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Jean Morency, Hélène Destrempes, Denise Merkle et Martin Pâquet (dir.), Des cultures en contact. Visions de l’Amérique du Nord francophone. Québec, Éditions Nota Bene, 2005, 551 p., réf.[Notice]

  • Guillaume Teasdale

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  • Guillaume Teasdale
    Department of History
    Michigan State University
    301 Morrill Hall
    East Lansing, MI 48824
    Etats-Unis

Saisir la dynamique des cultures francophones du continent nord-américain dans le temps et l’espace, voilà qui n’est pas une mince tâche! Des cultures en contact constitue un effort notable pour mieux « rendre compte du phénomène interculturel dans les différentes communautés francophones de l’Amérique du Nord » (p. 6-7). Et comme les directeurs de cet imposant recueil le mentionnent en introduction, il serait erroné de croire que ces collectivités se sont développées isolées les unes des autres et de manière autarcique par rapport aux cultures avoisinantes. Regroupant 31 textes, ce livre est divisé en six parties. D’abord, trois textes se succèdent sur la notion d’identité. On y démontre notamment que diversité culturelle et identité ne sont pas nécessairement incompatibles, qu’elles peuvent même être intimement liées. Ainsi, par exemple, Paul Dubé explique que les jeunes Franco-Manitobains, tout en étant conscients de leur appartenance à une communauté minoritaire, n’en sont pas moins ouverts sur le reste du monde pour forger leur propre identité : « […] la non-mémoire et la déterritorialisation de l’identité supposent que l’imaginaire des jeunes a effacé les frontières et se nourrit culturellement, faute de verticalité, d’une horizontalité large et vaste […] » (p. 38). La seconde partie contient quant à elle cinq textes, dont chacun se concentre sur un aspect de l’interculturalité canadienne-française dans l’histoire, des premières rencontres avec les Amérindiens durant le XVIIe siècle jusqu’à la Révolution tranquille. Par la suite, cinq auteurs analysent différentes particularités de la langue française en Amérique du Nord. Le métissage linguistique – en l’occurrence le recours toujours plus fréquent au vocabulaire anglais – complexifie les données, car l’on peut constater la « non-coïncidence des frontières linguistiques et des frontières culturelles », même si un « changement de langue n’entraîne pas toujours et partout un changement de culture » (p. 201-202). Dans la quatrième partie, intitulée « Amériques », différentes oeuvres littéraires, artistiques et cinématographiques sont analysées. Ces études permettent de prendre conscience qu’au-delà du cléricalisme conservateur (et pourvu de tendances narcissiques) de la période post-rébellion de 1837-1838, plusieurs « intellectuels ont été amenés à s’inscrire en faux devant un discours dominant qui a longtemps fait de l’anti-américanisme l’une de ses pierres d’assise » (p. 300). Dans les années 1930, un artiste comme Jean-Paul Lemieux refusait de « considérer la culture française comme la matrice idéale et ses avant-gardes, comme les seuls modèles à suivre » (p. 315). Bref, le Canada français des XIXe et XXe siècles n’était peut-être pas cette terre tournée uniquement vers le passé, vers la préservation des traits culturels d’outre-mer. Les cinquième et sixième parties portent respectivement sur le théâtre et la littérature. De toute évidence, l’hybridité culturelle caractérise la plupart des oeuvres étudiées, qu’elle fût souhaitée ou non par leurs auteurs. La principale force de ce livre réside probablement dans l’ensemble des analyses linguistiques et littéraires minutieuses – incluant des moyens d’expression comme le cinéma et le théâtre – qu’il regroupe. Ces analyses permettent de saisir les différences grammaticales que l’on trouve d’une communauté francophone minoritaire à l’autre ; le français écrit et parlé en Acadie n’est pas exactement le même que celui des Franco-Ontariens. Par surcroît, elles illustrent toutes le fait que la peur de la disparition culturelle agit comme source d’énergie (renouvelable). Par exemple, « […] le théâtre est pour les francophones un lieu privilégié d’affirmation et de résistance culturelles. Cette fonction identitaire de la parole théâtrale n’a pas d’équivalent au Canada anglais, où on ressent moins le besoin d’exercer sa langue haut et fort pour en proclamer l’existence » (p. 411). Mais rien n’est jamais gagné pour ces collectivités minoritaires et …

Parties annexes