Comptes rendus

Marc Lacheny, Nadine Rentel et Stephanie Schwerter, dir. Errances, discordances, divergences? Approches interdisciplinaires de l’erreur culturelle en traduction. Berlin, Peter Lang, 2019, 351 p.[Notice]

  • Louisane LeBlanc

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Les directeurs de cet ouvrage, Marc Lacheny, Nadine Rentel et Stephanie Schwerter, réussissent-ils le pari qu’ils se sont lancés, soit d’aboutir à une définition de l’erreur culturelle et de « briser le carcan disciplinaire pour étudier [cette] notion […] sous différents angles » (p. 19), et ce, dans un cadre traductologique? C’est la question qui sous-tend cette recension. D’emblée la préface de Nicolas Froeliger, professeur à l’Université Paris Diderot – Paris 7, présente les trois facettes de l’erreur culturelle en traduction qui sont abordées dans cet ouvrage bien pensé. La première partie du recueil, l’erreur culturelle, du mot au signe, est consacrée à l’aspect linguistique de l’erreur (culturelle) en traduction. La deuxième, l’erreur culturelle en contexte professionnel et politique, soulève le voile de l’erreur culturelle prenant forme lors de la pratique de la traduction et de l’interprétation en contexte politique. La dernière partie, l’erreur culturelle en philosophie et en musique, informe le lecteur à propos de l’importance de connaître les réalités culturelles des publics de départ et d’arrivée. Bien que l’erreur culturelle soit au centre des préoccupations des auteurs des chapitres, tous mentionnent l’importance de la culture générale du traducteur. Ce bagage de connaissances éclaire les choix que ce dernier devra soupeser. En effet, comme nous le découvrons au fil de la lecture, il arrive que l’erreur culturelle soit nécessaire afin de répondre aux impératifs du public cible, tandis que d’autres fois l’erreur culturelle est une faute. Dans cette recension, nous avons décidé de nous pencher sur les chapitres qui exposent les points clés des trois parties présentées par Froeliger. Mais qu’est-ce que l’erreur culturelle? Est-elle négative, positive ou inévitable? Pour Émeline Arcambal, « [d]ans certaines situations, comme en interprétation [en langue des signes] en milieu pédagogique, l’erreur culturelle semble donc parfois nécessaire pour ne pas faire obstacle à la visée du discours » (p. 73). L’interprète en contexte scolaire doit être en mesure d’adapter le contenu didactique pour permettre à l’élève sourd d’apprendre les règles qui, par exemple, régissent le français écrit, car elles diffèrent culturellement de celles de la langue des signes. Ainsi, pour Arcambal, « [l]’erreur culturelle est donc relative et peut parfois constituer une stratégie d’interprétation pour répondre aux enjeux de la situation de communication » (ibid.). Par ailleurs, en publicité, « une erreur dite culturelle […] pourrait alors être définie comme la négligence d’un ou de plusieurs paramètres culturels énoncés qui donnerait lieu à des conséquences négatives pour l’entreprise sur un ou plusieurs plans » (p. 173). Dans son article, Stacy Blin avance que l’erreur en marketing peut être proprement culturelle lorsqu’elle touche l’aspect extratextuel de la publicité et que, dans un autre contexte comme celui du slogan, elle s’avère linguistique. Pierre Degott, dans une approche cibliste, avance que la traduction d’un opéra vise d’abord et avant tout à « l’adapter et le rendre acceptable aux yeux d’un public nouveau », c’est-à-dire « proposer une lecture souvent considérablement éloignée des intentions de l’original et donc, forcément, erronée » (p. 332). Il conclut son article en affirmant que l’erreur culturelle en traduction n’en est pas une parce que « chaque » version est forcément le produit de sa propre culture et de son propre environnement » (p. 344). Élisabeth Navarro, dans un excellent chapitre consacré à l’interprétation dans les services publics pour les migrants ne maîtrisant pas la langue du pays d’accueil, se demande si l’on peut « qualifier d’erreur ce qui, afin de viser la fonctionnalité de la traduction, a été volontairement traité comme un écart » (p. 148). Dans ces situations d’urgence, l’écart entre les langues, entre les unités de sens et …