Volume 41, numéro 2 (122), hiver 2016 La révolution littéraire des années 1940 au Québec Sous la direction de Marie-Frédérique Desbiens et Denis Saint-Jacques
Sommaire (16 articles)
Dossier
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Autres temps, autres espaces : la révolution littéraire des années 1940 au Québec
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Une littérature sous influence : la guerre et les médias
Denis Saint-Jacques
p. 11–20
RésuméFR :
Dans cet article, l’auteur s’attache à éclairer les conditions de production et de distribution déterminant le profond changement qui affecte le champ de la fiction littéraire au Québec durant les années de la Deuxième Guerre mondiale, alors que la littérature légitime ne semble que peu portée à thématiser explicitement la conjoncture. Cet examen touche brièvement la poésie et le théâtre, porte principalement sur les romans ou récits brefs publiés en volumes, mais également sur ceux publiés en périodiques et en fascicules, ainsi que sur ceux diffusés à la radio. Le champ mis en cause comporte donc le circuit restreint et celui de grande diffusion. L’enquête permet de voir que, si la littérature légitime se réoriente de façon décisive vers des sujets plus « urbains » et une esthétique nouvelle, « l’introspection », la fiction radiophonique tant narrative que lyrique exploite opportunément les thèmes aussi bien militaires que civils fournis par la conjoncture immédiate. Elle permet de comprendre que, pour une bonne part, ces évolutions se trouvent fortement déterminées par les nouvelles conditions de diffusion qui s’organisent à cette époque et que la guerre, quand elle apparaît comme sujet explicite de représentation, doit cette visibilité à des demandes expresses.
EN :
In this article, the author seeks to shed light on the conditions of production and distribution that determined the profound change affecting the field of literary fiction in Quebec during the years of the Second World War, at a time when legitimate literature seemed to have little inclination to take the situation as an explicit theme. This analysis touches briefly on poetry and drama while focusing chiefly on novels or brief narratives published in volumes, periodicals or pamphlets, as well as narratives broadcast over the radio. The field under study thus includes both a restricted circuit and mass dissemination. Investigation shows that while legitimate literature reoriented itself decisively toward more “urban” topics and a new aesthetic, “introspection”—radio fiction both narrative and lyrical—took timely advantage of military and civil themes arising from the immediate context. This enables us to understand that to a large degree, such changes were highly determined by the new conditions of dissemination emerging during this period, and that the war, when it appeared as an explicit object of representation, owed this visibility to explicit requests.
ES :
En este artículo, el autor trata de precisar las condiciones de producción y distribución que determinan el profundo cambio que afectó el área de la ficción literaria en Quebec durante los años de la Segunda Guerra Mundial, mientras que la literatura legítima parece poco propensa a atribuir explícitamente a la coyuntura el papel de tema. Este estudio aborda brevemente la poesía y el teatro, y trata principalmente de las novelas o los relatos breves publicados en volúmenes, pero también de aquellos que se publican en periódicos y en fascículos, así como de los que se difunden en la radio. Por lo tanto, el campo que se considera incluye el circuito restringido y el de gran difusión. La encuesta permite ver que, si bien la literatura legítima se reorientaba de forma decisiva hacia temas más ‘urbanos’ y una nueva estética, la ‘introspección’, la ficción radiofónica, ya fuera narrativa o lírica, explotaba oportunamente tanto los temas militares como civiles que ofrecía la coyuntura inmediata. Permite comprender que, en gran parte, estas evoluciones están determinadas sobre todo por las nuevas condiciones de difusión que se organizaban en aquella época y que la guerra, cuando aparecía como tema explícito de representación, debía esta visibilidad a solicitudes expresas.
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L’évolution du roman urbain (1934-1945) : du roman bourgeois au roman du peuple
David Décarie
p. 21–33
RésuméFR :
Dans les manuels d’histoire littéraire québécois, le roman urbain se résume souvent à deux oeuvres : Au pied de la pente douce (1944) de Roger Lemelin et Bonheur d’occasion (1945) de Gabrielle Roy. Cet article jette un regard sur la production romanesque des dix années qui précèdent ces oeuvres, et l’étude de cette période révèle que l’action de très nombreux romans a lieu en ville. Apparaissant sous la plume d’écrivains souvent prolifiques (Adrienne Maillet, Geneviève de La Tour Fondue, etc.), la ville se décline dans des romans aux thématiques et aux styles très variés. Un fil conducteur apparaît toutefois dans ceux-ci : la bourgeoisie. La majorité des romans urbains peignent en effet le portrait de cette classe sociale et cherchent à traduire ses aspirations, ses goûts, sa langue. L’urbanité de ces romans découle en bonne partie des milieux qu’ils mettent en scène : les romanciers décrivent les lieux — bien souvent les quartiers huppés — habités par la bourgeoisie. En examinant l’arrière-plan des romans urbains bourgeois, il devient possible de mieux comprendre la spécificité des oeuvres de Lemelin et de Roy, qui décrivent surtout les quartiers Saint-Sauveur et Saint-Henri. Leur originalité ne réside pas seulement dans leur urbanité, mais également dans leur intérêt pour la classe populaire, très peu mise en scène dans le roman québécois jusqu’alors.
EN :
In Quebec literary history textbooks, the urban novel is often reduced to two works: Au pied de la pente douce (1944) by Roger Lemelin and Bonheur d’occasion (1945) by Gabrielle Roy. This article looks at the novelistic production of the ten years preceding these two novels. Study of this period shows that the action of a very large number of novels is set in the city. Appearing in the works of often prolific writers (Adrienne Maillet, Geneviève de La Tour Fondue, etc.), the city is portrayed in novels of great thematic and stylistic diversity. However, these novels do have one thing in common: the bourgeoisie. The majority of the urban novels depict this social class and seek to express its aspirations, tastes, and language. The novels’ urbanity is largely derived from the social environments they present: the novelists describe the places, which are often wealthy neighbourhoods, where the bourgeoisie lives. Looking at the background of the bourgeois urban novels helps us understand the specificity of the works of Lemelin and Roy, who chiefly describe the neighbourhoods of Saint-Sauveur and Saint-Henri. Their originality resides not only in their urbanity, but in their interest in the popular class, which had very rarely been represented in Quebec novels until that point.
ES :
En los manuales de historia literaria quebequense, la novela urbana se limita con frecuencia a dos obras: Au pied de la pente douce (A los pies de la pendiente suave), de Roger Lemelin (1944), y Bonheur d’occasion (Felicidad ocasional), de Gabrielle Roy (1945). Este artículo echa una mirada a la producción novelesca de los diez años que precedieron a estas obras, y el estudio de dicho periodo revela que la acción de numerosas novelas transcurre en la ciudad. Bajo la pluma de escritores, muchos de los cuales son prolíficos (Adrienne Maillet, Geneviève de La Tour Fondue, etc.), aparece la ciudad en novelas con temáticas y estilos muy variados. No obstante, hay un hilo conductor que se manifiesta en ellos: la burguesía. En efecto, la mayor parte de las novelas urbanas retratan esta clase social e intentan interpretar sus aspiraciones, sus gustos, su idioma. La urbanidad de estas novelas se deriva en buena parte de los medios que escenifican: los novelistas describen los lugares –con frecuencia los distritos de lujo– donde vive la burguesía. Al examinar el segundo plano de las novelas urbanas burguesas, se puede entender mejor la especificidad de las obras de Lemelin y Roy, que describen sobre todo los distritos de Saint-Sauveur y Saint-Henri. Su originalidad no estriba solo en su urbanidad, sino también en su interés por la clase popular, muy poco escenificada hasta entonces en la novela quebequense.
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Vers une reconstitution de la vie culturelle des femmes à Montréal dans les années 1940
Chantal Savoie
p. 35–44
RésuméFR :
Dans la perspective de ce dossier, qui vise à saisir les contours de la rupture littéraire de la décennie 1940 et qui réinterroge les « classiques », mais aussi et peut-être surtout les manifestations trop souvent considérées comme illégitimes par la critique, cet article s’intéresse à la culture féminine qui se déploie alors dans l’espace urbain. Se basant sur des dépouillements de la grande presse de l’époque et sur l’interprétation de nouvelles données statistiques et géolocalisées, l’analyse cherche à cartographier les trajectoires, les réseaux et la production des femmes de cette génération, hors des institutions et en marge du champ restreint. Elle permet ainsi de jeter un regard neuf sur la constitution de l’offre et des publics populaires dans la première moitié du xxe siècle, et pose les bases d’une réflexion sur l’émergence d’une culture moyenne.
EN :
In the context of this issue that seeks to understand the contours of the literary break of the 1940s, asking new questions of the “classics” but also, and perhaps even more importantly, examining manifestations too often viewed by critics as illegitimate, this article focuses on the women’s culture that was deployed in urban space during this period. Based on examination of major newspapers of the time and the interpretation of new statistical and geolocalized data, the analysis seeks to map the trajectories, networks and production of the women of this generation, outside of institutions and restricted fields. It enables us to take a new look at the way the popular offer and the popular audience were formed in the first half of the twentieth century, and lays the ground for thinking about the emergence of a mid-level culture.
ES :
En la perspectiva de este tema, que pretende captar los contornos de la ruptura literaria de la década de 1940 y que vuelve a consultar a los ‘clásicos’, pero también, y quizás sobre todo, las manifestaciones consideradas con excesiva frecuencia como ilegítimas por la crítica, este artículo se interesa por la cultura femenina que se desplegó entonces en el espacio urbano. Basándose en los análisis de la gran prensa de la época y la interpretación de nuevos datos estadísticos geolocalizados, este estudio trata de cartografiar las trayectorias, las redes y la producción de las mujeres de aquella generación, fuera de las instituciones y al margen del campo restringido. Así pues, permite echar una mirada nueva sobre la constitución de la oferta y los públicos populares durante la primera mitad del siglo XX, y establece las bases de una reflexión sobre el nacimiento de una cultura media.
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Les récits de voyage des années 1940 : vers « l’exceptionnelle occasion d’un réveil »
Pierre Rajotte
p. 45–55
RésuméFR :
Au cours des années 1940, la pratique du récit de voyage se renouvelle en accordant plus d’importance au regard personnel des auteurs et en préconisant une plus grande ouverture sur le monde. D’une part, les auteurs abandonnent peu à peu une approche essentiellement descriptive qui se limite à valider le discours et le savoir culturel convenus au sujet des lieux visités. Même les auteurs qui parcourent le Canada afin de faire la promotion d’une forme de tourisme intérieur — ou de « tourisme national », pour reprendre l’expression d’Édouard Montpetit (1940) — tentent de rapporter leur voyage d’une manière plus personnalisée. D’autre part, avec la guerre, la rhétorique essentiellement ethnocentrique et nationaliste qui caractérisait auparavant les récits de voyage à l’étranger laisse peu à peu place à plus de nuance et d’ouverture à l’égard de l’altérité des divers pays visités. À la limite, un discours anticolonialiste commence à poindre dans certains écrits. Ces modifications dans le discours et dans la façon de le diffuser, notamment par la radio, susciteront bientôt un intérêt nouveau pour la pratique du récit de voyage. À la fin des années 1940 et au début des années 1950, des écrivains comme Jacques Hébert (auteur de la série Aventures autour du monde, huit récits publiés de 1948 à 1953) et Alain Grandbois (à l’origine de l’émission radiophonique hebdomadaire « Visages du monde » de 1950 à 1952) s’emploieront à tenter de relire le monde en le parcourant. De plus en plus, les écrivains voyageurs partiront en quête d’inconnu, de dépaysement et de différence, et c’est à l’étude de cette approche que se consacre cet article.
EN :
During the 1940s, the practice of travel writing was renewed, with a greater emphasis on the author’s personal point of view and a desire to demonstrate greater openness to the world. On the one hand, authors gradually abandoned an essentially descriptive approach that was limited to validating conventional discourse and knowledge in relation to the places they visited. Even authors travelling within Canada to promote a form of domestic tourism—or “national tourism”, to use Édouard Montpetit’s expression (1940)—tried to report on their travels in a more personal way. On the other hand, during the war, the essentially ethnocentric and nationalist rhetoric that had previously characterized narratives of travel abroad gradually gave way to greater nuance and openness to the alterity of the countries that were visited, and an anticolonialist discourse began to emerge in some writings. These changes in discourse and in how it was disseminated, particularly over the radio, were soon to foster a new interest in the practice of travel writing. In the late 1940s and early 1950s, writers such as Jacques Hébert (author of Aventures autour du monde, an eight-part series published from 1948 to 1953) and Alain Grandbois (who initiated the weekly radio program “Visages du monde” from 1950 to 1952) sought to reinterpret the world through their travels. More and more often, travelling writers set off in search of what was unknown and different, attempting to leave their usual setting behind. The article studies this approach.
ES :
Durante los años 1940, la práctica del relato de viaje se renueva al otorgar más importancia a la mirada personal de los autores y preconizar una mayor apertura al mundo. Por una parte, los autores abandonan paulatinamente un enfoque esencialmente descriptivo que se limita a validar el discurso y el saber cultural acordados con respecto a los lugares visitados. Incluso los autores que recorren Canadá con el fin de realizar la promoción de une forma de turismo interno –o de ‘turismo nacional’, para recuperar la expresión de Édouard Montpetit (1940)–, procuran contar su viaje de una manera más personalizada. Por otro lado, con la guerra, la retórica esencialmente etnocéntrica y nacionalista que caracterizaba anteriormente los relatos de viaje en el extranjero permite poco a poco más matiz y apertura a la otredad de los diversos países visitados. En el límite, comienza a despuntar un discurso anticolonialista en algunos escritos. Estas modificaciones en el discurso y en la forma de difundirlo, especialmente en la radio, no tardarían a suscitar un interés nuevo por la práctica del relato de viaje. A finales de los años 1940 y principios de los años 1950, unos escritores como Jacques Hébert (autor de la serie Aventures autour du monde –Aventuras alrededor del mundo– ocho relatos publicados entre 1948 y 1953) y Alain Grandbois (en el origen de la emisión radiofónica semanal « Visages du monde » –Rostros del mundo– de 1950 a 1952) se dedicaron a tratar de presentar una nueva visión del mundo recorriéndolo. Cada vez más, los escritores viajeros salieron a la búsqueda de lo desconocido, la desconexión y lo diferente, y este artículo se dedica al estudio de este enfoque.
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La révolution du temps au théâtre
Lucie Robert
p. 57–66
RésuméFR :
Cet article vise à recadrer ce que nous savons déjà autour de la question du temps théâtral à partir du renouvellement apporté dans la pratique par les troupes apparues durant les années 1930-1940 à Montréal : L’Arcade, L’Équipe et Les Compagnons de Saint-Laurent. La question du temps est ici considérée selon plusieurs axes (temps de la répétition, temps de la représentation, temps de la fiction), comme la relation au temps humain dans son ensemble (temps de la vie, temps de l’histoire comme de la mémoire, temps de la rentabilité économique et de la réalisation de la valeur sur le marché). Après un rappel de la situation qui a prévalu depuis le début du siècle sur les scènes montréalaises, l’article retrace l’apparition du « Petit théâtre » et l’action dissolvante de la Crise sur le théâtre commercial, mais aussi la relative stabilisation apportée par l’avènement de la radio. Il fait voir comment la « saison » dramatique et les répétitions transforment profondément la tension entre le temps du travail salarié et le temps du travail artistique des « metteurs en scène » comme des acteurs. Le temps plus important imparti à la préparation d’un spectacle permet également de développer l’analyse dramaturgique et l’élaboration des personnages, qui deviennent plus originaux et authentiques. Le répertoire choisi détermine une confrontation entre le temps historique et un temps indéfini, proche de l’éternité et, par conséquent, une transformation dans l’expérience du temps humain. Enfin, la recherche de modernité, qui est contrainte à l’innovation et à la création, apparaît comme une esthétique de rupture. La rupture avec le passé est nette dans les projets des Compagnons et de l’Équipe, axés sur l’avenir, mais on doit noter aussi la rupture avec le présent des contraintes immédiates de la vie courante.
EN :
This article seeks to reframe what we already know about time on stage on the basis of the renewal of practice brought about by troupes emerging in Montreal in the 1930s and 1940s: L’Arcade, L’Équipe and Les Compagnons de Saint-Laurent. Several aspects of time are considered here (rehearsal time, performance time, fiction time), and are viewed in relation to human time as a whole (time of life, time of history and memory, time of economic profitability and realization of value in the market). Having outlined the situation that had prevailed since the beginning of the century on Montreal stages, the article describes the emergence of the “Petit théâtre” and the dissolving action of the Depression on the commercial theatre, but also the relative stabilization brought about by the advent of radio. It shows that for both “directors” and actors, the drama “season” and rehearsals deeply transformed the tension between salaried work time and artistic work time. The greater time allotted to preparing a stage production also made it possible to take analysis of the drama further and develop characters, who became more original and more authentic. The chosen repertory led to a confrontation between historical time and an indefinite time, close to eternity, leading to a transformation in the experience of human time. And finally, the search for modernity, which is constrained to innovate and create, appears as an aesthetics of breaking away. The break with the past is clear in the projects of Les Compagnons and L’Équipe, oriented to the future, but we must also note the break with the present in that it embodies the immediate constraints of everyday life.
ES :
Este artículo apunta a situar de nuevo lo que ya sabemos en torno a la cuestión del tiempo teatral a partir de la renovación que aportaron, en la práctica, las compañías que surgieron en Montreal durante los años 1930-1940: L’Arcade, L’Équipe y Les Compagnons de Saint-Laurent. En este caso, se considera la cuestión del tiempo desde varios ejes (tiempo del ensayo, tiempo de la función, tiempo de la ficción), como la relación en el tiempo humano en su conjunto (tiempo de la vida, tiempo de la historia y de la memoria, tiempo de la rentabilidad económica y la realización del valor en el mercado). Tras recordar la situación que prevaleció desde principios del siglo en los escenarios montrealenses, el artículo reconstituye la aparición del « Petit théâtre » y la acción disolvente de la Crisis en el teatro comercial, pero también la que se refiere a la estabilización que aportó la llegada de la radio. Muestra cómo la temporada dramática y los ensayos transforman profundamente la tensión entre el tiempo del trabajo remunerado y el tiempo del trabajo artístico, tanto la de los escenógrafos como la de los actores. Asimismo, el tiempo más importante dedicado a la preparación de un espectáculo permite desarrollar el análisis dramatúrgico y la elaboración de los personajes, que llegan a ser más originales y auténticos. El repertorio seleccionado determina una confrontación entre el tiempo histórico y un tiempo indefinido, próximo a la eternidad y, por consiguiente, una transformación en la experiencia del tiempo humano. Por último, la búsqueda de modernidad, que se ve obligada a innovar y a crear, aparece como una estética de ruptura. La ruptura con el pasado es clara en los proyectos de Les Compagnons de Saint-Laurent y de L’Équipe, centrados en el futuro; pero también hay que notar la ruptura con el presente de las presiones inmediatas de la vida corriente.
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Saillies et paradoxes : Amérique française et l’ethos du moraliste bouffon
Élyse Guay et Michel Lacroix
p. 67–81
RésuméFR :
Avec le boom éditorial qui survient au Québec pendant la « drôle de guerre », le milieu des revues littéraires se dynamise. Si une légèreté de ton avec une pointe d’humour grinçant la différencie de La Nouvelle Relève, la revue Amérique française opère également un renouvellement des formes et des discours qui l’éloigne de l’aura de Maritain. Ethos ironique, exploration de la brièveté, recherche stylistique et écriture par fragments sont les éléments qui caractérisent Amérique française et qui s’exemplifient dans une poétique de la saillie et du paradoxe, laquelle prend des dispositions collectives dans la revue. L’analyse des formes brèves (conte, poésie, maxime, épigramme et apophtegme) effectuée dans cet article tente de montrer que se développe, au sein de l’espace littéraire de la revue, une nouvelle figure d’écrivain, figure composite qui combine les traits du bouffon et du moraliste, l’esprit de recherche et l’esprit critique.
EN :
With the editorial boom experienced in Quebec during the “phony war”, the world of literary reviews was galvanized. While lightness of tone and a touch of sardonic humour distinguished it from La Nouvelle Relève, Amérique française also achieved a renewal of forms and discourses that set it apart from the aura of Maritain. Ironic ethos, exploration of brevity, the search for a distinctive style and writing by fragments, all characteristic elements of Amérique française, were embodied in a poetics of protrusion and paradox that took on collective form at the periodical. Through analysis of brief forms (tale, poem, maxim, epigram, apophtegm), this article attempts to show that a new writer’s figure develops in the periodical’s literary space—a composite figure combining features of the buffoon and the moralist and embodying both scholarship and critical thought.
ES :
Con el boom editorial que se produce en Quebec durante la ‘curiosa guerra’, se dinamiza el ámbito de las revistas literarias. Si bien cierta ligereza de tono, con una brizna de humor chirriante, la distingue de La Nouvelle Relève (El Nuevo Relevo), la revista Amérique française (América francesa) practica también un renuevo en las formas y los discursos que la aleja del aura de Jacques Maritain. Ethos irónico, exploración de la brevedad, búsqueda estilística y escritura por fragmentos son los elementos que caracterizan Amérique française y que se ejemplifican en una poética del impulso y de la paradoja, que adopta disposiciones colectivas en la revista. El análisis de las formas breves (cuento, poesía, máxima, epigrama y apotegma) que se hace en este artículo trata de mostrar que se desarrolla, en el seno del espacio literario de la revista, una nueva figura de escritor, una figura compuesta que combina los rasgos del bufón y del moralista, el espíritu investigador y el espíritu crítico.
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Avant Refus global : l’essai personnaliste sur l’art moderne
Karine Cellard
p. 83–93
RésuméFR :
Cet article s’intéresse à la critique d’art qui émerge dans les années 1940, principalement au sein de l’espace essayistique des revues comme Amérique française, La Nouvelle Relève et Gants du ciel, lesquelles appartiennent à la « constellation personnaliste » dominant alors le champ culturel. Tandis que l’époque commence à concevoir une distinction entre l’artiste (nourri d’une vision esthétique en littérature, en arts visuels, en théâtre ou en musique) et l’intellectuel (qui pense d’autres sujets et peut intervenir dans la Cité) se met en place, dans les corpus analysés, une poétique de l’apologie de la modernité basée sur trois types de discours communs (l’approche historique, le didactisme et la subjectivité lyrique de type symboliste) et sur des stratégies récurrentes (notamment l’antinomie et l’analogie). L’analyse de l’évolution de ces formes et de ces discours sur l’art au long de la décennie montre en quoi et comment celle-ci mène peu à peu à la rupture de 1948 qui, contrairement à ce que suggère le grand récit de l’histoire littéraire québécoise, ne représente pas uniquement une rupture avec « la tuque et le goupillon », mais aussi avec les alliés naturels, soit les personnalistes qui, au Québec, ont été les premiers à apprivoiser la modernité esthétique.
EN :
This article focuses on the art criticism that emerged in the 1940s, mainly in the essayistic space of periodicals such as Amérique française, La Nouvelle Relève and Gants du ciel, which belonged to the “personalist constellation” that dominated the cultural field at the time. The corpus under scrutiny shows that at this time, just as a distinction began to be perceived between the artist (shaped by an aesthetic vision in literature, the visual arts, drama or music) and the intellectual (who can think on other topics and intervene in the polis), a poetics appeared defending modernity on the basis of three types of common discourse (the historical approach, didacticism and symbolist-type lyrical subjectivity) and recurring strategies (including antinomy and analogy). Analysis of the evolution of these forms and discourses on art throughout the decade shows in what way they gradually led to the break of 1948, which, despite what is suggested by the great narrative of Quebec literary history, represented not only a break with “la tuque et le goupillon” but also with natural allies—the personalists—who, in Quebec, were the first to domesticate aesthetic modernity.
ES :
Este artículo se interesa por la crítica de arte que emerge en los años 1940, principalmente en el seno del espacio ensayístico de las revistas como Amérique française (América Francesa), La Nouvelle Relève (El Nuevo Relevo) y Gants du ciel (Guantes del Cielo), que pertenecen a la ‘constelación personalista’ que predominaba entonces en el campo cultural. Mientras la época comienza a concebir una distinción entre el artista (alimentado de una visión estética en literatura, artes visuales, teatro o música) y el intelectual (que piensa en otros temas y puede intervenir en la Ciudad) se instala, en los corpus analizados, una poética de la apología de la modernidad basada en tres tipos de discursos comunes (el enfoque histórico, el didactismo y la subjetividad lírica de tipo simbolista) y en estrategias recurrentes (en particular la antinomia y la analogía). El análisis de la evolución de estas formas y estos discursos sobre el arte a todo lo largo de la década muestra en qué y cómo esta conduce poco a poco a la ruptura de 1948 que, a la inversa de lo que sugiere el gran relato de la historia literaria quebequense, no representa únicamente una ruptura con ‘el gorro y el hisopo’ (el pueblo y la Iglesia), sino también con los aliados naturales, esto es, los personalistas que, en Quebec, fueron los primeros en domesticar la modernidad estética.
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Quand Refus global devient « Refus global » : les conditions de la réception à la fin des années 1940
Sophie Dubois
p. 95–105
RésuméFR :
Souvent retenu comme l’amorce de la modernité culturelle québécoise, le manifeste automatiste Refus global est examiné dans cet article du point de vue de sa première réception (1948-1949). Sont interrogés les critères sociohistoriques et esthétiques privilégiés à la fin des années 1940 ayant permis à l’oeuvre d’acquérir le statut de texte fondateur grâce à un resserrement du discours critique autour du texte éponyme, au détriment des autres composantes du recueil original. Une étude de la centaine d’articles formant la première réception révèle que cinq facteurs principaux jouent un rôle dans la lecture faite de l’oeuvre et dans le statut qui lui est octroyé : la matérialité du recueil original, l’état des champs artistiques, les critères de légitimité établis par la critique, la réaction étatique et l’attitude des auteurs envers la critique. Chacun de ces facteurs est analysé et historicisé par l’auteure, qui montre comment, à l’époque, une oeuvre recueillistique et pluridisciplinaire comme Refus global bouleverse l’horizon d’attente, entre autres en allant à contresens de la logique moderniste, malgré ce que la critique en a retenu. L’étude de la première réception permet ainsi à la fois d’expliquer la réduction du discours critique ayant conduit à la consécration du texte éponyme « Refus global » et de mettre en évidence d’autres lectures, faites avant la constitution du discours dominant ou en parallèle avec celui-ci, susceptibles de réévaluer le statut aujourd’hui attribué à l’oeuvre.
EN :
Often remembered as the event that launched cultural modernity in Quebec, the automatist manifesto Refus global is examined in this article from the point of view of its initial reception (1948-1949). The article scrutinizes the sociohistorical and aesthetic criteria prevailing in the late 1940s that made it possible for the work to acquire the status of a foundational text as critical discourse restricted its focus to the eponymous text, to the detriment of the other elements of the original collection. A study of the one hundred-odd articles that make up the initial reception of Refus global shows that five main factors played a part in how it was read and the status it was given: the materiality of the original collection, the state of artistic fields, the legitimacy criteria established by critics, the reaction of the state, and the authors’ attitudes to criticism. Each of these factors is analyzed and historicized by the author, who shows that despite what criticism has chosen to remember, a pluridisciplinary and collective work like Refus global disrupted the horizon of expectations at the time by running counter to the logic of modernism. Analysis of initial reception enables us both to explain the reduction operated by critical discourse that led to the consecration of the eponymous “Refus global” text, and to foreground other readings, carried out before the dominant discourse was constituted or in parallel to it, that may lead us today to reassess the status assigned to the work.
ES :
Recordado con frecuencia como el inicio de la modernidad cultural quebequense, se estudia en este artículo Refus global (Rechazo global), el manifiesto de los automatistas desde el punto de vista de su primer recibimiento (1948-1949). Se interrogan los criterios sociohistóricos y estéticos privilegiados que permitieron, a finales de los años 1940, que la obra adquiriese el estatus de texto fundador, gracias a una reducción del discurso crítico en torno al texto epónimo, en detrimento de los demás componentes de la selección original. Un estudio del centenar de artículos que integraban la primera edición revela que son cinco los factores principales que desempeñan un papel en la lectura que se hace de la obra y en el estatus que se le otorga: la materialidad de la recopilación original, el estado de los campos artísticos, los criterios de legitimidad establecidos por la crítica, la reacción estatal y la actitud de los autores ante la crítica. Cada uno de estos factores es analizado e historiado por la autora, que muestra cómo, en aquella época, una obra seleccionista y pluridisciplinaria como Refus global trastoca el horizonte de espera, en particular al ir en contrasentido de la lógica modernista, pese a lo que la crítica ha conservado de ello. Así pues, el estudio de la primera edición permite explicar la reducción del discurso crítico que condujo a la consagración del texto epónimo ‘Refus global’ y, a la vez, hacer hincapié en otras lecturas que se hicieron antes de la constitución del discurso dominante o en paralelo con el mismo, que tiende a reevaluar el estatus que se atribuye hoy en día a esta obra.
Étude
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Une constante de la critique : l’irréalité de la littérature canadienne-française
Vincent Lambert
p. 109–117
RésuméFR :
De Gilles Marcotte à Maurice Lemire, les grands critiques de la Révolution tranquille se sont entendus pour dire que la littérature canadienne-française, jusque vers 1930, serait une littérature livresque, désincarnée, irréelle. Si ce jugement a été peu remis en cause, il importe cependant d’insister sur le fait qu’il est loin d’être une invention moderne. On le retrouve dès le Mouvement littéraire de Québec, en 1860, et il revient périodiquement jusqu’en 1930, décennie où le constat de sa facticité se généralise, que ce soit chez Alfred DesRochers ou chez Carmel Brouillard. Cet article rétablit donc une continuité là où il y avait rupture entre le Québec moderne et le Canada français. Il montre que les écrivains canadiens-français n’étaient pas aveugles à leur propre irréalité, contrairement à ce qu’on a souvent cru depuis la Révolution tranquille, chez Hubert Aquin ou Fernand Dumont.
EN :
From Gilles Marcotte to Maurice Lemire, the great critics of the Quiet Revolution have agreed that French Canadian literature, up to about 1930, was bookish, disembodied, and unreal. While this judgement has rarely been questioned, it should be remembered that it is far from being a modern invention. It is already present with the Mouvement littéraire de Québec in 1860 and recurs periodically up until the 1930s—a decade in which awareness of the artificial quality of French Canadian literature becomes widespread, whether it is expressed by Alfred DesRochers or Carmel Brouillard. Hence, this article re-establishes continuity where a break had existed between modern Quebec and French Canada. The article shows that French Canadian authors were not blind to their own unreality, despite what has often been assumed since the Quiet Revolution by writers such as Hubert Aquin or Fernand Dumont.
ES :
Desde Gilles Marcotte hasta Maurice Lemire, los grandes críticos de la Revolución Tranquila fueron unánimes en decir que la literatura canadiense francesa hasta cerca de los años 1930, era una literatura libresca, desencarnada, irreal. Aunque esta opinión no se ha puesto mucho en tela de juicio, resulta importante insistir en el hecho de que dista mucho de ser una invención moderna. Se encuentra ya en el Movimiento Literario de Quebec, en 1860, y vuelve periódicamente hasta 1930, década en que se generaliza esta evidencia (constat) de su facticidad, ya sea en Alfred DesRochers o en Carmel Brouillard. Por lo tanto, este artículo restablece una continuidad donde había una ruptura entre el Quebec moderno y el Canadá francés. Muestra que los escritores canadienses franceses no estaban ciegos ante su propia irrealidad, a la inversa de lo que se creyó con frecuencia desde la Revolución Tranquila, en Hubert Aquin o Fernand Dumont.