Résumés
Résumé
Chef-d’oeuvre de condensation, la scène typiquement proustienne de la lecture du Figaro est ici considérée comme un récit de rêve. Son apparente étrangeté ne fait que souligner sa cohérence avec l’ensemble de l’oeuvre de Proust, qui en devient le contenu latent. Déjà présente dans le Contre Sainte-Beuve, cette scène d’À la recherche du temps perdu occupe une place importante dans les avant-textes de l’ouverture. Elle a souvent été réécrite avant d’être tardivement enchâssée dans Albertine disparue, cette partie instable du roman que Proust avait rayée juste avant sa mort, peut-être avec l’intention d’autres remaniements. Cette proximité du texte avec ses origines et son inachèvement fait écho à l’expérience de l’auteur en rêveur éveillé, soumis à la pulsion de mort ainsi qu’à la récapitulation de sa vie jusqu’en ses racines les plus lointaines. Lecteur de lui-même, le héros y réaffirme son identité d’écrivain en même temps qu’il sonde les facettes mystérieuses de son être. Chez Proust, l’exploration de la réalité passe par le rêve, à la fois révélateur de l’inconscient et moteur de la création.
Abstract
A masterpiece of condensation, the reading of the Figaro—a typically Proustian scene—is viewed here as a dream narrative. Its apparent strangeness merely serves to underscore its coherence with Proust’s work as a whole, which becomes its latent content. Already present in Against Sainte-Beuve, this scene from In Search of Lost Time occupies an important place in foretexts to the work. It was rewritten many times before being belatedly inserted into Albertine Gone, that unstable part of the novel that Proust removed shortly before his death, perhaps with the intention of making further changes. The text’s incompletion and closeness to its origins echo the author’s experience as a daydreamer, subject to both the death instinct and the recapitulation of his life from its very deepest roots. A self-reader, the hero affirms here his identity as a writer, while probing the mysterious facets of his being. In Proust, reality is explored through the dream, which both reveals the unconscious and serves as the engine of creation.