Book ReviewRecension critique

Hugo Cyr, Canadian Federalism and Treaty Powers: Organic Constitutionalism at Work, New York, PIE Peter Lang, 2009[Notice]

  • François Chevrette

Professeur titulaire, Faculté de droit, Université de Montréal. Texte posthume.

Citation: (2013) 58:3 McGill LJ 775

Référence : (2013) 58 : 3 RD McGill 775

La question de savoir si les provinces canadiennes disposent d’un pouvoir constitutionnel de conclure des traités dans leurs champs de compétence en est une qui a été assez abondamment débattue, à la fois en doctrine et dans les débats d’affaires publiques; mais il faut dire d’emblée que le présent apport du professeur Hugo Cyr est ce qu’il y a de plus exhaustif et de plus approfondi dans tout ce qui a été écrit à ce sujet à ce jour. Comme il se doit, je ferai d’abord un rapide survol de l’ouvrage pour ensuite m’appliquer à mettre en relief ce qui constitue, selon moi, ses cinq caractéristiques les plus marquantes. Je ne reviens pas sur sa stimulante entrée en matière, tenant cependant à ajouter que si les mots cadre d’analyse et méthodologie sonnent parfois un peu creux à mes oreilles, la dichotomie théorique que Hugo Cyr nous présente en introduction entre une vision volontariste (on pense aux ruptures et recommencements des États-Unis et de la France en matière constitutionnelle) et une vision organique (on pense à une progression plutôt qu’à un acte plus ou moins instantané de volonté, le tout à l’anglaise et à la canadienne) me réconcilie avec l’idée d’un cadre théorique, cadre qui, dans le cas présent, structure tout le reste du texte en même temps qu’il pourrait se lire et se méditer isolément. J’y reviendrai. Très simplement et très logiquement, l’étude se divise en deux parties. Dans la première, que je chapeauterais du titre « Un héritage non concluant », l’auteur, pour arriver à ce constat, se livre à une analyse approfondie du fameux arrêt sur les Conventions de travail, tant en Cour suprême du Canada qu’au Comité judiciaire du Conseil privé, et de la jurisprudence un peu tortueuse qui l’a précédé. La deuxième partie est à triple volet. Elle comporte d’abord un volet négatif, où l’auteur ne se contente pas de réfuter tous les arguments légaux traditionnellement avancés à l’appui d’une compétence fédérale exclusive en matière de conclusion de traités, mais présente plusieurs arguments fonctionnels (ou de policy) à l’encontre d’une telle compétence. Le volet positif, quant à lui, s’attarde d’abord à décrire avec minutie l’implication des provinces canadiennes dans les relations internationales. Cela fait, l’auteur s’interroge sur la légalité de ces implications, tant au regard du droit constitutionnel que du droit international. C’est l’occasion pour lui d’avoir recours, un peu à la façon dont il l’a fait sous le volet négatif, à des arguments fonctionnels et même à certains appels à la théorie des jeux, le tout au soutien du pouvoir des provinces de conclure des traités dans leurs champs de compétence. Le troisième volet de cette deuxième partie pourra, en première analyse, surprendre puisqu’il n’y est plus question de la conclusion des traités, mais bien de leur mise en oeuvre législative. Il est bien établi, depuis l’arrêt sur les Conventions de travail du Comité judiciaire, que la mise en oeuvre législative des traités portant sur des sujets de compétence provinciale relève des provinces. Mais comme certains juristes souhaiteraient que la Cour suprême modifie cela au profit du Parlement fédéral, Hugo Cyr a cru approprié de démontrer avec force, premièrement, l’absence de fondement légal à un tel revirement, deuxièmement, ses inimaginables conséquences sur l’équilibre du fédéralisme, et troisièmement, l’extrême difficulté d’opérer pareille révolution même en passant par la voie de l’amendement constitutionnel. Voilà pour l’ossature de ce livre. Ajoutons-y maintenant la chair et les muscles! J’espère pouvoir donner une idée de la profondeur et de l’originalité de cette importante réflexion en centrant mes commentaires autour de ses cinq caractéristiques selon moi les plus marquantes : …

Parties annexes