Comptes rendus

Kyle Conway. Everyone Says No: Public Service Broadcasting and the Failure of Translation. Montreal, McGill-Queen’s University Press, 2011, 217 p.[Notice]

  • Chantal Gagnon

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  • Chantal Gagnon
    Université de Montréal

L’ouvrage Everyone Says No, paru en 2011 aux éditions McGill-Queen’s University Press, porte sur le rôle de la traduction dans la télévision publique canadienne. Dans son étude, l’auteur vise tout particulièrement la couverture médiatique de Radio-Canada et de CBC lors de deux événements phares de l’histoire canadienne contemporaine, l’Accord du Lac Meech (1987) et l’Accord de Charlottetown (1992). Même si la contribution de Kyle Conway appartient d’abord au domaine de la communication (p. 8), son apport à la traductologie est lui aussi très important; pour des raisons évidentes, c’est de cette dernière dont nous traiterons dans le présent compte rendu. L’ouvrage recensé ici complète bien les travaux récents sur la traduction et les médias (Bielsa et Bassnett, 2009), en offrant une perspective institutionnelle canadienne. Au tout début de l’ouvrage, le lecteur apprend que le titre Everyone Says No fait référence aux propos de Jacques Parizeau le 19 octobre 1992, avant le référendum sur l’Accord de Charlottetown : « Lundi prochain là, qu’est-ce qui arrive? Les autochtones disent non aux Canadiens anglais pis aux Canadiens français, les Canadiens français disent non aux Canadiens anglais […], on se trouve tous – on se dit tous non » (p. 3, nous soulignons). L’introduction sert aussi à présenter le corpus, la méthodologie ainsi qu’à résumer le contenu du livre. Le premier chapitre décrit le contexte sociohistorique du corpus, notamment en examinant le concept de « nation » et en étudiant le système médiatique canadien. S’il incombe à Radio-Canada et à CBC d’aider les deux solitudes canadiennes à s’apprivoiser l’une l’autre, il s’agit d’une mission entravée par des obstacles historiquement conditionnés. Malgré ces difficultés, l’auteur est d’avis que les deux diffuseurs ont les outils, du moins en théorie, pour amorcer la levée de ces obstacles. Une réussite à cet égard ferait sans doute de Radio-Canada et de CBC des modèles à suivre pour les autres diffuseurs publics (p. 21). Le second chapitre porte entre autres sur un projet pilote du début des années 1990, où le réseau CBC diffusait LeTéléjournal de Radio-Canada avec des sous-titres anglais. Ce projet a été interrompu rapidement et l’expérience inverse, soit le sous-titrage en français du bulletin d’information The National, ne vit jamais le jour. L’échec de cette aventure est notamment attribué aux pressions exercées par les journalistes d’expression française, qui craignaient que le sous-titrage de l’émission The National en français ne nuise à leurs efforts d’obtenir une chaîne dédiée à l’information, similaire à celle qui existait au Canada anglais. De cette expérience, Conway tire la conclusion qu’au début des années 1990, le radiodiffuseur public a dû reconnaître que la traduction n’était pas apolitique, malgré son potentiel de rapprochement entre les communautés linguistiques du pays. Le troisième chapitre étudie le contexte au sein duquel le journalisme est pratiqué à CBC et à Radio-Canada. On apprend ainsi que la traduction au National et au Téléjournal ne constitue pas un outil neutre : ainsi, toute parole prononcée en langue étrangère peut être transmise selon divers formats (par exemple, citation directe ou indirecte, sous-titrage ou traduction hors champ), ce qui a une incidence sur le sujet présenté. Conway rapporte que lors du traitement des déclarations en langue étrangère, les journalistes du National emploient surtout la citation indirecte alors que ceux du Téléjournal ont davantage recours à la citation directe (p. 79). Par ailleurs, les journalistes de la télévision publique font souvent appel à la traduction pour équilibrer les points de vue de leur exposé. Ainsi, dans un reportage donné, les locuteurs qui s’expriment dans l’autre langue officielle expriment également un point de vue qui diffère des autres intervenants. Avec ce …

Parties annexes