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VertigO
La revue électronique en sciences de l’environnement
Volume 20, numéro 3, décembre 2020 Gestion des ressources naturelles : réflexion impertinente autour des ressources naturelles et de leur finalité Sous la direction de Caitriona Carter, Leila Iliana Celis, Yann Fournis, Nathalie Lewis et Éric Pineault
Sommaire (13 articles)
Gestion des ressources naturelles : réflexion impertinente autour des ressources naturelles et de leur finalité
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L’épuisabilité des ressources naturelles comme pierre d’achoppement du développement : exemplification théorique dans le domaine du tourisme de nature
Manu Tranquard
RésuméFR :
Le tourisme de nature est une forme de tourisme utilisant l’environnement naturel pour se réaliser. Les ressources naturelles y sont à la base de l’offre, et conséquemment, la durabilité de ces ressources devient un facteur premier et limitant du cycle économique de l’activité. Or si la dynamique de construction historique du concept de développement durable a toujours semblé impliquer la question de l’épuisabilité des ressources environnementales, la réflexion portant sur les modalités de leur évaluation opérationnelle et de leur gestion pratique peut conduire à faire de la bioéconomie et de la théorie de la durabilité forte le cadre d’analyse le plus pertinent concernant les spécificités du tourisme de nature. Ainsi, l’objet de la présente contribution est de présenter les référents historiques et théoriques qui établissent le lien consubstantiel entre le développement et les ressources naturelles pour les mettre en perspective avec les théories du tourisme de nature durable. Il s’agit également d’analyser les conséquences opérationnelles d’un tel cadrage théorique au regard du maintien de l’attractivité des territoires par la préservation des ressources, mais aussi de la connaissance des impacts environnementaux comme préalable à leur maitrise; et de manière générale concernant la mise en oeuvre des critères de la durabilité touristique.
EN :
Nature based tourism is a form of tourism that uses the natural environment to be realized. Natural resources are at the base of the supply, and consequently, the sustainability of these resources becomes a primary and limiting factor of the economic cycle of the activity. However, while the historical construction dynamic of the concept of sustainable development has always seemed to involve questions about the exhaustion of environmental resources, the reflection on the modalities of their operational evaluation and their practical management can lead to make the Bioeconomy theory the most relevant analytical framework regarding the specificities of nature tourism. Thus, the purpose of the present contribution is to present the historical and theoretical references that establish the consubstantial link between development and natural resources to put them into perspective with the theories of sustainable tourism. It is also a question of analyzing the operational consequences of such a theoretical framework with regard to the maintenance of the attractiveness of territories through the preservation of resources, but also the knowledge of environmental impacts as a prerequisite to their mastery; and generally regarding the implementation of the criteria of tourism sustainability.
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De la région ressource au territoire ressource ? Réflexion autour de l’hydroélectricité communautaire au Lac-Saint-Jean (Québec)
Lucas Durand
RésuméFR :
Les espaces ruraux canadiens sont souvent qualifiés de régions ressources. Celles-ci se caractérisent par un modèle de développement extractiviste, c’est-à-dire structuré autour des grandes industries exogènes d’extraction de ressources naturelles. Il s’agit ici d’examiner les conditions d’émergence d’un modèle alternatif de développement régional, que nous nommons territoire ressource, au sein duquel les acteurs territoriaux s’approprient la gestion des ressources naturelles. Nous illustrerons notre propos à travers le cas d’étude des mini-centrales hydroélectriques développées dans la région du Lac-Saint-Jean au Québec. Mises en service entre 2015 et 2018, les centrales de Val-Jalbert et de la Onzième Chute furent entièrement développées et gérées par un partenariat entre autorités publiques locales et la communauté ilnue de Mashteuiatsh, dans une finalité de développement territorial.
EN :
Canadian rural areas are often qualified as resource regions. They are characterized by an extractivist development model and the presence of exogenous companies exploiting natural resources. We analyse the conditions of the emergence for a territorial appropriation of natural resource and an alternative regional development model: the resource territory. We base out point on the cas study of mini hydroelectric power stations, located in Lac-Saint-Jean region in Quebec Province. developed and managed by local municipal authorities and the ilnu community from Mashteuiatsh, with a territorial development objective.
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La biodiversité, une ressource, mais aussi un fardeau ? Intérêt et limites des notions de services et disservices écosystémiques pour repenser les interactions nature-sociétés dans les territoires ruraux
Julien Blanco, Clémence Moreau, Chloé Guerbois, Cécile Barnaud, Pierre-Cyril Renaud, Marc Deconchat et Émilie Andrieu
RésuméFR :
Les processus de dégradation et de préservation des ressources naturelles s’accompagnent souvent de tensions et conflits entre les acteurs des territoires. Le cadre des services écosystémiques (SE) est désormais communément utilisé pour analyser ces processus et penser les termes d’une meilleure gouvernance. Nous développons ici l’idée impertinente selon laquelle l’intégration du concept très contesté de disservice écosystémique (DSE), qui qualifie les nuisances associées aux écosystèmes, améliore la compréhension de ces dynamiques et porte les germes d’une meilleure justice environnementale. Nous mobilisons trois cas d’étude dans lesquels les enjeux environnementaux sont sources de SE et DSE : le sanglier dans le Mont Lozère (France), les arbres champêtres dans les coteaux de Gascogne (France) et l’éléphant à Hwange (Zimbabwe). Au total, 119 entretiens semi-directifs ou essais anonymes ont été collectés et analysés selon deux axes autour des SE et DSE : i) les représentations et pratiques, ii) la gouvernance. Nos résultats montrent que le concept de DSE, associé à celui de SE, est utile pour révéler la complexité, voire l’ambivalence, des représentations des acteurs. Il permet en outre d’évaluer le rôle des pratiques dans le renforcement ou l’atténuation de nuisances écologiques qui ne sont pas toujours reliées à des dynamiques écologiques. Ce concept enrichit aussi la compréhension des positionnements des acteurs et des enjeux de gouvernance, permettant par exemple de révéler les contradictions et effets pervers de certaines politiques environnementales. Malgré les controverses dont il a fait l’objet, le concept de DSE semble donc prometteur pour repenser la gouvernance environnementale dans les territoires.
EN :
The degradation and preservation of natural resources are often sources of tensions and conflicts between stakeholders in territories. The ecosystem service (ES) framework has been widely used to analyse these processes and design more effective governance arrangements. In this contribution, we develop the non-conventional idea that integrating the contested concept of ecosystem disservice (EDS), which refers to the nuisances associated with ecosystems, improves the understanding of these processes, and may eventually help towards more environmental justice. We focus on three case studies where environmental issues provide both ES and EDS: wild boar in the Mont Lozère (France), farm trees in the coteaux de Gascogne (France), and elephant in Hwange (Zimbabwe). In total, 119 semi-structured interviews or anonymous essays were conducted and analysed through two axes: i) people’s representations and practices around E(D)S, and ii) E(D)S governance. Our results show that the concept of EDS, associated with ES, helps reveal the complexity and ambivalence of stakeholders’ representations. It also allows to assess the role of practices in reinforcing or mitigating ecological nuisances that are not necessarily linked with ecological dynamics. This concept also enriches the understanding of stakeholders’ positions and governance issues, for example in revealing contradictions and side effects of certain environmental policies. Despite the existent controversies around it, the concept of EDS seems promising for rethinking environmental governance in territories.
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Une ruée vers l’or contemporaine au Sahara : l’extractivisme aurifère informel au nord du Niger
Abdoulkader Afane et Laurent Gagnol
RésuméFR :
Depuis 2014 et la découverte inattendue de pépites dans la partie saharienne du Niger, une course enfiévrée vers la recherche de l’or mobilise des dizaines de milliers de nomades, de ruraux et d’urbains, devenus orpailleurs et venant aussi bien du Niger que des pays voisins ou plus lointains. Brusque, massive et cosmopolite, mais aussi mouvante, parfois violente et située dans les confins peu ou pas habités, l’exploitation de l’or est largement informelle, c’est-à-dire souvent considérée comme illégale mais tolérée. Artisanale au départ, elle devient de plus en plus mécanisée, voire industrielle. Cet article a pour objectif d’analyser le développement spectaculaire de l’orpaillage au nord du Niger pour en dresser un premier bilan provisoire six ans après son déclenchement et surtout de faire ressortir les principaux enjeux à venir. Notre analyse est issue de plusieurs missions d’enquêtes sur le terrain en 2018 et 2019, à la rencontre des différents acteurs de cette ruée extractive. Contrairement à l’exploitation d’autres ressources minières comme l’uranium, celle de l’or a la particularité d’être très peu accaparée à la fois par les firmes minières multinationales, mais aussi encadrée par l’État, en grande partie dépassé et prudent. Notre approche envisagera la ruée comme un cas exemplaire de mise en place d’un système de prédation de la ressource complexe, mobile et évolutif, exercée par des acteurs multiples. Nous aborderons les transformations des mécanismes de régulation informelle et concertée entre les acteurs qui ont eu lieu au cours de différentes phases de la ruée que nous qualifierons. Si cette ruée produit des changements sociaux, économiques et politiques majeurs dans un espace saharien particulièrement instable, nous évoquerons aussi les effets environnementaux et sanitaires. Car cette ruée est symptomatique de ce qui se passe à une échelle plus vaste et selon des logiques similaires au Sahara et au nord du Sahel, où s’est diffusée depuis une dizaine d’années une vaste nébuleuse pionnière d’exploitation de la ressource aurifère depuis les rives de la mer Rouge jusqu’à l’Atlantique. De façon plus générale, les différents traits caractéristiques du développement spectaculaire de l’orpaillage au nord du Niger que nous mettrons en exergue, en font une ruée vers l’or comparable à certains points de vue et à un certain degré au modèle du genre californien du milieu du XIXe siècle. Sans avoir l’ambition trop générale de caractériser les traits communs à toute ruée vers l’or, nous proposerons néanmoins quelques pistes de réflexion en ce sens, en distinguant notamment trois phases des ruées vers l’or à partir du cas du Sahara nigérien contemporain.
EN :
Since 2014 and the unexpected discovery of nuggets in the Saharan part of Niger, a feverish race towards the search for gold mobilizes tens of thousands of nomads, rural and urban, who have become gold diggers and come from Niger as well as from neighbouring or more distant countries. Sudden, massive and cosmopolitan, but also moving, sometimes violent and located in sparsely or uninhabited areas, gold mining is largely informal, i.e. often considered illegal but tolerated. Initially artisanal, it is becoming more and more mechanized, even industrial. The aim of this article is to analyse the spectacular development of gold mining in the north of Niger in order to draw up an initial provisional assessment six years after it began and, above all, to highlight the main challenges ahead. Our analysis is the result of several fact-finding missions in the field in 2018 and 2019, to meet the various players in this extractive rush. Contrary to the exploitation of other mining resources such as uranium, gold mining has the particularity of being very little monopolized by both multinational mining companies and the state, which is largely outmoded and cautious. Our approach will consider the rush as an exemplary case of setting up a complex, mobile and evolving system of resource predation exercised by multiple actors. We will address the transformations of informal and concerted regulation mechanisms between actors that took place during the different phases of the rush that we will qualify. If this rush produces major social, economic and political changes in a particularly unstable Saharan space, we will also discuss the disastrous and largely underestimated environmental and health effects. For this rush is symptomatic of what is happening on a wider scale and according to similar logics in the Sahara and the northern Sahel, where a vast pioneering nebula of gold exploitation has been spreading for the past ten years or so from the shores of the Red Sea to the Atlantic. More generally, the various features of the spectacular development of gold mining north of Niger that we will highlight make it a gold rush comparable in some respects and to some extent to the Californian model of the mid-nineteenth century. Without having too general an ambition to characterize the features common to any gold rush, we will nevertheless propose some avenues for reflection in this direction, distinguishing in particular three phases of gold rushes based on the case of the contemporary Nigerian Sahara.
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Instauration et coexistence de deux communautés de pratiques sur le Plateau de Millevaches (France) : une contribution à l’étude des forêts comme terrains de vies
Eléonore Kirsch et Dorothée Denayer
RésuméFR :
Dans un contexte industrialisé, empreint d’une histoire forestière marquée par la normativité, nous proposons d’envisager l’instauration des forêts par les pratiques des gestionnaires, ces dernières étant considérées comme des négociations dynamiques et territorialisées. Les pratiques des acteurs de la gestion et la ressource forestière se façonnent ensemble en instaurant des territoires qui sont des « terrains de vie », plus que de simples supports de production. En France, sur le Plateau de Millevaches, deux communautés de gestionnaires forestiers rivalisent de « bonnes recettes » pour promouvoir tantôt la productivité, tantôt la biodiversité. Dans une relative opposition, ces deux communautés expérimentent et négocient des définitions distinctes de la forêt comme ressource. D’abord instaurée comme un système socio-technique hyper-productif, la forêt monospécifique sert la redynamisation économique d’un territoire marqué par la précarité, tout en autorisant le développement d’un tissu dense de professionnels du bois. Mobilisé par d’autres acteurs comme lieu de la lutte écologique, le système vivant de la futaie irrégulière devient support d’innovation, de cohésion sociale et d’une réflexion sur les conséquences de l’industrialisation. Entre gestion techno-systématique et gestion éco-systémique, les divergences en matière de pratiques et de définitions de la forêt sont source de tensions. Chaque communauté tente d’ériger son mode de gestion de la ressource forestière comme un idéal. Pourtant ces deux dynamiques coexistent et s’influencent dans des trajectoires qui ne sont ni imperméables l’une à l’autre, ni clôturées. Reflétant ensemble une forêt complexe et des terrains de vie, ces deux communautés sont envisagées ici sous l’angle de la socio-écologie, au service d’une réflexion plus large sur la transition et la subsistance à travers des forêts habitées, apprenantes et plurielles.
EN :
In an industrialized context, based on a forest history marked by normativity, we propose to consider the instauration of forests and management practices as dynamic and territorialized negotiations. The practices of management actors and the forest resource, are shaped together by creating territories that are "land of life", rather than simple production means. In France, on the Plateau de Millevaches, two communities of forest managers compete for "good recipes" to promote either productivity or the biodiversity. First instaured as a hyper-productive socio-technical system, the monospecific forest serves economic revitalization. Mobilized by other actors as a place of ecological struggle, the actors of irregular forest becomes a platform for innovation, social cohesion and reflection on the consequences of industrialization. Between "techno-systematic" and "eco-systemic" management, differences in forest practices and definitions are sometimes a source of conflict. Each community is trying to build its forest management approach as an ideal. Yet these two dynamics, during their establishment processes, co-exist and influence in trajectories that are neither impervious to each other nor fenced. Reflecting together a complex forest and territorialized land of life, these two communities are considered here from the perspective of socio-ecology, in the service of a broader reflection on the transition and subsistence through inhabited, learning and plural forests.
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Les ressources territoriales des îles de l’Iroise à l’épreuve du développement local
Mylène Tesson, Éric Foulquier, Martial Laurans et Louis Brigand
RésuméFR :
L’article pose la question de la gestion par le collectif des pressions engendrées par la dynamique de développement local sur les ressources des territoires insulaires de la mer d’Iroise, l’île d’Ouessant, l’archipel de Molène et l’île de Sein. Une enquête de terrain a permis de réaliser 55 entretiens semi-directifs auprès de trois publics : porteurs d’activités, élus, gestionnaires; 254 questionnaires, dont 116 auprès des habitants et 138 auprès de touristes, ont apporté des informations quantitatives sur la mobilisation des ressources territoriales. Pour l’essentiel, celles-ci viennent de la mer. Elles sont halieutiques certes, mais aussi paysagères, voire plus globalement géographiques, au sens où la vie insulaire constitue, en tant que cadre de vie, un facteur d’attractivité, pour le moins le moteur de la fabrique identitaire et de fait, sociétale. Les ressources sollicitées aujourd’hui dans le cadre du développement local sont à la fois des ressources naturelles, sociales, spatiales et financières. Les pressions qui s’exercent sur le territoire s’expriment sous deux formes principales : la secondarisation de l’habitat et la disponibilité foncière en général, d’une part; la concurrence sur les ressources halieutiques, d’autre part. L’élément clé identifié sur le territoire concernant la gestion de ces ressources, est une difficulté de communalisation c’est-à-dire d’organisation des acteurs dans le but de gérer les ressources collectivement. Les organismes de conservation du milieu marin ne semblent pas actuellement parvenir à infléchir significativement la gestion des ressources, mais ils représentent un outil, éventuellement une ressource territoriale sous-exploitée, en faveur de ce processus de communalisation.
EN :
The article raises the question of the political management of the pressures generated by the dynamics of local development on the resources of the island territories of the Iroise Sea, the island of Ouessant, the Molène archipelago and the island of Sein. A field survey consisted in 55 semi-directive interviews with three audiences: activity promoters, elected officials and managers; 254 questionnaires, 116 of which were from inhabitants and 138 from tourists, provided quantitative information on the mobilization of territorial resources. For the most part, these come from the sea. They are of course fishery resources, but also landscape resources, and even more generally geographical resources, in the sense that island life, as a living environment, constitutes a factor of attractiveness, at least the driving force behind the creation of identity and, indeed, society. The resources required today in the context of local development are natural, social, spatial and financial resources. The pressures that are exerted on the territory are expressed in two main forms: the secondarization of the habitat and the availability of land in general, on the one hand; and competition over fishery resources, on the other. The key element identified on the territory concerning the political management of these resources is a difficulty of communalization, the organization of the actors with the aim of managing the resources collectively. The marine conservation organizations do not currently seem to be able to significantly influence the management of resources, but they represent a tool, possibly an under-exploited territorial resource, in favor of this process of communalization.
Section courante
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De la désindustrialisation au scandale de la France contaminée : médiatisation et controverses sur l’après-mine de l’uranium à Bessines (1991-2019)
Sylvain Le Berre et Sophie Bretesché
RésuméFR :
La chronologie de la médiatisation et la trajectoire du discours médiatique sur l’après-mine de l’uranium français, à partir d’un cas emblématique de la politique nationale de gestion post-exploitation (Bessines), mettent en lumière la force du territoire et de l’agenda local dans la définition d’un enjeu public. On y comprend aussi le rôle du croisement des différentes arènes médiatiques dans la mise en mot de la controverse.
EN :
The chronology of the media coverage and the trajectory of the media discourse on the post-mining of French uranium, based on an emblematic case of the national policy of post-exploitation management (Bessines), highlights the strength of the territory and of the local agenda in defining a public issue. We also understand the role of crossing the different media arenas in the process of putting into words the controversy.
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Éduquer aux risques dès l’école primaire : de la représentation à la conscientisation
Marie-Pierre Julien, David Bédouret, Raphaël Chalmeau, Christine Vergnolle Mainar, Jean-Yves Léna et Anne Calvet
RésuméFR :
Le territoire de la vallée du Gave de Gavarnie a connu un épisode d’inondation/crue particulièrement catastrophique en 2013, ayant entrainé de forts dégâts matériels et des pertes humaines. Dans ce contexte, la culture du risque est un enjeu tant pour les acteurs de la gestion de ce territoire que pour les citoyens, d’autant plus que les risques présents y sont multiples (avalanches, glissements de terrain et séismes). Dans cette perspective, l’école peut jouer un rôle déterminant à travers la mise en place de projets d’éducations au(x) risque(s). Ce type d’éducation doit commencer par la perception et la conscience du (des) risque(s), rendues possibles par le vécu et/ou par la culture du groupe dans lequel l’élève vit. Cette étude a pour objectif d’examiner les représentations et la perception du risque des élèves d’une école élémentaire française située sur une commune fortement impactée par cette crue, et l’évolution de ces représentations et cette perception un an après la mise en oeuvre du projet éducatif. Les résultats montrent une représentation plurielle du risque par les élèves avec des différences entre classes. La classe de CP-CE (enfants âgés de 6 à 8 ans) associe essentiellement le risque à l’aléa naturel (avalanche, inondation…) alors que les élèves en CM (enfants âgés de 9 à 10 ans) sont centrés sur ce qui pourrait leur arriver (accident, maladie…). Le risque inondation/crue est dans un premier temps très peu évoqué dans les représentations des élèves, mais lorsque les activités pédagogiques permettent de contextualiser cette notion sur leur territoire, il est alors plus fortement perçu.
EN :
In 2013, the Gave of Gavarnie valley has been suffering from a particularly catastrophic flood event, which resulted in severe material damages and loss of human life. In this context, the “risk culture” is an issue for both the actors involved in the management of this territory and for the citizens, especially since the hasards present are multiple (avalanches, landslides and earthquakes). From this perspective, the school can play a decisive role through the implementation of risk education projects. This type of education must begin with the perception and awareness of the risk(s), enabled by the experience and/or culture of the group in which the pupils live. This study aims to study the risk representations and perceptions of pupils, aged 6 to 11, in a french elementary school located in a town strongly impacted by this flood and the evolution of these representations and perceptions one year after the implementation of a risk(s) education project. The surveys results highlight a plural representation of risk by pupils with differences between classes. The pupils aged 6 to 9 associate mainly risk with natural hazard (avalanche, earthquakes ...) while pupils aged 9 to 11 see what might happen to them (accident, illness...). Furthermore, the flood risk is initially very rarely mentioned in representations, but when educational activities make it possible to contextualise this notion on their territory, it is then more strongly perceived and apprehended.
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L’infrastructure verte dans l’aire urbaine de Montréal : la multifonctionnalité des espaces végétalisés en question
Xavier Cornet
RésuméFR :
Depuis une dizaine d’années, on observe un engouement croissant des chercheurs pour les infrastructures vertes dans l’optique d’améliorer la qualité de vie des habitants, notamment en identifiant les services écosystémiques. Cette mise en réseau des espaces végétalisés urbains permet également d’augmenter leurs résiliences face à des perturbations (espèces invasives, dégradations des habitats, mauvaises pratiques de gestions, brassage génétique insuffisant, etc.). Cette multifonctionnalité des espaces végétalisés sera interrogée dans l’agglomération montréalaise. Le paysage végétal sera pris en compte à travers sa qualité écologique et les usages que les urbains en font. Ce paysage végétal est mobilisé grâce à des cartes des formations végétales identifiées par leurs espèces dominantes, ce qui permet une approche plus fine que la plupart des recherches sur les infrastructures vertes par images satellites. Une évaluation critériée nous permettra d’estimer la qualité écologique et l’intérêt social des espaces végétalisés selon leurs situations dans l’espace urbain. De plus, Montréal s’est doté d’un outil d’aménagement qui correspond aux définitions d’une infrastructure verte, les écoterritoires. Les opportunités de développement d’une infrastructure verte seront comparées à la disposition des écoterritoires, dans la perspective d’évaluer leurs potentiels.
EN :
Over the last ten years or so, there has been a growing interest among researchers in green infrastructure, which aims to improve the quality of life of inhabitants through the use of ecosystem services. More specifically, we are witnessing a networking of urban green spaces in order to increase their resilience in the face of disturbances (habitat degradation, poor management practices, insufficient genetic mixing, etc.). This multifunctionality of green spaces will be questioned in the Montreal agglomeration. The vegetal landscape will be taken into account through its ecological quality and the uses that urbanites make of it. This vegetal landscape will be mobilized through maps of plant formations identified by their dominant species, which allows for a finer approach than most research on green infrastructure using satellite images. A criterion-based evaluation will enable us to assess the ecological quality and social interest of green spaces according to their location in the urban space. In addition, Montréal has developed a planning tool that corresponds to the definitions of green infrastructure, the ecoterritories. The opportunities for the development of green infrastructure will be compared to the availability of these ecoterritories, with a stand point to evaluate their potential.
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Les eaux transfrontalières fédératrices d’une hydro-diplomatie environnementale ? Analyse comparée du Danube et du Jourdain
Bastien Richard
RésuméFR :
Les accords multilatéraux sont en vogue dans le monde des organisations internationales et reflètent une volonté croissante de renforcer l’hydro-diplomatie pour prévenir les conflits liés au partage des eaux transfrontalières. Cependant, ce partage est historiquement préempté par les accords bilatéraux entre États. Dans ce contexte, nous nous interrogeons sur la capacité des accords multilatéraux pour la gestion des eaux transfrontalières à être moteurs d’une hydro-diplomatie environnementale. Nous montrons que si ces accords ne résolvent pas directement l’obstacle de la souveraineté territoriale des États et des enjeux politiques comme dans le cas du bassin du Jourdain, ni celui du partage quantitatif des eaux transfrontalières, ils créent des espaces de dialogue fédérés par les questions environnementales comme le montre le cas du bassin du Danube, tempérant les gestes unilatéraux et contribuant en douceur à une redistribution des rôles vers des acteurs non étatiques.
EN :
Multilateral agreements are in vogue in the world of international organizations and reflect a growing desire to strengthen hydro-diplomacy to prevent conflicts over the sharing of transboundary waters. However, such sharing is historically pre-empted by bilateral agreements between states. In this context, we question the capacity of multilateral agreements for the management of transboundary waters to be drivers of environmental hydro-diplomacy. We show that while these agreements do not directly resolve the obstacle of the territorial sovereignty of States and political issues as in the case of the Jordan River basin, nor that of the quantitative sharing of transboundary waters, they do create spaces for dialogue federated by environmental issues as shown in the case of the Danube River basin, tempering unilateral actions and contributing smoothly to a redistribution of roles towards non-state actors.
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Vivre avec la mémoire de la catastrophe : l’éruption de La Soufrière de Guadeloupe en 1976
Magali Reghezza-Zitt, Fanny Benitez et Maud H. Devès
RésuméFR :
L’objet de cet article est d’interroger la spatialité de la mémoire post-catastrophe et de montrer qu’elle modifie le rapport au territoire des habitants qui ont vécu l’événement. En considérant la crise éruptive de la Soufrière des années 1975-1977, nous étudions à la fois la mise en mémoire institutionnelle des événements et les mémoires individuelles des témoins directs. Nous montrons que quarante ans plus tard, les personnes conservent une mémoire sensible et chargée d’affects, qui est fortement spatialisée et qui possède une spatialité particulière. Vivre avec le volcan consiste aussi à vivre avec le souvenir de cette crise, qui est interprétée par les personnes comme une catastrophe. La mémoire produit ainsi de nouvelles territorialités et de nouveaux modes d’habiter. À l’inverse de la mémoire individuelle, la mémoire institutionnelle est en revanche peu présente et ne transforme pas le territoire.
EN :
This paper aims to address the spatiality of disaster memory and show how disaster memory transforms the relationship between the inhabitants, who experienced a crisis, and the lived space. Considering the 1975-1977 eruptive crisis of the Soufrière, we study both the institutional memory and the individual memories of the direct witnesses. We show that forty years later, people still remember events in a sensitive and affect-filled way, which is highly spatialized and has a particular spatiality. Living with the volcano implies to live with the memory of the crisis, which is interpreted by people as a catastrophe. Memory thus produces new territorialities, i.e. new ways of dwelling. Conversely, institutional memory is not very present and does not transform the geographical space in its materiality or its meaning.
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Cartographie de l’érosion hydrique des sols et priorisation des mesures de conservation dans le territoire d’Uvira (République démocratique du Congo)
Jean Nacishali Nteranya
RésuméFR :
L’érosion des sols est un risque naturel qui est exacerbé par les activités anthropiques en République démocratique du Congo. Cependant, il existe peu d’information sur la spatialisation de ce phénomène à l’échelle territoriale. Cette étude est basée sur l’utilisation du modèle USLE (Universal Soil Loss Equation) et des données en accès libre pour cartographier les zones à risque d’érosion et faire la priorisation des zones pour la conservation des sols dans le territoire d’Uvira. Au regard de résultats, 52,79 % du territoire est caractérisé par un risque d’érosion faible tandis que 47,21 % font face à un risque de perte de sol supérieure à la limite tolérable de 11 t/ha/an dans le contexte des paysages tropicaux et montagneux. Ce risque est accentué par la perte du couvert végétal au profit de l’extension des zones urbaines et agricoles. Le faible niveau de sensibilité à l’érosion se trouve au niveau de la plaine de la Ruzizi tandis que les zones situées dans les plateaux présentent une forte sensibilité en raison de leur relief accidenté et une pluviosité forte. L’analyse statistique des rapports de fréquence des glissements de terrain montre l’existence d’une relation entre leur occurrence et les zones d’intensité d’érosion. La modélisation de la perte de sol en fonction des différentes méthodes de protection de sol montre que l’approche de mise en place des bandes enherbées et l’aménagement des terrasses sont les plus appropriés pour réduire le risque d’érosion dans ce secteur. Ces méthodes peuvent être associées aux efforts d’afforestation pour une protection efficace des sols.
EN :
Soil erosion is among the natural hazards that are exacerbated by human activities in the Democratic Republic of Congo (DRC). However, there is little information on the spatialization of this phenomenon at the territorial level in the DRC. This study assesses the potential use of Geographic Information System (GIS) techniques and open access data to map areas at risk of erosion and prioritize areas for soil conservation in Uvira’s territory. In terms of results, 52.79% of this territory is characterized by a low risk of erosion with an average soil loss of 6.08 t ha-1 year-1 while 47.21% faces a risk of soil loss which excess the tolerable limit of 11 t ha-1 year-1 for highlands of tropical areas. This risk is accentuated by the loss of vegetation cover in profit of agricultural activities and urbanization. The low level of sensibility to erosion is found in the Ruzizi plain while the areas in the plateaus are highly susceptible due to their rugged terrain and high rainfall intensity. The statistical analysis of the frequency ratios of landslide shows the existence of a relationship between their occurrence and erosion intensity zones defined on the basis of the Universal Soil Loss Equation (USLE model). Soil loss modeling for different soil protection methods shows that the grassland banding and terracing approach are most appropriate to reduce the risk of erosion in this area. These methods can be combined with afforestation efforts for effective soil protection in Uvira.
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Diversité et importance de la flore ligneuse de la ville de Sokodé (Centre - Togo)
Samsahatou Tourey, Tchaa Boukpessi, Koffi Djagnikpo Kpedenou et Tanzidani Komlan Thiou Tchamie
RésuméFR :
Les recherches menées dans la ville de Sokodé (Centre-Togo) en juin 2017 ont permis d’évaluer la diversité des ligneux et de relever les perceptions des populations sur leur importance. Les ligneux des concessions, les voiries, les établissements, les interstices et les places publiques ont été inventoriés. Dans les différents placeaux, les noms scientifiques des espèces présentes ont été identifiés. Au total 118 espèces ligneuses regroupées en 98 genres et 38 familles ont été recensées à travers 209 relevés. L’indice de diversité de Shannon (4,8 bits) est relativement plus élevé au niveau des établissements, suivi des concessions (4,61 bits), des interstices (4,03 bits) puis des voiries (3,7 bits). Par contre l’équitabilité de Piélou est plus élevée (0,87) au niveau de la voirie. Les familles des Fabaceae (25 espèces et 22 genres), Moraceae (11 espèces et 3 genres), Rutaceae (7 espèces et 4 genres), Apocynaceae (6 espèces et 5 genres), Arecaceae et des Malvaceae (6 espèces et 6 genres chacune), Annonaceae (5 espèces et 3 genres), Bignonaceae (5 espèces et 5 genres) et Euphorbiaceae (5 espèces et 4 genres) sont les plus représentées. Les Microphanérophytes (54,7 %) et les Mésophanérophytes (29,91 %) sont les types biologiques les plus abondants. Sur le plan phytogéographique, les espèces soudano-zambéziennes (20,41 %) sont les plus représentées, suivies des espèces Pantropicales (19,39 %). Une enquête par questionnaire a été réalisée auprès de 120 personnes. L’importance des ligneux en milieu urbain est reconnue par les populations locales. Le principal avantage reconnu est l’alimentation (63,5 %), auquel viennent s’ajouter d’autres tels que l’ombrage (59,5 %), le repos (41,9 %), la lutte contre les vents et l’érosion (39,9 %). Les fruits (84,7 %), les feuilles (38,7 %), les racines (16,7 %) et les écorces (16,7 %) de nombreuses espèces ligneuses sont récoltées pour satisfaire les besoins des populations; ce qui fait qu’elles font face à plusieurs menaces. Dans ce contexte, seule une gestion durable permettrait une meilleure conservation de cette ressource dans la ville de Sokodé.
EN :
Research carried out in the city of Sokodé (Center-Togo) in June 2017 made it possible to assess the diversity of woody species and to raise people's perceptions of their importance. The woods of the concessions, the roads, the establishments, the interstices and the public places were inventoried. In a compartment of a given compartment, the scientific names of the species present have been identified. A total of 118 woody species grouped into 98 genera and 38 families have been identified in 209 records. The Shannon diversity index (4.8 bits) is relatively higher at the establishment level, followed by concessions (4.61 bits), interstices (4.03 bits) then roads (3.7 bits). On the other hand, the fairness of Piélou is higher (0.87) at the road level. The families of Fabaceae (25 species and 22 genera), Moraceae (11 species and 3 genera), Rutaceae (7 species and 4 genera), Apocynaceae (6 species and 5 genera), Arecaceae and Malvaceae (6 species and 6 genera each), Annonaceae (5 species and 3 genera), Bignonaceae (5 species and 5 genera) and Euphorbiaceae (5 species and 4 genera) are the most represented. Microphanerophytes (54.7%) and mesophanerophytes (29.91%) are the most abundant biological types. In terms of phytogeography, the Sudano-Zambezian species (20.41%) are the most represented, followed by the Pantropical species (19.39%). A questionnaire survey was carried out with 120 people in the city of Sokodé. The importance of woody trees in urban areas is recognized by local populations. The main recognized advantage is food (63.5%), to which are added others such as shade (59.5%), rest (41.9%), wind control and erosion (39.9%).The fruits (84.7%), leaves (38.7%), roots (16.7%) and bark (16.7%) of many woody species are harvested to meet the needs of the populations; which mean that they face several threats. In this context, only sustainable management would allow better conservation of this resource in the city of Sokodé.