Comptes rendus

Gaudin, François. Socioterminologie : une approche sociolinguistique de la terminologie. Bruxelles, Duculot, 2003, 286 p.[Notice]

  • Sophie Ballarin

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  • Sophie Ballarin
    Université de Montréal

Comme son nom l’indique, le manuel dont il va être question est un ouvrage consacré à l’approche sociolinguistique de la terminologie. Plus précisément, l’auteur présente les problèmes que pose l’approche sociolinguistique de la terminologie. Il convient de rappeler ici que dans la lignée de William Labov, qui considérait que toute linguistique devait être sociolinguistique, François Gaudin perçoit la socioterminologie comme une terminologie « remise sur pieds ». Quelques pages d’introduction permettent de présenter rapidement la socioterminologie et de situer les prémices de cette nouvelle approche dans les années 1970 en France, avec Alain Rey et Louis Guilbert comme figures marquantes. Le terme est attesté au début des années 1980 par J.-C. Boulanger, P. Lerat et M. Slodzian et se dote d’une épaisseur conceptuelle dès le début des années 1990 (Y. Gambier, L. Guespin et F. Gaudin (a)). Le préambule constitue une entrée en matière pour une réflexion liée au concept de « langue de travail ». C’est d’ailleurs par une citation du paléontologue A. Leroi-Gourhan que F. Gaudin donne le ton. Il reprend ainsi à son compte les relations fortes établies entre l’apparition du langage chez l’homme et l’apparition de l’outil. Le parcours proposé au lecteur s’inscrit dans la continuité des travaux théoriques engagés par l’auteur. Certaines pistes explorées dans ce livre se retrouvent dans sa thèse publiée en 1993 (b), première publication dédiée à cette approche. L’organisation du livre favorise une entrée en matière progressive et met en relief un panorama francophone des différents aspects de la socioterminologie. Les deux premiers chapitres offrent une vue d’ensemble en abordant d’une part, le cadre historique et théorique (chap. 1) et d’autre part, les notions clés et les outils méthodologiques de la discipline (chap. 2). François Gaudin démontre dans quelle mesure la théorie héritée d’Eugen Wüster peut constituer un obstacle pour toute approche linguistique des questions terminologiques. L’accent est mis sur l’influence insidieuse d’une pensée positiviste, arrière-plan logique de l’émergence de la discipline, dans la conception contemporaine de la terminologie. Il faudra attendre les années 1980, semble-t-il, pour une remise en cause des postulats. Parmi les notions clés proposées par Gaudin, signalons la « référence ». Qu’est-ce que référer ? « C’est mettre un signe en rapport avec le monde construit par le biais du langage » (p. 33). L’auteur insiste sur le fait qu’il s’agit davantage d’une construction que d’un rapport direct entre signe et monde. Pour être plus précis, il faut parler d’une co-construction du monde qui s’inscrit dans un processus interactif. Ce préfixe permet de souligner le caractère social de la référence : action interlocutive ou dialogale sans cesse rejouée et surtout centrée sur la recherche d’un consensus. A travers cette conception, c’est une remise en cause de la relation de bi-univocité qui est visée, Gaudin émet des réserves sur le caractère opératoire de cette relation. De la même façon, la notion d’ « épistémè » est préférée à celle de « domaine » jugée inadaptée pour rendre compte du travail scientifique. Pour l’auteur, « les domaines proposent des découpages commodes, mais ils sont en porte à faux avec la réalité du travail scientifique et des pratiques langagières qui l’accompagnent » (p. 51). La notion d’ « épistémè » a été introduite par Foucault, véritable archiviste de la pensée, pour caractériser la structure mentale qui fait l’arrière-fond, l’atmosphère dans lesquels une époque donnée pense. Elle permet donc un élargissement des frontières, trop souvent floues, posées par les domaines classiques. Le chapitre 2 insiste sur les outils théoriques et méthodologiques de la sociolinguistique tout en considérant l’apport d’autres disciplines comme la linguistique de l’interaction et la praxématique. C’est vers Bakhtine …

Parties annexes