Mémoires du livre
Studies in Book Culture
Volume 13, Number 2, Fall 2022 Explorer les dimensions transnationales de l’activisme dans la culture contemporaine du livre Exploring Transnational Dimensions of Activism in Contemporary Book Culture Guest-edited by Rachel Noorda, Corinna Norrick-Rühl and Elizabeth le Roux
Table of contents (13 articles)
Articles
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No Taxation for Menstruation: The Book’s Role in Menstrual Activism
Ellen Barth
pp. 1–30
AbstractEN:
This article addresses the role of books about menstruation in twenty‑first century menstrual activism. It argues that such books support and inspire transnational activist efforts by increasing public visibility of a taboo topic and by influencing perceptions about menstruation through their contents. Books on menstruation localize issues for specific linguistic, political, and cultural arenas, while still connecting to and bolstering the transnational movement. After providing an overview of current book trends, the article examines a single book, The Tampon Book, which protested the German tampon tax by hiding tampons in a book—a good with a lower tax rate than tampons. Materially embodying menstrual discrimination, the book contributed to activist efforts that led to the elimination of the tampon tax in Germany. Moreover, through engagement in the post‑digital publishing field, the book helped bring greater visibility to this internationally relevant issue.
FR:
Cet article traite de la place qu’occupent les livres à propos des menstruations dans le contexte de l’activisme menstruel au XXIe siècle. Ces livres soutiennent et inspirent les actions militantes transnationales en augmentant la visibilité d’un sujet tabou et en influençant, par leur contenu, les perceptions sur les menstruations. Ils situent les enjeux localement, dans des contextes linguistiques, politiques et culturels spécifiques, tout en venant dynamiser un mouvement transnational. L’article brosse les tendances actuelles en matière de livres sur les menstruations, puis examine plus particulièrement le cas de The Tampon Book. Celui‑ci constituait un objet de résistance contre la taxe allemande sur les tampons hygiéniques, en ce qu’il dissimulait des tampons, produits davantage taxés que les livres. Puisqu’il a réussi à incarner de manière très concrète la discrimination menstruelle, The Tampon Book a concouru aux actions militantes qui ont conduit à l’élimination de la taxe sur les tampons en Allemagne. Enfin, en s’inscrivant dans le champ éditorial post‑numérique, le livre a permis d’accroître l’attention portée à la discrimination menstruelle en tant qu’enjeu à dimension internationale.
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Binding Transnational Lesbian‑Feminist Print Constellations: Exploring Feminist Print Cultures and Its Transnational Travels
Julie R. Enszer
pp. 1–26
AbstractEN:
A series of publishing interventions by lesbian-feminists document the transnational aspirations of the U.S. women’s liberation movement in the 1970s, 80, and 90s. The argument about how lesbian‑feminist publishers contributed to transnational feminist attentions unfolds in three parts. First, I examine how feminists built international publishing networks in the 1980s and 1990s. Second, I examine how three lesbian-feminist periodicals, Connexions, Sinister Wisdom, and Ikon, demonstrated commitments to transnational publishing and reading practices. Third, a constellation of five transnational texts published by independent lesbian-feminist publishers reveal the literacies imagined by feminist publishers and how lesbian‑feminist publishers worked to reshape American feminist imaginaries to be more transnational. In a final section, I speculate about how focusing on lesbian‑feminist publishing in the past might illuminate contemporary studies of publishing and inspire new publishing activists.
FR:
Une série d’interventions de lesbiennes féministes dans le domaine de l’édition documente les aspirations transnationales du mouvement de libération des femmes aux États-Unis dans les années 1970-1990. L’argumentaire se déroule en trois parties sur la façon dont les éditeurs lesbiens féministes ont contribué aux intérêts féministes transnationaux. Premièrement, j’examine comment les féministes ont construit des réseaux internationaux d’édition dans les années 1980 et 1990. Deuxièmement, j’examine comment trois périodiques lesbiens féministes, Connexions, Sinister Wisdom et Ikon, se sont engagés dans des pratiques transnationales d’édition et de lecture. Troisièmement, une constellation de cinq textes transnationaux publiés par des éditeurs lesbiens féministes indépendants révèle les littératies imaginées par les éditeurs féministes et la manière dont les éditeurs lesbiens féministes ont travaillé à remodeler les imaginaires féministes états-uniens pour les rendre plus transnationaux. Dans une dernière partie, j’émets des hypothèses sur la manière dont l’intérêt pour l’édition lesbienne-féministe du passé pourrait éclairer les études contemporaines sur l’édition et inspirer de nouvelles activistes de l’édition.
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Transnational Activism in the Post‑Digital Networks of the Bound Art Book Fair and the Hackney Comic + Zine Fair
Louisa Preston
pp. 1–53
AbstractEN:
The author’s experiences of the Hackney Comic + Zine Fair (HCZF) and the Manchester‑based Bound Art Book Fair (BABF) are the point of departure for this article. The discussion focuses on the distinctiveness of these spaces of dissemination and the positioning of the agents involved. This article shows how virtual engagement at each fair became entangled with situated experiences and printed publications. The article also considers the significance of an autoethnographic approach within the post‑digital context, and its relationship to pursuing scholarly activism within twenty‑first‑century book studies. HCZF and BABF operate in post‑digital networks of artist‑ and self‑publishing; this positionality allows them to advocate for change and social justice. Transnational activism is evidenced through the accessibility, resources, and community empowerment that these fairs offer and generate for creative publishing practices. HCZF and BABF evidence resistance to major book fair networks, e.g., in Frankfurt, and London, whilst simultaneously influencing and infiltrating those very networks.
FR:
Les expériences vécues par l’autrice dans le cadre des foires Hackney Comic + Zine Fair (HCZF) et Bound Art Book Fair (BABF, Manchester) sont le point de départ du présent article portant sur ces espaces de diffusion en ce qu’ils ont de distinct et sur le positionnement des agents y étant impliqués. Il montre la manière dont ont fini par s’enchevêtrer l’engagement virtuel dans ces foires, les expériences situées et les publications imprimées. Il souligne également l’importance que revêt l’approche autoethnographique en contexte postnumérique et son rapport avec une recherche qui se veut engagée, en études du livre au xxie siècle. Les foires HCZF et BABF opèrent en effet dans des réseaux postnumériques axés sur l’autoédition et l’édition par l’artiste, un positionnement favorable aux revendications en matière de changement et de justice sociale. Le militantisme transnational est mis en évidence par l’accessibilité de ces foires, par l’autonomisation qu’elles permettent et par les ressources et le soutien qu’elles apportent aux pratiques d’édition créatives. Les foires HCZF et BABF témoignent, enfin, d’une résistance aux grands réseaux des foires du livre (celles de Francfort et de Londres, par exemple), réseaux qu’elles n’influencent et n’infiltrent pas moins.
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Power to the People: Black Publishing for Social Change in South Africa
Elizabeth le Roux
pp. 1–36
AbstractEN:
The black power salute is a powerful call to arms for resistance and social change. In South Africa, black power is tied up with the Black Consciousness Movement of the 1970s, aiming to reclaim black identity. Integral to this attempt was the use of cultural and intellectual means, and under its aegis writers’ groups started forming in place of political groups (which were suppressed), as a base for mobilisation and collective action. But these writers could not effect social change on their own: they needed a platform—a publisher. Sipho Sepamla, writing in the New Classic in 1976, pointed to the absence of publishers as a hurdle for black writers: ‘A problem that wears us down is lack of publishers and outlets. There is not a single black publisher I know of in this country.’ In the context of the competing forces of repression and Black Consciousness, a few black publishers did emerge. Skotaville Press, for instance, aimed ‘to produce black literature that is relevant and contemporary—and to do it under black control from start to finish.’ However, it did this in somewhat ambiguous circumstances, relying on foreign funds and white patrons. Using archival records and interviews, this paper will assess the operations and output of these publishers, considering how race and context affects and inflects publishing. Moreover, it will ask why, in contrast to the legacy created by black power publishers in the US, a tradition of viable black‑owned publishing has not continued into the post‑apartheid period.
FR:
Le salut du « Black Power » est un puissant appel aux armes pour la résistance et le changement social. En Afrique du Sud, le « Black Power » est lié au « Black Consciousness Movement » des années 1970, qui visait à revendiquer l’identité noire. L’utilisation de moyens culturels et intellectuels faisait partie intégrante de cette tentative et, sous son égide, des groupes d’écrivains ont commencé à se former à la place des groupes politiques (qui avaient été supprimés), pour servir de base à la mobilisation et à l’action collective. Mais ces écrivains ne pouvaient pas provoquer un changement social par eux‑mêmes : ils avaient besoin d’une plate‑forme, d’un éditeur. Sipho Sepamla, soulignait dans le New Classic en 1976 que l’absence d’éditeurs était un obstacle pour les écrivains noirs : « Le manque d’éditeurs et de débouchés est un problème qui nous tire vers le bas. À ma connaissance, il n’y a pas un seul éditeur noir dans ce pays ». Dans le contexte des forces concurrentes de la répression et du « Black Consciousness », quelques éditeurs noirs ont vu le jour. Skotaville Press, par exemple, avait pour objectif de « produire de la littérature noire pertinente et contemporaine — et de le faire sous le contrôle des Noirs du début à la fin ». Toutefois, elle a agi dans des circonstances quelque peu ambiguës, en s’appuyant sur des fonds étrangers et sur des mécènes blancs. À l’aide de documents d’archives et d’entretiens, cet article examine les activités et la production de ces éditeurs, en étudiant la manière dont la race et le contexte affectent et influencent l’édition. En outre, l’article se demande pourquoi, contrairement à l’héritage créé par les éditeurs du « Black Power » aux États‑Unis, une tradition de maisons d’édition viables appartenant à des Noirs ne s’est pas maintenue dans la période post‑apartheid.
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“I want Black children to know that they should never, ever, ever settle for things that society wants to give to them”: Self‑published Black French and Black German Children’s Literature as Blacktivism
Élodie Malanda
pp. 1–33
AbstractEN:
In this paper, I analyze self‑published children’s books by Black French and Black German authors as a form of Blacktivism. I study how the authors’ comments about their work echoes with an activist narrative, and how they participate in a fight for racial justice, not only through the message of their children’s books, but through their choice of self‑publishing. First, I examine their motivations for writing and relate them to what I call “kidliteractivism,” to then show how self‑publishing can be a form of literary and racial insubordination, and finally I shed light on how self‑published children’s books by French and German authors of African descent are linked to broader Blacktivist movements in France and Germany.
FR:
Cet article aborde les livres jeunesse autopubliés par des auteur·ice·s afrofrançais·e·s et afroallemand·e·s dans une perspective de « blacktivisme » (ou activisme noir). J’y étudie la manière dont le discours des auteur.ices sur leur propre travail participe d’un récit activiste. Ces auteur·ice·s sont en effet engagés dans un combat pour la justice raciale, et, si leur activisme se manifeste dans le message véhiculé par leurs livres, il s’exprime également par leur choix de l’autopublication. J’analyse d’abord ce qui les pousse à écrire et lie ces motivations à ce que j’appelle le « kidliteractivisme » (ou activisme en littérature jeunesse). Puis, je montre que l’autopublication peut constituer une forme d’insubordination littéraire et raciale, pour enfin situer les livres jeunesse autopubliés par des auteur·ice·s afrofrançais·e·s et afroallemand·e·s dans le courant plus large des mouvements blacktivistes présents en France et en Allemagne.
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How the Marketing and Selling of Books by Authors of Colour Produces Racial Inequalities in Publishing
Anamik Saha and Sandra van Lente
pp. 1–31
AbstractEN:
Based upon a unique empirical study on diversity in UK publishing involving over 110 interviews with publishers, this paper explores the obstacles facing authors of colour. While the underrepresentation of authors from minoritized backgrounds is generally seen as a problem of acquisition, we identify what political economist Nicholas Garnham calls the “cultural distribution” stage as the most critical for authors of colour. Specifically, we demonstrate how racialized assumptions about audiences as articulated and mobilized by people working in promotion, sales, and retail impede the progress of these authors. We argue that racial inequalities in publishing are a product of how racially and ethnically minoritized audiences are undervalued, culturally as well as economically. Adopting a postcolonial cultural economy approach, we identify the areas where antiracist activism needs to be focused in order to address racial inequalities in publishing in a more impactful way.
FR:
Le présent article explore certains obstacles auxquels se butent les autrices et auteurs de couleur. Il s’appuie sur une étude empirique de la diversité dans le monde de l’édition au Royaume‑Uni rassemblant entre autres quelque 110 entrevues menées auprès d’éditrices et d’éditeurs. La sous‑représentation des autrices et auteurs issus de minorités est la plupart du temps perçue comme un problème d’acquisition; selon nous, l’enjeu le plus critique pour les autrices et les auteurs de couleur est plutôt ce que l’économiste politique Nicholas Garnham qualifie de « distribution culturelle ». Plus précisément, nous montrons de quelle manière ces autrices et auteurs sont affectés par les présomptions racisées que formulent et entretiennent, à propos des lectorats, les personnes travaillant à la promotion, à la distribution et à la vente des livres. Nous postulons que les inégalités raciales observables dans le monde de l’édition sont le produit d’une dévaluation des lectorats issus de minorités ethniques et raciales, dévaluation à la fois culturelle et économique. Partant d’une approche de l’économie culturelle qui se veut postcoloniale, nous identifions les lieux qu’aurait intérêt à investir le militantisme antiracisme afin de s’attaquer à ces inégalités de façon plus efficace.
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Exploring Transnational Dimensions of Activism in Contemporary Book Culture: Ons Klyntji and Afrikaner Activism
Jana Klingenberg and Samantha Miller
pp. 1–42
AbstractEN:
Afrikaans developed in South Africa out of an interaction among a variety of peoples. In the beginning, Afrikaans was considered a language spoken by the lower classes, but it rose from this low position to become an official language in 1925. After the National Party started to govern South Africa in 1948, Afrikaans became the language of the oppressor during apartheid. Post‑apartheid, Afrikaners questioned their identity, feeling conflicted between pride and shame.
The magazine Ons Klyntji was established in 1896 to foster a literary culture and shape Afrikaner identity, and still exists today. Throughout its publication history, the magazine was used to promote progressive causes: first in the creation of an Afrikaans literature, and then as a vehicle for protest by Afrikaners against apartheid. Both these causes developed out of a need to find a distinct identity amongst Afrikaners. The researchers argue that the publishing of Ons Klyntji has contributed positively to progressive political and social change with regards to Afrikaner identity, particularly in the post‑apartheid period.
FR:
L’afrikaans s’est développé en Afrique du Sud à partir d’une interaction entre différentes populations. Au début, l’afrikaans était considéré comme une langue parlée par les classes défavorisées, mais il s’est élevé de cette position inférieure pour devenir une langue officielle en 1925. Après que le Parti national a commencé à gouverner l’Afrique du Sud en 1948, l’afrikaans est devenu la langue de l’oppresseur pendant l’apartheid. Après l’apartheid, les Afrikaners se sont interrogés sur leur identité, se sentant partagés entre la fierté et la honte.
Le magazine Ons Klyntji a été fondé en 1896 pour promouvoir la culture littéraire et façonner l’identité afrikaner, et il existe toujours aujourd’hui. Tout au long de son histoire, le magazine a été utilisé pour promouvoir des causes progressistes : d’abord la création d’une littérature en afrikaans, puis la protestation des Afrikaners contre l’apartheid. Ces deux causes sont nées de la nécessité de trouver une identité distincte parmi les Afrikaners. Les chercheurs affirment que la publication d’Ons Klyntji a contribué de manière positive au changement politique et social progressiste en ce qui concerne l’identité afrikaner, en particulier dans la période post‑apartheid.
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Activism in the International Geography of Books: Small Publishing Houses from Argentina at the 2020 Virtual Frankfurt Book Fair
María Belén Riveiro and Daniela Szpilbarg
pp. 1–27
AbstractEN:
International Book Fairs are vital for the international geography of books and allow the researcher to observe the relations of domination and the defiant practices that shape book production. This article draws on a survey and in‑depth interviews with small publishing houses from Argentina to analyze their participation in the 2020 Virtual Frankfurt Book Fair, and complements this data with an online observation of the fair. While Argentine history is rich with cases of publishers closely related to politics, we pose the question on the forms activism adopts in the twenty‑first century. This analysis engages in current debates on the links between publishing and politics, centers and peripheries, power dynamics, and on how these phenomena shift in the virtual sphere. This participation is theorized as activism practices, i.e. (i) resistance from dominant practices, (ii) an enthusiastic approach to the virtual sphere, and (iii) cooperation and reliance on institutions.
FR:
Les foires internationales du livre sont centrales pour la géographie internationale du livre et permettent au chercheur d’observer à la fois les rapports de domination et les pratiques de provocation qui façonnent la production du livre. Cet article s’appuie sur une enquête et des entretiens en profondeur avec des petites maisons d’édition argentines pour analyser leur participation à la Foire virtuelle du livre de Francfort de 2020, et complète ces données par une observation en ligne de la foire. L’histoire argentine regorge d’exemples d’éditeurs étroitement liés au politique, et cet article analyse l’activisme au xxie siècle. Cette analyse s’inscrit dans les débats actuels sur les rapports entre l’édition et la politique, entre centres et périphéries, les dynamiques de pouvoir, et sur ces phénomènes dans l’espace virtuel. L’article définit cette participation comme des pratiques d’activisme, c’est‑à‑dire : (i) résistance des pratiques dominantes, (ii) approche enthousiaste de la sphère numérique, et (iii) coopération et appui d’institutions.
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Activismes éditoriaux en francophonie septentrionale : plurivocalité contre‑hégémonique contemporaine
René Audet and Corentin Lahouste
pp. 1–41
AbstractFR:
Cet article s’intéresse au livre comme moyen de stabilisation et de diffusion d’une parole activiste, spécifiquement collective. Dans la période contemporaine, on voit poindre des propositions à plusieurs voix, recourant à des formes livresques atypiques. Nous examinons des objets éditoriaux expérimentaux récents, émanant de différents espaces de la francophonie du Nord et qui s’inscrivent dans une dynamique activiste ouvertement revendiquée : la « sauvegarde no 1 » du projet nous sommes partout (Éditions Abrüpt); les quatre premiers volumes de la revue littéraire Sabir; les publications périodiques de La Conspiration dépressionniste; et le Petit manuel critique d’éducation aux médias (Éditions du commun). S’y observent, de manière prépondérante, une logique du collectif et une inclusivité intrinsèque, une horizontalité processuelle, une diversification formelle et de contenu, et la démarchandisation de l’objet‑livre. Participant d’un activisme inscrit dans l’événementialité, ces entreprises témoignent d’une cristallisation d’un faire‑communauté à travers ces objets à impact sociopolitique.
EN:
This article focuses on the book as a means of stabilizing and disseminating a specifically collective activist voice. Lately, multi-voice proposals using atypical book forms have come to light. We examine recent experimental editorial objects emanating from different areas of the northern Francophonie, objects which are part of an openly proclaimed activist dynamic: the “sauvegarde n° 1” of the project nous sommes partout (Éditions Abrüpt); the first four volumes of the literary review Sabir; the serial publications of La Conspiration dépressionniste; and the Petit manuel critique d’éducation aux médias (Éditions du commun). Predominantly, we observe a logic of the collective and an intrinsic inclusiveness, a procedural horizontality, a diversification of form and content, and the demarketing of the book‑object. As participants in an activism inscribed in the event experience, these enterprises testify to a crystallization of community-making through the sociopolitical impact of their publications.
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La relecture sensible : vers une conscientisation du « savoir‑lire éditorial » ?
Nolwenn Tréhondart
pp. 1–29
AbstractFR:
S’il est en plein essor aux États‑Unis, le métier de sensitivity reader est encore marginal en France. À partir d’entretiens semi‑directifs menés avec 14 professionnel·le·s concerné·e·s (relecteur·trice·s sensibles, éditeur·trice·s, agent·e·s littéraires), nous proposons dans cet article de mieux cerner les spécificités de cette activité émergente du point de vue de celles et ceux qui sont amené·e·s à l’exercer ou qui la promeuvent. Nous montrons les interrogations concernant l’émergence d’un « savoir‑lire éditorial » spécifique, où le vécu discriminatoire et l’affirmation d’un « savoir situé » sont au centre de l’expertise. Nous concluons sur le rôle d’intermédiaire de l’éditeur·trice, qui cherche à promouvoir une pratique encore invisibilisée dans les maisons d’édition.
EN:
Although the profession of sensitivity reader is booming in the United States, it is still marginal in France. Based on semi‑directive interviews conducted with fourteen professionals involved in the field (sensitivity readers, editors, literary agents), we propose in this article to better define the specificities of this emerging activity from the point-of-view of those who are called upon to practice it or who promote it. We shed light on questions concerning the emergence of a certain 'editorial knowledge-reading', where discriminatory real-life experience and the affirmation of a 'situated knowledge' are at the core of the expertise. We conclude with the role of the editor as an intermediary who seeks to promote a practice that is still rendered invisible in publishing houses.
Varia
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Reading for Normal: Young People and YA Fiction in the Time of Covid‑19
Alison Waller and Rita J. Dashwood
pp. 1–36
AbstractEN:
The Reading for Normal project discussed in this article sought to interrogate some of the assumptions about “normality” that underpin everyday life, and to understand how reading fictional representations of ordinary life might help young readers better manage periods of uncertainty and instability. Using data from a small‑scale UK‑based reading group project that ran from December 2020 to May 2021, we explore the affordances of authenticity, belonging, and connection that emerged when teens were offered opportunities for a “common dwelling in fictional ordinariness with a generational cohort”. We consider the ways in which reading and talking about young adult (YA) fiction helps teenage readers address questions about the changing world around them.
FR:
Le projet « Reading for Normal » s’intéresse aux conceptions de la « normalité » qui sous‑tendent la vie quotidienne, ainsi qu’à la manière dont des représentations fictives de cette banalité sont susceptibles d’aider les jeunes lectrices et lecteurs à mieux composer avec des périodes d’incertitude et d’instabilité. Les données, recueillies de décembre2020 à mai 2021 auprès d’un club de lecture actif au Royaume‑Uni, nous permettent de constater que, lorsque des adolescentes et des adolescents se voient offrir la possibilité de « fréquenter », avec d’autres jeunes de leur âge, des oeuvres de fiction mettant en scène le quotidien dans ce qu’il a de plus banal, il émerge une impression d’authenticité, et un sentiment d’appartenance et d’être en relation avec les autres. Nous nous intéressons aux manières dont le fait de lire de la littérature pour adolescents, et d’en discuter, permet aux jeunes lectrices et lecteurs d’interroger le monde en mutation dans lequel elles et ils vivent.
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“Unstoppable!”: Children as Readers and Researchers of Reading in an Arts‑Based Project
Danielle Fuller
pp. 1–30
AbstractEN:
Historians of children’s reading highlight how the voices, opinions and ideas of actual children, are missing from most institutional archives. Contemporary scholars have an opportunity to change that situation for the future by co‑producing research with children. This paper examines how a class of ten‑year‑old schoolchildren in England engaged with a multidisciplinary arts project involving creative writing, digital game‑making and reading research activities. The paper builds upon scholarship that emphasizes the importance of conceptualizing research projects about children’s reading with reference to transliteracies, multimodality and creative reading. It argues that, by offering the children different forms and media of expression and various means of documentation, the project enabled them to articulate vernacular as well as schooled ways of reading. Significantly, the children’s perspectives on their own reading acts and habits offer valuable insights into the qualities of their reading experiences as child readers navigating a twenty‑first‑century transmedia environment.
FR:
Les historiennes et historiens de la lecture chez l’enfant soulignent le fait que la voix, les opinions et les idées des enfants se font rares dans la plupart des archives institutionnelles. Il est toutefois possible, pour les chercheuses et chercheurs, de remédier à la situation par la coproduction d’études avec des enfants. L’article propose l’exemple d’une classe, en Angleterre, dont les élèves de dix ans se sont investis dans un projet artistique multidisciplinaire alliant création littéraire, conception de jeux vidéos et activités de recherche sur la lecture. La littérature sur laquelle il s’appuie fait valoir l’importance de conceptualiser les projets de recherche portant sur la lecture chez l’enfant en se référant à la translittératie, à la multimodalité et à la lecture créative. Le projet cité en exemple offrait aux enfants des moyens diversifiés de documenter leurs idées au sujet de la lecture, par l’entremise de différents médias. L’article soutient que c’est ce foisonnement de formes d’expression qui leur a permis d’articuler des pratiques de lecture, tant les pratiques plus informelles que celles préconisées par l’école. Plus particulièrement, les perspectives des enfants sur leurs propres actes et habitudes de lecture jettent un éclairage précieux sur la nature de leurs expériences en tant que jeunes lectrices et lecteurs se frayant un chemin dans l’environnement transmédiatique du xxie siècle.