Recensions

Michel Steinmetz, La fonction ministérielle de la musique sacrée. L’approche originale de la Tradition par Vatican II. Paris, Les Éditions du Cerf (coll. « Lex Orandi », 7), 2018, 379 p.Id., La musique : un sacrement ? La médiation de la musique rituelle comme lieu théologique : une participation à l’épiphanie du mystère de l’Église. Paris, Éditions Parole et Silence, 2017, 221 p.[Notice]

  • Ângelo Cardita

…plus d’informations

  • Ângelo Cardita
    Université Laval, Québec

Dans cette étude, l’auteur se concentre sur l’innovation terminologique du concile Vatican II pour se référer à la musique dans l’action liturgique en termes de munus ministeriale, une expression latine que l’on traduit normalement par « fonction ministérielle ». Cette locution se trouve dans le paragraphe initial du chapitre VI de la constitution conciliaire sur la liturgie, Sacrosanctum Concilium, sur la « musique sacrée » (De musica sacra), le paragraphe 112. La spécificité de cette étude repose non seulement dans l’essai d’une herméneutique du munus ministeriale de la musique dans son site liturgique, mais aussi dans l’effort de prendre le discours de SC 112 comme indication méthodologique. C’est ainsi que l’auteur porte son regard sur le discours des Pères de l’Église au sujet de la musique et du chant ainsi que sur le fameux motu proprio de Pie X Tra le sollecitudini sur la musique sacrée de l’année 1903, avant d’étudier l’invention du munus ministeriale de la musique par le concile Vatican II. L’auteur a donc voulu confirmer les termes utilisés par le Concile pour justifier ce munus ou cette fonction ministérielle de la musique dans la liturgie. En plus, il a voulu aussi creuser l’éventuelle signification et importance de ce choix terminologique, lequel est le fruit d’un amendement fait au texte et qui a consisté dans le remplacement du mot « aspect » (character) par celui de « fonction » (munus). Cette correction visait à éclairer le sens du supposé aspect ministériel de la musique dans la liturgie. Plus qu’un aspect que la musique peut acquérir de façon plus au moins extrinsèque, il s’agit, pour le Concile, d’un véritable « ministère » de la musique comme partie nécessaire on intégrante de la liturgie solennelle. Notre auteur a, donc, désiré explorer cette « ministérialité » de la musique, en suivant les indications offertes par SC 112, dans le contexte prochain où l’expression munus ministeriale apparaît. Cette option méthodologique semble assez intéressante et cohérente. Elle peut même correspondre à une bonne première intuition de recherche, mais elle aurait besoin d’une élaboration critique plus poussée. On le voit, en premier lieu, dans les maigres résultats de cette entreprise. Sur les Pères de l’Église, on revient sur des lieux communs, sans oser de pistes nouvelles de recherche. Les Pères auraient été particulièrement attentifs à la qualité chrétienne de l’expression musicale, refusant les excès païens ainsi que la nostalgie de la splendeur du Temple de Jérusalem que l’utilisation d’instruments musicaux pouvait susciter. La préférence retombait sur le chant vocal, mais encore ici selon un ethos chrétien particulier. La difficulté, qui exigerait d’autres options de recherche, est celle de déterminer cet ethos musical chrétien. Il ne suffit pas de citer les mises en garde des Pères contre les passions créées par les pratiques musicales païennes, notamment en l’absence d’informations plus concrètes sur celles-ci dans ses multiples aspects, des techniques de composition à la teneur et contexte des mises en oeuvre. Je présuppose (peut-être à tort) que les chrétiens n’avaient pas la capacité de créer ex nihilo le langage musical rituel de leurs célébrations. Je présuppose également que celles-ci devaient assumer certains traits identitaires propres, tout en ayant recours au(x) langage(s) humain(s) selon les dynamiques expressives du cadre rituel. Bref, le discours musical des Pères a besoin d’être éclairé par des données contextuelles plus précises, illustrées par des pratiques musicales et rituelles encore à repérer. Ensuite, à propos du motu proprio de Pie X sur la musique sacrée, on ne voit aucune marque d’originalité non plus. L’auteur fournit une bonne synthèse et une analyse pertinente du document, mais …