PrésentationCommunitas en variations libres[Notice]

  • Simon Saint-Onge et
  • Sabrina Tremblay-Huet

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  • Simon Saint-Onge
    Corédacteur en chef

  • Sabrina Tremblay-Huet
    Codirectrice du comité d’édition

Traiter le projet sous la forme de « variations libres » signifie que la façon de présenter le programme de Communitas, par exemple au moyen d’un télescopage conceptuel en deuxième partie, en est une parmi d’autres qui auraient pu être utilisées, et que la méthode privilégiée ne prétend en rien circonscrire dans ses détails les plus programmatiques l’initiative. L’ouverture à des conversations élargies constitue, d’autant plus, le fil conducteur du projet, ce qui inclut donc pour la discussion, ici, quelque chose comme un point de départ.

Les appels à l’ouverture du droit, comme objet autonome, ne sont ni nouveaux ni surprenants dans le paysage universitaire et plus largement dans la constellation des sciences humaines. Ces appels tonnent au moins depuis plus d’un siècle, notamment en réponse au légicentrisme et au positivisme, qui éclipsent ce qui, du droit, le droit doit à la société. Les appels veulent, à leur manière, libérer cet objet de la chasse gardée où se réfugient les juristes, afin de toucher à sa source le sociétal. L’idée serait de comprendre que le vitalisme du droit ne réside pas dans le formalisme, mais dans son expérience sensible, ce à quoi la revue Communitas ne peut qu’adhérer, et son premier numéro, le confirmer. Thématiser le premier numéro d’une nouvelle revue par une formule jouant de l’articulation quelque peu calcifiée entre « société » et « droit » pourrait toutefois donner tort à l’exigence d’ajouter notre média à ceux qui relaient les voix plurielles, mais aussi souvent consensuelles, tenant sur cette conjonction de coordination — ou des variantes qui ne trompent pas comme Law in Context. Pour le reconnaître, il suffirait de se référer au courant Law & Society (L&S), qui revêt aujourd’hui une aura de courant de pensée majoritaire (mainstream), tout en cultivant de nombreux émules à sa périphérie. Certes, cela se produit non pas au sein de l’enseignement du droit, qui profite d’un hermétisme s’expliquant généralement par la professionnalisation de la discipline, mais assurément dans la littérature qui interroge le droit. Nul doute que ce courant profite d’une aura multi-institutionnelle qui légitime une perméabilité aux plus affirmés vases clos épistémologiques que favorise la clôture entre les sciences. La description du mouvement par David M. Trubek ne peut que nous en convaincre : « The idea is that law is an object that can be studied by the social sciences. » L’idée partagée par ces initiatives qui font le pari de la conjonction du « droit » et de la « société » est de participer à une approche décentralisée du rôle du droit, ce qui se traduit en définitive par une vision holistique de l’environnement dans lequel le droit se produit, se maintient, se reproduit. Est-ce à dire qu’il faut convenir que le premier numéro de Communitas tombe alors sous les prétentions historiquement marquées par ce mouvement, ce dernier logeant le plus souvent à l’enseigne d’une critique de l’ontologie, de l’épistémologie et de la méthodologie des sciences juridiques ? Pour y répondre, encore devrait-on fixer sémantiquement et pragmatiquement le vocable « critique », qui ne s’impose pas moins que l’expression « droit et société » comme un label. Les remarques éclairantes de Susan S. Silbey et Austin Sarat offrent une piste de réponse : « [i]f there was a distinction between law and society and mainstream legal scholarship, it was not in the observation that law was not autonomous but in the degree of emphasis each placed upon different sides of the divide. If the law schools overestimated the determinacy of law, the law and society movement underestimated its consequences », une erreur corrigée, selon certains, par les Critical Legal Studies (CLS). En effet, l’une des différences majeures entre le courant L&S et les CLS est le projet apolitique qui définit les débuts officiels du courant L&S des années 60, penchant plutôt vers un souci de la conversation interdisciplinaire d’après G. Edward White, qui affirme que l’interdisciplinarité en matière de sciences sociales serait même prévalente dans les facultés élites américaines, ce qui relativise cette position d’extranéité par un lieu commun. Il serait hasardeux de qualifier notre projet de « critique …

Parties annexes