Recensions

Jean-Marie Brauns, L’initiation des chrétiens. De l’anthropologie à la théologie. Paris, Groupe Elidia - Éditions Lethielleux (coll. « Sed Contra »), 2018, 513 p.[Notice]

  • Raphaël Mathieu Legault-Laberge

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  • Raphaël Mathieu Legault-Laberge
    Université de Sherbrooke

Jean-Marie Brauns, prêtre de la Compagnie de Saint-Sulpice, offre aux spécialistes de théologie fondamentale et aux historiens de la religion un ouvrage d’une grande érudition, fruit d’une patiente recherche qui retourne aux sources du christianisme. Si l’utilisation du terme « initiation », au départ associé à un vocabulaire païen, est plutôt récente dans le contexte ecclésial — c’est Louis Duchesne qui, dans Les origines du culte chrétien (1889), aurait introduit le terme dans le langage ecclésial francophone —, Brauns parvient à démontrer que son utilisation contemporaine est légitime au regard de ce que représente le baptême pour les chrétiens. Pour ce faire, il considère à la fois l’assise anthropologique et universelle de l’initiation, d’une part, et ce qui la distingue en tant qu’initiation proprement chrétienne, d’autre part. L’ouvrage est divisé en quatre parties, la première étant de nature plus anthropologique, les suivantes plus théologiques. La première partie de l’ouvrage s’attache à définir ce qu’est l’initiation. Brauns développe ce qu’il nomme des faisceaux afin de lier la notion d’initiation à des pratiques concrètes qui ont eu cours dans l’histoire. Il considère quatre traditions d’initiation : les cultes à mystères de l’Antiquité gréco-romaine (Éleusis, Cybèle, Dionysos, Mithra et Isis, entre autres), les pratiques initiatiques des peuplades primitives (en référence aux travaux de van Gennep et d’Eliade), les traditions compagnonniques et le gnosticisme. Il présente, par la suite, une revue de la littérature contemporaine (en référence notamment à Bastide, Eliade, Bianchi, van Gennep, Meslin, Rahner, Vorgrimler, Gondal et Bourgeois) et en dégage une définition de l’initiation. Brauns en vient à affirmer que le « […] genre fondamental [auquel appartient l’initiation] est l’action, dont la modalité spécifique est d’être rituelle et par conséquent communautaire » (p. 109). Ce constat constitue le premier pas vers l’élaboration d’une critériologie opératoire plus spécifique de l’initiation. Selon l’auteur, l’action rituelle communautaire constitue le premier critère universel à retenir concernant les pratiques initiatiques. Il refuse l’idée de mutation comme élément critériologique pertinent, mais retient l’agrégation et l’illumination comme étant les deux éléments fondamentaux qui ressortent à la fois des faisceaux qu’il a explorés et des définitions qu’il a présentées. Par la suite, le théologien synthétise ses observations anthropologiques à propos de l’initiation, indiquant que la finalité de l’initiation, conçue comme un moyen, repose sur un principe de survie d’une communauté et de transmission d’une identité. Dans la seconde partie de l’ouvrage, Brauns s’attarde aux Écritures bibliques afin d’y déceler en quoi le baptême, en tant que « moment décisif de l’initiation chrétienne » (p. 168) constitue une initiation. Le « secret » de l’initiation chrétienne se trouve, selon lui, dans l’histoire « […] de la rencontre de Dieu et de l’homme ; histoire par la rencontre de Dieu et de l’homme » (p. 174). L’initiation chrétienne trouverait ses origines dans cette histoire s’exprimant à partir de l’Ancien Testament. L’auteur soulève le fait que les expressions typiques relatives au vocabulaire initiatique sont rares dans l’Ancien Testament et se concentrent dans certains textes (Sagesse, Siracide et Daniel). La ritualité la plus proche d’une pratique initiatique dans le monde juif est la circoncision masculine en tant que signe de l’Alliance et rite d’agrégation à la communauté. Le Nouveau Testament n’est pas plus clair, selon Brauns, en ce qui concerne la désignation d’une pratique initiatique précise. Le baptême chrétien est mentionné dans les Évangiles synoptiques (Mt 28,19 ; Mc 16,16) et l’Évangile johannique pose l’initiation baptismale comme condition d’entrée au Royaume de Dieu. Considérant par la suite les Actes des apôtres et le corpus paulinien, l’auteur insiste fortement sur le fait que « […] le μυστήριον paulinien et biblique n’entretient aucun rapport avec …