L’entrevue

Le Comité femmes en grèveEntrevue avec Isabelle, Françoise et Anne[Record]

  • Maria Nengeh Mensah

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  • Maria Nengeh Mensah
    École de travail social
    Université du Québec à Montréal

De février à avril 2005, plus de 100 000 étudiants et étudiantes du Québec ont déclaré une grève illimitée pour exercer une pression collective contre le gouvernement au pouvoir. Qualifiée du plus grand rassemblement étudiant depuis 1968, cette grève a fait couler beaucoup d’encre. On a parlé des coupures proposées par le gouvernement. Au cours de la campagne électorale de 2003, le Parti Libéral du Québec, avec Jean Charest à sa tête, promettait le gel des frais de scolarité pour les études postsecondaires tout en maintenant son désir de baisser les impôts. Afin de tenir ces promesses, les Libéraux organisèrent ce qu’ils appellent aujourd’hui la « réingénierie » de l’État, une forme de réorganisation des priorités budgétaires et du rôle de l’État dans la société. Plusieurs projets de loi, tels la loi 31 sur le code du travail, furent passés à l’Assemblée nationale sous bâillon. Plusieurs programmes sociaux virent leur budget amputé, tels le programme des garderies, et l’éducation ne fut pas exemptée de ces coupes. La réforme de l’Aide financière aux études prévoyait ainsi des coupures de 103 millions de dollars dans le régime de prêts et bourses. Des coalitions représentant les étudiants collégiens et universitaires engagent dès lors des négociations avec le gouvernement. Des marches de protestation sont organisées, pendant ce temps, la grogne s’étend dans le milieu étudiant. Devant l’impasse, plusieurs consultations concernant une grève commencent à s’organiser dès l’automne 2004. On a parlé aussi des grandes associations étudiantes concernées, dont la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ), la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), la Coalition pour une association solidaire syndicale étudiante élargie (CASSÉÉ) et l’Association facultative des étudiants et étudiantes en sciences humaines de l’Université du Québec à Montréal (AFESH). En somme, les revendications du mouvement étudiant concernaient l’abolition de la réforme de l’Aide financière aux études, la fin de tout projet de décentralisation ou d’arrimage au marché du réseau collégial et le tout dans une perspective de gratuité scolaire et d’éradication de l’endettement étudiant. La CASSÉÉ, elle, avait élargi les bases de la lutte étudiante pour y inclure des revendications menant vers un projet de société plus global : la fiscalité responsable, la démocratisation des institutions postsecondaires, l’altermondialisation, la démilitarisation, le développement du logement social, et la défense des droits des minorités, avec une attention particulière aux droits des femmes. La CASSÉÉ fut exclue de la table des négociations par le nouveau ministre de l’Éducation Jean-Marc Fournier à cause de son refus de condamner les gestes violents posés lors d’actions qu’elle a organisées. Toutefois, selon la CASSÉÉ, c’est plutôt dans le but de diviser le mouvement étudiant que le ministre l’a écartée. NPS a rencontré trois étudiantes qui ont participé à l’émergence d’un collectif féministe au sein de la mouvance étudiante de l’UQÀM qui a milité pour l’amélioration des rapports de pouvoir entre hommes et femmes à l’intérieur des groupes militants. Le Comité femmes en grève de l’UQÀM était composé d’une dizaine d’étudiantes, aussi membres de la CASSÉÉ et engagées dans différents groupes militants ; certaines plus que d’autres, certaines à l’UQÀM depuis plus longtemps, mais toutes avaient milité au moins de près ou de loin dans le milieu étudiant. Leur point de vue a rarement été diffusé, mais leurs actions ont eu néanmoins un impact déterminant dans la vie de plusieurs étudiantes et étudiants. ISABELLE : Je sais qu’il y a toute une symbolique autour du 103 millions, mais nous avons essayé d’apporter un discours plus large, justement vers un débat de société sur le droit à l’éducation, l’avènement de l’endettement étudiant, sur la gratuité scolaire, le maintien du réseau collégial dans son …

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