Book ReviewsComptes rendus

Anctil, P. et I. Robinson (dir.). 2010. Les communautés juives de Montréal. Histoire et enjeux contemporains. Québec : Éditions du Septentrion, 275 p.[Notice]

  • Myriam Richard

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  • Myriam Richard
    Étudiante à la maîtrise en études urbaines, Institut national de la recherche scientifique

Ancré dans des enjeux à la fois historiques et contemporains, l’ouvrage Les communautés juives de Montréal s’avère une entreprise efficace de vulgarisation des recherches récentes sur la présence juive dans la société montréalaise. La réflexion des auteurs s’appuie sur l’idée « […] qu’il n’existe pas une seule identité et une seule communauté juive à Montréal, mais bien une multitude de niveaux de référence, de langues et d’interprétations du judaïsme, diversement touchés par la réalité québécoise et formant un tout plus ou moins cohérent selon les circonstances » (p.10). C’est également la co-construction de l’identité juive et de la société montréalaise qu’on veut mettre à jour, en abordant les facettes historique, religieuse, spatiale, sociologique et communautaire de ce phénomène. Dans les deux premières sections de l’ouvrage, Ira Robinson dresse un portrait des fondements de l’histoire juive et des différentes formes qu’a pris le judaïsme montréalais jusqu’à nos jours. Il expose le caractère particulier de la communauté juive de la métropole, qui est à la fois articulée autour d’un noyau central d’individus fortement attaché aux traditions pour qui le judaïsme est un élément central de l’existence, mais aussi d’un groupe plus élargi qui gravite autour des institutions communautaires juives et valorise le métissage culturel. Pierre Anctil poursuit en abordant l’épineuse question des rapports entre Juifs et francophones. Il présente une évolution favorable de ceux-ci jusqu’à nos jours, sans toutefois éluder les épisodes plus difficiles, tels que les récents débats entourant la commission sur les accommodements raisonnables. Il montre que les dynamiques de rapprochement et de mise à distance s’effectuent d’abord autour d’enjeux liés au statut socioéconomique, puis à la sécularisation et à la langue. Jean-Philippe Croteau s’intéresse ensuite au thème des écoles privées juives, qui a été l’une des pierres d’achoppement des débats dans le cadre de la commission Bouchard-Taylor. L’auteur montre que depuis le 19e siècle, l’insertion des populations juives au sein de l’espace scolaire montréalais a été caractérisée par des affrontements entre les différents acteurs en présence, à savoir les différentes composantes de la communauté juive, les élites éducatives et culturelles catholiques et protestantes ainsi que l’État. Les enjeux qui les mobilisaient étaient idéologiques, religieux, fiscaux et finalement linguistiques. La contribution suivante de Rebecca Margolis traite de l’évolution de la culture yiddish à Montréal, en relation avec la position particulière qu’ont occupé les Juifs ashkénazes au point de vue scolaire, politique et religieux. L’auteure expose comment le yiddish est passé de langue vernaculaire à « véhicule culturel sophistiqué », après qu’il ait été dépassé par l’hébreu comme langue d’usage (p. 94). Une contribution analogue ayant pour objet l’hébreu et son usage en période plus récente aurait pu s’avérer un complément utile. Les deux textes suivants présentent l’apport des populations juives à la vie culturelle et littéraire montréalaise (Chantal Ringuet) ainsi qu’à la sphère économique et syndicale d’avant la Deuxième Guerre mondiale (Bernard Dansereau). Ringuet nous apprend entre autres que les Juifs ont longtemps été en marge des institutions culturelles des deux groupes fondateurs, mais qu’ils en font désormais partie intégrante et que leur apport est de plus en plus reconnu. Dansereau montre comment le bagage professionnel pré-migratoire, la position particulière des Juifs au sein du marché du travail montréalais ainsi que les liens avec les divers mouvements politiques et syndicaux ailleurs en Amérique et en Europe ont permis l’émergence d’un monde syndical juif très actif à Montréal dans la première moitié du 20e siècle. Sonia Zylberberg enchaîne sur la place des femmes dans le judaïsme en faisant le portrait de celles « […] dont l’exercice de certains postes a fait éclater des barrières de genre » (p. 94). …