McGill Law Journal
Revue de droit de McGill
Volume 61, Number 1, September 2015
Table of contents (6 articles)
Articles
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The Future of Poison Pills in Canada: Are Takeover Bid Reforms Needed?
Anita Anand
pp. 1–29
AbstractEN:
The rules regarding shareholder rights plans, also known as “poison pills”, ensure that boards of directors facing a hostile takeover bid can retain a poison pill for a period of time in order to search for other potential offers. Over the years, the period of time has grown in length from twenty to thirty-five days and the Canadian Securities Administrators (CSA) have recently proposed a 120-day period during which takeover bids would remain open. In light of the historical rationale of takeover bid law to protect the interests of target shareholders, this article argues that the legal regime should not allow an extensive bid period of 120 days. While other aspects of the CSA proposal are sound, a lengthy bid period disadvantages both target shareholders and bidders and will ultimately deter bids from occurring.
FR:
Les régimes de protection des droits des actionnaires, autrement connus sous le nom de « pilules empoisonnées », visent à protéger les actionnaires d’offres d’achat hostiles en permettant au conseil d’administration de se prévaloir d’une période de temps extraordinaire afin de considérer de nouvelles soumissions. Au fil des années, cette période est passée de vingt à trente-cinq jours. Récemment, les Autorités canadiennes en valeurs immobilières (ACVM) ont proposé d’établir une période fixe de 120 jours durant laquelle les actionnaires pourraient considérer toute offre d’achat soumise. Compte tenu des raisons historiques ayant poussé à réglementer les offres publiques d’achat, à savoir protéger certaines classes particulières d’actionnaires, cet article soutiendra que notre régime juridique devrait se garder de décréter une période de soumission aussi longue. Bien que d’autres éléments de la proposition de l’ACVM s’avèrent prometteurs, une période prolongée de soumission aura pour effet de désavantager à la fois les actionnaires ciblés et les soumissionnaires, et finira par dissuader ces derniers de se prêter au processus d’offres.
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Situating Canada’s Commercial Surrogacy Ban in a Transnational Context: A Postcolonial Feminist Call for Legalization and Public Funding
Maneesha Deckha
pp. 31–86
AbstractEN:
In large part due to feminist interventions in the early 1990s about the dangers of assisted reproductive technologies (ARTs) for women, Canada banned several practices related to ARTs when it enacted the Assisted Human Reproduction Act (AHRA) in 2004. Notably, the AHRA prohibited commercial surrogacy. Feminists feared that a market in surrogacy would exploit and objectify marginalized Canadian women who would be pressured into renting out their wombs to bear children for privileged couples. Since the early feminist deliberations that led to the ban, surrogacy has globalized. Canadians and other citizens of the Global North routinely travel to the Global South to source gestational surrogates. In doing so, they partake in an industry that heavily depends on material disparities and discursive ideologies of gender, class, and race. Indeed, the transnational nature of surrogacy treatment substantially reshapes the earlier feminist commodification debates informing the AHRA that took the domestic sphere as the presumed terrain of contestation. Due to the transnational North-South nature of surrogacy, a postcolonial feminist perspective should guide feminist input on whether to allow commercial surrogacy in Canada. I argue that when this framework is applied to the issue, the resulting analysis favours legalization of commercial surrogacy in Canada as well as public funding for domestic surrogacy services and ancillary ARTs.
FR:
En 2004, le Canada adoptait la Loi sur la procréation assistée (LPA), interdisant plusieurs pratiques reliées aux technologies de procréation assistée pour les femmes, et ce, en réaction aux interventions de féministes au début des années 1990 sur les risques de ces technologies. La LPA interdit particulièrement la maternité de substitution à visées commerciales. Certaines féministes craignaient que le marché de maternité de substitution ait pour effet d’exploiter et d’objectiver des femmes canadiennes marginalisées, qui pourraient se sentir poussées à louer leurs corps pour porter les enfants de couples privilégiés. La pratique de la maternité de substitution s’est mondialisée depuis les premières discussions féministes ayant mené à sa prohibition. Les Canadiens et d’autres citoyens de pays du Nord visitent régulièrement les pays du Sud à la recherche de mères porteuses. Ce faisant, ils participent à une industrie qui dépend fortement de disparités matérielles et d’idéologies discursives de genre, de classe et de race. En effet, la nature transnationale du traitement de la maternité de substitution reformule substantiellement les premiers débats féministes sur cette marchandisation; ces débats faisaient partie du contexte de la LPA et voyaient la sphère domestique comme le terrain de contestation présumé. En raison de la nature transnationale Nord-Sud de la maternité de substitution, une perspective féministe postcoloniale devrait guider l’apport féministe à la question de savoir si le Canada devrait permettre la maternité de substitution à visées commerciales. Nous argumentons que le recours à une telle perspective mène à une conclusion qui prône la légalisation de la maternité de substitution à visées commerciales au Canada ainsi que le financement public de services de maternité de substitution à visées commerciales et de technologies accessoires de procréation assistée.
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Sur les traces du principe de proportionnalité : une esquisse généalogique
Antoine Guilmain
pp. 87–137
AbstractFR:
La proportionnalité a le « vent en poupe »… que voilà un bel euphémisme! Depuis son introduction dans le Code de procédure civile, le principe de proportionnalité a envahi le droit et les esprits avec une aisance déroutante (art 4.2 Cpc). Cette situation devrait encore s’accentuer avec l’adoption du nouveau Code de procédure civile, qui fait de la proportionnalité une véritable « philosophie ». Seulement, ne dit-on pas que derrière toute réussite se cache un chemin? Ceci se vérifie merveilleusement pour la proportionnalité. Du Code d’ Hammourabi au droit administratif prussien, en passant par les Anciens et le Siècle des Lumières, la proportionnalité imprègne le droit depuis la nuit des temps — quoique sous des appellations variées et voilées. Le présent article vise donc à proposer une histoire de la proportionnalité dans un contexte juridique. L’objectif est ambitieux, à la limite du périlleux. Aussi, la flèche du temps sera scindée en trois époques successives. Premièrement, la phase prémoderne marque les balbutiements de la proportionnalité tant sur le plan philosophique que normatif. Deuxièmement, la phase moderne révèle une différence de réception de la proportionnalité entre le droit public et le droit privé. Troisièmement, la phase post-moderne se caractérise par une propagation exponentielle de la proportionnalité au sein de l’ensemble des branches du droit et des ordres juridiques. Au bout du compte, ce travail se veut démontrer que la proportionnalité est certes un domaine de recherche éclaté, mais dont les fragments ont beaucoup en commun.
EN:
Proportionality has the wind in its sails, to say the least! Ever since its introduction in Quebec’s Code of Civil Procedure, the proportionality principle has been ingrained in the law and in our minds (art 4.2 CCP). This reality can only be reinforced with the adoption of the new Code of Civil Procedure, which truly transforms proportionality into a philosophy. Be that as it may, there is a path that leads to every success, and this notion certainly holds true for proportionality. From the Code of Hammurabi to Prussian administrative law, from the Ancients to the Enlightenment, proportionality has permeated the law since time immemorial, albeit under various names. This article proposes a history of proportionality in the legal context. This ambitious—even risky—objective is divided into three periods. First, the premodern stage highlights the first steps of proportionality, in both the philosophical and normative senses. Second, the modern stage reveals the different applications of proportionality in the public and private law spheres. Third, the postmodern stage is defined by the exponential expansion of proportionality in all branches of the law and juridical orders. In the end, this article seeks to show that, although proportionality might be a fragmented area of research, its parts have much in common.
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The Treatment of Ipso Facto Clauses in Canada
Adrienne Ho
pp. 139–189
AbstractEN:
Whether a debtor is an individual or a sophisticated financial institution, a common issue that arises is whether its insolvency alters the rights of the parties with whom the debtor has entered into contracts. Could the non-defaulting party to the contract, on the basis of the debtor’s insolvency, terminate or amend the contract? Could it demand accelerated payment? Many parties preserve contractual rights, through what are commonly known as ipso facto clauses, to terminate and amend contracts or to demand an accelerated payment in the event that a counterparty to the contract becomes insolvent. Despite recent amendments to the Bankruptcy and Insolvency Act (BIA) and the Companies’ Creditors Arrangement Act (CCAA), the validity of ipso facto clauses, outside the context of derivatives contracts, is an issue that has not been thoroughly addressed in the Canadian literature. This article will trace the anti-deprivation rule in England, culminating in the United Kingdom Supreme Court’s leading case: Belmont Park Investments PTY Ltd. v. BNY Corporate Trustee Services Ltd. and Lehman Brothers Special Financing Inc. It will then explore to what extent recent amendments to the BIA and the CCAA have displaced the common law rule in Canada. Both the BIA and the CCAA have nullified ipso facto clauses in some but not all situations, the most notable exceptions being cases involving corporate bankruptcies and receiverships. This article will conclude with a discussion of the codified exceptions to the common law principles and whether the Canadian jurisprudence might incorporate some of the modifications to the anti-deprivation rule introduced by Lord Collins in Belmont.
FR:
Lorsqu’un débiteur devient insolvable, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une institution financière complexe, la question se pose à savoir si son insolvabilité affecte les droits des parties avec lesquelles le débiteur a conclu un contrat. La partie non-défaillante pourrait-elle ainsi mettre fin ou modifier le contrat sur la base de l’insolvabilité du débiteur? Pourrait-elle demander un paiement accéléré? Il est commun que les parties maintiennent leurs droits contractuels à travers des clauses ipso facto, leur permettant de modifier, de mettre fin aux contrats ou de demander un paiement accéléré lorsqu’une autre partie au contrat devient insolvable. Malgré de récentes modifications à la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) et à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC), la validité des clauses ipso facto, en dehors du contexte des contrats dérivatifs, est un problème qui n’a pas encore été adressé en profondeur par la doctrine canadienne. Cet article retracera le parcours du principe légal de non-appauvrissement en Angleterre, ayant abouti à la Cour suprême du Royaume-Uni dans l’arrêt Belmont Park Investments PTY Ltd. v. BNY Corporate Trustee Services Ltd. and Lehman Brothers Special Financing Inc., avant d’examiner dans quelle mesure les modifications récentes à la LFI et à la LACC ont supplanté la règle de common law au Canada à ce sujet. La LFI et la LACC ont toutes deux invalidé les clauses ipso facto dans plusieurs situations, exceptés pour les cas de faillite d’entreprise et de mise sous séquestre. Cet article analysera finalement les exceptions codifiées aux principes de common law et l’intégration potentielle à la jurisprudence canadienne de certaines modifications de la règle du non-appauvrissement introduites par Lord Collins dans l’arrêt Belmont.
Case Comment / Chronique de jurisprudence
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R. v. Spencer: Anonymity, the Rule of Law, and the Shrivelling of the Biographical Core
Chris Hunt and Micah Rankin
pp. 193–218
AbstractEN:
The Supreme Court of Canada’s recent decision in R. v. Spencer is likely to become a landmark decision on informational privacy. Spencer addressed the issue of whether an Internet user charged with possession and distribution of child pornography had a Charter-protected privacy interest in his Internet subscriber information. A unanimous Supreme Court answered this question in the affirmative, primarily because such information could lead to the identification of a user carrying out intimate or sensitive activities in circumstances where the user would believe that his or her activities would be carried out anonymously. The immediate practical consequence of Spencer is that police will henceforth be required to obtain prior judicial authorization before requesting a person’s Internet subscriber information—a holding that squarely contradicts a number of recent appellate court decisions. In this comment, the authors argue that Spencer is likely to have a significant, and possibly transformative, impact on section 8 jurisprudence. In their view, the Court’s recognition of “anonymity” as an independent value underlying section 8 of the Charter leads to a more robust account of privacy—an account that is more consistent with theoretical approaches to the concept. The authors argue that the recognition of a right to anonymity may also serve to support the rule of law by refocusing the section 8 analysis on unwanted scrutiny by the state. In addition, an emphasis on the right to anonymity may lead to a diminished role for the analytical device known as the “biographical core”. The authors conclude their comment with a discussion of the Court’s decision to admit the impugned evidence under section 24(2) of the Charter, arguing that the Court placed too much emphasis on the legal uncertainty surrounding the search.
FR:
Le jugement récent de la Cour suprême du Canada dans R. c. Spencer s’annonce en tant que décision historique en ce qui a trait au caractère privé des renseignements personnels. La Cour devait décider si un internaute reconnu coupable de possession et de distribution de pornographie juvénile jouissait néanmoins d’un intérêt en matière de vie privée protégé par la Charte concernant ses renseignements d’abonné aux services Internet. C’est d’une seule voix que la Cour suprême a répondu par l’affirmative, principalement parce que de tels renseignements permettent d’identifier un utilisateur s’adonnant à des activités intimes ou confidentielles alors que ce dernier croit agir sous le couvert de l’anonymat. Il s’ensuit que les policiers auront dorénavant à obtenir une autorisation judiciaire avant de recueillir les renseignements d’abonné aux services internet d’un individu—une décision qui contredit ouvertement plusieurs jugements récemment rendus par différentes cours d’appel canadiennes. Dans cette étude, les auteurs soutiennent que Spencer aura probablement un impact significatif, et possiblement transformateur, sur la jurisprudence relative à l’article 8. À leur avis, la reconnaissance par la Cour de « l’anonymat » comme valeur indépendante sous-tendant l’article 8 de la Charte entraîne une notion plus robuste de la vie privée—plus cohérentes avec la doctrine de l’article 8. Les auteurs soutiennent que la reconnaissance d’un droit à l’anonymat pourrait également servir à épauler la primauté du droit en recentrant l’analyse de l’article 8 sur les surveillances indésirables de l’État. En outre, une insistance sur le droit à l’anonymat pourrait entraîner un rôle atténué du dispositif analytique des « renseignements biographiques d’ordre personnel ». Les auteurs concluent leur commentaire en discutant de la décision de la Cour d’admettre la preuve contestée en vertu de l’article 24(2) de la Charte. Ils soutiennent notamment que la Cour a donné trop d’importance à l’incertitude juridique liée à la fouille.