Partie II - TémoignagesZeugnisse

Peter Szondi : point(s) de retour à Zurich en 1971[Notice]

  • Monique Moser-Verrey

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  • Monique Moser-Verrey
    Université de Montréal

Mon mari, Walter Moser, et moi-même avons fait nos études à l’Université de Zurich dans les années 1960 et avons été témoins de la création en 1967−68 d’une chaire de littérature comparée lors de l’engagement de Paul de Man. Pour des raisons personnelles et institutionnelles, ce nouveau professeur a été davantage accueilli par les « romanistes », dont nous faisions partie, que par les germanistes et les anglicistes. Aussi, il faisait cours en français, ce qui pouvait décourager certains étudiants plus à l’aise en allemand. Dans la rétrospective, cet engagement a placé Zurich dans un réseau de professeurs qui ont révolutionné les études littéraires. C’est en tout cas ce que le 50e anniversaire de l’Institut de littérature comparée de l’Université de Zurich a mis de l’avant lors d’un colloque qui a eu lieu en 2018. Un choix de textes issus de cette rencontre a été édité par Thomas Fries et Sandro Zanetti et a paru en 2019 sous le titre Revolutionen der Literaturwissenschaft 1966−1971 (2019). C’est en effet la mort de Peter Szondi en octobre 1971 qui clôt, pour un temps, le premier épisode de cette révolution initiée en 1966 lors du mémorable congrès organisé à l’Université Johns Hopkins à l’initiative de René Girard également appuyé par l’École pratique des hautes études de Paris, où une grande ouverture interdisciplinaire qui devait porter fruit s’initia. Paul de Man et Jacques Derrida firent connaissance à cette occasion. Georges Poulet était également venu de Zurich. Bref, cet événement semble être à l’origine de la création en 1968/69 du « Seminar für Vergleichende Literaturwissenschaft » de l’Université de Zurich qui, depuis 2006, s’appelle « Abteilung für Allgemeine und Vergleichende Literaturwissenschaft ». Peter Szondi avait accepté le poste laissé vacant par de Man, qui avait pour sa part accepté un poste à l’Université de Yale. Mais la disparition de Szondi laissa tant à Berlin qu’à Zurich, comme le disent si bien Fries et Zanetti : « eine unersetzliche Lücke » (ibid., 37), un vide irremplaçable. Walter et moi avons été confrontés à ce vide. C’est Philippe Despoix qui a repéré dans les archives de Peter Szondi quelques lettres adressées à Walter datant des années 1968 et 1969. Sur la recommandation de Paul de Man, Walter avait alors signifié à Peter Szondi son intérêt pour un poste d’assistant à Berlin, mais celui-ci ne se libérant qu’en 1970, Szondi lui proposait de venir en tant que boursier, tout en lui expliquant comment procéder et souhaitant une rencontre lors de sa prochaine venue en Suisse. Mais en 1969 nous sommes partis pour les États-Unis, où un poste de visiting assistant professor avait été offert à Walter au département de langues romanes de l’Université Yale, tandis que sur place j’avais pu obtenir un poste au Quinnipiac College. Ce séjour s’est prolongé d’une année et les rencontres personnelles souhaitées avec Peter Szondi n’ont pas eu lieu, malgré les éventuelles dates et les lieux proposés dans les lettres. Enfin, à notre retour en Suisse à l’été 1971, nous apprenions et le départ de Paul de Man pour Yale et la venue de Peter Szondi à Zurich. Comme je m’étais inscrite au doctorat en littérature comparée à l’université de Zurich, j’ai donc eu finalement une rencontre avec Peter Szondi au cours de l’automne 1971, seulement quelques semaines avant sa disparition. Comme il n’y a rien d’écrit pour témoigner de cette rencontre, et que je n’étais pas la seule personne convoquée à cette première et dernière « Sprechstunde » du professeur Peter Szondi à l’Université de Zurich, mon souvenir est personnel. Zurich est la ville où je suis née. J’y ai …

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