, 2019, 656 p.
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Okihoüey Atisken / l’esprit des os : écrits théoriques, poétiques et polémiques, Yves Sioui Durand. Québec : Presses de l’Université Laval, 2020, 199 p.