Recensions

Roland Varin, Le sacrement du ministère apostolique. La sacramentalité de l’épiscopat et ses conséquences ecclésiologiques. Paris, Groupe Elidia, Éditions Artège - Lethielleux (coll. « Sed Contra »), 2016, 317 p.[Notice]

  • Ângelo Cardita

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  • Ângelo Cardita
    Université Laval, Québec

Cet ouvrage rend publiques les recherches de maîtrise de l’auteur sur la sacramentalité de l’épiscopat. L’ouvrage s’organise en trois chapitres, en correspondance à trois moments méthodologiques et aussi à trois groupes de sources théologiques. Dans le premier chapitre, l’auteur interroge certains témoins de la Tradition, notamment le Nouveau Testament, les Pères et, plus rapidement, la liturgie. Le second chapitre se concentre sur le Magistère dans l’Église catholique et le troisième se présente comme un chapitre de réflexion théologique systématique. En résumé, ce livre nous offre le récit de l’éclipse de la sacramentalité de l’épiscopat dans l’Église de l’Occident et de sa réémergence dans le Magistère catholique culminant dans le second concile du Vatican. Le but de la recherche est d’établir l’état des lieux. L’éclipse de la sacramentalité de l’épiscopat en Occident est due notamment à l’influence des opinions de saint Jérôme. Avant, cette réalité pouvait être discernée, même sans l’emploi de la notion de « sacramentalité », autant dans le Nouveau Testament que chez les premiers Pères de l’Église. L’auteur souligne l’importance du contexte ecclésiologique ainsi que la signification christologique pour le discours sur le ministère des évêques dans ces témoignages anciens. La position de saint Jérôme, selon laquelle il n’existe pas vraiment de différence entre les évêques et les prêtres, surgit dans un contexte de polémique cléricale (p. 58), d’ailleurs analogue à celle motivant des opinions semblables chez l’Ambrosiaster. Son influence marquerait une conception de l’épiscopat axée sur le pouvoir de juridiction, une conception qui serait conservée et développée par les théologiens médiévaux, à l’exception près de saint Thomas d’Aquin qui conserverait une référence ecclésiologique au moment de distinguer les évêques des prêtres. Le pouvoir épiscopal dépasserait le pouvoir des prêtres en ce qui concerne les fidèles (p. 89). Avant le concile de Trente, le Magistère catholique sur l’épiscopat s’est appuyé surtout sur les déclarations du concile de Florence (1439), selon lesquelles le ministre ordinaire du sacrement de l’ordre est l’évêque (p. 119). Toutefois, comme l’auteur illustre bien en référence aux bulles concédant à certains abbés la faculté d’ordonner, « la dérive épiscopale de l’abbatiat au Moyen Âge » reste à étudier (p. 121). Le concile de Trente se contente de répondre aux objections protestantes, notamment celles visant le caractère hiérarchique de l’Église. On devait attendre le premier concile du Vatican pour voir les premiers signes d’évolution dans ce chapitre, en lien avec la réflexion sur l’Église et, plus concrètement, sur la primauté papale. Les papes du xixe et du xxe siècle continueront la réflexion, cherchant l’équilibre entre le rôle du pape et celui des évêques. Ainsi, pour Léon XIII (Encyclique Satis cognitum : 29 juin 1896) les évêques appartiennent à la constitution de l’Église en tant que successeurs des apôtres. Pie XII reprendra cette ligne de pensée, mais sa contribution la plus significative est celle qui concerne la matière et la forme du sacrement de l’ordre à commencer par la consécration épiscopale. Pendant tout le Moyen Âge, le sacrement de l’ordre et le sacre des évêques avaient été conçus selon les catégories féodales comme transmission d’un pouvoir à travers la consignation des instruments correspondant au même pouvoir. C’est seulement avec Pie XII que l’on revient à l’imposition des mains et à la prière de consécration, comme « matière » et « forme » du sacrement de l’ordre. La sacramentalité de l’épiscopat se voit renforcée avec ce retour au signe sacramentel. Le terrain était donc préparé pour le renouveau du second concile du Vatican, lequel non seulement soutient la dimension sacramentelle du ministère épiscopal mais aussi sa « plénitude » (p. 153 : Lumen Gentium …