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Analyse de l’expression des gènes dans le néphron de l’hommeAnalysis of gene expression in the human nephron[Record]

  • Christian de Rouffignac

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  • Christian de Rouffignac
    Département de Biologie Joliot-Curie,
    Centre d’Études de Saclay,
    91191 Gif-sur-Yvette, France.
    rouffignac@dsvidf.cea.fr

Depuis quelques années, les laboratoires disposent de méthodes d’analyse globale des gènes et de leurs produits (ARN messagers, protéines). Appliquées à des organismes ou des organes dans leur globalité, ces méthodes procurent un foisonnement de données qui bouleversent la vision que l’on avait jusqu’ici des processus biologiques. Il faut d’ailleurs reconnaître que la lecture de ces « catalogues » n’est pas toujours explicite. Les documents restent encore peu accessibles au profane et sont, même pour les spécialistes, parfois difficiles à interpréter, ne serait-ce qu’en raison de l’hétérogénéité cellulaire du matériel examiné. Un travail récent [1], dépassant ces difficultés, illustre la puissance de ces nouvelles démarches et leurs vertus exploratrices. Il met en effet en oeuvre, à l’échelle cellulaire, un outil applicable à l’étude des fonctions rénales chez l’homme. En collaboration avec les chirurgiens de l’hôpital Necker et le Centre national de séquençage d’Évry, un travail coordonné par J.M. Elalouf au CEA-Saclay a permis d’établir une cartographie quantitative à haute résolution des transcrits du rein humain, en ayant recours à la méthode SAGE (serial analysis of gene expression) appliquée à des segments de néphrons obtenus par microdissection. La méthode SAGE mesure, en termes quantitatifs, l’expression de tous les gènes, connus et inconnus. Elle repose sur le séquençage d‘un court fragment (une « étiquette », ou tag) de chacun des ADNc obtenus à partir des transcrits issus du tissu d’origine. Autrement dit, pour un ADNc donné, le nombre d’étiquettes séquencées est directement proportionnel au nombre de copies d’ARN exprimées par le gène correspondant. Pour conduire cette analyse à l’échelle cellulaire, la méthode a été modifiée à Saclay [2] pour lui donner la sensibilité requise et la rendre compatible avec l’analyse de segments de néphrons bien individualisés, prélevés sur des fragments de tissu rénal provenant d’interventions chirurgicales [3]. Les fonctions vitales du rein résultent d‘un processus d’ultrafiltration du sang par les glomérules, puis d’une succession de processus de transport qui modifient la composition du filtrat au cours de sa progression dans les structures tubulaires du néphron. Dans ce travail [1], le glomérule et sept segments tubulaires différents ont été explorés (Figure 1). Quatre des sept segments ne comportent qu’un seul type cellulaire, les trois autres n’en comptant que deux ou trois. Au total, plus de 400 000 étiquettes ont été analysées, le nombre variant de 44 000 à 67 000 pour chacune des structures explorées. Les auteurs mettent notamment l’accent sur les gènes préférentiellement exprimés dans chacune des structures. Parmi ceux-ci, on en trouve plusieurs dizaines dont la ou les mutations sont associées à des maladies humaines. Les informations contenues dans l’article publié ne représentent cependant qu’une infime partie de ce qui peut être extrait de ce travail. L’ensemble des résultats est librement accessible sur le web [4]. La pertinence de la méthodologie est attestée par le fait que l’on retrouve, aux endroits attendus, les gènes dont l’expression met en place les marqueurs distinctifs du segment concerné. Dans certains cas, ces marqueurs ne sont exprimés que dans une seule structure. Par exemple, on note que les gènes AQP1, SLC12A3 et AQP3, qui codent respectivement pour un canal hydrique apical et basolatéral, un cotransporteur NaCl sensible au thiazide et une aquaporine basolatérale, ne sont exprimés, exclusivement ou presque exclusivement, que dans le tubule proximal, le tubule distal et les canaux collecteurs, c’est-à-dire dans les structures où ces molécules ont été déjà répertoriées le long du néphron, chez l’animal. Les auteurs ont classé les gènes en fonction de leur niveau d’expression dans chaque structure. Ils ont retenu le terme d’ « expression différentielle » pour des variations importantes, lorsque l’abondance …

Appendices