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Le droit du citoyen à l’information scientifique et l’incontournable nécessité d’une grande revue d’expression françaiseThe citizen’s right to scientific information and the absolute necessity of a major biomedical journal in French[Notice]

  • Michel Bergeron

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  • Michel Bergeron
    Rédacteur en chef fondateur (1984-2000) et Directeur général (Amérique du Nord),
    Société de la revue médecine/sciences,
    500, rue Sherbrooke ouest,
    bureau 800, Montréal, Québec, H3A 3C6 Canada.
    michel.bergeron@umontreal.ca

Indéniable est le succès de médecine/sciences comme revue de formation, d’information et de culture. Avant tout, ce succès est dû à la foi de nos auteurs en cet outil de diffusion scientifique et à la qualité de leur recherche. En ce vingtième anniversaire, il convient de rappeler l’enthousiasme et les doutes mais surtout l’optimisme qui a entouré la conviction d’éditer une grande revue d’expression française [1]. Dans ce numéro, Axel Kahn souligne la philosophie du premier Comité de rédaction franco-québécois, sa volonté de suivre l’évolution de la recherche en biologie, son objectif d’influencer le cours des idées en sciences de la santé et en bioéthique. « La qualité seule sera le moteur de la diffusion de médecine/sciences », pouvait-on lire dans le premier éditorial [2]. La recherche de l’excellence repose sur le jugement des pairs et sur la rigueur dans l’évaluation et la critique des manuscrits. C’est grâce au respect de ces principes que médecine/sciences est présente dans les grands index internationaux et peut y être lue et consultée notamment dans l’Index Medicus/Medline. La route allait être ardue - nous le savions - mais dorénavant nos collaborateurs ne devraient plus avoir à travailler dans des conditions artisanales. La recherche de l’excellence a aussi un prix. Ne le cachons pas, médecine/sciences ne correspond pas encore à ce rêve d’une grande revue qui possède les moyens financiers de ses ambitions. Les revenus autonomes sont insuffisants car l’édition électronique fait perdre des revenus d’abonnement et les agences de publicité pharmaceutique ne recommandent pas médecine/sciences à cause de son tirage peu élevé et de son contenu « trop savant ». Il est illusoire de compter sur des revenus autonomes pour assurer la diffusion de nos travaux de recherche et de nos réflexions dans une revue indépendante comme médecine/sciences. Il faut en prendre acte et agir auprès de nos partenaires scientifiques, comme les associations savantes, les universités et les institutions de recherche qui toutes reconnaissent l’importance de l’enseignement scientifique continu. Heureusement, médecine/sciences a reçu l’appui généreux de ses ministères de tutelle qui ont compris, au Québec comme en France, les enjeux de l’appropriation de la science au sein de nos sociétés. La critique de la science, en particulier celle des applications thérapeutiques, est un devoir pour tout chercheur. médecine/sciences doit avoir les moyens d’être ce phare en Francophonie. Les cliniciens et leurs patients, les contribuables et les journalistes ont besoin de lire l’avis des experts indépendants que sont nos auteurs. Qu’il suffise de mentionner les débats entourant le retrait récent des inhibiteurs de la COX-2 ou de certaines médications hormonales de la ménopause. Les exemples sont légion où médecine/sciences a rempli ce rôle au cours de ces deux décennies : les cellules souches, la thérapie génique, l’euthanasie, le sida. Que la solution à certains problèmes de santé soit connue et ne soit pas appliquée constitue un des scandales de nos démocraties modernes. En fait, la notion même de l’accessibilité à la Science et à la Technologie en tant que droit fondamental serait ici mise en cause. Un droit aussi fondamental que la liberté de presse, le droit d’association, l’indépendance du système judiciaire… Certes, il est inhérent au droit à l’éducation mais il serait important de le distinguer parce que nos sociétés sont imprégnées de connaissances scientifiques qui influent sur le processus décisionnel des parlements et des instances qui font appel à la participation des citoyens. Comme l’analphabétisme, l’absence de culture scientifique - surtout chez les praticiens de la science - est un danger dans les sociétés modernes. Cet analphabétisme scientifique, comme l’autre, est souvent associé à la pauvreté et aux mauvaises conditions …

Parties annexes