Résumés
Résumé
Poursuivant l’examen des thèses de Rosenzweig sur la traduction déjà amorcé dans une précédente étude, cet article en mesure les enjeux et la portée, à l’aune notamment de la dimension eschatologique qui s’y projette et forme en quelque sorte la condition implicite de son exercice. S’y révèle entre autres le fait que le paradigme d’une langue Une – Es gibt nur Eine Sprache – courant en filigrane de la pluralité des idiomes, loin de se laisser cantonner dans la quête fantasmatique d’une prétendue langue adamique ou de quelque autre parangon de ce genre, se « traduit » plutôt dans une eschatologie discrète dont le dessein s’affine et se ramifie en chacune des langues, orientant secrètement leurs affinités électives en direction d’un partage que Rosenzweig associe à l’avènement de la paix messianique. Ce scénario doit cependant être conçu dans l’horizon de la finitude qui appartient originairement à la détermination d’essence de l’être humain, bref au fondement ontologique de son existence, laquelle en retour se révèle tributaire de la dimension historiale qui enchâsse le champ entier de son expérience. La figure complexe que dessine ce champ de déterminations sollicite donc de la part du traducteur, même commande chez lui, une responsabilité toujours plus accrue à l’égard de l’autre homme, de l’étranger. Il s’agit en quelque sorte d’activer, en l’occurrence dans le frayage avalisé par l’exercice de la traduction, ce que Walter Benjamin désignait pour sa part comme une « faible force messianique ».
Mots-clés:
- Franz Rosenzweig,
- eschatologie,
- paix messianique,
- traductibilité/perfectibilité des langues,
- finitude humaine
Abstract
Proceeding with the examination of Franz Rosenzweig’s assumptions on the theory and practice of translation already initiated in a former paper, this article intends to scrutinize the import of the eschatological dimension guiding the elaboration of this subject matter at every stage of its development. The paradigmatic tenet of this speculative endeavor, that there exists One and only language–Es gibt nur Eine Sprache–running through the manifold human idioms, far from vindicating the fanciful quest for a pristine, idyllic language, advocates that every one of all the languages used by human communities endorses in its proper fashion the longing for messianic peace. For that reason, this eschatological scenario should be read against the background of human finiteness, acknowledging the historical horizon towards which the whole range of human experience is projected and found liable by an ontological bond. The burden of responsibility towards the other man, the foreigner, becomes then an implicit condition of the practice of translation and its ethical commitment, ascribing to its inner dynamics what Walter Benjamin called a « weak Messianic force ».
Keywords:
- Franz Rosenzweig,
- eschatology,
- Messianic peace,
- translatability/perfectibility of languages,
- human finiteness