Résumés
Résumé
Cadre de la recherche : Dans le contexte français, les grossesses sont encadrées par un ensemble de dispositions légales (droits de la santé, de la sécurité sociale, du travail) et de pratiques médicales (parcours de soins type). Cet article interroge l’encadrement du temps de la grossesse et les tensions entre différentes temporalités. Les femmes enceintes sont assignées à des responsabilités supplémentaires au nom de la « protection » du fœtus qui viennent s’ajouter au travail domestique et, pour nombre d’entre elles, au travail rémunéré.
Objectifs : L’article analyse le rôle ambivalent et les effets différenciés de l’encadrement légal et médical des grossesses.
Méthodologie : Il s’appuie pour cela sur une enquête par entretiens et observations réalisée en Île-de-France entre 2014 et 2017. Trente femmes enceintes ont été interrogées, dont onze à plusieurs reprises. Les observations concernent différentes étapes du suivi de grossesse à l’hôpital, principalement les inscriptions, les consultations, et les cours de préparation à la naissance.
Résultats : L’encadrement des grossesses assigne aux femmes la responsabilité individualisée de garantir la santé du fœtus. Le parcours de soin est intensif et repose sur une disponibilité permanente des femmes, rendue possible par la subordination du temps professionnel aux impératifs médicaux. Les salariées cherchent à minimiser l’impact de leur grossesse sur leur lieu de travail en mettant en œuvre des stratégies de séparation du temps médical et du temps professionnel.
Conclusions : L’accès aux soins est largement effectif en France et le droit garantit une couverture médicale pour les femmes enceintes, mais celle-ci ressort en même temps de l’obligation de soins. Cette obligation est inégalement contraignante selon les ressources des femmes. Du côté de droit du travail, les mesures dites protectrices sont peu effectives, car peu appliquées par les employeurs et mobilisées partiellement par les salariées ; celles qui sont le mieux situées dans les rapports de classe et dans la hiérarchie professionnelle ont davantage de marge de manœuvre.
Contribution : Cet article contribue à la sociologie de l’articulation des temps sociaux, à la sociologie de la santé, et à la sociologie des inégalités sociales.
Mots-clés :
- maternité,
- accès aux soins,
- santé,
- emploi,
- conciliation,
- temporalité
Abstract
Research framework: In France, the management of pregnancies rests upon a set of legal measures (health, social insurance, and labour rights) and stabilized medical practices (standard prenatal care). This paper questions the time management of pregnancies and tackles the contradiction between several temporalities. Pregnant women are entrusted with specific tasks and responsibilities for the fetus’ sake, this third shift adds up to domestic labour and in many cases to paid labour.
Objectives: This paper analyzes how the legal frame and the medical control have ambiguous and unequal effects for pregnant women.
Methodology: It draws on interviews and ethnographic observation conducted in the Paris’ region from 2014 to 2017. Thirty women were interviewed during their pregnancy, amongst whom 11 were interviewed twice or three times. Hospital care was observed from different places and times: registration, appointments with a midwife or obstetrician, antenatal classes.
Results: The management of pregnancy assigns an individualized responsibility to women for guaranteeing the fetus’s health. Health care for women can be intensive and rests upon their permanent availability for it. This is made possible by subordinating their professional timetable to health care requirements. Employees seek to minimize the impact of their pregnancy in their workplace by separating medical time and professional time.
Conclusions: Access to health care is largely effective and the legislation ensures that all pregnant women get prenatal care, which makes it at the same time an obligation for women. This obligation is more or less constraining depending on women’s resources. Measures concerning pregnant workers are not so beneficial as employers often do not abide by them, and employees only partially use them. Middle- or upper-class workers and those on the upper levels of the occupational hierarchy benefit more from these measures than others.
Contribution: This paper contributes to the sociology of work-life balance, to the sociology of health and to the sociology of inequalities.
Keywords:
- motherhood,
- access to health care,
- health,
- employment,
- work-life balance,
- temporality
Parties annexes
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