Volume 67, Number 2, juin 1991 Symposium sur le salaire minimum et l’emploi
Table of contents (8 articles)
Articles
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Introduction
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L’incidence du salaire minimum sur le marché du travail des adolescents au Canada : une reconsidération des résultats empiriques
Gilles Grenier and Marc Séguin
pp. 123–143
AbstractFR:
Un des résultats les moins controversés de la théorie économique est la prédiction que l’imposition d’un salaire minimum a des effets néfastes sur l’emploi. Des études empiriques réalisées dans les années soixante-dix et au début des années quatre-vingt ont confirmé la présence de ces effets, surtout chez les adolescents. Par ailleurs, depuis le milieu des années soixante-dix, le salaire minimum au Canada a très peu augmenté et a même baissé en termes réels, ce qui aurait dû affecter l’emploi favorablement. Le but de cette étude est de tenter de vérifier si le salaire minimum a toujours le même impact négatif sur le marché du travail des adolescents au Canada durant la période 1976-1988. À cette fin, nous estimons un modèle semblable à ceux des études antérieures. Les résultats sont différents de ceux de ces études : l’indice du salaire minimum n’est pas significatif dans les régressions estimées. Il semblerait donc que le salaire minimum ait un impact plus faible, ou du moins plus incertain, que par le passé. Quelques explications possibles aux changements observés sont suggérées. Certaines ont trait aux données utilisées et à la façon de mesurer les variables du modèle, alors que d’autres se rapportent aux relations théoriques entre ces variables.
EN:
One of the least controversial issues in economic theory is the prediction that the imposition of a minimum wage has a negative impact on employment. Empirical studies performed during the seventies and the early eighties have confirmed the presence of that impact, especially among teenagers. Since the mid-seventies, however, minimum wages in Canada have changed very little and have even decreased in real terms. This should have had a favourable effect on employment. The purpose of this study is to see if the minimum wage still has the same negative effect on the labour market of teenagers in Canada during the period 1976-1988. To that effect, a model similar to those of the previous empirical studies is estimated. The results are different from those of the earlier studies: the minimum wage index is no longer significant in the estimated regressions. This suggests that the influence of the minimum wage on the labour market of teenagers is weaker than it used to be or, at least, that it is more uncertain. Possible explanations of the observed changes are discussed. Some are related to the data and to the way certain variables of the model are measured, while others pertain to the theoretical relationships among those variables.
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L’effet du salaire minimum sur le chômage des jeunes et des femmes au Québec : une réestimation et un réexamen de la question
Jean-Michel Cousineau
pp. 144–165
AbstractFR:
Les résultats d’estimation auxquels en arrive cette étude sont à l’effet qu’une hausse du salaire minimum relatif de 10 points de pourcentage contribue à accroître le chômage des jeunes et des femmes au Québec de l’ordre de 1,3 point de pourcentage dans chacun des cas.
La méthodologie utilisée consiste à régresser le taux de chômage de chacun de ces groupes sur des variables d’offre, de demande et de salaire minimum relatif en données semi-annuelles sur la période 1968-1988 pour les femmes et 1976-1988 pour les jeunes.
Par rapport à la littérature existante, on cherche à y préciser la portée des études utilisant le taux de chômage comme variable dépendante, on y re-spécifie les variables d’offre en tenant compte des possibilités de substitution ou de concurrence entre groupe pour les mêmes emplois, on y discute de la prise en compte du chômage structurel, des possibilités de relations non linéaires entre le salaire minimum et le chômage et de la symétrie de ces effets selon qu’on considère une phase de déclin ou de remontée du salaire minimum relatif. Les résultats se montrent très robustes à divers choix de la période d’observation.
EN:
This article shows that a 10 percentage point change in the relative minimum wages in Québec induces a 1,3 percentage point increase in both the youth and female unemployment rates. The methodology uses the youth (less than 25 years old) and females (all ages) unemployment rates as the dependent variables in a model that considers minimum wages, supply and demand variables as the main explanatory factors. The paper however attempts to re-specifiy the supply variable in order to take account of the competition between youth and females or other groups of labour for the same or similar jobs requiring less or fewer experience in the labour market. It also discusses the place and significance of such unemployment rate models in the literature, the problems associated with the consideration of structural or "natural" unemployment, the possible non linear type relationship between minimum wages and unemployment, and the question of asymetric effects between periods of high increasing or low decreasing relative minimum wages. The new model shows great robustness and stability over varying sample periods.
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Salaire minimum, emploi et productivité dans une perspective post-keynésienne
Mario Seccareccia
pp. 166–191
AbstractFR:
L’objectif de cet article est de présenter un cadre analytique d’inspiration post-keynésienne pour évaluer l’impact du salaire minimum sur l’emploi. Après un bref aperçu de la théorie macroéconomique post-keynésienne du marché du travail, nous examinons les effets indirects que les changements du salaire minimum peuvent avoir sur l’emploi par l’entremise de leur impact sur la productivité. Dans la conclusion, nous nous penchons brièvement sur le lien empirique salaire-emploi-productivité en utilisant des données canadiennes touchant la période 1961-88.
EN:
The purpose of this article is to provide a post-keynesian analytical framework for evaluating the impact of minimum wages on employment. After describing briefly the post-keynesian macroeconomic theory of the labour market, emphasis is then placed on the critical second-round productivity effects that changes in minimum wages can have on employment. A short empirical assessment of the wage-employment-productivity link, using Canadian observations for the period 1961-88, is undertaken in the concluding section of the article.
Critiques et expertises
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Les premiers travaux économiques de Gunnar Myrdal
Gilles Dostaler
pp. 192–217
AbstractFR:
Ce texte discute des premières contributions de Myrdal à la théorie économique, élaborées alors qu’il était l’un des principaux animateurs de l’école de Stockholm. Il examine les idées développées dans sa thèse de doctorat, Le problème de la formation des prix et le changement économique (1927), dans L’Équilibre monétaire (1932) ainsi que dans ses contributions au débat sur la politique fiscale. Ces premiers travaux sont sans doute les plus originaux de Myrdal et plusieurs de leurs éléments se retrouvent dans les écrits de la deuxième partie de la carrière de l’auteur, lorsqu’il est devenu, selon son propre témoignage, un économiste institutionnaliste. L’article se termine par un examen de quelques aspects des relations entre Keynes et Myrdal. Il est clair que Keynes est loin d’être l’unique acteur dans la construction de nouveaux cadres théoriques associés à ce qu’on appelle la révolution keynésienne. Myrdal est intervenu activement dans cette transformation. À certains égards, il est allé plus loin que Keynes, en direction de développements plus contemporains. Ses apports les plus fondamentaux, l’intégration des anticipations, le développement d’une méthode d’analyse dynamique, l’étude des relations entre l’épargne et l’investissement, constituent le fondement de la théorie de l’école de Stockholm et ont aussi influencé d’autres économistes qui ont jeté les bases de la théorie macroéconomique moderne, notamment John Hicks.
EN:
This essay discusses Myrdal's first contributions to theoretical economics, developed when he was one of the mainstrays of the Stockholm school. It examines the theories developed in his doctoral dissertation, The Problem of Price Formation and Economic Change (1927), in Monetary Equilibrium (1931), as well as his contributions to the debate on fiscal policy. It is argued that these works are probably Myrdal's most original and that many of their conclusions are utilized in the later part of his career, when he became, as he said himself, an institutional economist. The paper concludes with an examination of a few aspects of the relation between Myrdal's and J. M. Keynes's works. It is clear that Keynes was not the sole actor in the building of new theoretical frameworks, associated with what is now called the Keynesian revolution. Myrdal was active in the changes taking place. In certain aspects, he went beyond Keynes towards more contemporary developments. His basic contributions, including the analysis of expectations, the development of a method to deal with dynamics, and the analysis of the relationship between saving and investment, formed the basis of the Stockholm school and influenced other economists who helped build important parts of modern macroeconomic theory, notably John Hicks.
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Observations sur la notion de marché
André Raynauld
pp. 218–230
AbstractFR:
Il n’est guère de concept plus commun ou élémentaire en analyse économique que celui de marché. Et pourtant il donne encore lieu à de profondes divergences de vues. Pour certains, le marché s’étend à l’univers tout entier, pour d’autres aux frontières des zones de libre-échange ou de marchés communs. Cet article soutient au contraire que l’étendue d’un marché est une question essentiellement empirique dont la réponse, variable, tient aux caractéristiques des produits concernés et aux conditions des échanges.
Un marché parfait se définit par l’unicité du prix d’un bien homogène disponible à un même moment en un même endroit. Toutes les restrictions à cette notion de référence restreignent les aires du marché et ces restrictions varient à l’infini suivant les circonstances, les produits ou les facteurs de production. Certains marchés ne s’étendent pas au-delà d’un quartier urbain ou d’un village de campagne, d’autres, au contraire, rejoignent toutes les capitales du monde, comme c’est le cas du marché boursier.
EN:
There are few concepts more common or elementary in economics than that of market. And yet, it still gives rise to deep differences of views. In the eyes of some, the market reaches the world as a whole, for others the typical area of a market is that of a free trade zone or a common market. This paper shows that a market area is an empirical question essentially and varies widely depending upon the nature of the commodities involved and the conditions of exchange.
A perfect market is defined by the law of one price applying to a homogeneous good available at a given time and a given place. AIl restrictions to this reference notion imply a narrowing of market areas and in reality those restrictions vary endlessly according to circumstances, commodities or factors of production. Some markets do not go beyond two streets in the city or a village in the countryside; others on the contrary involve all the major capital cities in the world as is the case of the stock-market.
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Les limites de la social-démocratie ou les limites de l’analyse néo-marxiste / Louis GiIl, Les limites du partenariat : les expériences sociales-démocrates de gestion économique en Suède, en Allemagne, en Autriche et en Norvège, (Boréal, 1989), 145 p.
Notes, commentaires et comptes rendus
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Éléments de comparaison des régimes d’assurance-chômage canadien et américain
Emmanuel Nyahoho
pp. 241–251
AbstractFR:
L’Accord de libre-échange Canada-États-Unis a donné lieu à plusieurs controverses sur le recentrage des politiques de main-d’oeuvre dont, en particulier, le régime d’assurance-chômage qui constitue une des mesures les plus déterminantes de lutte contre la précarité de l’emploi. Pour éclairer le débat, nous avons choisi de procéder à une analyse comparative du régime d’assurance-chômage au Canada et aux États-Unis. Il est observé que le système américain instauré en 1935 (soit cinq ans avant le Canada) a la particularité d’être moins généreux de par la durée, le montant de prestation ainsi que par les critères d’admissibilité. Mais le travailleur canadien défraie une partie importante du coût du financement du régime alors que le salarié américain en est généralement exempté, sauf dans un nombre restreint d’États. On explique ici que, malgré cette générosité, le système canadien peut sûrement coexister dans la diversité des régimes des États américains qui témoignent des préférences régionales solidement ancrées.
EN:
Canada-USA Free Trade Agreement has created some controversies over its effect on manpower-policies and programs such as Unemployment Insurance which is one of the most distinguished social measure against job's precarity. In order to bring some insight on these issues, this text offers a comparative analysis of the UI compensation's system in Canada and the United States. While the US system was introduced in 1935, five years before Canada's, it has the distinction of being less generous both in duration and amount of benefits and in admissibility criteria. One key difference is that Canadian workers pay a significant part of the cost of financing their system while their American counterparts are generally exempted except in a limited number of States. Here it is argued that, despite the generosity of the Canadian system, it can continue to coexist with the diverse array of systems in American States, which display strong regional preferences.