FR :
Chez Foucault le pouvoir est d'abord pensé comme déploiement de la visibilité et comme inscription des corps. On voit dans une première partie comment les figures de l'autorité disparaissent, laissant place à un espace de dispersion où s'estompe la figure de l'homme comme effet passager d'une discontinuité entre le savoir et le pouvoir. Si le pouvoir est invisible lorsqu'il se confond avec l'adéquation à soi du savoir, c'est dans un effet de résistance que se constituent nos expériences qui sont à la fois événements et significations : dans une deuxième partie nous reprenons la question du pouvoir à partir de l'impuissance du sujet à fonder son expérience, la perte de l'intériorité, la difficulté de la contestation, la perte de la profondeur, la perte du corps comme « propre » qui est aussi perte de l'excellence inhérente à tout être humain et du sexe comme affirmation de la différence (ou d'une identité). Nous croyons toujours opposer une nature intacte au déploiement du pouvoir. Nous examinons comment nous croyons trouver cette nature dans ce que nous caractérisons comme sujet de la contestation, peuple-substrat, corps-rebelle ou sexe-nature. Mais - nous le voyons dans la troisième partie - ces natures sont toujours « informées » par le pouvoir. C'est pourquoi, dans ce qui oppose une résistance au pouvoir, tels les expériences de la contestation sociale, de la sexualité et aussi du redoublement et de la transgression dans le langage, on retrouve les mêmes figures de déploiement qui caractérisent un pouvoir qui se redouble en lui-même et se dissémine dès qu'il rencontre des résistances, pour informer celles-ci. Car chez Foucault, l'expérience est une structure tripartite qui met en relation savoir, pouvoir et subjectivité.
EN :
In Foucault's first writings, power was the spreading-out of visibility and an inscription of bodies. In the first part of this paper we examine how the figures of authority slowly faded, as power became very dispersed and diffused, only to give a last glimpse of the figure of man, a mere discontinuity between knowledge and power. If power remains invisible when it merges completely with a self-sufficient knowledge, our experiences take shape as effects of resistance to power. This is why experiences are simultaneously events and meanings : in a second part we reconsider the query on power in the light of Foucault's commentary on the difficulty of the subject to give foundation to his experiences, the loss of inferiority and profoundness, the challenge of true subversion, the loss of the body as one's "own", the loss of belief in a core of goodness in all human beings and the loss of sex as being decisive in recognition of a difference (or an identity). We believe we ultimately can oppose an untouched and profound quality in human nature to the dispersion of power. We examine the different forms of such a belief in what we caractérise as the subject of subversion, the people as substratum, the body as rebel and sex as nature. But - as we can see in the third part - these natures are always "informed" by power. This is why we can find in most forms of resistance to power, as in the experiences of social subversion, sexuality, redoubling and transgression in language, the same forms of scattering which are specific to power itself, to a power which redoubles itself and in itself and is disseminated wherever he meets some resistance, to inform the latter. As with Foucault, experience is a tripartite structure which relates knowledge, power and subjectivity.