Comptes rendus

Michèle Vatz Laaroussi, Le familial au coeur de l’immigration. Les stratégies de citoyenneté des familles immigrantes au Québec et en France. Paris, L’Harmattan, Collection Espaces interculturels, 2001, 259 p., ann., réf., bibliogr.[Notice]

  • Margot Tremblay

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  • Margot Tremblay
    Régie régionale de la santé et des services sociaux de Québec
    525, boulevard Hamel Est
    Québec (Québec) G1M 2S8
    Canada

Cet ouvrage aborde l’immigration sous un angle rarement exploré par les chercheurs, les praticiens et les décideurs politiques, celui des familles immigrantes, redonnant ainsi la légitimité au groupe familial comme espace, soutien et tremplin aux changements traversés lors de la trajectoire migratoire et tout au long du processus d’adaptation. En effet, ici, la famille est présentée comme une entité en soi à prendre en compte dans les orientations, les structures et les interventions visant l’insertion des immigrants dans la société d’accueil. Privilégiant l’angle familial, l’auteure porte un regard nouveau sur les immigrants en France et au Québec, d’une part, sur leurs modes d’adaptation, d’insertion et de citoyenneté et d’autre part, sur la diversité et la richesse des ressources et potentiels en jeu. De plus, l’auteure invite le lecteur, qu’il soit travailleur social, gestionnaire d’organismes ou décideurs d’institutions responsables de l’accueil et de l’accompagnement des immigrants, tant jeunes qu’adultes, à s’interroger sur la prise en compte de la dimension familiale dans l’intervention sociale et sur l’exploration de pistes originales et pertinentes issues de l’analyse des stratégies familiales de citoyenneté brillamment décrites dans l’ouvrage. Le sujet traité se situe au coeur de l’immigration, des histoires de vie, de l’interculturel et il se trouve divisé en cinq chapitres. Dans la première partie, le livre rend compte des différences et des ressemblances entre deux pays, la France et le Québec, en matière d’immigration, de politiques d’intégration et des modes d’intervention sociale mis en oeuvre pour accompagner les immigrants à travers leur processus d’insertion dans la société d’accueil. Dans un deuxième temps, l’auteure fait place au discours des familles grâce à des récits extraits de rencontres avec six familles d’origines diverses installées en France et au Québec, révélant au lecteur des trajectoires migratoires et des dynamiques d’insertion qui s’inscrivent dans des stratégies de citoyenneté au service d’un « nous familial ». Pour ce faire, la chercheure sollicite tout d’abord la sociologie en se référant aux typologies et modèles construits (concepts de changement, de transmission) et les analyses de rapports de genres et de générations. Par la suite, les perspectives de la psychosociologie, de l’histoire et de l’ethnologie aident l’auteure à illustrer l’importance des histoires familiales dans la réalisation des stratégies d’insertion et de citoyenneté. L’analyse des histoires couvrant des groupes aux origines ethniques et aux appartenances religieuses variées ouvre sur les divers sens pris par la famille dans la migration et permet à l’auteure de construire les différentes stratégies familiales de changement et de citoyenneté par le biais de leurs composantes dynamiques : les rapports au privé et au public, la création de réseaux, l’interprétation des histoires familiales et collectives, et les trajectoires individuelles dans un parcours familial de migration. Enfin, à l’aide de l’analyse de ces divers modèles de stratégies familiales de citoyenneté, l’auteure insiste sur l’importance relative des contextes d’accueil en différenciant les stratégies appliquées en France et au Québec, et elle propose des pistes d’intervention aux travailleurs sociaux, organismes et institutions travaillant avec les populations immigrantes, en fonction des contextes juridiques, légaux et sociaux dans les deux sociétés. Parmi les apports de cet ouvrage, soulignons l’invitation qui est faite aux praticiens de l’interculturel à adopter un regard critique et dynamique qui prenne en compte le savoir et le potentiel des personnes immigrantes, au lieu de « problématiser » la situation vécue. Ce nouveau regard aide à ouvrir à la diversité des discours, aux stratégies élaborées et à la complexité des situations. Il permet également de s’éloigner des approches culturalistes de l’immigration et de voir les familles immigrantes comme médiatrices de changement. De plus, il offre la possibilité d’explorer des pistes originales et …