Résumés
Résumé
La minimisation des dommages, dit-on souvent, est une règle de common law : donc, elle ne s’applique pas dans le Québec. En l’occurrence, « ne s’applique pas » signifie « ne devrait pas être appliquée » car les opposants confondent droit positif et droit normatif. Curieusement, la question est surtout débattue en droit du travail, rarement en droit civil. Cela est paradoxal, en ce sens que le Code civil n’exprime pas la règle, tandis que le Code du travail québécois — comme d’autres lois canadiennes similaires — contient un article particulier énonçant la règle explicitement. Le phénomène pourrait s’expliquer par la dimension collective du droit du travail qui tend à amplifier la portée des discussions et à les diffuser dans la population. À l’opposé, la minimisation des dommages est appliquée sans discussion dans les litiges privés et la jurisprudence tient la règle pour acquise.
Cette note de recherche montre que la minimisation des dommages était connue de l’ancien droit français; malgré que les codificateurs aient décidé de ne pas l’énoncer explicitement, elle a survécu comme cas particulier de la règle de la non-compensation des dommages indirects. Aussi le débat s’est-il engagé sur des bases fragiles. L’origine de l’article 15 remonte au droit civil. Le fait que la common law comporte une règle semblable n’a aucune pertinence, dans la perspective que nous examinons ici.
La véritable question est de savoir pourquoi un employeur ayant contrevenu à l’article 15 devrait bénéficier du travail d’un salarié congédié qui a eu la chance de se trouver un autre emploi ? La réponse et qu’il n’y a ici aucun bénéfice, dans le sens où l’auteur d’une faute n’a rien à payer si peu ou pas de dommage n’en est résulté. Par ailleurs, pourquoi le travailleur recevrait-il double salaire s’il est réintégré ? Serait-ce une façon d’implanter les dommages punitifs dans cette partie de notre droit du travail ? Au fond, tout le débat est d’ordre normatif, sous le couvert du droit positif. Une fois reconnue et acceptée cette assertion, les enjeux apparaissent, plus clairement, sous un jour nouveau.
Abstract
Mitigation of damages, it is often said, is a common law rule; therefore it does not apply in Quebec. Here, “does not” means “should not”, as debaters confuse positive law and legislative policy. Oddly enough, this argument is made in the field of labour law, seldom in civil law discussions. This is paradoxical in the sense that the Civil code does not enunciate the principle whereas the Quebec Labour Code — as well as similar statutes throughout Canada — contains a specific section asserting the principle. A possible explanation is that discussions are usually more extensive and publicized in labour law, due to its collective features. In contrast, mitigation is applied without question in civil litigation and case law takes the principle for granted.
This research note shows that mitigation of damages was the rule in Ancient French Law. Although the French code did not state the rule as such, it is still present through the rule of non-compensation of indirect damages. Thus, the debate has been engaged on shaky grounds. The origin of section 15 can be traced back to civil law. The fact that common law has a similar rule is irrelevant for our purpose.
The true question is: why should an employer, who has violated section 15 benefit from the work of a former employee who was lucky enough to find an alternate job? The answer is that there is no benefit in the sense that a wrongdoer has nothing to pay if no or little damage is suffered. On the other hand, why should the worker be double paid if he is reinstated? Is this a way to introduce punitive damages into this part of our labour law? The truth of the matter is that the whole debate deals with policy under the guise of positive law. Once this is realized — or recognized — the stakes are seen more clearly.