Notes de lecture

HENRIPIN, Jacques. 2000. Les Enfants, la pauvreté et la richesse au Canada. Montréal, Les Éditions Varia, 190 p. [Notice]

  • Roderic Beaujot

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  • Roderic Beaujot
    Université de Western Ontario

Plus d’une fois, Jacques Henripin nous a fait réfléchir sur les grands thèmes de la démographie. Il traite aujourd’hui du « coût » des enfants, se demandant, en particulier, pourquoi les pays riches imposent aux parents une si grande part de ce fardeau, qui les appauvrit d’autant plus sûrement qu’ils sont seuls ou jeunes. Le coût des enfants et son partage entre les parents et les autres membres de la société soulèvent en effet des questions morales et politiques fondamentales. Si, comme le fait remarquer Henripin, les parents ne sont pas les seuls à profiter des enfants, quelle part des coûts les gouvernements devraient-ils assumer, et quelles formes devrait prendre leur aide ? Ce sont là des questions qui définissent les régimes démographiques et les sociétés. Nos politiques sont-elles encore trop le reliquat d’époques où il fallait réduire la fécondité en imposant aux parents le coût des enfants, et où le veuvage risquait fort de jeter ces derniers dans la misère ? Accorde-t-on trop d’importance à la pauvreté des personnes âgées et à la réduction des impôts, et trop peu au dénuement  des familles, monoparentales notamment ? « Pour le bonheur actuel et futur de ses citoyens », écrit Henripin, le Canada « devrait d’abord s’occuper de ses enfants : de les faire naître pour commencer, et ensuite de les bien former, hors de la pauvreté » (p. 17). Il nous prévient d’emblée que « les suggestions qu’on trouvera dans ce petit ouvrage sont coûteuses, très coûteuses » (p. 20). Henripin situe d’abord la condition des enfants dans le contexte des changement socio-démographiques. Il signale que les enfants pauvres se concentrent dans les familles monoparentales, les familles biparentales de trois enfants et plus, ou les familles dont les parents sont jeunes. Abordant ensuite les coûts directs des enfants, il cite diverses estimations, et retient la moyenne de 8000 à 9000 dollars par an par enfant, qui tient compte de l’influence du nombre d’enfants sur le niveau de vie des familles. Il ne croit donc pas que 4000 dollars par an soient le minimum nécessaire pour prendre soin d’un enfant (Battle, 1997). Il lui paraît raisonnable d’estimer le coût annuel direct d’un enfant à 8600 dollars, son coût annuel « alternatif » (le manque à gagner dont il est la cause) à 5840 dollars, et les dépenses publiques qui lui sont destinées à 7500 dollars, soit la moyenne annuelle calculée pour les âges de 0 à 18 ans (p. 71). Sur 18 ans, les coûts privés par enfant s’élèveraient ainsi à 243 000 dollars, ce qui correspond à six ans et demi de travail à temps plein. Pour trois enfants, cela équivaut à presque 20 ans de travail et revient à dire, si la famille n’a qu’un pourvoyeur, que ce dernier ne peut rien garder pour lui pendant 20 ans… ou s’invente des économies quelque part ! L’auteur s’intéresse ensuite à l’aide financière aux familles : le Canada est classé parmi les pays qui dépensent le moins à ce chapitre, et où l’aide est surtout verticale, c’est-à-dire concentrée sur les familles pauvres. Henripin note par ailleurs que le Canada tient une place « plus qu’honorable en matière de santé et d’instruction publique » (p. 87). La moindre importance accordée aux coûts directs et alternatifs des enfants relèverait-elle d’un choix politique ? Avant de passer à des propositions précises, Henripin traite des principes qui devraient les inspirer. Ceux-ci sont fort intéressants, en particulier l’idée de baser l’impôt sur le niveau de vie plutôt que sur le revenu, ou, ce qui revient au même, d’exonérer d’impôt la partie du revenu personnel correspondant à …

Parties annexes