DocumentationComptes rendus

Mattila, Heikki, E. (2012) : Jurilinguistique comparée. Langage du droit, latin et langues modernes. Texte français par Jean-Claude Gémar. Cowansville : Éditions Yvon Blais, 680 p.[Notice]

  • Máirtín Mac Aodha

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  • Máirtín Mac Aodha
    Université de Strasbourg, Strasbourg, France

Bourlingueur jurilinguiste, Heikki Mattila nous livre ici les trésors rapportés de ses diverses pérégrinations langagières à travers les grands systèmes juridiques du monde. La discipline ciblée « se situe à la croisée des deux disciplines mères que sont pour elles la linguistique et le droit » (Gémar 2005 : 11). Elle examine l’évolution, les caractéristiques et l’emploi de la langue juridique (id. : 17). Le mot jurilinguistique est né au Canada. Cette appellation apparaît pour la première fois dans le sous-titre du volume Langage du droit et traduction. Essais de jurilinguistique de Jean-Claude Gémar en 1982. Le terme s’apparente à l’expression « linguistique juridique » forgée par Gérard Cornu (2000) et privilégiée en France. L’auteur se contente de distinguer les deux termes ainsi : « “jurilinguistique” est un terme d’une portée plus large que celui de “linguistique juridique”, lequel peut laisser croire qu’il ne s’agit que d’un volet de la linguistique » (p. 11). On aurait aimé que l’auteur s’arrête un peu plus longuement sur cet aspect terminologique important. Chiara Preite nous précise les variations subtiles entre ces deux termes : Ajoutons à cette récapitulation que la fonction lexicale était privilégiée dans le premier de ces deux courants avant la publication du grand ouvrage de synthèse de Cornu, et que la phraséologie et la stylistique n’étaient que « des parents pauvres par rapport au vocabulaire » (Fernbach 1991-1992 : 37). La jurilinguistique, quant à elle, s’est toujours intéressée à la traduction (dans tous ses aspects : y compris la fonction lexicale et la fonction stylistique). Un engouement qui s’explique par la cohabitation de deux langues et la coexistence de deux systèmes juridiques sur le même territoire comme on la connaît au Canada (Gémar 2005 : 328). Publié en finnois en 2002, le texte a ensuite été traduit et publié en anglais en 2006. Une deuxième édition anglaise a suivi en 2013. Le présent volume constitue une seconde traduction, en français, révisée et augmentée par l’auteur. Il convient de saluer ici l’apport de Jean-Claude Gémar, un pionnier de la jurilinguistique, qui a « corrigé de fond en comble la traduction faite, à l’origine, par l’auteur lui-même » et dont « l’importante contribution lui vaut de voir son nom figurer sur la page titre de l’ouvrage ». Le volume se divise en trois parties. La première est consacrée à la théorie générale sur le langage du droit et la jurilinguistique. Dans une deuxième partie, le langage juridique est abordé comme langue de spécialité. L’histoire, les caractéristiques et l’usage international des grandes langues juridiques sont exposés dans la dernière partie. Ayant déjà eu l’occasion d’écrire un compte rendu détaillé de la première version anglaise, nous allons nous borner ici aux nouveautés et ajouts que l’on trouve dans la présente version française (soit environ 5 % du contenu total) (Mac Aodha 2010). L’auteur de ce volume a évoqué ailleurs l’utilité d’étudier l’usage du latin juridique dans le cadre de l’Union européenne (Mattila 2002 : 755). Il nous livre ici les résultats de la recherche effectuée par Pascale Duparc-Portier et Antoine Masson (2007) sur l’usage du latin auprès de la Cour de justice de l’Union européenne. Se fondant sur la jurisprudence de cette Cour, les auteurs dévoilent une incidence plus élevée de locutions et d’adages latins dans les avis des avocats généraux. Certaines locutions sont même des créations de cette instance ou du Conseil de l’Union européenne (citons à titre d’exemple, fumus boni juris et societas europea). Une explication de la prolifération de ces locutions latines dans la jurisprudence se trouverait dans la volonté des avocats généraux d’introduire sur le plan …

Parties annexes