PrésentationCyberespace et anthropologie : Transmission des savoirs et des savoir-faire[Notice]

  • Joseph J. Lévy et
  • Évelyne Lasserre

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  • Joseph J. Lévy
    Département de sexologie, Faculté des sciences humaines , Université du Québec à Montréal, Case postale 8888, succ. Centre-ville, Montréal (Québec), H3C 3P8, Canada
    levy.joseph_josy@uqam.ca

  • Évelyne Lasserre
    Laboratoire d'Étude du Phénomène, Scientifique (LEPS –LIRDHIST), Université Claude Bernard Lyon 1, Campus de la DOUA, Bâtiment La Pagode, 43, boulevard du 11 Novembre 1918, 69622 Villeurbanne Cedex, France
    evelyne.lasserre@wanadoo.fr

Dans le champ des technologies de communication contemporaines, Internet constitue une innovation majeure. Mises en place à partir de la fin des années 1960, les interconnexions entre les ordinateurs ont, depuis, crû exponentiellement, tout comme le nombre des usagers de l’Internet, qui devrait atteindre en 2011 plus de 1,5 milliards de personnes (Le Journal du Net 2009). La multiplicité des outils ou de l’information disponible dans le cyberespace – qui représente des milliards de documents (textes, images, enregistrements sonores, etc.) – contribue également à en faire un espace dans lequel un ensemble vertigineux de données en constante évolution est accessible en tout temps. Internet constitue de ce fait un objet de recherche complexe qui interpelle à la fois les sciences informatiques, cognitives et sociales, et l’anthropologie en particulier. Dès le début des années 1990, Escobar (1994) proposait l’établissement d’un programme de recherche, celui de la « cyberanthropologie », qu’il définissait comme l’étude des répercussions des innovations liées, d’une part, aux révolutions informatiques et communicationnelles (dispositif de « technosocialité ») et, d’autre part, aux biotechnologies (dispositif de « biosocialité »). En ce qui concerne la première dimension qui nous intéresse ici, Escobar distinguait plusieurs champs de recherche : celui de la production et de l’emploi des nouvelles technologies de communication, en premier lieu ; celui d’Internet avec ses « communautés virtuelles » et ses « réseaux sociaux en ligne » dont l’étude permettrait de mieux comprendre le buissonnement de nouvelles cultures, en deuxième lieu. Un troisième champ de recherche couvrirait, quant à lui, les aspects de l’économie politique liée à l’accès à ces nouvelles technologies et à la façon dont elles réorganisent les relations entre les centres et les périphéries. Ces propositions ont ensuite été élargies par Hakken (1999) qui proposait de situer l’ethnographie du cyberespace dans un modèle écologique plus complexe inspiré de Bronfenbrenner pour en comprendre les différents paliers d’interaction, des macrosystèmes aux microsystèmes. Ces perspectives, sans être toujours reprises de façon aussi structurée, ont donné lieu, parallèlement, à de nombreuses recherches qui couvrent plusieurs angles, depuis l’étude de la construction culturelle des jeux en ligne jusqu’aux répercussions des usages dans le quotidien des internautes, comme le suggèrent les recensions bibliographiques. Dans ce vaste panorama hétérogène, à l’image de la diversité de l’univers d’Internet, la question des savoirs et des savoir-faire et de leur transmission dans le cyberespace n’a pas fait l’objet d’une réflexion thématique dans les revues d’anthropologie, une carence que ce numéro tente de combler partiellement en proposant des pistes de réflexion théorique et méthodologique, de même que des études empiriques menées dans des contextes socioculturels variés. L’article de Joseph J. Lévy et Évelyne Lasserre qui ouvre ce numéro met en relief les différentes positions théoriques à cet égard, à partir d’une reprise des travaux sur la place d’Internet dans la transmission des savoirs et des savoir-faire à travers les technologies de communication comme Internet. Les auteurs vantent la contribution d’Internet et du cyberespace, montrant combien il élargit l’accès aux ressources touchant le savoir dans ses différentes facettes et contribue à sa diffusion dans un espace globalisé, à l’image de la noosphère proposée par Teilhard de Chardin. Cette vision ne fait cependant pas l’unanimité et plusieurs chercheurs critiquent cette perspective utopique pour mettre en évidence les inégalités socioculturelles liées au fossé numérique, ainsi que les définitions du savoir proposées et leurs limites, de même que les effets de l’utilisation de l’Internet sur l’apparition d’une culture hostile au savoir et tournée vers le divertissement. Les travaux empiriques dans le cyberespace montrent, quant à eux, les différentes formes de savoirs (experts, populaires et expérientiels) véhiculés et la diversité …

Parties annexes