PrésentationDésir d’enfant et désir de transmission : quelles influences sur la formation des familles ?[Record]

  • Laurence Charton and
  • Joseph J. Lévy

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  • Laurence Charton
    Centre Urbanisation, Culture, Société, Institut national de la recherche scientifique, 385, rue Sherbrooke Est, Montréal (Québec) H2X 1E3, Canada
    Canada laurence.charton@ucs.inrs.ca

  • Joseph J. Lévy
    Département de sexologie, Université du Québec à Montréal, Case postale 8888, succursale Centre-ville, Montréal (Québec) H3C 3P8, Canada
    levy.joseph_josy@uqam.ca

À la jonction du biologique, du psychologique et du socioculturel, le désir d’enfant fait l’objet de nombreuses théories et travaux empiriques. Notion complexe, sa définition, son origine et ses motivations varient selon la discipline qui l’étudie. D’un point de vue biologique, le désir d’enfant s’inscrirait dans les structures même du vivant qui « consiste dans la possibilité de se reproduire [en assurant] la conservation, la perpétuation de caractères héréditaires : par là même, l’individu évite son entière disparition, c’est-à-dire la mort » (Dagognet 2003 : 4). Dans cette perspective, le désir d’enfant n’est pas un concept élaboré, il se présente en évidence et n’appelle pas à être défini plus précisément. Le désir d’enfant n’est pas non plus une dimension directement soulevée dans les théories évolutionnistes (Darwin 1876 ; Kohler et al. 1999 ; Picq et al. 2003). Ces théories placent la reproduction sexuée au coeur des processus essentiels du renouvellement des générations et de leur évolution par le brassage génétique. Les stratégies de reproduction des mammifères, incluant les primates, obéissent à des contraintes écologiques, saisonnières et hormonales ainsi qu’à celles liées à un investissement parental différentiel (Trivers et Willard 1973) du fait de l’apport plus important des femelles à la gestation, aux soins périnataux et à l’alimentation des petits. La répartition entre descendants mâles et femelles (sexe-ratio) serait globalement équilibrée, ce qui refléterait la présence d’une stratégie évolutive stable. Des hypothèses ont toutefois été avancées sur la variation du sexe des petits en fonction de caractéristiques liées à la santé et au statut de dominance de la mère. Dans une situation favorable pour ces deux critères, ce serait la reproduction des mâles qui serait favorisée, comme le rapportent des données sur plusieurs espèces, incluant des primates. Cette corrélation n’est cependant pas absolue et de nombreuses exceptions sont rapportées (Barash 1982 ; Hewison et Gaillard 1999 ; Brown et Silk 2002 ; James 2006), suggérant un modèle trop simple et ne tenant pas compte de la complexité des systèmes sociaux et des modulations dans les relations mère-enfant (Brown 2001). Quant au nombre de petits, deux stratégies ont été mises en évidence : la stratégie R où c’est la quantité de petits qui est privilégiée, et la stratégie K, dans laquelle ce nombre serait au contraire plus limité en raison d’un investissement parental plus significatif. C’est le cas chez les primates non humains où les modalités de maternage sont complexes en raison du temps nécessaire à la maturation des petits. Ce temps, variable selon les espèces, peut conduire à une naissance unique ou à un intervalle entre les naissances pouvant atteindre plusieurs années (Hill et al. 2000). L’analyse des stratégies de reproduction selon les perspectives évolutionnistes met aussi en évidence la présence de formes d’infanticide parmi les mammifères et les primates comme mode de modification du sexe-ratio (Hausfater et Hrdy 1984). Il peut être perpétré soit par des mâles (augmentant ainsi leur succès reproductif en intervenant sur le cycle reproductif des femelles), soit par des femelles (repoussant l’investissement parental dans une progéniture ultérieure en cas de stress environnemental important), soit par siblicide (Hayssen 1984). Ce comportement, rapporté chez plusieurs espèces de primates, renverrait à une stratégie pour éliminer la progéniture d’un mâle par un autre mâle, ou à la présence d’une aberration comportementale dans un contexte social marqué par de trop fortes densités démographiques (Hausfater 1984 ; Wachter et Bulatao 2003). Ces hypothèses font toutefois l’objet de critiques qui continuent d’alimenter les polémiques plus récentes quant aux fonctions de l’infanticide (Rees 2009). La psychologie évolutionniste (Barrett et al. 2002) reprend aussi certaines perspectives évolutionnistes en mettant notamment en évidence les …

Appendices