Comptes rendus

Simon Langlois et Jocelyn Létourneau (dirs), Aspects de la nouvelle francophonie canadienne, Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 2004, 325 p. (Culture française d’Amérique.)[Notice]

  • Claude Couture

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  • Claude Couture
    Jackson School of International Studies
    University of Washington (Seattle)

Depuis toujours, l’Université Laval joue un rôle important pour les francophones d’Amérique. Sous la direction de deux universitaires chevronnés, Simon Langlois et Jocelyn Létourneau, cet ouvrage s’insère dans cette tradition de leadership. Au départ, l’initiative avait été d’organiser un séminaire à l’automne de 2001 chapeauté par la Chaire pour le développement de la recherche sur la culture d’expression française en Amérique du Nord. Le résultat est cet ouvrage qui vient à point nommé au moment où la francophonie vit une période vraiment charnière. Les dix-sept contributions de ce recueil sont regroupées en trois sections : la « nouvelle francophonie canadienne » est constituée de six textes (Yves Frenette, Patrick Clarke, Julie Lavergne, Sylvie Lebel, Vim Remysen, Simon Laflamme) qui présentent des éléments descriptifs de la réalité sociologique définissant la « nouvelle francophonie ». La deuxième section, « mutations de l’imaginaire commun » (Marcel Martel, Herménégilde Chiasson, Jacques Beauchemin, Daniel Poliquin), rassemble des textes qui interpellent la francophonie sur les plans théorique et identitaire. Enfin, la troisième section, intitulée « vitalité et visibilité des communautés francophones » (Robert Stebbins, Charles Castonguay, Greg Allain, François Boileau, Carol Léonard, Patricia-Anne De Vriendt, Marc-André Schmachtel) explore les dynamiques contradictoires des minorités francophones. À noter que pour chacune de ces sections, on retrouve un équilibre entre les textes de chercheurs ou d’auteurs plus avancés dans la carrière et des textes de plus jeunes chercheurs. La qualité n’en est pas moins constante dans chacune des sections. Pour ce compte rendu, nous avons regroupé les textes différemment en quatre catégories : d’abord les textes plus généraux et théoriques, ensuite les textes sur l’Acadie suivis des textes sur d’autres régions spécifiques, enfin, les textes abordant le politique. Dans cette quatrième catégorie, les textes de Boileau, De Vriendt et Schmachtel rappellent les principaux aspects de l’évolution politique et juridique des communautés francophones et de leurs organisations depuis les années 1960. Ces trois textes font ressortir comment les nouvelles élites francophones ont mené parallèlement la lutte pour le dossier jugé prioritaire de l’éducation et la lutte pour la construction d’une nouvelle identité, créant ainsi certaines tensions, toujours non résolues, avec le Québec. Ce faisant, ces textes rejoignent les analyses de l’historien Michael Behiels, lequel, dans une autre parution récente sur les minorités francophones (Canada’s Francophone Minority Communities. Constitutional Renewal and the Winning of School Governance, Montreal / Kingston, McGill / Queen’s Press, 2004, 480 p.), a cherché à montrer comment les leaders des minorités francophones ont voulu développer une nouvelle direction politique menant à de nouvelles stratégies provinciales et nationales. Convaincues de l’importance de l’école pour le renouvellement et la croissance des communautés, les organisations francophones des années 1970 et 1980 auraient donc constamment fait pression pour l’enchâssement des droits linguistiques dans la constitution de même que les droits scolaires y compris la gouvernance des écoles. Ces objectifs étant atteints, en quelque sorte, en 1969 et 1982, elles ont dû néanmoins continuer la lutte juridique pour la reconnaissance de ces droits. La décision de la Cour suprême du Canada dans l’Arrêt Mahé, une cause débattue en Alberta par l’Association Bugnet, couronna de longues années de luttes et servit depuis de référence quasi universelle. Les causes et événements plus récents, comme la décision de la Cour suprême dans l’Affaire Arsenault-Cameron, en 2000, l’arrêt Beaulac (1999) ou l’arrêt Montfort (1999), ont participé de ce même mouvement de contestation juridique des francophones hors Québec et de l’affirmation de leur présence. Ces temps forts des relations entre les communautés francophones et les différents leviers de gouvernement sont particulièrement éclairants lorsque mis en relation avec les principales propositions qui ressortent …