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L’activité en théories. Regards croisés sur le travail, Dirigé par Marie-Anne Dujarier, Corinne Gaudart, Anne Gillet et Pierre Lénel (2016) Toulouse : Octarès Éditions, 264 pages. ISBN : 978-2-36630-055-0[Notice]

  • Mircea Vultur

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  • Mircea Vultur
    Professeur, Centre Urbanisation Culture Société, Institut national de la recherche scientifique (INRS)

Les théories sur ‘l’activité’, dont les racines philosophiques se trouvent dans la pensée de Karl Marx, s’inscrivent dans un courant interdisciplinaire ayant pour ancêtres les représentants de la psychologie culturelle russe des années 1930, soit Lev Vygotsky, Alexis Leontiev et Alexandre Luria. Après la Deuxième Guerre mondiale, ces théories se sont développées à l’intérieur de la psychologie comportementale et des sciences cognitives. Elles connaissent un premier regain d’intérêt au cours des années 1980 et, un deuxième, à partir du milieu des années 2000, à la suite des métamorphoses du monde du travail induites par les nouvelles formes d’activité communicationnelles et relationnelles qui ont suscité un intérêt renouvelé pour « le travail en acte ». Malgré cette longue ascendance, les théories de l’activité, leurs racines et les travaux produits par ce courant de pensée demeurent très fragmentés et mal connus, notamment dans le monde francophone. Réunissant la contribution de neuf chercheurs en provenance de plusieurs universités françaises, cet ouvrage, dirigé par Dujarier, Gaudart, Gillet et Lenel, est issu d’un colloque organisé en avril 2014 au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), et il constitue la première synthèse en langue française qui nous offre l’opportunité de connaître les nouveaux développements et les perspectives de recherche sur ‘l’activité’. Concept polysémique, qui réfère à « ce que font les travailleurs », l’activité est actuellement mobilisée principalement par les ergonomes, les psychologues cliniciens et, marginalement, par les sociologues du travail, notamment dans leurs analyses de la distinction entre tâche et activité. « À quoi nous sert l’activité pour comprendre le travail ? », voici la question qui donne matière aux réflexions contenues dans cet ouvrage qui se propose « d’expliciter de façon pédagogique des théories et des débats pluridisciplinaires sur l’activité », et s’adresse « à des spécialistes du travail qui cherchent à repérer, comprendre et articuler la diversité théorique des approches » (p. 10). La pluridisciplinarité caractérise la structure de l’ouvrage. Les auteurs des chapitres appartiennent à des disciplines variées : l’ergonomie (Corine Gaudart), l’ergologie (Yves Schwartz), la psychologie (Yves Clot et Christophe Dejours) la psychosociologie (Dominique Lhuilier), la sociologie (Alexandra Bidet, Anni Borzeix, Marie-Anne Dujarier et Gilbert de Terssac), l’économie (François Vatin), et ils inscrivent leurs analyses dans des traditions intellectuelles différentes, allant du marxisme au pragmatisme américain, de l’ethnométhodologie à l’interactionnisme et à la psychologie clinique. Cette diversité disciplinaire et de traditions intellectuelles, qui constitue l’une des forces de l’ouvrage, illustre, en même temps, la fragmentation du travail scientifique consacré à l’activité. La structure du livre comporte huit chapitres, outre une introduction et une riche conclusion. Chacun des chapitres tente de répondre à des problématiques transversales qui ont été établies par les coordonnateurs de l’ouvrage et transmises comme consigne de rédaction aux auteurs. Ces problématiques concernent : 1- la clarification des concepts mobilisés ; 2- les théories du sujet adossées à l’approche de l’activité ; 3- le lien activité-santé ; 4- la prise en compte des rapports sociaux dans l’analyse de l’activité ; 5- les liens entre activité, temps et histoire; et, enfin, 6- les méthodologies utilisées dans les enquêtes sur l’activité. Les limites de cette recension et la densité des analyses réalisées dans chaque chapitre sur ces problématiques spécifiques excluent la tentative de rendre compte de façon exhaustive de cet ouvrage. Je me limiterai donc à souligner brièvement quelques constats qui me semblent importants et mettrai en relief la valeur ajoutée apportée par cette publication. D’abord, soulignons l’une de ses principales forces : la clarification des approches de l’activité dans différentes disciplines. Il se dégage de l’ensemble des chapitres une vision large de l’activité qui offre de nouvelles perspectives …

Parties annexes