FR:
L’école ne fait pas partie du champ du travail social. Les mêmes questions, pourtant, traversent l’espace scolaire, espace social par excellence, et les institutions relevant de ce champ. Ainsi la question de la prise en compte du religieux, qui a ressurgi il y a une vingtaine d’années, avec les premières polémiques sur le port du foulard dit « islamique » à l’école, interpellant une laïcité qui semblait jusque-là inébranlable.
En 2002, le « rapport Debray » pose la nécessité de renforcer l’étude du religieux comme objet de culture. « Il ne s’agit pas de remettre “Dieu à l’école” », mais de comprendre que « traditions religieuses et avenir des humanités sont embarqués sur le même bateau » (Debray, 2002 : 5) et de lutter contre une ignorance génératrice d’irrationalité et de fanatisme.
L’école, à juste titre, renvoie les convictions de chacun à la sphère privée. Au nom de quoi elle ignore l’existence de ces convictions chez ses élèves, les abandonnant dans leur quête spirituelle et identitaire et refusant de voir les conséquences de cette conception d’une laïcité mal comprise.
Car la laïcité française n’est pas incompatible avec une prise en compte du fait religieux à l’école. Elle fournit au contraire le cadre idéal pour comprendre qu’une religion n’est qu’une déclinaison particulière d’un phénomène partagé qui traverse – et structure – toutes les sociétés humaines, apprendre à relativiser, à ne pas diaboliser la religion – ou la non-religion – de l’autre, accéder, au-delà du sens propre du culte, des textes, des représentations, au sens figuré, symbolique.
Aujourd’hui, cependant, les enseignants ne sont pas suffisamment formés et abordent le plus souvent les faits religieux sous la forme d’un catalogue, sans établir entre eux les liens indispensables pour que tous les élèves, quelles que soient leurs références culturelles, familiales, personnelles, comprennent non seulement l’histoire de l’humanité, mais aussi celle de nos sociétés contemporaines.
EN:
School is not part of the domain of social work. The same questions, however, traverse the school space, a social space par excellence, and the institutions that come under this domain. Hence the question of considering the religious, which resurfaced twenty years ago with the first polemics on the so-called “Islamic” headscarf being worn at school, challenging a secularity that until then seemed unshakeable.
In 2002, the “Debray Report” put forward the need to reinforce the study of the religious as an aspect of culture. “The idea is not to put ‘God back into the classroom’, but to understand that religious traditions and the future of human cultures are carried on the same boat” (Debray, 2002 : 5 – our translation) and to combat the ignorance that gives rise to irrationality and fanaticism.
The school rightly relegates individuals’ personal convictions to the private sphere. In the name of this separation of private and public spheres, it overlooks the existence of these convictions held by its students, abandoning the latter to their spiritual quest and search for identity and refusing to see the consequences of this conception of poorly-understood secularity.
In fact, French secularity is not incompatible with considering the religious in school. On the contrary, it provides the ideal framework for understanding that religion is only a particular variation of a shared phenomenon that traverses – and structures – all human societies, for learning to relativize and not demonize the other’s religion or non-religion, and for gaining access, beyond worship per se, to texts and representations in the figurative, symbolic sense.
Today, however, teachers are not sufficiently trained and all too often approach religious facts in the form of a catalogue, without establishing the links between them that are indispensable for any students, whatever their cultural, family or personal references, to understand not only the history of humanity, but also that of our contemporary societies.